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Se tenant fièrement sur son cheval, Darius arpentait les villages les uns après les autres en quête d’une fastidieuse bâtisse. Il avait une idée concrète de ce qu’il recherchait et les demeures visitées n’avaient pas su le charmer, au plus grand dam de la sorcière qui se trouvait à sa droite.
— Voilà des semaines que nous écumons les villages à la recherche de ce bien qui n’existe probablement pas, vas-tu te décider Darius ?
— Appelez-moi Sir.
— Va au diable, Darius !
Agathe vit les lèvres du roi s’allonger en un sourire en coin. Ces deux-là étaient comme chien et chat, toujours à se quereller à la moindre occasion, c’est probablement pour cette raison qu’ils étaient de très proches amis. La rouquine était la plus puissante de son espèce, une sorcière née d’une longue lignée dont elle n’était pas peu fière. Ses cheveux roux bouclés lui arrivaient à hauteur des épaules et son regard noisette observait avec malice la monture du vampire, mais Agathe eut à peine le temps de prononcer quelques mots que la voix de Darius s’éleva dans les airs.
— J’ai enfin trouvé la demeure que je recherchais.
La sorcière ravala le sort qu’elle s’apprêtait à lui lancer et posa à son tour son regard sur le domaine. La bâtisse s’apparentait à un petit château, son toit était de couleur noire, la porte teintée de la même couleur et les murs d’un blanc éclatant. Les rayons du soleil venaient se refléter sur les fenêtres qui occupaient une grande partie de la façade. Autour se trouvaient une étendue d’herbe à perte de vue, différentes fleurs et des arbres qui entouraient la demeure de charme. Elle n’était pas si différente des autres qu'elle avait pu voir durant son long séjour, mais la lueur étincelante dans le regard de son ami, semblait dire tout autre chose.
Darius avait enfin trouvé le domaine auquel il aspirait tant. Tous ses critères y étaient rassemblés, la résidence principale se devait d’être imposante et accueillante. Un second bâtiment tout en longueur était disposé non loin, ce qui correspondait en tous points à ce qu’il s’était imaginé, il parvenait enfin à le voir de ses propres yeux et ce qu’il ressentait en cet instant était indescriptible.
— Suivez-moi Agathe, je vais vous montrer ce qui va advenir de cet édifice en commençant par la pièce principale.
Dariuse se mit à marcher à grandes enjambées jusqu’à la porte comme si ces lieux lui appartenaient déjà.
— Darius attends ! s’époumona la sorcière. Mais rien à faire, il parlait seul en effectuant de grands gestes comme si quelqu’un se trouvait près de lui.
Agacée, elle fit éclater le grand vase en plâtre qui se trouvait non loin du vampire. Ce dernier se mit en position d’attaque avant de comprendre qu’il ne s’agissait que de son amie.
— Avez-vous perdu l’esprit ?
Agathe leva les yeux au ciel, laissant un soupir las franchir la barrière de ses lèvres. Elle s’approcha, non sans un sourire, vers Darius visiblement contrarié.
— Je vous rappelle que nous ne sommes pas sur vos terres, mais celle d’un noble certainement très attaché à sa demeure, alors je vous demande de vous montrer conciliant si ce dernier refuse de vous la vendre.
— Je sais me montrer très persuasif ma chère.
Darius afficha un sourire espiègle avant de tourner vivement lorsqu’il entendit la serrure de la porte s’enclencher, de sa vitesse vampirique, le roi se retrouva sous le porche en quelques secondes seulement. Une femme d’une quarantaine d’années l’accueillit, une servante sans aucun doute. Son tablier bien que propre ne laissait aucun doute quant à ses fonctions dans cette demeure.
— Que puis-je faire pour vous monsieur…
— Monsieur Smith.
Agathe pouffa de rire en entendant le faux nom que venait de s’attribuer son vieil ami. Il en avait inventé tout un tas, mais celui-ci, il ne l’avait vraiment pas cherché loin.
— Je dois m’entretenir, pour une affaire urgente, avec le seigneur de cette maison.
L’employée s’éloigna quelques secondes avant de revenir et de les inviter à entrer. À peine avait-il mis un pied à l’intérieur qu’un large sourire égaya son beau visage, contrairement à la sorcière qui savait déjà que les négociations allaient être compliquées pour ce pauvre propriétaire. Ce dernier arriva, vêtu de ses plus beaux vêtements, ainsi que sa femme qui ne cacha pas son admiration pour le beau vampire. Elle saisit son éventail et le secoua vivement prise d’une soudaine bouffée de chaleur. Darius s’approcha d’elle et lui fit un baise main qui relança les rougeurs de ses joues. Enfin, il fit face au noble : ce dernier se tenait parfaitement droit et détailla Darius puisqu’il n’avait jamais entendu parler de ce fameux monsieur Smith.
— J’aimerais parler affaires avec vous, auriez-vous l’obligeance de m’accorder un instant entre hommes ? J’ai une proposition des plus alléchantes à vous faire part.
Aucune chance pour cet homme de refuser cette demande, puisque Darius avait mis en marche son pouvoir de persuasion et les humains y étaient particulièrement sensibles. Le noble lui demanda de le suivre, juste après s’être adressé à son amie.
— Vous n’avez qu’à prendre le thé entre femmes, dit-il avant de se détourner précipitamment.
« Maudit vampire ! » maugréa Agathe. Son espièglerie le perdra tôt où tard.
La rouquine ne sut quoi faire, elle hésitait entre verser une fiole discrètement dans la tasse de cette femme, afin qu’elle s’endorme paisiblement et de cette façon, elle n’aurait pas à s’efforcer de discuter ou à se montrer sociable. Agathe était sur le point de choisir la seconde option lorsque Margarette se mit à déblatérer tout un tas de parole en un temps record, sachant pertinemment qu’elle ne retiendrait rien mise à part son prénom, la sorcière détourna son attention et versa deux gouttes de son précieux breuvage. Il ne fallut qu’une à deux minutes pour que l’effet escompté se produise, Margarette venait de rejoindre les bras de Morphée. Satisfaite, Agathe s’approcha d’une grande fenêtre et s’exprima à voix basse.
— Tu as quinze minutes Darius, pas une de plus, ou je viendrais te chercher moi-même.
Le vampire quant à lui prit place autour d’un bureau fait en bois massif, le décor de cette pièce était sobre, mais la qualité des matériaux indéniablement d’une grande richesse. L’homme lui servit un verre de whisky et s’assied confortablement sur son fauteuil, d’un geste de la main, il l’invita à prendre la parole.
— Je ne vais pas tourner autour du pot, votre domaine m’intéresse et je suis prêt à en payer le prix fort.
Le propriétaire écarquilla les yeux et haussa les sourcils d’un air interloqué. Cependant, Darius ne lui laissa aucun répit et entreprit les négociations en lui proposant tout d’abord un échange contre l’un de ses domaines. Ce dernier ne possédait qu’un seul bâtiment ainsi qu’une ferme, mais comptait un hectare de plus. Les terres étant le plus recherché, l’offre ne pouvait être refusée. De plus, Darius avait un atout de taille, son don de persuasion. Néanmoins son adversaire semblait redoutable en affaires et ne laissait rien au hasard, de ce fait, les négociations prirent plus de temps qu’il ne l’aurait imaginé et connaissant l’impatience de la sorcière, la vampire se précipita pour conclure l’affaire.
Les minutes et sa patience s’étant écoulés, Agathe sortit une seconde fiole qu’elle agita sous le nez de Margarrette, la blonde se réveilla en quelques secondes totalement débossolée.
— Que s’est-il passé? Je… je ne comprends pas.
— Il n’y a rien à comprendre ma chère, vous vous êtes endormie.
— Oh je suis confuse, pardonnez-moi ce n’est pas dans mes habitudes, dit-elle en se relevant honteuse.
Darius arriva enfin le sourire aux lèvres. Il haussa un sourcil interrogateur en voyant la mine à peine réveillée de la noble. Sachant que son amie n’y était certainement pas pour rien, il s’empressa de mettre fin à cette entrevue et quitta la demeure accompagnée de la gouvernante. Une fois à l'extérieur, elle s'étonna lorsqu'elle s'aperçut que l'un des grands vase en plâtre était totalement fendu, près à répandre toute sa terre sur le sol. Voyant son air interrogateur, Darius leva les yeux au ciel en voyant Agathe qui avait bien du mal à dissimuler son amusement.
Les deux chimères quittèrent le domaine sur leurs chevaux respectifs et une fois à l'abri des oreilles indiscrètes, la sorcière posa enfin la question qui lui brûlait les lèvres.
— Vas-tu enfin me dire pourquoi tu as choisi cette demeure et en quoi je te suis utile ?
— Agathe, t'as curiosité te perdra ! répondit le roi amusé. Je vais faire de cet endroit une école pour vampire. Tu devras la rendre invisible aux yeux des humains.
La rouquine haussa un sourcil, une école pour vampire ? Voilà qui était bien curieux.
— Dans cet institut les vampires apprendront à se contrôler, ils apprendront aussi l'histoire des vampires et même des chimères dans leurs ensembles. Certains n'ont pas choisi de devenir des créatures de la nuit et se retrouvent seuls ne comprenant rien à ce qui leur arrive, tuant des innocents. Des meurtres les hantant jours après jours, nuits après nuits.
La soif d'un vampire, la perte de contrôle et les remords. Une chaîne sans fin que Darius voulait éviter à tout prix. Il fallait qu'il trouve un refuge assez grand pour abriter des dizaines de son espèce, les éduquer pour qu'ils puissent vivre à leur tour parmi les humains, sans craindre de les mordre à chaque instant.
C'était un apprentissage de longue haleine, certains d'entres-eux ne réussiraient pas du premier coup mais au moins, ils sauraient où se diriger en cas d'échec et de doute.
— Je trouve ce projet fort honorable et je l'approuve, même si je sais que tu te moques de mon approbation, je te la donne quand même. Quel nom portera cette école ?
Darius avait longuement pensé au nom qu'il donnerait à cette école et un en particulier n'avait jamais quitté son esprit.
— Felesia.
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