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Malia s'était souvent demandé ce que représentait la vie en meute et aujourd'hui, elle avait la chance de pouvoir le découvrir par elle-même. Jessy lui avait souvent conté la vie qu'il y menait, les règles ainsi que la vie en groupe, mais pour Malia, l'idée même d'être entourée à longueur de temps lui était impensable. Étant fille unique, la solitude avait bercé son enfance, plus tard, c'était de nouveau seule qu'elle avait emménagé dans son logement et une fois vampire, il n'y avait eu que Méline. Felesia avait été le premier endroit où elle comprit ce que voulait dire le mot "amis", et jamais elle ne reviendrait à sa vie monotone et solitaire qu'elle menait autrefois. 
Malheureusement, vivre en meute n'avait pas que de bons côtés, surtout pour une vampire devant s'adapter à des loups-garous. Si on ajoutait à ça le fait qu'elle était suspectée de meurtre, ses chances d'intégration devenaient plutôt minces. Malia n'étant pas du genre à abandonner, chaque jour elle s'était forcée à mettre sa timidité de côté, pour venir en aide aux plus jeunes. Ces derniers étant les plus accessibles, la vampire réussit à s'immiscer parmi eux sans trop d'efforts. Dae et Jessy n'y étaient pas pour rien, Lenzo non plus. L'Alpha répondait avec le plus grand calme à toutes les questions que certains posaient à son sujet. Son devoir était de les rassurer, pour apaiser les tensions qui planaient autour d'elle.
En ce qui concernait les parents, c'était une toute autre paire de manches. La méfiance se lisait dans leurs regards lorsqu'elle se tenait aux côté de leur Alpha. Leurs pupilles la fixaient avec la plus grande vigilance. Le message était clair, au moindre faux pas, Malia servirait de repas à la meute Suprême. 
Pour finir et contrairement à ce qu'elle avait imaginé, les plus anciens lui avaient réservé un accueil plus chaleureux. D'après Lenzo, si les plus anciens l'avaient acceptée, c'était parce qu'ils voyaient la meilleure partie d'elle et non pas son côté sombre. 

Voulant à tout prix s'intégrer auprès de l'ensemble de la meute, Malia s'était levée chaque jour sans relâche, dans l'espoir qu'ils puissent voir qu'elle était bien plus qu'une Ultime. Certains pourraient se demander pourquoi se donner autant de mal auprès de personnes qui ne l'acceptaient pas, et bien pour Malia la réponse était évidente. Tôt ou tard, elle deviendrait ce qu'ils appellent la Luna, “leur” Luna, et si elle se fiait à ses pressentiments, ce jour était proche. 

S'occuper du territoire était l'une des tâches auxquelles elle s'affairait tous les jours. Les maisons n'étaient pas assemblées les unes sur les autres comme on pourrait le croire. Le canton était si vaste que chaque membre disposait d'une maison en bois entourée d'un terrain qu'ils se devaient d'entretenir. Pour eux, c'était une évidence d'entretenir la nature dans laquelle ils vivaient, en ces lieux ils trouvaient tout ce dont ils avaient besoin : eau, nourriture, plantes médicinales. Ils chassaient selon leurs besoins et non pas avec opulence. La plupart d'entre eux vivaient une vie parfaitement normale, ils partaient travailler le matin et retrouvaient leurs familles le soir. Cela ne concernait pas les membres de la garde suprême qui en plus de combattre chaque jour, s'affairaient à la sécurité du territoire. Les combattants n'étaient pas traités différemment du reste de la meute, mais pour tous les loups-garous ou presque, servir l'Alpha et faire partie de sa meute, était une grande fierté. L'allégeance qu'ils portaient à leur chef était tout bonnement stupéfiante. Ils plaçaient en lui une confiance aveugle, chaque mot qu'il prononçait était écouté et exécuté sans le moindre reproche. 

 Vivre auprès de Lenzo lui avait fait prendre conscience des devoirs qu'il avait envers les siens. Être Alpha revenait à être roi et le poids des responsabilités qu'il avait sur le dos devait être lourd à porter. La décision qu'il avait prise de ne pas la garder près de lui devint aussi claire que de l'eau de roche. Il ne pouvait tout simplement pas prendre un tel risque avec une femme comme elle. Une Ultime qui aurait pu tout détruire sur son passage, capable de folie meurtrière. Ces mots étaient durs et pourtant si réalistes, elle comprit seulement maintenant son choix, même si cela n'expliquait pas pourquoi il avait mis autant de temps à revenir vers elle. Ce qui avait été fait, était chose faite. Nul besoin de revenir en arrière, malgré son côté sombre qui faisait resurgir une rancœur qu'elle ne voulait plus ressentir et qui pourtant faisait surface à la moindre faiblesse. 

Prenant place sur le toit du grand chalet, Malia esquissa un sourire attendri en voyant son loup les bras croisés et la tête bien haute. Ici Lenzo était un autre homme, s'il se montrait doux et attentionné avec elle, il savait se montrer dur et impitoyable envers les siens. Elle avait découvert un Alpha qui se faisait respecter et qui ne laissait rien au hasard au sein de sa meute. Il avait l'étoffe d'un chef tout comme l'avait Alban. Tous deux étaient des hommes puissants avec une tendance à vouloir tout contrôler. Malia elle, se trouvait au milieu de ces deux mâles surpuissants et plus le temps passait, plus le combat semblait inévitable entre les deux espèces. Lenzo ne laisserait pas leur histoire indéfiniment sous silence. Ce dernier ne redoutait en rien Alban qui pourtant était plus puissant que lui, mais en avait-il conscience ? Apparemment pas. Son côté Alpha Suprême le poussait dans ses retranchements les plus profonds et une part de lui se pensait capable de faire flancher le roi des vampires. Peut-être était-ce vrai, se surprit-elle à penser. Elle n'avait jamais combattu plus redoutable adversaire que son âme soeur et savait pertinemment qu'il retenait ses coups face à elle. Mais Alban restait un Ultime, une espèce surpuissante.

La jeune vampire soupira longuement. Tant de chemin parcouru et pourtant, elle était encore si loin du but. Elle aurait voulu connaître son avenir, savoir que lui réservait son destin incertain, mais personne, pas même Sandrea, n'était en mesure de le lui dire. 

— Je pensais justement à ta mère, dit Malia le regard rivé devant elle.

Dae esquissa un sourire amusé. Surprendre une Ultime à l'ouïe surdéveloppé, était plus difficile qu'elle se l'était imaginé. La sorcière prit place près de la belle vampire et contempla à son tour le territoire de l'Alpha. Une grande étendue de verdure et d'arbres aux tailles et aux espèces différentes sillonnaient l'intégralité de la propriété, des cours d'eaux créaient des bassins naturels dans lesquels tous aimaient s'y détendre. La forêt à l'état pur, une merveille pour les loups et toute aussi importante pour les sorcières qui s'y ressourçaient.

— J'aurais aimé connaître mon avenir. 

Le sourire de la belle rouquine s'évanouit. Lire l'avenir n'était possible pour personne, pas même pour les sorcières les plus anciennes. Celles qui prétendaient savoir de quoi était fait le destin d'autrui n'étaient que pure folie. Les sorcières possédaient une magie, un don particulier aux pouvoirs incroyables capables de faire et de créer des choses impensables. Certaines possédaient des visions inexpliquées et toujours très complexes à détailler. Idem pour les prémonitions, celles-ci n'étaient jamais claires et pouvaient être interprétées de diverses façons. En revanche les sorcières avaient des pressentiments et pouvaient même soupçonner la mort, comme il avait été le cas pour Dae, mais en aucun cas ni elle, ni une autre, ne pouvait lire l'avenir avec clarté. Ressentir un mauvais présage était dans leurs capacités et c'est ce qu'elle ressentait actuellement, tout comme le ressentait sa mère. Sandrea avait fait usage de sa magie en compagnie de sa fille et ce qu'elles y avaient vu ne laissait aucun doute. Les images de cette soirée revinrent dans sa mémoire.

La pièce était sombre, les murs colorés de blanc et le sol tapissé d'un plancher en bois ancien. La seule lumière résidente était celle des bougies disposées à différents endroits de la pièce, source indispensable pour la sorcellerie. Sandrea vêtue d'une longue robe argentée et dont la chevelure d'ébène retombait le long de son dos, finit d'allumer la dernière bougie et fit face à sa fille. 

Dae était installée à genoux regardant fixement le sel disposé sur le sol comme si celui-ci était la réponse à ses questions. Dans un silence pesant, Sandrea s'installa à ses côtés et prit un couteau pour s'entailler la paume de main. Quelques gouttes s'écoulèrent sur le sel et Dae releva son regard sur celui de sa mère. 

— Tu en es sûre ? demanda la brune.

— J'ai besoin d'en être sûre.

Sa mère acquiesça et prit une poignée de sel qu'elle versa directement dans chaque main de la rouquine. Sandrea lui fit serrer les poings et tout en laissant ses mains sur celles de sa fille, se mit à réciter une incantation dans une langue étrangère. Dae serra les dents à son maximum, une douleur lancinante traversa ses mains mais la puissante sorcière ne lâcha rien, jusqu'à ce que la douleur ne soit trop forte. 

Sandrea la relâcha, Dae jeta le sel au plancher et plongea ses mains dans la coupelle d'eau en terre qui se trouvait à ses côtés. Grimaçant de douleur, Dae se pencha pour voir si son ressenti n'était que la peur et non une réalité comme elle l'espérait. 

Malheureusement le sel se transforma en un liquide rougeâtre, semblable à du sang. Dae ouvrit les poignets où un symbole s'était tracé dans sa chair pour disparaître quelques secondes plus tard. La sorcière arrima son regard brillant de désespoir à celui de sa mère, le présage était clair. 

Sombre et mortel.

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