Chapitre 23

April

Vous avait-on déjà dit que la roue tournait ? Vous avait-on déjà supplié de croire au bonheur ?

Je n'y croyais jamais quand ma mère me le disait. Pourtant, elles me les avaient répétées ces phrases.

En un an, il m'était arrivé énormément de choses. Le décès de ma mère, mon subite déménagement à Paris, la découverte de la double vie d'Arthur, ma rencontre avec Antoine, Charles et mes amis de Paris, mon retour à Greenville avec Benjamin. En un an, j'avais également brisé le cœur de mon premier amour, et j'étais tombée amoureuse. Pourtant, je n'avais jamais été plus heureuse qu'aujourd'hui. Comme quoi le bonheur n'était jamais loin et qu'il suffisait simplement d'y croire.

Je souris quand j'entendis Benjamin éclater de rire. Depuis qu'il était ici, il s'était métamorphosé. Il était beaucoup plus heureux et je savais que c'était notamment grâce à Paola.

Les voir tout ici, réunis chez moi, dans mon salon, me faisait chaud au cœur. J'avais de la chance de les avoir et hormis le fait qu'ils partaient demain, tout allait bien. C'était étrange, car je croyais bien que pour la première fois de ma vie, j'étais vraiment heureuse. Vous allez me dire que je m'apitoie sur mon sort. Après tout, c'est peut-être la vérité, mais ce n'est pas mon ressenti. Certes, j'ai passé de bons moments avec des personnes incroyables. Mais lorsque qu'une chose horrible vous arrive, elle prend le dessus sur toutes les choses positives et plus rien ne vous rend votre bonne humeur et votre envie de sourire.

— Ça vous dit une partie de poker ? hasarda mon frère.

Tout le monde approuva et mon frère sourit, content de pouvoir jouer à son jeu favoris.

— On fait des équipes de deux.

Les binômes se firent rapidement : Noémie et Charles, Ethel et Stan, Paola et Benjamin, Brad et Matteo, Lucy et mon frère et pour finir Antoine et moi. J'étais plutôt forte au poker. Quand j'étais petite, avec mon frère on jouait avec des bonbons à la place des jetons ou de l'argent. C'était amusant et puis on se régalait.

Mon frère descendit de l'étage, avec la boîte en métal du jeu et la déposa sur la grande table du jardin. Il ne faisait pas encore nuit, le soleil allait se coucher, et nous venions de finir de dîner. Les filles surveillaient la boule de feu, pour pouvoir arrêter la partie et demander au garçon de nous prendre en photo, devant le coucher de soleil.

Les photos avaient été une source de conflits durant ces deux dernières semaines. Nous, les filles, avions agacé les mecs à vouloir capturé chaque moment de nos journées. De plus, nous nous disputions car il y en avait toujours une qui se trouvait moche sur le cliché. De quoi encore plus énerver les garçons.

La partie commença. Stan et Ethel se disputaient déjà car ils avaient un jeu de "merde". La plupart des binômes durent se coucher, si bien qu'il ne restait plus qu'Antoine et moi contre Paola et Benjamin.
Je relevai la tête de mes cartes et Antoine hocha de la tête. Je me raclai la gorges et les dix petites têtes me fixèrent. J'abattis un brelan de huit sur la table. La colombienne étouffa un petit rire et s'en se concerter avec son partenaire, elle abattit un carré de dix. Je soupirai et le couple contre nous cria sa victoire.

Paola avait toujours été plus forte que moi au poker, alors que je lui avais appris les règles. Je croisai mes bras sur ma poitrine. J'étais mauvaise perdante. Antoine m'attrapa par les épaules et m'embrassa la tempe.

—  C'est pas grave minette, me dit-il, on va se rattraper.

—  Alerte coucher de soleil ! s'écria soudainement Ethel.

Les filles se levèrent toutes en même temps et la rousse m'attrapa fermement le poignet, m'obligeant à me lever malgré le fait que je boudais.

—  Les gars venez avec nous, comme ça on fait une photo de groupe ! dit Noémie.

Ils hochèrent la tête et on plaça le trépied ainsi que l'appareil photo face à nous. Nous prîmes plusieurs photos, toutes extrêmement jolies, de nous et du sublime coucher de soleil à Greenville. C'était de loin nos plus belles photos qu'on avait fait durant ces deux semaines.

À la fin de la séance, Matteo et Brad me poussèrent dans la piscine. J'aurais pu être énervé, étant donné que j'avais déjà perdu ma manche de poker. Pourtant, lorsque je remontai à la surface, j'éclatai de rire. Ils me rejoignirent en un rien de temps et la soirée se termina par une bataille d'eau et une partie de water-polo.

*

Je me garai devant leur hôtel à contre coeur et on sortit de ma voiture, silencieux. Nous fîmes un espèce de cercle et personne n'ouvrit la bouche. Je n'avais aucune envie de leur dire au revoir, non pas parce que nous n'allions pas nous revoir -cette hypothèse était impossible, mais parce que je ne savais pas quand est-ce que nous allions nous voir justement.

—  Arrête de pleurer pripril, tu vas tous nous faire chialer, rit Ethel en me serrant dans ses bras.

J'essuyai les quelques larmes qui s'échappaient de mes yeux et leur offris un sourire.

—  T'es vraiment laide quand tu pleures, plaisanta Matteo.

Je roulai des yeux et étouffai un rire. Qu'est-ce qu'il pouvait être con.

—  J'ai passé les meilleures vacances de ma vie, lâcha Charles.

—  Je suis d'accord avec lui, renchérirent Stan et Noémie.

Charles me fit un clin d'œil pour me faire sourire. En deux semaines, il était redevenu mon demi-frère qui veillait sur moi lorsque mon frère n'était pas là.

—  C'était un plaisir de vous rencontrer, ajouta Paola, et j'espère vraiment qu'on se reverra.

—  Bien-sûr qu'on va les revoir, on ira à Paris pendant les vacances, n'est-ce pas April ?

J'ai approuvé la phrase de mon frère et mes amis me sourirent. C'était la première fois que je faisais des "au revoir" aussi long et j'avais clairement envie de m'enfuir. Pourtant, je pris sur moi et je savourai nos derniers instants passés ensemble avant qu'on soit séparé par un océan.

—  Bon, on va vous laisser, il faut qu'on se repose, on part tôt demain, a tranché Charles.

On hocha de la tête, Charles échangea une dernière fois avec Benjamin et Ethel me serra une dernière fois dans ses bras.

—  Vous m'appelez quand vous arrivez. Sinon je vous promets que je prends le premier avion pour Paris et je vous tue tous un part un, les menaçai-je.

Ils rigolèrent, puis ils nous saluèrent une dernière fois pour ensuite disparaître dans l'hôtel. Je tournai ma tête vers la seule personne qui était resté, celle qui allait le plus me manquer.

—  On y va, on se voit demain ? me souffla Benjamin.

J'acquiesçai, lui fis un bisou sur la joue et affrontai le regard d'Antoine. Il n'avait pas ouvert la bouche depuis que nous étions partis de chez moi. Cela allait être dur et je n'avais pas envie de lui dire au revoir, ni de lui promettre que lorsque qu'on se reverra tout sera pareil. J'aimerais qu'il ne parte pas, qu'il reste et qu'on s'aime. Je souhaiterais lui prouver chaque matin que je suis amoureuse de lui.

Il ouvrit ses bras pour que je vienne immédiatement m'y loger et que je laisse couler ma tristesse sur son épaule. Puis il attrapa gentiment  mon menton et me força à le regarder.

—  Arrête de pleurer, ça ne va pas me faire rester. En plus, je serai capable de chialer moi aussi et j'en ai pas du tout envie.

Il réussi à me décrocher un sourire. Il essuya mes joues puis il poursuivit :

—  J'ai passé deux semaines extraordinaires à tes côtés mon April. Je t'aime et je vais compter les jours jusqu'à ce qu'on se voit.

Un second sourire vint fendre mes lèvres. Il était capable d'accrocher un calendrier et de barrer chaque jour qu'on passerait loin l'un de l'autre, je le savais.

—  Antoine ?

Il grogna, avec le temps j'avais compris que c'était pour me dire qu'il m'écoutait.

—  Je suis amoureuse de toi.

Un immense sourire s'élargit sur son visage, le genre de sourire qui montait jusqu'aux oreilles et qui laissait voir les dents.

—  Moi aussi, je suis fou de toi Fredson. D'ailleurs c'est pour ça qu'on va tout faire pour se revoir.

J'hochai de la tête. Il sortit un petit écrin de sa poche et me le tendit. Je fronçai d'abord les sourcils, puis je relevai la tête vers lui.

—  C'est pas grand chose, mais juste assez pour que tu penses à moi tous les jours.

J'ouvris alors la boîte et découvris un collier avec un pendentif en forme de A. Notre initial à tous les deux, il n'aurait pas pu choisir mieux.

Il m'aida à l'attacher autour de mon coup. Puis on s'embrassa une première fois, pour se dire qu'on s'aimait et une deuxième fois pour se dire au revoir. Ensuite, je retournai dans ma voiture et j'attendis qu'il rentre à l'intérieur de l'hôtel pour rentrer chez moi.

Je ne vais pas vous mentir, j'ai pleuré toute la nuit. Mais seulement parce que je savais que cela allait être dur de ne pas pouvoir le serrer dans mes bras.

   Antoine était mon bonheur.

FIN

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