Chapitre 2 : Haine
Je sors de la chambre d'université d'Anxieuse, essayant de cacher tant bien que mal la tristesse qui me ronge. Je n'aurais jamais pensé que son départ affecterait autant mes émotions, moi, le grand Haine, qui ne montre jamais rien, je me trouve soudain vulnérable. Le dernier baiser que nous avons échangé brûle encore sur mes lèvres, et son doux regard que j'aime tant hante mon esprit. Je prends une profonde inspiration en descendant les escaliers, malgré tout, je garde la tête haute même si un chaos règne en moi.
En rejoignant l'extérieur du campus, je m'arrête un instant, regardant autour de moi. Les rires et les conversations des étudiants ne font qu'accentuer mon inquiétude. Je jette un coup d'œil derrière mon épaule, vers le bâtiment imposant que je viens de quitter. Un pincement au cœur me saisit. Savoir Anxieuse loin de moi me laisse un goût amer. Je veux être fort pour elle, mais l'idée de la laisser affronter tout cela seule m'est insupportable.
En marchant vers la sortie de l'université, je remarque un jeune homme en train de draguer une fille à côté de moi. Il est tout sourire, s'efforçant de l'impressionner avec ses histoires. Cette scène me fait penser à Anxieuse. Elle sera probablement confrontée à des gars comme lui, tentant de la séduire. Imaginer cela me rend fou de jalousie. Mon cœur se serre à cette pensée. Moi qui adore la protéger, la soutenir et voler à son secours, réaliser que tout va être différent maintenant me trouble profondément. Je serre les poings, combattant l'envie de retourner en arrière. Mais je sais que je dois la laisser partir, grandir et trouver sa propre voie. C'est son moment, son aventure.
Je détourne le regard, refoulant mes émotions. En marchant, j'allume une cigarette, espérant que la nicotine apaise un peu ma douleur. Clope aux lèvres, je laisse mes pensées vagabonder vers nos moments partagés, nos rires, nos disputes, et surtout cet amour profond qui nous lient. Je souffle une dernière bouffée de fumée et jette la cigarette, regardant droit devant moi. La vie continue et je dois l'accepter. Je slalome entre les passants de ce quartier auquel je n'ai jamais mis les pieds. Soudainement, une voiture roule lentement à mon niveau. En m'arrêtant, je remarque une chevelure blonde portant des lunettes de soleil rose, m'observer d'un air intrigué, cette dernière se penche vers moi tout en baissant la vitre.
— Haine ? Mais que fais-tu ici ? Tu es loin du centre de Feelings.
— Salut blondinette ! Tu tombes bien, tu peux me déposer chez moi ?
— Bien sûr, monte, mais tu faisais quoi exactement dans ce quartier ?
— Je reviens de l'université, j'ai accompagné Anxieuse, déclaré-je en ouvrant la portière.
— C'est vrai que sa rentrée est aujourd'hui, ça doit te faire bizarre de l'avoir laissé là-bas sans pouvoir rester avec elle.
— Merci Joviale d'en rajouter.
— Pardonne-moi, c'est juste, je te comprends, ça va être compliqué pour moi aussi, d'être loin de ma meilleure amie, j'ai surtout peur qu'elle m'oublie ou pire qu'elle trouve une nouvelle meilleure amie ! J'essaye de pas y penser pour ne pas angoisser, gérer mon stress, c'est encore nouveau pour moi.
— Ne t'en fais pas, si je peux gérer son absence, je pense que tu peux le faire également, affirmé-je. Ça va juste être dur de savoir que Feelings a perdu sa grande personnalité.
— Elle n'est pas vraiment partie, tu sais. Elle peut revenir à tout moment. Elle n'a pas quitté la ville, Haine, rigole Joviale.
— Pour moi, c'est tout, comme réponds-je en soupirant. M'enfin, la vie va être ennuyante sans elle.
Joviale acquiesce en s'arrêtant à un feu rouge.
— C'est vrai que l'an dernier, c'était assez animé, cette belle aventure.
Je la regarde, une lueur d'intensité dans les yeux.
— Une belle aventure ? C'était plutôt une guerre, tu veux dire.
Elle sourit doucement, secouant la tête.
— Certes, je te l'accorde, mais une guerre que nous avons gagnée ensemble. Et tu sais quoi ? Je pense que nous continuerons à vivre et à trouver d'autres aventures, même si Anxieuse n'est pas là pour le moment.
Je reste silencieux, absorbant ses paroles. Dès le feu vert, la voiture redémarre et nous continuons notre route vers le centre-ville. Après quelque temps à rouler, Joviale s'arrête enfin devant mon allée et déclare d'un sourire chaleureux.
— Nous y sommes !
— Merci, Joviale, dis-je en ouvrant la portière.
Elle me fait un signe de la main avant de repartir. Je la regarde s'éloigner, puis tourne mon regard vers la maison voisine, celle d'Anxieuse. Mon cœur se serre à nouveau en pensant à elle, et je soupire, le cœur lourd. Je me dirige vers ma maison, montant les marches jusqu'au porche. Alors que j'atteins la poignée, j'entends des sirènes se rapprocher. Je lève la tête, me demandant de qui il peut s'agir. Une voiture de police se gare devant mon allée. Je soupire, levant les yeux au ciel.
En me retournant, j'aperçois Brave sortir de la voiture, en tenue de policier. Il vient tout juste d'obtenir son concours et est maintenant flic, tout comme son père, le commissaire. Brave, a bien changé depuis l'an dernier. Une nouvelle coupe de cheveux rasée et dégradée, une nouvelle musculature, son regard, autrefois plein de joie et de courage, semble désormais plus sombre et fermé, comme si le poids de ses responsabilités a terni son enthousiasme.
— Haine ! Appelle-t-il en s'approchant.
— Brave, que me vaut cette visite ? Réponds-je en croisant les bras sur mon buste.
— Ça fait un bon bout de temps que l'on ne s'est pas vu, depuis que j'ai obtenu mon concours d'agent de police, je suis très pris...
— Effectivement, on ne s'est pas vu de tout l'été. À ce que je vois, tu as bien changé physiquement, le blondinet que tu étais a évolué.
Il me sourit, mais ce sourire n'atteint pas ses yeux.
— En effet, je suis en patrouille. C'est mon premier jour en solo.
— Félicitations, tu veux que je te remette une médaille en plus de ton insigne ? Dis-je d'un ton sarcastique.
Ce dernier me sourit légèrement en baissant le regard vers le sol avant de le reconcentrer sur ma portée.
— Le grand Haine et son sarcasme, ça m'avait manqué, je dois le reconnaitre.
En observant sa réaction, je me demandais ce qui avait pu transformer Brave de cette manière. Il détourne le regard vers la maison voisine puis me questionna au sujet d'Anxieuse.
— Et toi ? Comment ça va ? J'imagine avec le départ d'Anxieuse, ça doit être compliqué ?
— Comme tu peux le voir, j'essaie de m'habituer à tout ça. C'est... différent sans Anxieuse, mais je vais gérer, on va tous reprendre nos vies et ça va le faire, affirmé-je en ne croyant qu'à moitié à mes propos.
Brave acquiesce, le regard pensif.
— Oui, c'est vrai.
Je hoche la tête, réalisant que, malgré les changements, la vie continue. Brave est devenu flic, Joviale reste une source de lumière, et moi, je dois trouver un moyen de m'adapter à cette nouvelle réalité.
— Oui, nous devons continuer nos vies, d'ailleurs, je m'apprête à rentrer et j'imagine que tu vas continuer ta patrouille ?
— Exactement ! Ça m'a fait plaisir de te revoir, Haine ! Bonne journée à toi.
Brave pose une main rassurante sur mon épaule avant de retourner à sa voiture. Je le regarde s'éloigner, puis j'en profite pour rentrer dedans.
Je franchis la porte d'entrée de la maison, mais aussitôt, je remarque l'absence de mes parents et de ma sœur Rage. Je monte rapidement les escaliers, le cœur lourd, et j'atteins ma chambre. En fermant la porte derrière moi, un soupir de soulagement m'échappe. Je retire mon tee-shirt, laissant mes muscles respirer. Je jette un coup d'œil rapide à mon téléphone, espérant trouver un message d'Anxieuse, mais rien. L'heure avance et mon ventre gargouille de faim. Je décide de prendre une douche rapide avant de me préparer à sortir.
L'eau chaude apaise mes muscles tendus, mais mon esprit reste préoccupé par l'absence d'Anxieuse. Sous l'eau chaude, mes pensées divaguent. Une fois rafraîchi, je retourne dans ma chambre. J'enfile un tee-shirt noir sur un pantalon de la même couleur déchiré aux genoux. Je passe une main dans mes cheveux bruns pour restructurer les pointes mouillées qui retombent sur le haut de mon front, me donnant un air ténébreux. En me détournant du miroir, mon regard se pose sur la fenêtre. Un sourire se dessine sur mes lèvres en me rappelant une anecdote de l'année dernière.
Je me tenais dans ma chambre, me changeant tranquillement. Alors que je choisissais un tee-shirt, une sensation étrange m'envahit celle d'être observé. Intrigué, je levai les yeux vers la fenêtre. De l'autre côté, j'aperçus la silhouette de ma voisine, figée, les yeux rivés sur moi. Prise en flagrant délit, elle tenta maladroitement de se cacher. Un sourire amusé se dessina sur mon visage. Je sentis une légère chaleur monter en moi, un mélange de gêne et de plaisir. Le sourire ne quittait pas mes lèvres. Avec une lenteur délibérée, je m'approchai de la fenêtre et je fermai doucement les volets.
Cette anecdote me fait lentement rire. Ce jour-là, quelque chose avait commencé à se créer entre nous, malgré nos différences apparentes. Secouant la tête pour chasser les pensées qui s'accumulent, je prends mon téléphone et sors de ma chambre. Descendant les escaliers, j'atteins la porte, l'ouvre et referme derrière moi avant de me diriger vers ma voiture. Je m'installe au volant de ma voiture sportive et prends la direction du centre commercial.
La journée est chaude, le soleil brille haut dans le ciel, faisant scintiller les lignes fluides de ma voiture alors que je roule à travers les rues animées de la ville. J'ai faim et j'ai besoin de quelque chose à manger, le centre commercial semble être le meilleur endroit pour commencer ma recherche.
Après avoir parcouru quelques magasins sans trouver ce que je cherche, je décide de me rendre au restaurant des parents de Blessée. En entrant, je choisis une table au fond à l'abri des regards, mais surtout pour être tranquille. De nombreux cadres se trouvent près de cette place, les murs sont ornés de peintures locales et de photos de différents endroits se trouvant à Feelings. Je feuillète le menu avec intérêt, cherchant quelque chose qui peut satisfaire ma faim grandissante. C'est alors que j'entends une voix familière résonner à travers le restaurant, celle de Protecteur. Ce qui ne me ravit pas, mon entente avec lui est assez bancale. Il s'approche de ma table avec son enthousiasme débordant, me bombardant de questions sans fin. Je lève les sourcils avec un soupçon d'agacement, accompagné d'un sourire ironique.
— Salut, Protecteur, dis-je d'un ton poli, mais distant. Tu sembles être plein d'énergie.
— Tu m'étonnes que je le suis ! J'ai été nommé, employé du mois par les parents de Blessée !
— Bravo ! Écoute, je vais te prendre un...
— Je suis tellement heureux, mec, tu n'imagines pas la réaction que j'ai eu quand ils me l'ont annoncé ! Déclare Protecteur.
Il s'assoit face à moi sans invitation, ne paraissant pas remarquer mon manque d'enthousiasme.
— Super, je suis content pour toi, à ce que je vois, tu gères bien la joie, ça se lit sur ton visage. Écoute, je n'ai pas le temps pour la causette, je vais te prendre un burger, si tu veux bien me l'apporter.
— Oui, la joie est une émotion que j'arrive plutôt bien à gérer, mais avant, quoi de neuf ? Comment tu trouves la vie sans Anxieuse dans les parages ?
Mon regard se durcit légèrement.
— C'est différent, réponds-je sèchement. Mais je m'adapte.
Protecteur, insensible aux sous-entendus, continue comme si de rien n'était.
— J'imagine que ça doit être dur pour toi.
Je garde le silence un instant, luttant pour garder mon calme.
— Oui, on l'était, dis-je finalement.
Il continue à poser des questions, curieux de savoir ce que je fais là, comment je vais depuis la dernière fois que nous nous étions croisés. Mon regard se perd parfois à travers la fenêtre, observant les passants et les voitures qui filent, tandis que je réponds à ses interrogations d'une manière légèrement sarcastique et détachée.
Avant que je m'énerve contre lui, Blessée arrive avec une assiette, composé d'un burger et de frites, ainsi qu'un soda, qu'elle dépose devant moi avec un sourire complice. Elle se tourne ensuite vers Protecteur avec un regard amusé.
— Tu ne vois pas qu'il a faim et qu'il est à deux doigts de te dévorer si tu ne t'arrêtes pas de parler ? Va prendre les commandes des nouveaux clients, s'il te plaît, s'exclame Blessée avec douceur, mais aussi avec fermeté.
Protecteur, acquiesce avec un sourire gêné avant de partir vers d'autres tables. En remerciant silencieusement Blessée d'un léger sourire, cette dernière reste debout face à moi, croisant les bras avec un air amusé.
— Je vois bien qu'il commence à te saouler. Puis, comme tu viens souvent ici, je connais ta commande maintenant.
— C'est vrai que depuis l'an dernier, je suis souvent venu ici avec Anxieuse. Ce n'est pas trop dur de gérer le restaurant et de devoir s'occuper de Protecteur ?
— Oh, tu sais, il n'est pas aussi envahissant qu'il en a l'air, depuis l'an dernier, je vois qu'il gagne petit à petit en maturité et puis il apprend à gérer ses émotions tout comme nous. Il ne faut pas lui en vouloir, je suis contente de l'avoir, j'ai pu découvrir un bon ami en lui malgré tout.
— Ravis de l'entendre. Et te concernant ? Comment ça se passe avec Brave ?
Blessée soupire légèrement, son visage s'assombrissant.
— Eh bien avec ses patrouilles et ses responsabilités, on ne se voit que très peu en ce moment. Mais tout va bien. Et puis avec les cours, le restaurant et la gestion d'émotions, ça me prend beaucoup de temps.
— Je comprends. C'est dur, mais vous allez trouver un équilibre, j'en suis sûr.
Blessée esquisse un sourire reconnaissant.
— Merci, Haine. C'est gentil de ta part.
Je lui réponds d'un sourire avant de prendre une gorgée de ma boisson. Lorsque au même moment, Blessée m'interroge sur l'absence d'Anxieuse.
— Mais d'ailleurs, Anxieuse n'est pas avec toi ?
— Non, elle est à l'université, sa rentrée est aujourd'hui.
— Oh, je pensais que c'était plus tard, ça doit être un sacré changement pour toi.
— Oui, c'est vrai que c'est dur, je sens que les prochains jours vont être rudes sans elle, mais je vais m'y habituer, déclaré-je en soupirant longuement.
Blessée pose une main rassurante sur mon bras.
— Sache que si tu as besoin de parler ou quoi que ce soit, tu sais où me trouver.
Je n'apprécie pas beaucoup les amis d'Anxieuse depuis notre lutte de l'an dernier, mais il faut reconnaitre que Blessée et Joviale ou encore Brave, sont les seuls que je puisse tolérer. Je prends le temps de manger mon repas tout en offrant un léger sourire en coin à Blessée. En retrouvant ma voiture, je prends mon téléphone en main. Je suis partagé entre l'envie d'envoyer un message à Anxieuse et la crainte d'être trop intrusif. Finalement, je décide de ranger mon téléphone et de reprendre la route vers la maison. En atteignant ma chambre, je m'effondre sur mon lit, épuisé par cette matinée. Les pensées du départ d'Anxieuse tournent en boucle dans ma tête. Je réalise alors que les jours à venir s'annoncent longs sans celle qui a conquis mon cœur.
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