Chapitre 17 : Anxieuse




Je suis sur la route, les mains crispées sur le volant, mes pensées qui s'embrouillent. En quittant le chalet, l'image de Haine, son regard distant et ses paroles si durs me revient sans cesse, j'ai senti mon cœur se serrer, plus lourd que jamais. Depuis que j'ai fauté, j'ai l'impression que la distance entre nous ne fait qu'accentuer le vide que je ressens à l'intérieur. Le silence autour de moi n'aide pas. Le paysage défile, mais je n'y fais pas attention, perdue dans mes souvenirs. Je soupire, essayant de chasser ce poids qui m'étouffe. Pourtant, impossible d'échapper à cette sensation de perte, de culpabilité. Plus les jours passent et plus, je me demande, comment vais-je arriver à réparer mon erreur auprès de Haine ?

Alors que je roule en silence, j'entends soudain mon téléphone vibrer sur le siège passager. Je ne jette qu'un rapide coup d'œil, préférant attendre d'être stoppé pour vérifier. Je continue à rouler, la ville se rapprochant peu à peu, et c'est seulement en atteignant un feu rouge que je me permets de le prendre en main. C'est un message de ma mère. Elle me demande si je peux passer à la maison, ça fait longtemps qu'elle ne m'a pas vue. Mon cœur se serre encore un peu plus. Cela fait un moment que je n'ai pas pris le temps de passer à la maison, de me poser un peu en dehors de l'agitation de l'université et de tout ce qui se passe autour de Haine.

Je soupire en regardant la route qui se déroule devant moi. Je décide de faire demi-tour. Peut-être que ça me fera du bien de retrouver l'ambiance chaleureuse de la maison. Quand j'arrive devant chez eux, la première chose que je remarque, c'est la voiture de Haine garée dans son allée. Mon cœur se serre aussitôt. Il est chez lui, cela veut dire que je peux le croiser à tout moment. J'inspire profondément, baissant la tête en soupirant. Je tente de chasser Haine un instant de ma tête. Quand j'entre, mes parents m'accueillent avec des sourires chaleureux. Ils sont si heureux de me voir, et je me rends compte à quel point ils m'ont manqué. Ça fait vraiment du bien de rentrer à la maison, de retrouver ma petite zone de confort.

— Ma chérie, tu es enfin là ! S'exclame ma mère en venant me prendre dans ses bras.

— Anxieuse ! Comment ça va à l'université ? Enchaîne mon père, le visage bienveillant.

Je souris un peu crispée. Ils me bombardent de questions sans me donner le temps de respirer.

— Est-ce que tu t'es fait des amis ? Comment ça se passe avec tes professeurs ? Et tes crises d'angoisse ? Elles se sont manifestées ?

— Ça va... J'essaye de gérer tout ça.

Mais évidemment, ma mère ne lâche pas l'affaire. Elle reprend, son ton un peu plus inquiet.

— Tu sais, le centre que j'anime pour aider les habitants à gérer leurs émotions est toujours ouvert. Ce ne serait pas une mauvaise idée que tu viennes y jeter un œil. Tu pourrais y trouver du soutien à apprendre à les gérer.

— Maman, j'apprécie ton geste, mais je n'en ai pas besoin, lui dis-je avec douceur, mais je sais que son inquiétude ne va pas disparaître pour autant.

Elle soupire en secouant légèrement la tête, mais elle finit par sourire, comme pour me rassurer.

— Je sais, ma chérie. Mais je m'inquiète pour toi. C'est tout.

Juste au moment où je commence à me détendre un peu, mon père pose la question qui fâche.

— Et Haine, alors ? Comment ça se passe entre vous ? Vous arrivez à vous voir, malgré la distance et les cours ?

L'entendre parler de Haine me provoque un pic au cœur si fort que je me fige un instant. Mon père, curieux, attend une réponse. Je ne veux pas leur dire la vérité, je ne veux pas qu'ils s'inquiètent plus qu'ils ne le font déjà et prends la décision de mentir à ce sujet.

— Oui, ça va... On se voit de temps en temps quand on peut. C'est un peu compliqué avec nos emplois du temps, mais on fait au mieux.

Ma mère sourit, apparemment rassurée, mais je sens que mon père n'est pas entièrement convaincu. Heureusement, il ne pose pas plus de questions. Le silence qui suit est un peu pesant pour moi. Mon cœur bat encore fort à cause de ce mensonge, mais je sais que je ne pouvais pas leur dire la vérité. Pas maintenant. Autour de la table, mes parents discutent des dernières nouvelles de la ville, des initiatives qui ont été mises en place depuis la fin de la loi. La mairie a mis en œuvre de nombreux projets, et ils semblent satisfaits. Je les écoute vaguement tout en jouant avec la nourriture dans mon assiette.

— Ils ont ouvert un nouveau complexe sportif et relaxant, tu sais ? S'exclame ma mère avec un sourire enthousiaste. On va passer un week-end là-bas avec les parents de Haine bientôt.

Mon cœur se serre à la mention de Haine, mais je garde la tête baissée, concentrée sur mon repas. Mes pensées vagabondent, loin de la conversation. Mon père, toujours aussi attentif à tout, me jette un regard méfiant avant de lancer.

— D'ailleurs, Anxieuse, j'ai revu Drôle récemment. Il a travaillé de nouveau sur ma voiture.

Je lève à peine les yeux, hochant distraitement la tête. C'est alors qu'il lâche, presque d'un ton comme si mon père souhaitait attirer mon attention.

— Tu savais que Gaffe, sa sœur, a disparu ?

Je bois une gorgée d'eau, mais l'entendre parler de l'émotion de Gaffe, me provoque une grimace. Cette disparition, c'est une des raisons principales de ma dispute avec Haine, et rien que d'y penser, je me sens mal à l'aise. Tentant de cacher mon trouble, je réponds d'une voix plate.

— Oui, je sais. J'espère qu'ils la retrouveront.

Ma mère prend le relais, toujours avec ce ton rassurant qu'elle a, sans même se rendre compte de mon malaise.

— Il me semble que c'est le fils de Courage qui est sur cette affaire , je crois. Elle n'a pas dû aller bien loin, Brave et son équipe la retrouveront sûrement.

À la mention de Brave, mon cœur se serre un peu plus. Où est-il, lui aussi ? Je termine rapidement mon assiette, souhaitant que cette conversation se termine. C'est à cet instant que mon père, avec ce regard tendre, me propose.

— Anxieuse, pourquoi tu ne restes pas à la maison pour la nuit ? Ça nous ferait plaisir, et on pourrait regarder un film ensemble ce soir.

— Non, je préfère rentrer pour m'avancer sur mes prochains cours de la semaine qui arrive...

Mais ma mère insiste, son sourire doux et ses yeux brillants d'espoir.

— Ça nous ferait tellement plaisir, ma chérie.

— D'accord... je vais rester.

Sous la joie de mes parents, je décide de débarrasser et de filer dans ma chambre. En ouvrant la porte tout est exactement comme je l'avais laissé, chaque objet à sa place. Les photos accrochées aux murs attirent mon attention. Les visages de mes amis, les sourires figés dans le temps. Mes yeux se posent sur Haine, puis glissent vers les images de Brave. Ce dernier me manque terriblement. Depuis ma rentrée, c'est comme s'il s'était évaporé, sans laisser de trace. Je m'assieds sur mon lit, prenant mon téléphone avec l'espoir vain de pouvoir le joindre. Je compose son numéro, mais, je tombe sur sa messagerie. Personne ne répond.

— Où es-tu, Brave ? Murmure-je.

Je m'allonge ensuite, fermant les yeux pour tenter d'échapper à ces pensées. Mais une idée s'impose dans mon esprit : peut-être est-il temps de faire un pas vers Joviale ? Après tout, cette distance entre ma meilleure amie et moi, ne fait qu'alourdir mon quotidien. Je prends une grande respiration et lui envoie un message. Pas de réponse. Exaspérée, je finis par éteindre mon téléphone, le jetant sur le lit. Me relevant doucement, je décide de m'occuper en ouvrant mon placard et fouille à travers mes vieux vêtements. Autant profiter de mon passage ici pour récupérer quelques affaires que je pourrais porter sur le campus. Alors que je commence à faire un petit tas, j'entends la sonnette de la porte d'entrée résonner dans la maison. Intriguée, lorsque je descends à l'entrée, je vois Inquiet, installé dans le salon avec mes parents.

— Bonjour mon fils, comment te portes-tu ? Lance mon père, en jetant un coup d'œil vers moi avant de revenir à mon frère.

— Bonjour papa, je vais bien.

— Ça tombe bien que tu sois là avec ta soeur ! Tu vas rester pour le diner ?

— Avec plaisir, je dois juste envoyer un message à Rancunière pour lui dire que je ne rentrerai pas pour diner avec elle.

— Fais donc ça, je vais vous donner une liste, pour que vous ailliez acheter quelques courses pour cuisiner ce soir.

— Pas de souci, papa. Anxieuse et moi, on s'en occupe.

Je hoche la tête en silence. Après avoir écrit une liste sur un bout de papier, mon père la remet à mon frère tout en ouvrant la porte pour que l'on puisse sortir de la maison. Je prends une grande respiration, tentant de me détendre. Inquiet sort ses clés de voiture et me fait signe de le suivre.

— Allez, on y va. On revient vite.

Sur le trajet jusqu'au centre commercial, un silence s'installe entre Inquiet et moi. Je regarde par la fenêtre, mais mon frère finit par lancer la conversation en jetant un coup d'œil dans ma direction tout en gardant une main sur le volant.

— Ça va mieux ? Demande-t-il d'un ton doux.

— Pas vraiment. Je cherche des solutions, mais je ne trouve rien. Que ce soit avec Haine ou Joviale, tout semble être un échec en ce moment.

— Tu sais, si les gens t'aiment, ils reviendront, je te le promets. Regarde-moi, j'ai fini par pardonner à Rancunière, ce qu'elle a fait, l'an dernier. Et on s'est retrouvés après un moment. Je suis sûre que ce sera pareil avec Haine.

Je l'écoute, mais ses mots ne trouvent pas vraiment d'écho en moi. C'est comme si mon esprit refusait d'y croire. Haine et Rancunière sont totalement différents. Je hoche simplement la tête en guise de réponse à mon frère.

— J'espère. D'ailleurs, Rancunière est venue me voir, et on a pu discuter. Ça m'a fait du bien.

Inquiet sourit légèrement, et au moment où il intègre le parking du centre commercial, il se tourne vers moi.

— D'ailleurs, je voulais te parler d'un truc important, à propos de Rancunière.

Intriguée, je lève un sourcil.

— Quoi ? Ne me dis pas que toi aussi, tu vas te séparer ?

Il rigole en secouant la tête et se gare dans une place du parking.

— Non, non. Au contraire. Je voulais te dire que... j'ai demandé Rancunière en fiançailles.

Je reste bouche bée. Je ne m'y attendais pas du tout, surtout après seulement un an ensemble. Pourtant, je suis incroyablement heureuse pour lui. Rancunière avait été mon cauchemar au lycée, mais elle a tellement changé, et aujourd'hui, elle compte vraiment pour moi, comme une véritable amie. Je le serre dans mes bras avec enthousiasme.

— Oh ! Félicitations, Inquiet ! Je suis si heureuse pour toi !

Il sourit et répond en se détachant de mon accolade.

— Merci. Mais je voudrais que ça reste entre nous pour le moment. Je préfère l'annoncer à tout le monde plus tard, quand tout sera plus calme.

— C'est une bonne idée. Avec la disparition de Brave et cette affaire des résistants, ça tombe un peu mal.

— Oui, exactement. C'est pour ça que je préfère attendre. Mais... je ne pense pas participer à cette quête, Anxieuse.

Je le regarde, surprise.

— Pourquoi ?

— J'ai mes salles à gérer et j'aimerai préparer les fiançailles. Je ne peux pas vraiment m'absenter. Rancunière viendra probablement, mais moi, je resterai ici. Et puis... l'un de nous doit bien rester au cas où on aurait besoin de nous, ici.

Je réfléchis quelques instants avant de hocher la tête.

— Je comprends, mais ça va être dur sans toi, surtout avec tout ce qui se passe. Je ne sais même pas combien de temps ça va prendre. Et avec Haine, comment je vais faire ? Je baisse la voix, la tristesse qui m'envahit à nouveau. Ce sera compliqué à gérer.

Inquiet pose une main réconfortante sur mon épaule.

— Anxieuse, tu es ma sœur et la personne la plus forte que je connaisse. Tu es aussi la Sauveuse. Tu es forte, bien plus que tu ne le crois. Tu vas réussir cette quête, quoi qu'il arrive. Fais-toi confiance, tu y arriveras à surmonter n'importe quelle épreuve, je te le promets.

Je souris doucement à ses paroles. Ses mots me réchauffent un peu le cœur.

— Merci, Inquiet.

Il me regarde et sourit en retour. Après avoir fini nos achats, Inquiet et moi sortons du centre commercial, poussant un caddie rempli de provisions. Le soleil commence à descendre à l'horizon, et l'air est plus frais. Inquiet sort son téléphone de sa poche, lève les yeux vers moi et dit.

— Je dois passer un coup de fil rapide, tu peux commencer à ranger les courses dans la voiture ? Je te rejoins après.

Je prends les clés qu'il me tend, hoche la tête et m'avance vers sa voiture, le caddie devant moi. Une fois arrivée, j'ouvre le coffre et commence à ranger les sacs. J'essaie de me concentrer sur ce que je fais, mais quelque chose me met mal à l'aise. Comme si, je sentais une présence à côté de moi. Mon cœur se serre, et je tourne la tête. Charmeur est là, se tenant à quelques pas, son visage hésitant. Je me fige, tentant de l'ignorer et de me concentrer sur le rangement. Mais il ne bouge pas.

— Anxieuse, je veux juste te parler.

Je serre les dents, les mains tremblantes alors que je continue à ranger les sacs. Je n'ai pas envie de l'écouter. Pas maintenant, pas ici.

— S'il te plaît, réponds-moi, insiste-t-il.

Je prends une profonde inspiration avant de lui lancer un regard glacial.

— Pars, Charmeur. Je ne veux plus te voir ni te parler.

Mais il ne bouge pas, et son insistance commence à me mettre mal à l'aise. Ma colère monte, et je ne sais pas comment le faire fuir. Alors, sans réfléchir, je me mets à crier. Charmeur réagit immédiatement, me saisissant par le bras et me poussant contre la voiture. Il place rapidement sa main sur ma bouche, tentant de me faire taire.

— Mais t'es folle ou quoi ?! Pourquoi tu cries ? Je ne te veux pas de mal !

Je lutte pour dégager sa main de ma bouche et, d'un coup sec, j'y parviens enfin.

— Le mal est déjà fait, Charmeur ! À cause de toi !

Il recule légèrement, levant les mains en signe de paix tout en soupirant. Il passe une main nerveuse dans ses cheveux blonds, visiblement agacé.

— Je sais... je sais que j'ai merdé, commence-t-il, les yeux baissés. Mais Anxieuse, je ne voulais pas te faire de mal. J'ai agi de manière stupide et immature. Je pensais pouvoir te séduire, mais... c'était une erreur. À ce que je comprends, Haine et toi, c'est spécial, je le vois bien maintenant. Je ne voulais pas m'interposer entre vous, mais je me suis laissé emporter par ce que je ressentais pour toi.

Il relève les yeux vers moi, et cette fois, son arrogance habituelle a disparu. Son regard semble sincère, presque vulnérable.

— Je suis désolé, vraiment. Je n'aurais jamais dû essayer de me mettre entre toi et Haine. Vous avez quelque chose de fort, et je le respecte maintenant. J'aurais dû le comprendre plus tôt. Je ne voulais pas que ça se passe comme ça. Mais désormais, je sais que ce que vous avez, toi et Haine, c'est quelque chose que je ne peux pas briser.

Il baisse la tête avant d'ajouter.

— Je suis vraiment désolé, Anxieuse. Et je sais que des excuses ne suffiront probablement pas, mais je devais te le dire. Je ne veux plus te faire de mal, je te promets. Peut-être qu'on pourrait essayer d'être amis, toi et moi ?

Ses paroles me déstabilisent. Il semble réellement regretter, et pour la première fois, je ne vois plus le Charmeur vantard et insistant. Mais malgré cela, la douleur qu'il m'a causée est encore bien trop présente. Je détourne le regard, réfléchissant à ce qu'il vient de dire. Puis, sans m'engager, je lâche simplement.

— Je vais y réfléchir.

Charmeur hoche la tête avec un faible sourire aux lèvres, avant de s'éloigner. À ce moment précis, Inquiet revient de son coup de fil. Il regarde Charmeur s'éloigner et se tourne vers moi, intrigué.

— C'était qui, lui ? Demande-t-il.

— Juste un ami, réponds-je, sans conviction, tandis que je continue de ranger les dernières courses dans le coffre.

Une fois les courses faites, nous sommes de retour à la maison. Je m'apprête à monter dans ma chambre pour me changer quand Inquiet m'interpelle.

— Anxieuse, viens, j'ai quelque chose à te dire.

Je le rejoins sur le porche, me demandant ce qu'il mijote. En ouvrant la porte, je tombe nez à nez avec Joviale, assise sur les premières marches du porche. Mon cœur se serre instantanément, mais surtout, je me pose la question sur la raison de sa venue à une heure tardive. Inquiet se tourne vers moi, l'air soucieux.

— Je l'ai appelée pour que vous vous expliquiez.

Je le regarde, surprise et agacée à la fois.

— Donc cet appel... c'était avec elle ? Pourquoi tu ne me l'as pas dit ?

Mon ton est plus sec que je ne le voudrais. Inquiet me répond d'un sourire plein de tendresse avant de refermer la porte, me laissant seule avec Joviale. Je soupire lourdement, évitant son regard, puis je vais m'asseoir à l'autre bout des marches. Le silence entre nous est pesant et froid. Aucunes de nous ne semble savoir par où commencer. Je prends les devants et décide de briser la glace.

— Joviale, je suis désolée de m'être éloignée de toi comme du reste de la bande, d'avoir causé du tort à Haine... mais surtout à toi.

Les larmes commencent à couler malgré moi. Je les essuie rapidement, mais une échappe à ma vigilance. Joviale, doucement, la rattrape du bout des doigts. Elle me regarde avec une tendresse que je n'ai pas méritée.

— Je serais vraiment la pire des meilleures amies si je ne pouvais pas te pardonner, Anxieuse. Mais s'il te plaît, ne recommence plus.

Sa voix est douce, mais ferme. Je hoche la tête, soulager et coupable à la fois. Puis, je décide de tout lui dire, de me confier comme avant.

— Je m'en veux tellement, Joviale. Je ne sais pas comment rattraper le coup avec Haine... Je ne sais même pas s'il veut encore de moi dans sa vie.

Joviale m'écoute attentivement, son regard ne me lâche pas. Puis, elle prend la parole avec cette sagesse qui m'a toujours impressionnée chez elle.

— Anxieuse, écoute, ça ne sera pas facile. Pendant ton absence à la fac, j'ai pu me rapprocher de Haine. Il a eu cette facilité à se confier à moi, mais... je ressens qu'il ne sait pas gérer ses émotions. Toute cette histoire, la trahison qu'il a ressentie, ça l'a dévasté. Il a laissé sa colère le contrôler. Il a laissé sa haine le transformer.

Je frissonne en repensant à ce soir-là, ma voix s'étrangle en parlant.

— Je le sais. Le soir de notre dispute, Haine m'a foncé dessus avec sa voiture. Il ne comptait pas s'arrêter... J'ai vu dans son regard une colère que je ne reconnaissais pas. Si Curieux n'était pas intervenu, je ne sais pas où je serais aujourd'hui.

— Haine n'est pas un monstre, Anxieuse. Il ne t'aurait jamais tuée, jamais. Il est blessé, trahi, et il se sent seul. Mais ce n'est pas quelqu'un de mauvais. Il a juste besoin de toi, autant que tu as besoin de lui. Ça prendra du temps, mais je te promets que vous vous retrouverez.

— J'espère vraiment que tu as raison...

Joviale se rapproche de moi et me prend dans ses bras.

— Je te le promets, Anxieuse. Mais avant dis-moi, qu'est-ce qu'il s'est passé avec ce blond plutôt mignon qui a semé la discorde entre toi et Haine.

Je baisse les yeux avant de continuer, essayant de choisir mes mots avec soin.

— Tu parles de Charmeur... Il est en deuxième année à l'université. Il est plutôt... comment dire... charismatique, je lâche un petit rire nerveux. Au début, je ne pensais pas qu'il s'intéressait à moi. Mais il a commencé à se rapprocher, et c'était assez... inattendu. Et je dois admettre que j'ai été un peu... attirée. Pas comme avec Haine, bien sûr, mais c'était là. Un petit coup de cœur léger, tu vois ?

— Je vois, ça arrive, tu sais.

— Je sais bien mais quand j'ai appris que Haine travaillait avec Brave pour retrouver Gaffe... c'était trop pour moi, Joviale. J'étais déjà sur le fil du rasoir avec tout ce qui se passait, mais ça, ça m'a complètement fait craquer. Pourtant, au fond de moi, je savais que Haine faisait ça uniquement pour aider Brave, pas pour me blesser. Mais je n'ai pas voulu y croire à ce moment-là, j'étais trop en colère et perdue...

Je m'arrête, sentant ma gorge se serrer, mais je continue.

— C'est après ça que tout est parti en vrille. J'ai fini par embrasser Charmeur... et après, c'est lui qui a pris les devants. Je me sens tellement mal d'avoir laissé tout ça arriver. J'ai quitté Haine, et juste après... sous le coup de la colère et de la confusion, j'ai embrassé quelqu'un d'autre. Je n'aurais jamais dû, mais c'était comme si j'avais besoin de me raccrocher à quelque chose. C'était un moment de faiblesse, et maintenant, je ne sais plus comment réagir avec Haine. Je me sens tant coupable.

Je lève enfin les yeux vers Joviale, cherchant du réconfort.

— Je ne sais pas comment le retrouver. Comment faire pour qu'il me pardonne, pour que je me pardonne surtout. Haine est en colère, et je le comprends. Je l'ai trahi, même si ce n'était pas intentionnel. Et à présent, j'ai l'impression qu'il est si loin de moi... Je l'aime toujours, mais j'ai l'impression d'avoir tout gâché.

— Écoute, je pense que Haine a eu du mal à gérer ses émotions, notamment avec tout ce qui s'est passé entre vous. Tu sais, il est plus sensible que ce qu'il montre. Ça ne veut pas dire que ce sera facile de rattraper tout ça, mais si tu veux vraiment réparer les choses avec lui, je crois que c'est encore possible. Il t'aime, même s'il a du mal à le montrer en ce moment.

Je hoche la tête, un peu rassurée, mais toujours anxieuse. Joviale reprend avec une pointe de sérieux dans la voix.

— Je te le promets, tout finira par s'arranger. Mais sérieusement, c'est marrant, toi et les blonds. Tu étais déjà amoureuse de Brave l'an dernier, alors je ne suis même pas surprise que tu craques encore pour un blondinet. Si tu veux, je peux teindre les cheveux de Haine en blond.

Je secoue la tête, souriant malgré moi.

— Je sais... mais ce n'était qu'un léger coup de cœur. Rien de comparable à ce que je ressens pour Haine. Je l'aime tellement, et même si Charmeur est... charmant, rien ne pourra remplacer ce que j'ai avec Haine. Oh non, pas ses cheveux ! Ce serait horrible !

Joviale éclate de rire à son tour.

— Ah oui, j'imagine que ce serait un désastre ! Mais c'est drôle d'y penser.

Je retrouve mon sérieux un instant, mon regard se posant sur Joviale.

— Haine me manque. J'ai fait des erreurs, Joviale. Cette histoire avec Charmeur... je n'aurais jamais dû le laisser s'approcher autant, mais je te jure que je n'ai jamais eu l'intention de tromper Haine. Je m'en veux vraiment pour tout ça.

— Laisse faire le temps et tu verras que tout rentrera dans l'ordre avec Haine. Mais en attendant, essaye de ne plus tomber sous le charme des blonds, d'accord ? Ça complique un peu trop les choses.

Nous rions toutes les deux légèrement avant de retourner à l'intérieur, réconciliés.

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