Chapitre 10 : Haine
Je sors de l'université, la rage bouillonnant en moi, chaque muscle tendu par une colère que je peine à contenir. Je me dirige vers ma voiture, mais alors que je m'apprête à y entrer, je l'aperçois. Le blondinet, celui qui était dans la chambre d'Anxieuse, se tient près d'une voiture. Sans doute la sienne. Quelque chose se brise en moi. Je n'arrive pas à calmer cette fureur qui me dévore. J'attends qu'il quitte le parking pour passer à l'action. Je me dirige vers le coffre de ma voiture, l'ouvre, et en tire une barre de fer. L'idée de m'en prendre à sa voiture tout comme j'avais fait à celle de Rancunière, me traverse l'esprit. Pourtant l'envie de laisser tomber, de ne pas céder à cette impulsion vient me hanter également, mais l'image de ce type avec Anxieuse me rend fou. Je serre la barre de fer entre mes doigts, la colère monte encore d'un cran. Sans réfléchir, je m'approche de la voiture de Charmeur et abats la barre de toutes mes forces sur le rétroviseur, qui explose en morceaux. Je m'en prends ensuite aux vitres, aux phares, aux portières. Je termine en rayant la carrosserie de la voiture, laissant une longue marque de colère indélébile. Je me sens plus léger, libéré de ce fardeau, même si je sais qu'Anxieuse me détestera pour ça. Mais à cet instant, je m'en fiche royalement. Je balance la barre de fer dans le coffre, monte dans ma voiture, et démarre en trombe, laissant derrière moi cette carcasse de métal clignotante et en piteux état.
— Qu'il ose encore rôder autour d'elle, et je finirai par lui faire comprendre qu'il n'a rien à faire là, murmuré-je à moi-même.
Je roule sans but, le pied lourd sur l'accélérateur, la colère me poussant à aller toujours plus vite. Je zigzague à travers les rues désertes, les lumières des lampadaires défilant comme des éclairs. J'ai failli percuter une voiture à une intersection, mais je m'en fous. Je suis trop enragé pour m'arrêter, trop perdu pour savoir où aller. C'est alors que je passe devant la plage déserte. L'obscurité recouvre le sable, et l'eau semble presque paisible sous la lueur de la lune. Je pile, le crissement des pneus déchirant le silence nocturne. J'éteins le moteur et me traîne vers la plage, m'affalant sur le sable froid. Je suis seul, entouré par le vide, loin des regards, et c'est tout ce dont j'ai besoin. Je prends un galet trouvé à mes pieds et le balance avec colère dans l'eau. J'aurai pu aller voir n'importe qui, mais je ne veux pas me montrer vulnérable. Pas devant qui que ce soit. Je retire ma veste en cuir pour m'en faire un oreiller et y poser ma tête. Allongé, fixant le ciel étoilé, je sens la fatigue me rattraper. Je finis par sombrer, mes pensées s'éteignant sous le poids de la colère et de l'épuisement.
Quand j'ouvre les yeux, c'est une voix familière qui me réveille.
— Eh, Haine, mec, réveille-toi.
Je cligne des yeux et découvre Protecteur, entouré d'une bande d'enfants qui me regardent avec curiosité. Un des gamins lâche un commentaire à vive voix.
— Beh, il n'est pas mort, le monsieur.
Je me redresse, les muscles endoloris, et lance un regard interrogateur à Protecteur.
— Qu'est-ce que tu fais là avec tous ces mômes ?
— Je suis volontaire pour leur donner des cours de natation. J'ai proposé mon aide aux écoles et les parents ont accepté.
Tandis que les enfants s'éloignent pour enfiler leurs brassards, je lève un sourcil, étonné qu'on lui confie cette responsabilité.
— Donc, des gens te confient leurs enfants, à toi ?
— En effet. Pourquoi, ça t'étonne ?
Je ricane, moqueur.
— Oh, pour rien. Bon courage.
Il me remercie, mais je continue, incapable de retenir mon sarcasme.
— C'est pour eux que je dis ça. Pas pour toi.
Il ignore le ton de ma voix et me demande calmement.
— Pourquoi tu as dormi ici, Haine ?
— Ce n'est pas ton problème.
Protecteur ne lâche pas l'affaire et continue de me suivre tel un chien.
— Haine, on est amis, non ?
— Non, Protecteur, on n'est pas amis. Ce n'est pas parce qu'on a sauvé la ville ensemble qu'on l'est.
Il semble presque blessé par mes mots, mais il persiste.
— Alors pourquoi tu es ami avec Brave ?
— Car lui, il est différent de toi. Il n'a jamais souhaité du mal à Anxieuse, ni à Joviale.
Il passe une main dans ses cheveux, tenant compte de mes paroles.
— Si je comprends bien, tu vis encore dans le passé, et tu m'en voudras toujours malgré mes efforts ?
Je m'apprête à répondre, mais il m'interrompt, comme s'il n'avait pas fini de dire ce qu'il avait sur le cœur.
— J'essaye de changer, Haine. Pour être accepté pour réparer ce que j'ai fait. Mais avec toi et Joviale, j'ai l'impression de nager à contre-courant. J'aurais voulu avoir une seconde chance...
Il regarde les enfants, puis s'éloigne pour les rejoindre. Je le regarde courir vers eux, les aider à enfiler leurs brassards et à entrer dans l'eau, tel un véritable protecteur. Un sentiment étrange monte en moi, quelque chose que je ne veux pas admettre. Peut-être que... Peut-être que je pourrais lui laisser une seconde chance, après tout, il le mérite sûrement.
***
Je rentre chez moi avec l'intention de me reposer. L'après-midi s'étire et je m'installe sur mon lit pour me détendre, Mais bien sûr, on sonne à la porte. Je n'ai aucune envie de répondre, alors je fais comme si je n'étais pas là. Quelques secondes plus tard, c'est mon téléphone qui se met à vibrer, affichant l'émotion de Brave sur l'écran. Je soupire et laisse l'appel passer sans répondre. Lorsque son appel cesse, j'entends ma mère, ouvrir la porte. Je sais qu'elle va faire entrer Brave, cela m'agace. Résigné, je me lève, enfile un nouveau tee-shirt et ajoute un sweat noir par-dessus. Alors que je referme la porte de mon placard, je tombe nez à nez avec Brave, en tenue de civil, portant un simple pull gris. Il tient une pile de documents sous le bras, l'air sérieux.
— Que veux-tu ? lancé-je déjà agacé par sa présence.
Brave me regarde avec insistance et déclare.
— Ne m'attaque pas, je viens en paix. Mec, je sais que tu ne veux pas m'aider, mais je suis venu pour essayer une nouvelle fois. J'ai vraiment besoin de ton aide, Haine.
— Pourquoi tu ne demandes pas à Protecteur ? C'est ton meilleur ami, non ?
Il dépose les documents sur mon bureau avant de répondre.
— Je t'avoue que depuis l'an dernier, je me sens plus proche de toi que de lui. On a certes grandi ensemble, c'est un super ami, mais j'aime bien notre amitié à nous deux, malgré nos pics.
Je le dévisage, une expression de dégoût sur le visage. Il parle de choses bien trop sentimentales à mon goût.
— S'il te plait Brave, j'aimerais mieux éviter cette discussion mielleuse.
Brave continue en me narguant d'un sourire.
— J'ai une équipe d'agents de police, mais aucun n'est comme toi. Notre duo durant la lutte me manque.
— T'as gagné ! Je vais t'aider. De toute façon, je n'ai rien d'autre à faire.
Brave semble surpris, il balbutie presque.
— Attends, tu veux vraiment m'aider ? J'avais préparé tout un discours pour te convaincre.
— Dépêche-toi avant que je change d'avis.
Brave s'active, déplie ses documents et sort un plan de Feelings. J'en profite pour ouvrir la porte de mon placard, y accrochant les preuves que Brave a rassemblées pour retrouver Gaffe. Il m'explique en se tenant à côté de moi.
— Selon ses parents, Gaffe a disparu depuis plus de deux semaines. Elle n'est ni au ranch de ses parents, ni chez des amis, ni même à l'université avec son frère. Ils ne savent pas où elle est passée, elle est partie sans même prendre son téléphone. Ses parents sont très inquiets.
— Elle est peut-être allée voir son oncle Épaté en détention.
— Non, même pas. Bien essayé.
Je réfléchis, cherchant où cette folle pourrait être allée. Au même moment, Brave reçoit un message de son père, lui demandant de venir au commissariat. Il raccroche rapidement et je lui confie.
— Je n'ai aucune idée de l'endroit où elle pourrait être. Si seulement on avait des vidéos de la ville...
Brave me regarde soudainement frapper par mon idée.
— Mais attends, oui ! Je n'y avais pas pensé ! On peut essayer de voir avec les caméras de la ville. J'ai accès au poste de police, tu peux passer demain ?
— Je vais voir ce que je fais demain, mais j'essaierai de passer. Et Brave, pas un mot de cette affaire à Anxieuse, d'accord ?
— Tu peux compter sur moi, je serai muet.
Il s'en va, me laissant avec un léger sourire. Au fond, je me dis que je ne suis pas si inutile que ça. Partir à l'aventure m'a tellement manqué, mais malheureusement, je ne peux pas en parler avec Anxieuse. De toute façon, on s'est disputé, alors...
Dès que Brave quitte la maison, ma mère, entre dans ma chambre. Elle me regarde d'une mine inquiète.
— Tout va bien, Haine ?
Je hoche la tête, évitant son regard.
— Oui, tout va bien.
Mais elle ne se contente pas de ma réponse et rétorque.
— Et Anxieuse ? Des nouvelles d'elle ?
— Elle est à l'université. Elle a un but dans la vie, elle. Il est temps pour moi de trouver le mien, enfin si je le trouve.
Elle me regarde avec une certaine tristesse.
— Pourquoi tu ne viendrais pas travailler à la mairie, comme le reste de la famille ? Tu pourrais faire une différence.
— Non, ce n'est pas pour moi.
En ne souhaitant pas continuer ma conversation avec elle, j'attrape mon téléphone, un peu d'argent, mes clés de voiture et descends les escaliers. Alors que je m'apprête à sortir de la maison, elle me rattrape avant que je ne passe la porte.
— Haine, mon chéri, tu ne pourras pas passer ta vie à fuir. Tu dois trouver ta place, toi aussi.
Je me tourne vers elle, la main sur la poignée de la porte.
— Je sais, je vais sortir, à plus tard.
Une fois sur le porche, je soupire longuement. Je sais qu'elle s'inquiète pour moi, que son cœur se serre à l'idée de me voir aussi perdu. Mais je refuse de l'admettre, encore moins d'en parler. Fuir, c'est tout ce que je sais faire. Je gagne ma voiture et roule dans la ville, sans but précis. Mon esprit est ailleurs, retournant sans cesse à Anxieuse. Une culpabilité sourde me ronge. J'ai envie de l'appeler, de la sentir dans mes bras, mais la distance entre nous me semble insurmontable. Je m'arrête pour acheter un pack de bières dans une épicerie, puis je regagne ma voiture et roule jusqu'au bout d'un ponton, près du port de Feelings. Là, je m'assois, les pieds pendants au-dessus de l'eau, et j'ouvre la première bière. Je bois lentement, une gorgée après l'autre, laissant mon esprit divaguer sur la mer. Le vent frais caresse mon visage. J'avais besoin d'un temps pour me retrouver avec moi-même. En soufflant longuement, je sens mon esprit se libérer un peu, et je commence à parler tout seul, murmurant mes pensées à la mer.
— J'ai toujours voulu être fort... mais là... le grand Haine se sent juste... perdu.
Un silence s'installe, le son des vagues remplissant le vide, puis je reprends entre deux gorgées de bière.
— Peut être que je suis plus fait pour elle... mais si je la perds... qu'est-ce qui me reste ?
Je réalise à quel point je me sens seul, et ça me frappe comme un coup de poing. Je suis là, assis au bord de ce ponton, perdu dans une ville où je ne trouve pas ma place, parlant à personne d'autre que moi-même. Je soupire longuement, conscient que mes mots se perdent dans le vide, sans écho, sans réponse. Je sors mon téléphone et hésite avant de composer un message pour Anxieuse. Mais avant même de lui écrire un message, une notification apparaît sur l'écran.
Anxieuse : Haine, il faut que l'on parle.
Une vague de bonheur me traverse l'esprit, sans attendre, je tape rapidement une réponse. Je me lève brusquement avec une hâte de la retrouver, mais une pensée me frappe. Les documents de l'affaire avec Brave sont éparpillés dans ma chambre. Il faut que je les cache et vite. Je me précipite vers ma voiture en roulant à toute vitesse à travers les rues de Feelings, le vent sifflant à mes oreilles. En arrivant devant mon allée, je remarque des nuages sombres se former. Les éclairs zèbrent le ciel alors que je verrouille ma voiture. C'est à ce moment-là que j'aperçois Anxieuse, elle était déjà là. Je m'avance vers elle en la regardant comme toujours, avec amour et désir. Cependant, je remarque qu'elle a une expression différente. De la colère et de l'inquiétude marquent ses traits. Elle m'accueille avec une question directe.
— Où est-ce que tu étais ?
— Je suis allé me promener.
— Haine, il faut qu'on discute.
Sous le grondement du tonnerre, un frisson me parcourt. Mes deux seules faiblesses ont toujours étaitient ma copine et les orages. Je regarde le ciel puis lui propose.
— On serait mieux dans ma chambre pour parler.
À l'intérieur, la maison est silencieuse, presque vide. Anxieuse me questionne.
— Tu es tout seul ?
— Ma mère est souvent là, mais elle a dû sortir, je suppose.
Une fois dans ma chambre, je ferme la porte, en jetant un coup d'œil rapide sur mon bureau. Je réalise avec soulagement que les documents ne sont plus là. Brave a dû repartir avec, et c'est une chose de moins à gérer. Je remarque qu'Anxieuse se dirige vers la fenêtre, celle qui donne sur la sienne, lorsqu'elle vivait encore chez ses parents. Un sourire nostalgique se dessine sur ses lèvres.
— Je me souviens de toutes ces fois où je t'observais de ma fenêtre, dit-elle doucement.
Je laisse échapper un sourire, mais Anxieuse détourne le regard de la fenêtre pour concentrer son attention sur moi.
— Haine, je sais que tu es jaloux de Charmeur, mais il faut que tu comprennes qu'il n'y a rien entre lui et moi. Il n'y aura jamais rien. C'est toi que j'aime, mais si tu ne me fais pas confiance, on n'arrivera jamais à vaincre la distance.
En entendant l'émotion de ce crétin, je fronce mes sourcils sentant une vague de frustration monter en moi.
— Anxieuse, je t'aime plus que tout. Je n'ai pas peur de te le dire, je n'ai pas honte de te le dire. Mais je suis un mec, et je sais comment les gars fonctionnent. Ce blondinet, il ne te regarde pas comme une simple amie. Il te regarde avec le même désir que moi. Ce gars te veut pour lui, et ça se trouve, il te veut même dans son lit.
— Haine, tu vas trop loin ! Tu ne le connais pas et tu présumes déjà de ses intentions. Charmeur s'est confié à moi, il n'a pas une histoire facile, et je me dois d'être proche de lui.
— Ah, donc parce qu'il n'a pas une histoire facile, ça te donne le droit de te rapprocher de lui ?! lancé-je en sortant un rire arrogant.
— Son frère est mort, Haine ! Il a perdu son frère... Il est en plein deuil.
Surpris par cette révélation, je murmure, d'un ton presque honteux.
— Je n'en savais rien... Je suis désolé pour lui, mais ça ne lui donne toujours pas le droit de se rapprocher de toi.
— Il vit la même chose que tu croyais vivre sans Rage. Et comme toi, il essaie de ne pas le montrer pour ne pas inquiéter les autres.
Sous les propos d'Anxieuse, je reste figé, je suis peut-être allé un peu loin en imaginant certaines choses d'autant plus que sa voiture est endommagée par ma faute.
— Sache que je suis désolé, mais je veux que tout le monde sache que c'est moi ton unique copain.
Je me laisse tomber sur mon lit, le regard tourné vers le sol, la honte pesant sur ses épaules. Anxieuse s'assied à côté de moi, avec une peine visible. Elle pose doucement une main sur ma joue, me forçant à la regarder.
— Eh, Haine, regarde-moi. Tu sais que c'est toi et personne d'autre. Personne ne rivalisera avec toi. Tu es l'homme que j'aime plus que tout, et tu me l'as tant de fois montré.
Touché par ses mots, j'esquisse un sourire. Ce que j'aimais tant chez elle, c'est qu'elle avait toujours les mots qu'il fallait pour me réconforter et calmer mes crises de nerfs. Elle m'offre un sourire apaisant la tension entre nous.
— Je ne peux pas rester fâchée contre toi, murmure-t-elle, je t'aime trop pour ça.
— Je crois bien que c'est moi qui suis devenu le parano.
Anxieuse éclate de rire en plissant les yeux.
— Le grand Haine devient donc le parano ? Hum, c'est le scoop de l'année, j'aime bien, je ne serai plus la seule.
Je rigole à mon tour.
— Je devais m'y attendre, sortir avec une parano, ç'a fini par déteindre sur moi.
Anxieuse me regarde intensément, pose ses deux mains sur ses joues et murmure.
— Je te préfère comme ça. Ton beau sourire m'a tant manqué.
— Toi seule me rend ainsi.
Je passe ma main sur sa joue, et l'embrasse longuement en la basculant légèrement sur mon lit. Anxieuse répond a mon baiser en glissant doucement sur le lit. Au-dessus, d'elle, je commence à l'embrasser dans le cou pour descendre à son épaule. Au contact de mes lèvres dans le creux de son cou, Anxieuse murmure tendrement, presque en riant.
— Doucement Haine, je suis craintive dans le cou.
D'un sourire espiègle, je profite de l'occasion pour lui faire des chatouilles. Anxieuse éclate de rire, se tortillant sous mes mains, essayant en vain d'échapper à mes taquineries. Elle se redresse pour m'embrasser encore et encore, baladant ses mains sur mon dos. Elle glisse ses mains sous mon sweat de Haine, effleurant mes abdos avec délicatesse. Je la regarde d'un sourire malicieux et descend pour l'embrasser dans le cou à nouveau, passant une main sur sa taille. Puis, dans un murmure, je lui demande en plongeant mes yeux dans les siens.
— Anxieuse, tu voudrais qu'on le fasse ?
Mon insinuation est claire, mais je ne veux rien précipiter. Anxieuse se redresse doucement, posant une main sur mon buste.
— Haine, j'ai vraiment envie de le faire avec toi, mais je ne me sens pas encore prête.
— Ne t'en fais pas, on le fera quand tu te sentiras prête, dis-je en l'embrassant sur le front.
Je m'allonge sur mon lit en calant ma tête sur l'oreiller tandis qu'Anxieuse repose la sienne sur mon torse, se blottissant contre moi. Je caresse le long de ses cheveux tout en fermant les yeux, Rien au monde peux me faire sortir de ce merveilleux moment avec elle, mais Anxieuse rompt ce moment avec un soupçon de malice.
— Tu as recommencé à t'en prendre à des voitures ?
— C'était soit lui soit sa caisse.
Anxieuse rigole tout en me donnant une tape amicale à l'épaule, je pose ma tête près d'elle savourant son parfum floral que j'aime tant sentir. Soudain, je sens qu'Anxieuse se redresse, ce qui fait retomber ma tête sur l'oreiller. Son regard est attiré par la porte de mon placard dont un papier dépasse. Intriguée, elle se lève du lit et ouvre mon placard, n'y faisant pas attention, je l'observe de loin. Elle aperçoit des papiers accrochés à l'intérieur. En plissant les yeux, elle distingue des notes et une carte marquant les derniers endroits fréquentés par Gaffe. La réalisation de ce qu'elle voit frappe Anxieuse de plein fouet. Une vague de colère monte en elle, incontrôlable. Elle se tourne brusquement vers Haine, la voix tremblante d'indignation.
— Haine, c'est quoi tout ça ?!
Surpris par le changement soudain d'attitude d'Anxieuse, je me lève face à elle.
— Ce n'est rien, ce sont juste les plans de Brave...
Mais avant que je puisse finir ma phrase, Anxieuse recule, le regard plein d'incompréhension et de peur.
— Qu'est-ce que ça fout chez toi, Haine ?! Rassure-moi, tu ne fais pas ce que je crois, pas vrai ? Tu n'es pas en train d'aider Brave à retrouver ma pire ennemie ! Tu me ferais quand même pas ça ?
— Anxieuse, écoute-moi... Ce n'est pas ce que tu crois...
— Donc, c'est vrai ? Comment tu peux me faire ça, Haine ?! Entre ta jalousie, la voiture de Charmeur, là, c'est la goutte de trop ! Gaffe, ce n'est pas une simple fille et tu le sais ! Elle a tout fait pour me pourrir la vie, l'an dernier, tu as la mémoire courte ?!
Je tente de me défendre, mais impossible de caler un mot au milieu de sa colère.
— Je voulais juste... Je voulais juste aider Brave, c'est lui qui me l'a demandé !
— À partir du moment, ou tu as accepté de l'aider ! Tu es en tort ! Tu sais quoi, c'est trop pour moi !
En sentant le poids des accusations d'Anxieuse, mes mots de s'étranglent dans ma gorge. C'est une première pour moi, de la voir dans cet état. Elle tremble de rage et de déception, ses yeux me fixent comme si elle ne me reconnaissait plus. Finalement, elle secoue la tête, les larmes menaçant de couler.
— Je ne peux pas continuer comme ça, Haine. T'es censé être celui sur qui je peux compter, pas celui qui me trahit... On... on a besoin d'une pause.
Sa voix se brise à la fin, mais elle reste ferme, résolue, elle quitte la chambre me laissant seul. Il est hors de question que je la laisse mettre un point final à notre relation sous prétexte que j'ai apporté mon aide à un ami. Stupéfait, je la suis dans les escaliers avant d'arriver devant la porte d'entrée.
— Anxieuse, attends ! Ne fais pas ça ! Je t'en prie...écoute-moi.
— Je ne peux pas continuer avec toi, Haine, regarde ce que tu fais. Tu me dis que tu n'as pas confiance en moi, mais regarde de ton côté, tu défonces des voitures, tu me caches cette affaire concernant Gaffe, ça va être quoi la fois suivant ? J'ai besoin de temps pour réfléchir.
Elle franchit la porte sans me porter un dernier regard. La réalité de la perdre me frappe comme un coup de poing. Alors que je la suis dehors, le grondement de l'orage se fait entendre, résonnant lourdement. Je sursaute légèrement, mon cœur s'accélérant à cause de cette peur. Mais malgré cette angoisse, je continue de suivre Anxieuse jusqu'à sa voiture. Elle ouvre sa portière, s'assoit derrière le volant et démarre rapidement. J'arrive à temps pour me placer devant la voiture, lui barrant la route.
— Anxieuse, s'il te plaît ! Laisse-moi t'expliquer ! Crie-je, ma voix déchirée par l'urgence et le chagrin.
Mais Anxieuse, les yeux embués de larmes, ne veut rien entendre. Elle klaxonne, espérant que je me pousse, mais je suis bien décidé à rester planté là sous la pluie qui commence à tomber lourdement, trempant mes vêtements.
— Je t'en prie, parlons ! Ne pars pas comme ça !
Je tente de percer la barrière de colère et de douleur qui me sépare d'elle, mais mes paroles semblent s'écraser contre un mur invisible. Voyant que je ne suis pas décidé à me bouger, Anxieuse recule lentement pour faire demi-tour. Impuissant, je regarde la voiture partir, mon cœur se serrant davantage à chaque mètre qui l'éloigne de moi...
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