Chapitre 46



Cela faisait maintenant deux jours que j'étais enfermée dans ce centre. Enfermée contre ma volonté. Enfermée mais surtout contrôlée. Depuis que l'on m'a injecté ce sérum, personne n'est venu me voir mais je savais qu'ils gardaient un œil sur moi via la caméra de ma cellule. Non seulement j'étais enfermée et contrôlée mais j'étais également surveillée comme si je pouvais trouver le moyen de m'échapper. J'avais l'impression d'être une bête de foire, le résultat d'une expérimentation. Assise sur le sol glacé, la tête en arrière posée sur ce qu'on pourrait appeler un lit, fixant la vitre du plafond de la cellule. Je ne pouvais contrôler que mes pensées. Elles avaient le don de m'étouffer autrefois, aujourd'hui c'est tout ce qu'il restait de l'anxieuse que j'étais. Je n'aurais jamais pensé reconnaître ça un jour mais à cet instant, je chérissais ces maudites pensées remplies d'inquiétudes. J'ignorais ce qui se tramait de l'autre côté de cette salle. Qu'est-ce que Dégoût et son acolyte Épaté étaient en train de mijoter ?

Au même moment, la porte s'ouvrit laissant apparaître un agent de traque. Il avait sûrement eu pour ordre de venir me chercher. Il se rapprocha de moi en m'ordonnant de me lever, le regard fixé vers moi. D'un bond mon corps se mit à se lever, sans même que je ne le décide. C'était un des côtés de ce sérum que ma mère aurait vraiment apprécié. Toutes ces fois où je n'ai pas voulu quitter mon lit, il aurait vraiment été utile. Cela faisait maintenant un sacré bout de temps que je n'avais plus aucune nouvelle d'eux. Je me demandais comment était ma mère, elle qui m'envoyait des tonnes de messages d'inquiétude dès lors que j'avais l'habitude de quitter la maison. Est-ce que le stress avait dénigré son état ? Est-ce qu'elle avait tenté de partir à ma recherche ? Où avait-elle préféré abandonner comme l'avait fait mon père ? Des questions se rajoutaient à la pile d'interrogations non résolues depuis que j'étais partie. En quittant la salle, deux autres agents me demandèrent de les suivre dans un long couloir. En atteignant le bout de celui-ci, une salle remplie de clarté s'ouvrit à moi. Cela changeait de l'obscurité qui régnait dans la cellule où j'étais enfermée. Je me stoppai au milieu de la pièce, les fenêtres de cette dernière donnaient sur de grands arbres de la forêt de Feelings. Épaté, Dégoût, mais aussi de nombreux agents de traque entrèrent. Parmi eux, un visage familier.

Je n'aurais jamais pensé que ce dernier se trouverait ici. Il avait donc fait comme sa sœur et avait rejoint les agents de traque. Il fut surpris de me voir. Il écarquilla ses yeux. Dégoût remarqua ce dernier et s'exclama tout en posant deux grandes mallettes sur le bureau :

— Eh bien, qu'est-ce qui t'arrive mon grand ? Pourquoi cette réaction ? D'ailleurs rappelle-moi ton émotion ?

— Drôle, je m'appelle Drôle et je suis le neveu d'Épaté. Je me demandais ce qu'avait son visage. Je ne la reconnais pas. Anxieuse n'est pas comme d'habitude.

— Tu la connais ?

— Je la connaissais, oui.

— Tu fais bien de parler d'elle au passé car elle s'appelle désormais Écœurée.

— Mais comment ça ?

— Tu sais ce qu'il y a à l'intérieur de ces mallettes ? Lança Dégoût en pointant du doigt les mallettes.

— Non, m'sieur.

— Il y a le futur. la paix, le résultat de beaucoup d'heures de travail.

Dégoût ouvrit l'une des mallettes qui contenait des dizaines de sérums. En lui montrant, Drôle lança sous l'incompréhension :

— Et alors, je ne vois pas où est le rapport avec l'expression inhabituelle d'Anxieuse. C'est comme si elle ressentait du...

— Du dégoût, c'est bien ça ? Affirma Dégoût, le regard fixé vers Drôle.

Drôle hocha la tête en guise de réponse. Épaté reprit la conversation :

— Nous avons injecté le sérum sur Anxieuse, nous avions prévu de le faire sur les changements d'émotions mais une petite fouineuse a remis en question notre plan. Du coup, il nous fallait un cobaye et nous l'avons trouvé, s'exclama Épaté en pointant son regard vers moi.

— Mais nous devions arrêter les changements d'émotions, pas les obliger à leur faire ressentir une émotion qui n'est pas la leur.

— Épaté, tu veux bien expliquer à ton neveu. Cela m'évitera de me répéter, grommela Dégoût, la main sur le front.

— Drôle ? As-tu vu à quoi ressemble Feelings à l'heure où l'on parle ?

— Oui et ?

— Et bien quelle est l'émotion qui règne ?

— La peur ?

— Tout à fait ! Cette émotion est désagréable pas vrai ?

— Certes, mais c'est une émotion tout de même, vous ne voulez pas l'interdire ? Si ?

— Nous allons pas l'interdire mais l'éradiquer. Les habitants de Feelings ressentiront bientôt du dégoût envers la peur. Ils seront tous écœurés de cette émotion qui apporte que la destruction et le chaos. Mais pour ceux qui ne ressentiront pas du dégoût envers la peur, on leur infligera ce petit sérum que l'on mettra dans les armes à la place des décharges électriques.

— Mais ce n'est pas ce qu'on doit faire. C'est de la folie ! Vous êtes allés trop loin ! J'en toucherai deux mots à mes parents ! Pourquoi avoir fait ça à Anxieuse ?!

— Elle se mêlait un peu trop de tout et si tu fais de même, tu auras le même résultat. Sois, tu opères et tu te tais, soit tu finis comme elle, menaça Dégoût en s'approchant de Drôle.

Drôle recula d'un pas tout en m'adressant un regard désolé. Il se fit sortir de la pièce par les agents de traque présents. Je fus étonnée de la réaction de Drôle sachant qu'il avait été assez fourbe avec moi. Ressentait-il de l'inquiétude me concernant ? Je ne savais pas à quoi il jouait. Il avait rejoint les manigances de Dégoût et Épaté. Il était plus fourbe que sa sœur. Dégoût ouvrit les mallettes en s'adressant à des agents de traques :

— Je veux que ces sérums soient intégrés dans les armes, à la place des décharges électriques. Ce sera plus facile pour les injecter, que cela soit fait dès maintenant.

Les agents acquiescèrent tout en prenant les mallettes. Dégoût posa ses mains écœurantes sur mes joues pâles tout en me chuchotant :

— C'est dommage que tu ne puisses pas assister à ce si beau spectacle Anxieuse.

Dégoût fit un geste de la main afin qu'un des agents restant dans la pièce, me ramène à nouveau dans ma cellule. L'agent m'attrapa le bras tout en s'avançant vers la sortie. En regagnant ma cellule, l'agent me força à m'asseoir sur le lit et referma la porte derrière lui puis fit demi-tour. Soudain, j'aperçus Drôle m'observer derrière la vitre de la cellule, ce dernier appuya sur la poignée de porte de la cellule et intégra celle-ci. Drôle s'avança en s'installant sur le bout du lit. Il avait le même regard désolé qu'il avait un peu plus tôt. Il me murmura :

— Que t'ont-ils fait Anxieuse ? Je ne sais pas si tu m'entends mais je suis sincèrement désolé pour tout ce qui t'est arrivé et pour tout ce que moi ou ma sœur t'avons fait. Tu avais raison sur le fait de changer d'émotion, j'aurais dû t'écouter. Je te promets que je trouverai une solution pour arrêter ce cirque et retrouver celle que tu étais et...

Soudain un des agents surprit Drôle à mon chevet, il se mit à hurler à son égard :

— Eh toi ! Qu'es-tu fais avec elle ?!

— Rien, je voulais voir de plus près le travail de Dégoût.

— C'est bon, tu l'as assez vu comme ça ! Allez dehors ! Ordonna l'agent.

Drôle se leva et referma la porte derrière lui. Il baissa alors le regard vers le sol et quitta la grande salle. Je ne savais pas si oui ou non, je devais accepter les excuses de Drôle. Pour moi, il était autant fautif que sa sœur. Toutefois, une part de bien était en lui. J'espérais qu'il tienne promesse et qu'il essaierait de stopper Dégoût. Mon seul souhait était pour la ville. Cela m'importait peu que je reste dans cet état, tant que Feelings retrouve le calme et la sérénité d'autrefois. J'avais toujours été invisible aux yeux de tous. Cela ne changerait pas pour moi. Haine m'aurait sans doute jeté un regard des plus noirs à ces propos, mais au moins, il aurait pu être libre. Il n'aurait plus à se traîner le boulet que je suis, un boulet plein de stress qui ne cesse de s'inquiéter. Il pourra enfin vivre ce qu'il a toujours rêvé de réaliser. Après ce qu'il a vécu, il méritait qu'on le laisse partir où il souhaitait à la conquête de nouveaux souvenirs. Même si ça voulait dire qu'on ne se reverrait plus. Parfois, il faut laisser partir les personnes qu'on aime...

PDV de Haine :

L'équipe s'était réveillée bien avant que le soleil n'ait montré le bout de son nez. En rechargeant les décharges électriques des armes, Rage m'annonça :

— Haine, il est temps.

— Très bien, je viens de finir les recharges.

Rage me fit un sourire en passant une main dans mes cheveux. Je détestai qu'elle agisse ainsi surtout pour défaire ma coupe si bien structurée. Je tenais à mon image malgré ce temps de guerre. Rage s'avança vers la portière d'un des fourgons afin de monter à bord. Brave s'avança vers moi en compagnie de mon géniteur. Il s'exclama alors :

— Furieux va ouvrir le bal. C'est lui qui nous fera rentrer et ensuite, on trouvera une entrée pour intégrer le centre.

Tout en écoutant le discours du blondinet, mon regard passa telle une balle de ping-pong dans les différents camps qu'importent les propos de Brave. Mon père ne méritait aucune réaction de ma part. Dès que Brave finit de parler, je traçai dans l'espace qui s'était creusé entre eux afin de rejoindre l'un des fourgons. En montant au côté conducteur, Brave ouvrit la portière passagère, en m'informant :

— Mec, le côté conducteur, c'est Furieux qui va le prendre.

— Tu es sérieux ? Pourquoi tu me l'as pas dit ?!

— Justement, je comptais te le dire mais tu es parti avant.

— Il est hors de question que je monte dans le même fourgon que lui !

— Libre à toi, d'aller ailleurs Haine.

Je penchais alors ma tête vers les deux autres fourgons où j'aperçus Curieux monté à bord du sien. Il capta mon regard et me fit un geste de la main que j'ignorai volontairement. Quant à l'autre véhicule, il s'agissait de Joviale dont je n'avais rien contre elle mais me coltiner Protecteur était un réel supplice en m'adressant à nouveau à Brave. Je lui répondis :

— Finalement, je vais rester dans ce fourgon. Ce n'est pas mieux dans les autres mais il est hors de question que je m'installe à côté de lui.

— Pas de soucis. Je me mettrais sur le siège du milieu.

J'ouvris la portière du côté passager et m'y installai. Brave fit le tour du véhicule pour s'installer sur le siège du milieu et enfin Furieux rentra au côté conducteur. Ce dernier essaya de capter mon regard, chose que j'évitais à tout prix, mon père démarra le fourgon tout en faisant marche arrière. Une fois que l'on eut quitté la forêt, on reprit la route afin d'atteindre le centre. Le soleil venait tout juste de rejoindre sa place dans le ciel, tandis que nous arrivions devant l'entrée du centre. En baissant le regard vers le sol, tenant mon arme à décharge électrique contre moi, mon père baissa alors sa vitre dans le but de s'exclamer aux agents présents devant le portail du centre :

— Bonjour, il faut que je rentre. Veuillez m'ouvrir.

— On attendait pas de la visite d'un des membres aujourd'hui. Quel est le motif de votre venue ?

— Vu ce qu'il s'est passé au centre dernièrement, ça nous a été remonté à la mairie. On a donc décidé d'envoyer des renforts pour pallier les imprévus.

— Peut-être, mais on n'a pas été avertis. Je ne peux pas vous laisser rentrer.

— Vous savez à qui vous parlez là ? Je suis Furieux, le représentant de la famille de la colère. Si je le veux, en un claquement de doigt, je peux vous faire perdre votre poste et vous bannir de la ville, vous et votre famille.

— Je ne veux pas de problème. Allez-y, Furieux.

L'agent fit un signe de main à son collègue qui ouvrit le portail afin de nous laisser rentrer dans le centre. Furieux gara son fourgon sur l'emplacement réservé aux fourgons d'agents. Pendant un léger instant, des flash-back m'apparurent de notre première entrée dans ce centre en compagnie d'Anxieuse. Brave me sortit de ces souvenirs en me tapotant sur le bras, il s'exclamait :

— Haine, tu viens ?!

— Oui, j'arrive, je pensais juste à...

— Anxieuse ? Ne t'en fais pas, on va la sauver, lança Brave en me tendant son poing vers moi.

Je collai alors mon poing contre le sien. En sortant sur le parking du centre, j'aperçus ainsi le groupe suivre à la trace Furieux. Je me rangeai ainsi aux côtés du groupe tout en marchant derrière mon géniteur qui s'avança vers l'entrée du centre. Furieux accéda à l'entrée. En rentrant dedans, je bouillonnai d'envie de me battre avec tous ces agents, de les éliminer un par un. Un homme en costard assez chic se présenta face à mon père, le sourire aux oreilles. Il s'exclama à vive voix :

— Furieux ! Quel plaisir de vous voir ici ! Quel est le motif de votre visite accompagné de tous ces agents ?

— J'ai été mis au courant de ce qu'il s'est passé, apparemment des jeunes seraient rentrés dans le centre pour délivrer les changements ?

— C'est bien ça, mais rassurez-vous, on contrôle la situation.

— Je m'en doute mais je viens voir ça de plus près si vous le permettez.

— Vous savez, il n'y avait pas de quoi vous déplacer. J'aurais pu vous envoyer un petit mail.

— Épaté, vous ne voudriez pas voir tous les côtés de ma colère, n'est-ce pas ?

— Non, je l'avoue. Je vais appeler Dégoût, il est ici également. Il pourra s'entretenir avec vous. Venez, nous allons le retrouver.

Épaté s'avança alors vers une porte qui menait directement à la salle où nous étions avec Anxieuse. La salle dans laquelle étaient enfermées les personnes que nous avions toutes délivrées. Furieux contempla toutes ces cellules en fronçant les sourcils. J'aperçus une nouvelle émotion figurer sur le visage de mon père. C'est comme s'il ne croyait pas ce qu'il était en train de voir. En apercevant les cellules, Furieux lança à Épaté :

— Rassurez-moi, ce ne sont pas dans ces cellules que vous mettiez les changements d'émotions ? Pas vrai Épaté ?

— Furieux, comment vous dire ça de façon courtoise ? Si, c'est ici que résidaient les changements. Après tout, ce n'était que des intrus, des anomalies du système. Nous allions tout de même pas leur fournir des chambres et des thérapies.

— Il n'était pas question de cellules ! Ce sont des pratiques barbares !

Épaté fit un signe de main à des agents qui se trouvaient dans le coin, afin qu'ils s'en prennent à Furieux. Ces derniers s'approchèrent tandis que nous décidions d'attaquer. Épaté sous l'incompréhension, s'exclama à travers les jets de décharges électriques en direction de mon géniteur :

— Je vois que vous êtes venu avec votre groupe d'agents personnels !

— Il faut mettre un terme à cela Épaté !

— Au contraire Furieux. Cela ne fait que de commencer !

Épaté s'en alla au pas de course tandis que mon père tenta de le rattraper. Vu la lenteur de mon géniteur, je décidai alors de m'en charger et de courir vers Épaté qui tenta de s'enfuir. Ce dernier avait emprunté des escaliers. Il était à présent en train de chercher sa carte d'accès afin d'ouvrir une porte. En cherchant dans le fond de ses poches, je le rattrapai. Il sentit alors ma présence. En se retournant, il s'exclama :

— Il me semble t'avoir reconnu, tu ne serais pas le fils de Furieux ?

— Trêve de bavardages, je ne suis pas venu ici pour discuter avec un fou comme vous !

— C'est de la science, mon garçon !

— Je m'en cogne de votre science, dites-moi où est Anxieuse !

— Oh, tu es donc ici pour elle ?!

Je décidai alors de le prendre par le col de sa chemise en le plaquant contre la porte. En déglutissant, il me répondit :

— Du calme, du calme ! Relâche-moi et je te dirai tout ce que tu veux savoir sur elle.

Je décidais à ce moment-là de le relâcher violemment. Il se cogna contre le métal de la porte. Épaté se releva :

— Anxieuse n'est plus là.

— Où est-elle ?!

— Je t'ai dit ce que je savais sur Anxieuse, pas te dire où elle était ! D'ailleurs au passage, tu ressembles vraiment à ton père. Tu es même sa photocopie !

Les poings serrés, la respiration saccadés, le regard noir, en un élan, mon poing droit atterrit dans la figure d'Épaté. Ce dernier tomba raide à terre. En le regardant assommé au sol, je m'exclamai :

— Non, je ne ressemble pas à mon père. Je suis mieux que lui !

Je repartis dans le sens inverse pour aider les amis d'Anxieuse. Je tirai alors sur des dizaines d'agents. Il fallait impérativement que je fasse preuve de discernement pour voir sur qui je tirais. Nous nous battions contre des agents de traque possédant la même tenue que notre équipe. Brave tira ainsi sur les agents qui se ramenèrent en groupe de chaque côté de la salle. Rage qui était face à moi, me hurla :

— Haine ! Attention derrière toi !

Rage lança une décharge en direction d'un agent tentant de me tirer dessus. En le voyant à terre, je m'exclamai à ma sœur :

— Bravo, tu assures vraiment bien mes arrières !

— Ravie de faire équipe avec toi !

— Attention ! Sur ta gauche !

J'attrapai l'agent tentant de s'en prendre à ma sœur, je lui donnai alors un coup de pied dans l'estomac pour ensuite lui donner un coup de poing en pleine face. Ce dernier fut assommé. Rage arqua un sourcil en ma direction et me lança :

— Où tu as appris à te battre ainsi ?! J'ai réellement raté quelque chose !

— Au lycée, il y avait un cours facultatif qui s'intitulé, apprendre à te battre contre des agents de traque pour secourir ta copine, il devait sûrement pas y être à ton époque.

— Sûrement pas, non, lança ma sœur tout en tirant avec son arme.

Après un instant à tirer dans tous les sens et combattre une horde d'agents, un silence se fit entendre. La salle était remplie d'agents éparpillés au sol. En constatant l'ensemble des dégâts, Protecteur s'exclama :

— Il serait temps qu'on s'en aille ? Je ne voudrais pas être là à leur réveil !

— Tu as raison Protecteur, rétorqua Brave.

Nous continuâmes d'avancer lorsque d'un coup un agent de traque se retrouva alors devant nous, ce dernier errait devant une grande salle en faisant des allers et des retours tel un garde. Je brandis ainsi mon arme dans le but d'appuyer sur la détente. Au même moment, Joviale m'ordonna de ne pas tirer. Elle s'exclama en s'approchant de l'agent :

— Drôle ? C'est toi ?

— Joviale ? Mais que fais-tu ici ?!

— On est venus sauver Anxieuse ! Et toi, que fais-tu ici ?!

Ce clown avait rejoint les agents de traque mais pire encore, il se trouvait au même endroit qu'Anxieuse et il n'a pas tenté de l'aider. Je m'approchai alors de ce dernier en lui donnant un coup de poing en pleine face. Ce dernier, ne s'y attendant pas, tomba au sol. Brave s'exclama en fronçant ses sourcils d'incompréhension :

— Haine ! Pourquoi tu fais ça ?!

— J'ai mes raisons ! Et puis c'est un traître, lui comme sa sœur ! Dois-je te rappeler pourquoi Anxieuse a fui ?

— Il est vrai que Drôle n'a pas toujours eu le bon comportement envers Anxieuse. D'ailleurs pourquoi tu es ici ?!

— J'ai rejoint les agents de traque car ma sœur y était et il fallait que je garde un œil sur elle. Elle a été affectée au centre-ville. Et moi j'ai été affecté au centre. Je peux vous aider à sauver Anxieuse. Je sais où elle est !

Lorsqu'il se mit à énoncer l'émotion d'Anxieuse, je ne supportai pas le fait que ses lèvres aient émis l'émotion de celle que j'aime. Pris par la colère, je collai à nouveau mon poing dans son nez, ce qui le fit saigner à flots. Brave me repoussa alors en me gueulant :

— Mec ! Arrête-toi ! C'était quoi la raison de ce coup ?!

— Le premier coup, c'était pour venger Anxieuse, le deuxième est pour moi !

— Moi je dis, jamais deux sans trois, ricana Protecteur.

Le regard furieux de Brave se posa ainsi sur son ami. Drôle sortit d'une de ses poches un chiffon pour le mettre sur son visage. Il s'exclama :

— Ne t'en fais pas Brave, je le méritais amplement. Je disais donc que je peux vous venir en aide.

— Non merci, on n'a pas besoin d'un traître comme toi ! Lançai-je en sa direction.

— Haine, il sait où se trouve Anxieuse je t'en prie. Mets ta colère de côté. En plus tu lui as déjà réglé son compte, me conseilla Rage.

En le regardant, je n'avais qu'une idée, c'était de l'enfermer dans l'une de ces cellules et le laisser pourrir dedans après ce que lui et sa sœur avaient fait à Anxieuse. Drôle s'exclama en posant son regard sur l'ensemble du groupe :

— Il faut qu'on y aille dès maintenant. Je peux vous mener à Anxieuse. Je n'ai pas menti sur ça !

— Épaté m'a dit comme quoi, elle n'était plus ici, est vrai ? Questionnai-je Drôle.

— C'est une façon de parler. Elle est bien présente mais Dégoût lui a injecté un sérum qui lui a enlevé son émotion.

— Non, ce n'est pas possible ! M'exclamai-je en fronçant les sourcils en sa direction.

— Il lui a injecté un sérum afin qu'elle ressente uniquement du dégoût. Il veut que l'ensemble de Feelings soit dégoûté de l'émotion de la peur. Il a créé des dizaines d'échantillons afin de les mettre à la place des décharges électriques pour en diffuser à l'ensemble des habitants.

— Il faut l'arrêter tout de suite, affirma Brave.

Soudain plusieurs portes s'ouvrit laissant rentrer des dizaines d'agents, Brave s'exclama en ma direction :

— Va avec Drôle, va sauver Anxieuse ! Nous, on s'occupe d'eux ! Va la secourir !

J'acquiesçai en hochant la tête. Drôle se mit à courir afin de rejoindre un escalier. Je le suivis en tenant mon arme à la main. En montant les escaliers, nous atteignîmes une grande salle. Drôle me lança en se posant devant cette porte :

— Haine, je sais que tu m'en veux beaucoup mais je tiens à m'excuser encore une fois. J'ai mal agi envers Anxieuse et puis tu avais raison sur quelque chose.

— Sur quoi ?

— Elle est beaucoup plus qu'une simple émotion. On est tous plus qu'une simple émotion.

— C'est que maintenant que tu te rends compte de ça ?

— Eh bien, oui.

— Elle se trouve dedans ?

— Oui.

Drôle ouvrit la porte afin de me faire rentrer. Il y avait à l'intérieur une immense cellule avec un lit. En m'approchant, Drôle m'ouvrit la cellule. Elle était là. Celle pour qui je pouvais affronter n'importe quel danger. Anxieuse se tenait assise sur le lit, le regard froid et vide fixant la cellule. La lueur de son regard n'était pas celle que je connaissais. Il n'y avait pas cette clarté que j'aimais tant. En m'approchant d'elle, je passai alors ma main contre sa joue en murmurant :

— Anxieuse, c'est moi, c'est Haine. Je suis venu te sauver.

Soudain une voix assez forte se fit entendre :

— Elle ne peut pas te reconnaître. Essaie autant que tu veux mais à ses yeux, tu es un inconnu.

En me retournant, j'aperçus Dégoût. Ce dernier avait une arme à feu posé sur la tempe de Drôle. Puis en un geste, il décida de jeter Drôle contre le sol. Ce dernier se releva et sortit en vitesse de la salle. Dégoût m'annonça quant au départ précipité de Drôle :

— Tu devrais faire comme lui et partir tant qu'il est encore temps.

— Il est hors de question que je m'en aille ! Qu'est-ce que vous avez fait à Anxieuse !

— Ce que je devais faire. Je n'ai fait que mon travail.

— Rendez lui son état habituel !

— Sinon quoi ? N'oublie pas ce que j'ai entre les mains mon grand. Une seule balle t'emmènera dans un lieu encore inconnu de tous.

En me retournant vers Anxieuse, je m'approchai d'elle en lui tenant les mains et m'exclamai :

— Anxieuse ! Il faut qu'on s'en aille ! Viens avec moi ! Tout le monde est revenu te sauver !

— Mais qui tu es ? Lâche-moi ! Je ne te connais pas ! Lança Anxieuse en me regardant avec amertume.

— Anxieuse, c'est moi Haine. Je suis revenu pour toi. Je suis ton voisin, celui que tu aimes. Je sais que tu es là. Lève-toi, viens avec moi.

— Non, je ne viendrai pas avec toi ! Je ne te connais pas, laisse-moi tranquille ! Lança Anxieuse en me repoussant.

Dégoût pointa alors son arme vers moi en s'exclamant d'un ton confiant :

— Je te l'avais dit. Tu n'es qu'un inconnu pour elle et tu le seras toujours !

Ça ne pouvait pas être possible, je ne pouvais pas y croire, je ne pouvais pas me dire que tout était fini, qu'il n'y avait plus d'espoir. En m'agenouillant face à Anxieuse, je lui pris les mains tout en la regardant, je m'exclamai :

— Anxieuse, je sais que tu es là. Tu n'es peut-être pas là physiquement mais je sais qu'on ne pourra jamais t'enlever tes pensées. Je sais que tu m'entends. Je pose ta main sur ma poitrine pour que tu sentes les battements de mon cœur, ce cœur qui ne sert pas à grand-chose sans t'avoir à mes côtés. Tu sais, notre vie est comme un livre. Je vais bientôt terminer mon dix-neuvième chapitre et je crois que c'était le plus beau de toute ma vie. Avant de te connaître, mes chapitres précédents n'étaient que haine, douleur et malheur. J'ai rempli beaucoup trop de pages avec. Ce n'était que du noir, des ratures et des gribouillages. Puis un jour, tu es rentrée dans ma vie. Tu m'as fait comprendre que le livre de ma vie devait être tout en couleur et beau. Tu m'as fait comprendre que ce n'était pas ça la vie. En rentrant dans ma vie, tu m'as offert un nouveau départ, tu m'as montré que changer d'émotions était possible et que ce n'était pas mauvais. Durant ces derniers mois, tu m'as fait passer par toutes les émotions, la joie, la peur, la surprise... Tu m'as donné de l'espoir et des sourires. Je sais que je n'ai pas toujours été tendre avec toi, j'ai été le pire des connards avec toi. Je ne sais pas comment tu as fait pour me supporter autant de temps. J'aurais déjà abandonné à ta place. Si tu savais à quel point je m'en veux. Tu es cette personne qui a fait ressortir le meilleur de moi-même, celle qui captait mon attention à chaque fois, qu'importe les endroits. Tu es tout simplement la lumière de ma vie sombre. On est peut-être deux opposés mais à mes yeux, on est liés. Je ne me vois pas sans toi. Anxieuse, je sais que tu as toujours douté de toi, que tu penses être invisible aux yeux de tous. La plupart des personnes ne te voient pas telle que tu es, mais moi, contrairement à eux, je t'ai vue, je n'ai vu que toi. Toi, la fille qui se mêle de tout, la fille qui n'a aucune autorité pour faire sortir un étranger de sa voiture, la fille qui a fait de son voisin insolent le plus grand de ses mystères à résoudre.

— Que c'est touchant ! Tu as beau parler, elle n'agira pas, coupa Dégoût avec son rictus arrogant.

J'ignorai les mises en garde de Dégoût et repris :

— Si tu savais tout ce que je pense de toi, Anxieuse, tu es tellement magique putain. Tu n'es pas comme les autres filles ordinaires. Je ne peux pas me passer de toi. Même si je t'ai détestée un bon nombre de fois, tu n'es pas quelqu'un qu'on oublie du jour au lendemain. Tu n'es pas quelqu'un qu'on oublie tout simplement. Durant ces derniers temps, j'ai pu connaître une tout autre Anxieuse, celle qui a une folie de vivre. Ton sourire que tu balances à la gueule des gens pour leur montrer que tu vas bien alors que tu souffres tant à l'intérieur. T'as une force surhumaine et c'est ça qu'on retient de toi Anxieuse. Qu'importe tes choix, tes erreurs, c'est ta force qu'on retiendra. J'ai tant envie de continuer mes aventures avec toi. Je sais que tu m'as toujours reproché de ne pas assez me livrer. Tu m'as reproché de ne pas montrer le vrai Haine alors, je vais te dire le fond de mes pensées, j'ai envie d'être constamment avec toi Anxieuse. Je souhaite qu'on réalise tous nos rêves ensemble. Je veux pouvoir continuer à venir te secourir. Je veux qu'on continue d'écrire notre histoire ensemble, qu'importe notre émotion, ce n'est qu'une nomination. On est bien plus qu'une simple émotion. Tu l'as toujours été à mes yeux. Je veux retrouver la parano dont je suis tombé amoureux. Je t'aime Anxieuse. Je t'ai toujours aimée secrètement. Je t'aimerai toujours jusqu'à mon dernier souffle. Je ne regretterai jamais le jour où je me suis installé sur le capot de ta voiture car depuis ce jour, tu as été la plus belle rencontre de ma vie Anxieuse...

Après un long silence, le regard d'Anxieuse n'avait pas changé. Le vide était encore présent dans la lueur de son regard. Les larmes dégoulinèrent le long de mes joues. En baissant la tête, je serrai les mains d'Anxieuse du plus fort que je puisse faire contre ma poitrine. Les yeux humides, je n'avais même plus envie de ravaler mes larmes. C'était la première fois que je ressentais de la tristesse. Un nuage de mélancolie et de nostalgie avait trouvé refuge dans ma mémoire. Des dizaines de flash-back de moments passés avec Anxieuse défilèrent les uns après les autres. Je me sentais si impuissant. J'avais perdu Anxieuse. Je sentis ma gorge se nouer, mes jambes lourdes et mon corps si faible. Je sentis plusieurs présences derrière mon épaule. Sûrement l'équipe qui m'avait rejoint. Que les autres aient pu m'apercevoir dans cet état n'avait pas d'importance. Plus rien n'avait d'importance. Il était trop tard. J'étais abattu. Le grand Haine que j'étais avait perdu, tout perdu...

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