Chapitre 42
En me réveillant, Haine n'était plus dans le lit ni dans la chambre. Je quittai la pièce en prenant avec moi mon oreiller. Joviale était encore endormie, je profitai alors de me recoucher en passant inaperçue. En m'installant dans le lit, elle se réveilla légèrement. Elle étira ses bras tout en bâillant. Elle me lança :
— Tu es matinale, dis donc !
— Oui, j'ai dormi tôt hier.
— J'ai vu ça. Aujourd'hui est un jour décisif !
— Tout à fait ! Il faut qu'on aille prendre notre petit déjeuner et on va commencer à établir un plan.
— Ça me provoque de l'excitation tout ça mais également cette sensation désagréable dans l'estomac.
— De la peur Joviale, de la peur.
— Oui ça !
— Allez viens, on va déjeuner. Je ne veux pas que tu te sentes mal.
Joviale sortit la première. Je pris le temps de mettre un tee-shirt blanc, un sweat-shirt noir et un jeans bleu marine. En descendant dans la cuisine, tout le monde était déjà là. En m'approchant de la table, je pris une pomme et un verre de jus d'orange. Par la fenêtre, j'aperçus Haine revenir du lac. Il gagna la cuisine et s'exclama :
— Il faut qu'on parle du plan maintenant ! Cessons de perdre du temps. Je vous attends dans le salon !
Dans le salon, Haine s'installa contre un meuble près de la fenêtre. Rage et le reste du groupe sur le canapé blanc. Quant à moi, j'étais debout derrière le canapé en concentrant mon regard sur Haine qui s'exclama :
— Je pense qu'on a pris assez de temps comme ça. Il faut que l'on agisse vite ! Et que vous dégagiez vite de chez moi !
— On avait pas prévu de vivre ici éternellement ! rétorqua Brave en se levant d'un bond.
— Encore heureux, lança Haine en fronçant les sourcils.
Brave prit ainsi la parole :
— Bon, il faut qu'on réfléchisse à quoi faire en priorité. Vous avez des idées ?
— Il faut sauver les dizaines de personnes enfermées au centre, s'exclama Blessée.
— Oui, c'est vrai, affirma Curieux.
— Et ensuite où est-ce qu'on irait ?
— Il faut aller à la mairie, s'adresser aux membres fondateurs et leur faire comprendre que changer d'émotions est un bienfait, lançai-je.
— Je ne sais pas s'ils t'écouteront Anxieuse ! S'exclama Brave.
— Inquiet m'a dit que nos parents n'étaient pas au courant pour le livre et de ce qu'ils font à ces pauvres gens au centre. Ils font pourtant partie des membres fondateurs et ils ne savent pas les tortures qu'on inflige à ces personnes capturées.
— Oui, elle a raison. Mes parents qui font aussi partie des membres pensent que c'est un lieu de ressources et de médecine, avoua Joviale.
— Mais alors si aucun membre n'est au courant, qui est derrière tout ça ? Interrogea Blessée.
— C'est ce qu'on doit découvrir, lançai-je en direction de l'ensemble du groupe.
— Il faudrait qu'on fasse des équipes. Mais je ne sais pas comment on va faire pour rentrer au centre.
— Avec ça ! M'exclamai-je en sortant le badge d'accès que j'avais pris au centre.
Tous les regards étaient alors en ma direction. Inquiet me lança :
— Mais d'où tu tiens ça toi ?! Tu l'as volé ?
— Non, je l'ai trouvé. Il nous a permis à moi et Brave de rentrer dans cette horrible salle cachée. En sortant de celle-ci, un agent de sécurité nous a vus...
— Chance pour nous, nous avions des blouses de scientifique, me coupa Brave.
— Tout à fait. On nous a pris pour des scientifiques. Si on nous a confondus avec de vrais scientifiques une fois, ça ne peut que marcher une deuxième fois.
— Astucieux ! Lança Joviale, le sourire aux lèvres.
— Mais tu oublies un truc, tu es recherchée désormais ! Lança Haine en croisant ses bras sur son buste.
— Ce n'est qu'un léger détail. Je doute que tous les scientifiques et agents de sécurité du centre soient à ma recherche.
— Tu as eu un coup de chance. La deuxième fois ça ne marchera pas.
— Je te prouverai le contraire.
Brave s'intercala entre Haine et moi et s'exclama :
— Il faut maintenant décider qui sera avec qui. On va faire des groupes. Anxieuse, tu seras avec moi. On retourne au centre et on fait sortir ces pauvres gens. Tu es d'accord ?
— Non, lança Haine.
Tous les regards se posèrent sur mon voisin ténébreux. Haine les dévisagea un par un. Puis s'exclama en se rapprochant de Brave :
— Il est hors de question qu'elle retourne là-dedans, avec toi en plus.
— Mec, il faut qu'on fasse quelque chose et Anxieuse est la mieux placée d'entre nous pour y aller. Elle ne sera pas seule.
— Je ne veux rien savoir ! Elle n'y va pas et surtout pas avec toi.
— T'as un problème avec moi Haine ?! Dis-le, qu'on le règle toute suite ! S'exclama Brave en fixant Haine.
Rage se leva alors afin de se mettre entre Brave et Haine pour les séparer. Blessée retint Brave par le bras. En les voyant agir ainsi, je pris la parole :
— Je n'ai pas besoin que l'on décide à ma place avec qui je vais être. Je ne suis pas un morceau de viande. Je suis majeure et je sais faire des choix. Je retourne dans ce centre même s'il faut que j'y aille seule.
Haine fronça les sourcils tout en serrant ses poings. Il lâcha :
— Très bien mais je viens avec vous.
— Comme tu veux.
— Bon, pour le reste, j'avais pensé que Protecteur, tu ailles avec Joviale et Blessée. Vous irez chercher des fourgons et vous vous occuperez de faire diversion afin qu'Anxieuse, Haine et moi rentrons dans le centre.
— Ça me va.
— Je te confie ma copine, s'il te plaît prend soin d'elle le temps qu'on vous rejoigne.
— Je la protégerai comme je protégerai Joviale. Tu peux me faire confiance.
— Très bien.
— Et nous, on compte pour du beurre ? Lança Rancunière en levant sa main.
— Non, j'allais y venir. Inquiet, tu seras avec Rancunière. Vous irez en ville pour préparer le terrain. Il faut que vous réunissiez tous les membres fondateurs dans une des salles de la mairie. Il faudrait qu'on filme ce qui se passe au centre afin de leur montrer leurs pratiques barbares.
— C'est noté, on s'en chargera !
— Quant à Curieux, tu feras équipe avec Rage. Dès qu'on sortira du centre, on vous fera signe pour que vous preniez en charge ces personnes. Il faudrait que vous retourniez à Feelings avec Inquiet et Rancunière pour prendre des fourgons. On aura besoin de plusieurs camions pour mettre ces personnes dedans.
— On fait ça !
Brave remarqua alors le regard vide de plusieurs d'entre nous. Il s'exclama ensuite :
— Écoutez, je sais que ça peut paraître terrifiant. Cette sensation désagréable dans l'estomac, c'est de la peur. Oui ça fait peur, je vous comprends. Mais on peut y arriver, on peut arriver à nos fins. Si on suit le plan à la lettre, on ne peut qu'y arriver ! Ne doutez pas de vous ! Vous en êtes capable ! Il faut qu'on mette ce plan en pratique dès maintenant, allez-vous préparer, on y va !
L'ensemble de mes amis se levèrent du canapé afin d'aller se préparer. Quant à moi, je restai figée sur le plancher de la salle de séjour. Joviale s'approcha de moi tout en murmurant :
— Tout va bien Anxieuse ?
— J'ai peur qu'on n'y arrive pas.
— Brave a motivé les troupes et puis tu es en sécurité. Tu as ton meilleur ami et il y a aussi Haine qui sera toujours là pour toi. Regarde comment il s'est comporté, il t'aime et ça se voit.
— Mmh, je vais monter me préparer.
Je me dirigeai à l'étage où je comptais emprunter une veste à Rage. En gagnant la chambre, un sac était posé sur la couverture du lit. En me dirigeant vers celui-ci, j'entendis une voix me surprendre :
— Je t'ai préparé un sac avec dedans des bricoles. Je vous ai mis des barres chocolatées, un briquet, des couvertures, un taser et une boussole, lança Rage en se tenant devant moi.
— Un taser, est-ce vraiment utile ?
— Oui, je t'assure. J'espère que tu ne l'utiliseras pas mais il vaut mieux que tu l'aies en ta possession.
— Je le prends mais j'espère ne jamais l'utiliser.
— Fais bien attention à toi Anxieuse ! Promets-moi de faire attention à lui. Quand il a une idée en tête, il peut paraître très têtu.
— Ne t'en fais pas, je saurai le dissuader de ces mauvaises idées.
— J'espère qu'on arrivera à retrouver Feelings comme avant. Voire mieux qu'avant.
— J'espère et je te le promets.
Rage me prit dans ses bras. Je me redressai pour prendre une des vestes en jeans de la sœur de Haine et le sac posé sur le lit. Une fois à l'extérieur, je m'orientai vers la voiture de Haine en jetant un dernier regard vers le chalet. Brave fut le premier à sortir du chalet. Il réajusta le col de sa veste en mettant les deux branches de son sac à dos sur ses épaules. Il s'exclama tout en s'avançant vers moi :
— T'es déjà prête ?!
— Oui, il faut qu'on en finisse pour de bon.
— J'imagine que tu dois être morte de peur ?
— Totalement mais j'essaye de pas le montrer sinon je vais être dans un sale état.
— Ne t'en fais pas ! J'ai beau avoir eu ce discours envers vous mais j'ai cette crainte qu'une chose horrible se passe.
— J'espère que c'est faux. Je me dis qu'on a un bon plan et puis on a de bonnes équipes.
— Oui, c'est certain. Je doute que l'ambiance suive par contre.
— Comment ça ?
— Tu as vu comment il s'en est pris à moi ? J'espère arriver au centre en un seul morceau.
— Ne t'en fais pas. Il ne te fera rien. Je suis là et puis il fait ça parce qu'il a peur qu'il m'arrive quelque chose.
— Je comprends. J'ai moi-même peur pour Blessée.
Au même moment, Blessée sortit de la maison avec Joviale et Protecteur. Ces derniers se dirigèrent vers nous. Joviale se précipita vers moi en se jetant dans mes bras et me lança :
— C'est vraiment nul, je t'ai à peine retrouvée que je dois déjà te dire au revoir.
— Joviale, on ne se dit pas au revoir, on va se revoir très vite, je te le promets.
— Oui, mais c'est vraiment dur. Tu vas vraiment me manquer. Promets-moi de bien faire attention à toi, s'il te plaît !
— Je te le promets et puis tu sais, tu es en bonne compagnie avec Protecteur.
— C'est vrai, sois-en sûre Anxieuse. Je ferai bien attention à elle, me lança Protecteur en souriant à Joviale.
— Ça vaut aussi pour ma copine, mec !
— Ne t'en fais pas. Ce qui vaut pour l'une vaut pour l'autre.
Brave continua de discuter avec Protecteur. Tout en disant au revoir à Blessée, mon regard fut attiré par une tout autre personne. Je m'avançai jusqu'à lui. Il m'ouvrit ses bras. Je m'y réfugiai en le serrant bien fort. Il s'exclama :
— Tu vas me manquer ! Sois forte Anxieuse, on se retrouve très vite ! Fais bien attention à toi !
— C'est promis Inquiet ! Tu vas tant me manquer.
— Vous ne partez pas pour la vie ! Vous allez vous revoir ! Lança Rancunière à nos côtés.
— Merci Rancunière de gâcher les moments, s'exclama Inquiet.
— Non mais c'est vrai, vous allez vous revoir. C'est à peine si j'ai dit au revoir à Protecteur.
— J'espère qu'il ne t'arrivera rien Inquiet.
— Tout comme toi, petite sœur.
Inquiet me prit à nouveau dans ses bras tout en tournant sa tête derrière son épaule. En sortant des bras de mon frère, je jetai un coup d'œil par derrière son épaule. Curieux, Rage ainsi que Haine sortirent du chalet et se dirigèrent vers nous. Haine s'orienta vers moi, jeta un regard à Brave et s'exclama :
— On y va !
Je fis un signe de main à l'ensemble de mes amis et m'avançai en suivant Haine accompagnée de Brave. Ce dernier ouvrit la voiture, s'installa à l'intérieur. Quant à moi, je m'installai au côté passager. Brave s'installa à l'arrière de la voiture. Haine démarra. Le chemin se fit en silence lorsque Brave me lança :
— Anxieuse, tu sais où se trouve le centre ?
— Il me semble. On n'est pas très loin.
— C'est bien ce qui me semblait.
— Alors pourquoi tu poses la question ! Lança Haine en jetant un coup d'œil sur Brave à travers le rétroviseur.
Haine se figea et un épais silence envahit la voiture. Je le regardai ensuite et vis ses yeux se plisser de colère. Après un moment à traverser la forêt, les arbres s'éclaircirent et le sentier déboucha sur la route. Nous roulions en direction du centre. Quelques heures plus tard, on atteignit notre destination. Nous n'étions pas très loin de l'entrée. Haine décida alors de reculer afin de cacher sa voiture dans la forêt qui se trouvait à proximité. Nous étions à quelques mètres du centre. Haine roula pour se mettre à l'abri le temps que Protecteur, Joviale et Blessée rappliquent avec les fourgons. Après deux heures d'attente, toujours rien, aucun signe. Haine fit les vas et viens devant Brave et moi qui étions posés contre le capot de la voiture.
Brave s'exclama envers Haine:
— Haine, ils ne vont pas tarder à venir. Il faut qu'on réfléchisse à comment on fait quand on rentrera dedans.
— C'est déjà prévu ça ! Toi, tu restes à l'arrière pour réquisitionner les personnes qu'on va libérer Anxieuse et moi, ordonna Haine.
— Très bien, lança Brave en se levant pour aller marcher pas très loin.
J'orientai mon regard vers Haine qui ne capta pas un seul de mes regards. Je décidai alors de me lever pour marcher un peu. Je jetai un regard au loin en direction du bâtiment du centre qui était visible de notre position. En me retournant, j'aperçus Haine se tenir contre un arbre. Je m'avançais ainsi jusqu'à lui en m'exclamant :
— Tu comptes me parler un jour ?
— Ce n'est pas prévu mais malheureusement je suis obligé.
— Rien ne t'oblige à rester.
— Très bien, je m'en vais. Reste avec ton blondinet, vous ne tiendrez même pas deux heures sans moi. C'est vrai ça ! Pourquoi je persiste avec une parano et un traître ? Tu as raison, je m'en vais !
Haine s'avança vers la voiture. Je tentai de le rattraper, Haine s'installa au côté conducteur et mit le contact. Je me tenais alors debout devant sa voiture. Haine posa ses mains sur le volant. Brave, entendant notre conflit, me rejoignit. Haine démarra jusqu'à moi. Brave m'ordonna de partir. Je ne l'écoutai pas et restai ancrée dans le sol quitte à me faire renverser. Je savais qu'il ne ferait rien. Haine avança rapidement jusqu'à ma portée lorsque soudain mes jambes arrivèrent au niveau du pare-choc de sa voiture. Haine sortit de sa voiture pour me rejoindre. Brave qui était sur le côté de la voiture regarda la scène avec un air soucieux. Haine, le regard noir, la respiration saccadée, les poings serrés me dévisagea. En le regardant, je m'exprimai alors :
— Oui, tu peux m'en vouloir de t'avoir menti ou trahi ! Oui, tu peux être aussi furax que tu le souhaites ! Tu peux me détester plus qu'aucune personne m'a jamais détestée dans cette ville ! Oui, tu peux me hurler dessus jusqu'à te briser la voix ! Mais sache que je suis désolée ! Tellement désolée. C'est le mieux que je puisse faire, mais s'il te plaît, ne pars pas !
Haine plongea dans mon regard, baissa la tête et fit demi-tour. Il s'en alla vers le fond de la forêt et s'installa sur une pierre se trouvant au milieu. Brave se rapprocha de moi tout en me lançant :
— Ça va ?
— Oui, je suis un peu fatiguée. Je vais m'asseoir un peu.
— Il faut que tu manges. J'ai pris des pommes dans mon sac.
— Tu as pensé à tout décidément ! Souriai-je à mon ami.
— Tu penses que je devrais lui en donner une ?
— À toi de voir !
— J'y vais à mes risques et périls.
Brave me tendit une pomme et en saisit une dans sa main pour la donner à Haine. Il lui jeta un regard puis attrapa la pomme de la main de Brave d'un coup sec et l'essuya sur sa cuisse. Brave fit demi-tour, le sourire aux lèvres. En m'atteignant, il me chuchota alors :
— Mission réussie !
— Bravo ! C'est une première pour toi !
— J'espère que Protecteur et les filles n'ont pas eu de soucis à trouver des fourgons. En attendant qu'ils viennent, je vais préparer le campement. Je crains qu'on passe la nuit ici.
— Je vais t'aider.
L'après-midi toucha à sa fin et nous avions préparé un campement. Des bâtons étaient réunis pour allumer un feu. Brave s'était occupé d'enlever tout un tas de feuilles trouvées au sol afin de poser une couverture et un oreiller portatif. Haine malgré son mécontentement avait tout de même mis la main à la pâte. Le soleil était en train de se coucher. Aucune nouvelle de l'équipe de Joviale. Aucun fourgon en vue. Haine décida alors d'allumer le feu avec le briquet fourni par Rage dans mon sac. Je m'installai au sol. Haine s'installa en face de moi, le regard posé sur les flammes. Brave s'installa près de moi. Il lança :
— Vous pensez que nos parents s'inquiètent pour nous ?
— Je doute, lançai-je en direction de Brave.
— Et toi Haine ? Interrogea Brave.
— Je pense que mes parents ne connaissent même pas le mot inquiétude.
— J'ai l'impression qu'ils continuent tous leur vie comme si de rien n'était, avouai-je en baissant le regard vers le crépitement du feu en contact du bois.
— Mon père a beau faire partie de la police, il a beau être le commissaire, il ne s'est jamais vraiment intéressé à moi. Il y en a que pour son boulot. Quand on est parti, j'ai prétexté à mon père que je sortais faire une sortie avec des amis. C'est à peine s'il m'a souhaité une bonne journée. Alors, je doute que notre disparition leur fasse quelque chose, soupira Brave.
— Brave, tu ne dois pas t'en faire. Ils comprendront un jour, c'est sûr. On va tout faire pour leur faire comprendre.
— J'espère aussi qu'on arrivera à sortir ces pauvres personnes intactes de cet endroit.
— On les sortira tous, j'en suis certaine, quitte à risquer ma vie.
— C'est mort, je préfère que tu laisses ces gens mourir que de mettre ta vie en danger, coupa Haine.
— Pardon ?!
— T'as très bien entendu.
— Haine, il faut qu'on sauve ces personnes, coûte que coûte. Si c'était toi qui étais enfermé, j'aurais tout fait pour te sortir de ce lieu atroce.
— Et fort heureusement, je ne suis pas dans ce lieu ! Tu ne les connais pas et tu agis comme si c'était quelqu'un de ta famille ! Il est hors de question, tu m'entends !
Je fis un bond tout en m'adressant à Haine. Je m'exclamai alors :
— Tu peux essayer de me surprotéger autant que tu souhaites, je ferais ce que j'ai à faire, avec ou sans toi. J'irai les sauver même si je dois moi-même être enfermée. C'est mon devoir envers moi-même. J'ai envie de les aider, j'ai envie de mettre fin à cet enfer. Soit tu es avec moi, soit tu es contre moi.
— Je te le redis ! Tu ne te mettras pas en danger pour des personnes que tu connais même pas ! S'exclama Haine en se levant.
— J'ai pris ma décision ! Sur ce, je vais me coucher, je suis fatiguée de tout ça ! J'ai besoin de dormir.
Je décidai alors de sortir du sac une couverture que je pris en me dirigeant vers l'arrière de la voiture. Je l'installai sur le long des sièges, rentrai dans la voiture et refermai derrière moi. Laissant Haine face à Brave, je comptais bien faire ce que j'avais en tête. Je savais que le danger était grand. Mais il ne devait pas m'interdire de telles choses. Même Inquiet qui a un tempérament à sans cesse s'inquiéter, n'aurait pas agi ainsi.
Je posais ma tête contre le siège en essayant de trouver une position confortable. Soudain la portière s'ouvrit laissant entrer un Haine silencieux. Il essaya tant bien que mal de s'allonger près de moi. Je fis mine de dormir afin de ne pas croiser son regard. Il passa sa main dans ma courte chevelure et me murmura :
— Je sais que tu ne dors pas. C'est impossible que tu puisses trouver le sommeil avec cette situation.
— Je suis partie pour t'éviter toi et tes interdictions !
— Je m'en doute ! Je sais que je suis personne pour t'interdire quoi que ce soit mais tu sais très bien pourquoi j'agis ainsi.
— Écoute ! Si tu es ici pour parler à nouveau de ça, quitte la voiture et retourne avec Brave !
— Ton blondinet s'est endormi.
— Tant mieux ! Je vais en faire autant !
— Si je fais tout ça, c'est pour te protéger. J'ai failli te perdre une fois, je ne veux pas que ça recommence.
— Au lieu de me priver et de m'interdire, cherche à comprendre pourquoi !
— Je suis désolé de ne pas savoir comment m'y prendre ! Quand il s'agit de toi, j'essaye de faire au mieux.
Je me redressai alors afin d'être face à lui sur la banquette arrière. Je pris la main de Haine et lui demandai de me suivre dehors. En sortant de la voiture, je m'installai sur le capot, ce qu'il fit également. Tout doucement, on s'allongea l'un près de l'autre sur le pare-brise de la voiture. Je posai ma tête sur sa poitrine et levai le regard vers le ciel étoilé. J'étais émerveillée par ce spectacle naturel. Haine me chuchota :
— C'est quoi que tu trouves joli ? Ce ne sont que des points blancs qui brillent dans un ciel noir.
— J'ai toujours aimé les étoiles. Quand j'étais plus jeune, je quittais ma chambre en pleine nuit pour m'allonger dans mon jardin et contempler les étoiles. Je me disais qu'un jour viendra et je brillerai comme elles.
— Avec tout ce qu'on vit, ces embûches qu'on traverse, je ne sais pas si on arrivera à briller ainsi.
— Haine, les étoiles ne peuvent pas briller sans noirceur.
— C'est vrai, je n'avais jamais vraiment pensé à ça, lança Haine tout en me souriant légèrement.
— C'est si beau quand tu souris ! Pourquoi tu montres à tout le monde une facette de toi qui n'est pas celle que tu aimerais montrer.
— Parce que j'ai peur. J'ai constamment peur que les gens autour profitent que je sois vulnérable pour jouer avec moi. Je préfère leur montrer la facette qu'ils ont toujours connue plutôt que celle que j'aimerais avoir.
— Et pourquoi avec moi, tu me montres celle que tu souhaites ?
— Tu sais très bien pourquoi. Tu veux juste que je te le dise.
— Pas faux.
Haine détourna le regard vers les grands arbres près de la voiture. Je me redressai et passai une main sur sa joue. Il me regarda. Je le questionnai :
— Qu'y a-t-il Haine ?
— J'ai peur pour demain. Je ne sais pas comment cette situation va finir. J'ai peur qu'on soit séparé. J'ai peur de ne plus t'avoir à mes côtés.
— Haine, je suis morte de peur mais t'avoir à mes côtés me rassure. Je sais qu'il ne m'arrivera jamais rien avec toi.
— Je te le promets, chuchota Haine en m'embrassant sur le front.
— Haine ?
— Oui ?
— Tu feras quoi quand toute cette histoire sera terminée. Lorsqu'on obtiendra tous nos diplômes, tu iras à l'université ? Tu travailleras ?
— J'ai toujours voulu partir au-delà ces montagnes, voir des paysages, pouvoir faire le tour de la planète et toi ?
— Je ne sais pas, j'aimerais écrire un livre, être auteure. Pouvoir laisser une trace de moi, de mes écrits afin que d'autres personnes puissent me lire et se reconnaître à l'intérieur. Et d'un autre côté, j'aimerais pouvoir aider et écouter les personnes qui ont besoin de parler. Surtout quand on mettra fin à cette loi, beaucoup de gens auront besoin d'aide pour vivre en ressentant l'émotion de leurs choix.
— Pourquoi tu ne fais pas les deux ? Tu écrirais et à côté, tu serais psychologue. Comme ça, dès que tu seras en manque d'inspiration, tes patients pourront t'aider à y voir plus clair, tu ne trouves pas ?
— Je n'avais jamais vu ça sous cet angle. Je me dis que c'est beaucoup de travail.
— Je sais que tu en es capable. Rien ne te fait peur désormais. J'espère juste que ton livre ne sera pas ennuyeux comme certains livres de la bibliothèque.
— Non, il ne sera pas ennuyeux. C'est promis, lançai-je en souriant à mon tour à mon voisin ténébreux.
Haine détourna le regard vers le feu de camp qui venait de s'éteindre. Il me chuchota :
— Tu devrais te reposer. Demain est une journée importante. Je vais monter la garde.
— Et toi, il faut que tu dormes aussi.
— Ne t'en fais pas, ça va aller. Ferme les yeux et laisse-toi aller.
Avant de fermer les yeux, je me penchai pour poser un dernier baiser sur ses lèvres. Tenant son visage de mes mains, je prolongeai ce baiser. J'avais tant besoin de cet instant entre nous. Haine répondit à ce baiser. Je posai ensuite délicatement ma tête sur sa poitrine. En fermant les yeux, Haine passa alors sa main dans ma chevelure brune en faisant des allées et venues. Il posa ensuite ses lèvres sur mon front. Comme par réflexe, je frissonnai face à cette marque d'affection. Haine m'avait à ce jour montré deux facettes de sa personne : Celle qui pouvait parfois me faire peur et celle qui me rassurait et que j'aimais tant. Toutefois, je m'inquiétais des peurs et des angoisses qu'il pouvait ressentir. Je me demandais souvent s'il ressentait les mêmes que les miennes. Je ne savais pas pourquoi mais j'avais la sensation que c'était la dernière fois que je pouvais être aussi proche de Haine. Le vent frais caressa mes joues. Je parvins à trouver le sommeil. Je sentis les battements de cœur de Haine, sa respiration. Soudain, je sentis Haine se pencher vers moi. Sûrement pensait-il que je dormais ? Il murmura alors :
— Quoi qu'il nous arrive, je t'aime Anxieuse et je t'aimerai toujours. Je sais que tu m'entends. Et même si tu dors, je sais que tu t'en souviendras.
Je savais que tu t'en souviendrais. Je t'aime aussi Haine, pensai-je.
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