Chapitre 35




Le car atteignit le parking du lycée après une bonne heure à rouler. En descendant du bus, j'aperçus des troupes d'élèves, tous vêtus de gilets pare-balles noirs, de la même façon que les agents de police postés devant le lycée. Le père de Brave se trouvait sur les lieux. Il était en pleine discussion avec la proviseure devant l'entrée de l'établissement. En attendant que Brave descende du car, j'aperçus la proviseure se diriger vers nous en présence du commissaire Courage. Cette dernière arriva pour nous informer :

— Chers élèves, j'espère que la sortie vous a plu et vous a permis d'en savoir plus sur le centre. Je remercie votre enseignante Épanouie de vous y avoir menés. Je tiens à vous informer qu'à partir d'aujourd'hui du changement est prévu au lycée. Vous avez pu remarquer des affiches un peu partout dans les couloirs. Sachez que ce sont des recrutements facultatifs pour celles et ceux qui souhaiteraient s'engager auprès de nos forces de l'ordre afin de garantir la sécurité de notre si belle ville et la protéger du danger que sont les changements d'émotions. Le commissaire s'est déplacé aujourd'hui pour former ces personnes volontaires. J'aimerais savoir qui d'entre vous s'y est inscrit ?

Quelques élèves levèrent alors la main. La proviseure les invita à la rejoindre pour commencer leur journée de formation lorsque soudain, le père de Brave appela son fils afin qu'il le rejoigne. Mon regard était porté sur mon ami. La classe regarda avec insistance Brave qui était indécis face à l'appel de son père. En le regardant, il serra des poings en s'avançant vers ce dernier. Son géniteur lui fit une tape sur l'épaule tout en lui souriant. Je jetai à ce moment-là un dernier regard vers Brave. Il acquiesça de la tête et s'en alla en suivant son père. Feelings était en train de filer tout droit dans une guerre. Je jetai ainsi un regard vers Joviale qui ressentait de l'incompréhension.

Une heure après, le car s'en était allé, les élèves de la classe avaient repris le chemin des cours, quant à moi, je m'étais installé sur les gradins du stade. C'était un de mes endroits favoris pour rester un peu seule, moi et mes pensées, c'était un endroit que j'appréciais, car ce fut le premier lieu où j'ai aperçu Haine pour la première fois. Je me souviens encore de son allure à travers le portail, cette façon d'occuper toute la place, son signe de main m'indiquant mes lacets défaits. Je ne le connaissais pas encore et pourtant il m'avait déjà porté secours avant même que je sache son émotion. Tout en pensant à lui, je me fis sortir de mes pensées par Joviale qui s'avançait vers moi, elle me lança alors :

— Donc c'est ici que tu te caches ? Que fais-tu ici toute seule ? Tu sais qu'on a cours de mathématiques ?

— Je ne peux pas aller en cours ! Pas après ce que j'ai vu aujourd'hui. C'est trop pour moi.

— Tu veux m'en parler ?

— Je pense que tu ferais mieux de t'asseoir.

— Dis-moi tout, demanda Joviale.

— Avec Brave, on s'est éloignés du groupe afin de trouver des réponses à nos questions. La séance de relaxation nous paraissait fausse. Épaté nous a montré seulement ce qu'il voulait. J'ai trouvé un badge d'une scientifique qui nous a permis de trouver une salle cachée. On a trouvé un long couloir sombre, assez étroit qui nous a menés tout droit en enfer. Brave et moi avons ressenti de la peur comme je n'en ai jamais ressentie. C'était effroyable, horrible. Des centaines de personnes innocentes, enfermées dans des cellules. À l'intérieur se trouvaient tous types de personnes confondues. Des adolescents comme nous, des personnes âgées, des adultes, tous apeurés, en larmes. Il y avait des gardes avec des chiens en muselière et des scientifiques. Pendant une seconde, je me suis imaginée dans l'une de ces cellules. Qu'est-ce qu'ils font vraiment avec ces personnes qui sont juste des humains. Si tu savais, j'en tremble encore, m'exprimai-je en remuant la jambe prise par l'angoisse.

— Je n'en reviens pas, ça me semble si faux après ce que le chef de service nous a montré dans cette yourte. Tu as des preuves de ce que tu as vu ?

— J'ai voulu prendre une photo mais Protecteur a appelé Brave. Il n'avait pas coupé la sonnerie qui a été entendue. On s'est enfuis. Épaté a été mis au courant ensuite, d'où l'excuse de la panne.

— C'était donc vous la panne du système ?

— Oui, tout à fait. La professeure de gestion d'émotion nous a ensuite informés que nous étions sur aucune caméra ce qui est vraiment louche, vu l'endroit.

— Peut-être qu'il y a quelqu'un qui a brouillé les pistes ou hacké le système.

— Qui ça pourrait être ?

— Aucune idée ! Je dis ça comme ça ! Je doute que tu aies un proche parmi la sécurité du centre.

— Ce ne serait pas le lieu idéal pour se faire des amis, en effet. Quoi qu'il en soit, je compte bien retourner dans ce centre pour libérer ces pauvres personnes.

— Mais comment tu vas t'y prendre ? C'est trop dangereux ! Il y a une centaine d'agents de sécurité. Et même au lycée, ils forment d'autres personnes en renfort. D'ailleurs, je ne sais pas quoi penser de Brave qui vient de les rejoindre.

— Brave est avec nous. Il est notre taupe. Il les a rejoint car il ne veut pas s'opposer à son père. Il aimerait mais il n'y arrive pas. Mais savoir qu'il est parmi ces agents de force de l'ordre me rassure un peu. Savoir qu'il est de notre côté est une bonne chose pour nous.

— J'ai une question. En découvrant ces personnes enfermées, tu as pensé peut-être que Haine serait enfermé là-bas ?

— J'y ai pensé, je l'avoue mais Haine n'a pas changé d'émotions. Il a toujours été ce crétin colérique malgré qu'il m'ait défendue. Il a su garder son émotion comme un bouclier même s'il était différent avec moi.

—Donc tu reconnais qu'il a changé d'émotions mais uniquement avec toi. Je suis si contente qu'il n'y soit pas. J'espère vraiment qu'il reviendra. Tu ne peux pas tomber amoureuse et pas commencer cette histoire avec lui.

— Oui, tu as tout compris. Tu sais, ce n'est pas ma priorité du moment de construire une relation. Je pense d'abord qu'il faut mettre un terme à ce centre et cette stupide loi.

— Je confirme. D'ailleurs, c'est quand que tu vois ton groupe secret ?

— Je comptais envoyer un message à Curieux mais je n'ai plus de batterie.

— Je peux te dépanner. J'ai une batterie de secours sur moi.

— Mille merci Joviale, tu me sauves !

En prenant la batterie de secours de ma meilleure amie, je me rendis compte que le numéro de Curieux m'avait appelé une dizaine de fois. Il répondit à mon message dans la seconde même :

" Enfin, tu réponds ! Tu as perdu ton portable ? Je n'ai cessé de te joindre ! Il faut que l'on se voit au plus vite ! Rendez-vous à quinze heures, où tu sais ".

En jetant un coup d'œil sur l'heure de mon portable, je me rendis compte qu'il était quinze heure et quart. Je décidai alors d'aller au point de rendez-vous en compagnie de Joviale. En quittant le stade pour atteindre le bâtiment principal du lycée, le regard de ma meilleure amie fut attiré par Protecteur. Il était vêtu tel un agent de force de l'ordre. En avançant au même rythme que Joviale, il s'exclama :

— Tu me fuis Joviale ?!

— Non mais j'ai des cours à suivre. Que veux tu Protecteur ? Je suis assez pressée.

— Je me demandais si ça te dit qu'on traîne à nouveau ensemble ?

— Protecteur, elle n'a pas le temps de te répondre ! Et puis même si elle avait le temps, je doute qu'elle accepte de traîner avec un sale type de ton genre ! Lançai-je à Protecteur.

— Je ne t'ai pas sonnée la timbrée. Joviale a une bouche ! C'est à elle que je parle ! rétorqua Protecteur, le visage fermé et les poings serrés.

— Joviale est attendue en cours ! Retourne en formation pour arrêter les changements d'émotions ! Tu devrais retourner à ton poste ! Va protéger la ville ! lançai-je en prenant la main de ma meilleure amie.

En avançant vers l'entrée du bâtiment, Protecteur me jeta alors un regard noir. Il resta figé lorsque brusquement, il me lança d'une voix assez forte :

— Tu as raison ! Je vais retourner à mon poste afin de protéger la ville des changements d'émotions comme toi, ricana Protecteur sous le ton de l'insolence.

En entendant ces propos, Joviale me lâcha alors la main dans le but de faire demi-tour. Elle était à quelques centimètres de Protecteur et colla furtivement sa main sur la joue gauche de Protecteur. Elle était en colère. Je jetais un regard autour de nous afin ne pas se faire attraper par les agents de police qui rodaient dans les parages. Protecteur fronça alors les sourcils en restant bouche bée de l'acte commis par Joviale. Elle s'exclama :

— Regarde comment j'agis face à de tels propos de ta part ! Comment oses-tu dire ça à ma meilleure amie ?! Tu es censée nous protéger ! Regarde comment tu te comportes ! Qu'est-ce que tu attends pour m'attraper ?! Vas-y ! Arrête-moi ! Fais ton travail ! Lança Joviale tout en poussant Protecteur de ses mains.

— Je ne peux pas, murmura Protecteur tout en se rapprochant de Joviale.

— Tu n'as que de la gueule ! Des paroles et aucun acte ! Je devrais peut-être demander à ta copine Gaffe !

— Cesse de dire de telles choses ! Retournez en cours et remets de la joie sur ton visage, tu es nettement mieux comme ça ! Répondit Protecteur en s'éloignant de Joviale.

Je fis demi-tour afin de rejoindre Joviale en restant en état de choc. J'orientai mon regard vers ma meilleure amie qui avait le regard figé vers son ex. Tout en passant ma main sur sa joue, je m'exclamai avec douceur :

— Laisse-moi deviner, tu as envie de le retenir ?

— Je ne sais pas. Je n'ai jamais réagi ainsi envers lui. C'était libérateur mais en même temps, ça m'a blessée de lui parler comme ça.

— T'as laissé parler ta colère mais ce qui me surprend, c'est qu'il ne t'a rien fait. J'ai l'impression qu'il est incapable de te faire du mal, qu'il est protecteur envers sa sœur mais également envers toi, Joviale.

— Je n'en reviens pas de la gifle que je viens de lui donner, ça me ressemble pas.

— Ne t'en fais pas ! Tu vas t'y habituer. Merci de m'avoir défendue Joviale.

— Je ne pouvais pas laisser passer ça. C'était trop pour moi. T'es ma meilleure amie et je ne laisserai aucun garçon s'en prendre à toi, verbalement ou physiquement.

— Heureusement que tu es là. Je ne sais pas ce que j'aurais fait sans toi.

— Bon, ne traînons pas ! Curieux nous attend !

En empruntant la porte menant au sous-sol, Joviale et moi-même arrivions devant la salle de photographie. En ouvrant la porte, Curieux et Blessée étaient à l'intérieur de la pièce. Joviale jeta alors un coup d'œil sur la salle qui manquait cruellement de clarté. Cette dernière s'exclama en s'adressant à Curieux :

— Mais il manque de la lumière ici ! Il faut investir dans des luminaires, c'est trop sombre !

— Joviale, que fais-tu ici ? Tu n'étais pas censée te ramener. C'est un groupe privé !

— Plus maintenant.

Curieux me jeta alors un regard en s'exclamant :

— Que fait-elle ici, Anxieuse ?

— C'est ma meilleure amie. Il fallait que je l'invite et puis c'est une personne de confiance.

— Très bien, dans ce cas...

Le grand gaillard s'avança vers la porte pour l'ouvrir. Une silhouette féminine se trouvait derrière. Elle s'avança pour entrer dans la pièce. J'étais étonnée de sa présence ici et en posant mon regard vers Curieux, je m'exprimai alors :

— Donc tu as ramené ta meilleure amie aussi, je m'y attendais.

— C'est une personne de confiance à mes yeux malgré que le courant ne passe pas entre vous deux.

Rancunière referma ainsi la porte derrière elle et resta appuyée contre celle-ci. Elle s'exclama en me regardant avec mépris :

— Peu importe ce que pense Anxieuse. Je suis ici pour éviter une guerre. Mais aussi pour le fait que Protecteur ait intégré les forces pour traquer les changements d'émotions. Je ne veux pas qu'il lui arrive quelque chose.

— Cool, lançai-je en levant les yeux au ciel.

Blessée s'avança afin de s'asseoir à la table au centre de la pièce. Elle essaya de capter le moindre de mes regards, chose que j'esquivais. Tout en donnant une chaise à Rancunière, Curieux lança :

— Bon, nous sommes au complet. On va commencer à parler de notre plan.

Soudain, la poignée de la porte se mit à bouger. Une personne était en train de l'ouvrir. Nous étions au complet. Curieux, Rancunière, Joviale, Blessée et moi s'avançâmes alors vers la porte pour voir de qui il pouvait s'agir. Celle-ci s'ouvrit ensuite. Nous tombâmes nez à nez avec...

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