Chapitre 18 - EVA
J'ouvre péniblement les yeux et les referme immédiatement aveuglée par le soleil qui inonde le lit. Quelle heure est-il ? Lentement, les souvenirs de la veille me reviennent en mémoire. Je ne vais plus jamais sortir de cette chambre... Je suis vraiment débile. Je me suis donnée en spectacle. D'habitude, quand le souvenir de Ben se fait trop présent, je démoralise seule pendant des jours jusqu'à ce que Laïla me tire de cette spirale infernale et vice-versa.
Je me dirige péniblement vers la douche. Pour la première fois depuis très longtemps, j'ai ressenti du désir hier soir, quand Isaac m'a touchée dans le taxi. Je repense à sa main sur ma cuisse, à sa façon protectrice presque animale de rabaisser ma robe et je frisonne. Il est à l'opposé de Ben et pourtant, c'est le premier homme qui m'a fait ressentir ça depuis des années.
Sous le jet d'eau bouillant, je ne peux m'empêcher de repenser à ma rencontre avec mon premier amour. Lors de mon premier jour à la fac, je déambulais dans les couloirs seule et perdue. Je cherchais désespérément le local où avait lieu mon premier cours. J'étais évidemment en retard. Ben a surgit avec un camarade à lui et il a proposé de m'aider. Il connaissait déjà bien les lieux puisqu'il était en dernière année et étudiait le droit. Je me suis sentie comme dans un film américain pour ado quand il m'a accompagnée jusqu'à ma salle de classe. Il était grand, blond, bronzé avec des yeux verts et il avait un sourire ravageur. Il était vêtu tout de blanc et on aurait pu croire qu'il venait de finir son entrainement de golf. Le gendre idéal. Mes parents, surtout ma mère, l'auraient adoré. De fil en aiguille, on s'est recroisés et il m'a invitée à manger pendant une pause de midi, ensuite il m'a proposé d'aller chez lui, plus tard il m'a emmené en week-end. Tout était simple et j'étais amoureuse. Il comblait par sa tendresse et ses attentions le vide qu'avaient laissé mes parents. Très vite, j'ai emménagé chez lui dans un quartier chic de Paris. On parlait mariage, on parlait enfants... j'entends encore sa voix me dire : « Je veux une fille qui te ressemble. ». Et moi, je voulais aussi un petit garçon blond à son image. Je lui ai tout donné, mon temps, mon amour, mon corps, mon âme. Je vivais un rêve jusqu'à cette nuit-là. Et depuis, je n'ai plus laissé aucun homme m'approcher.
Mes larmes se mêlent à l'eau, enveloppée dans la buée, je me laisse aller encore quelques minutes. Il faut que je me reprenne alors je me focalise sur le message que m'a envoyé Laïla. Elle a réussi à faire parler Wellington. Elle m'a envoyé un nom et un prénom. Mes recherches seront plus faciles à effectuer. Jean-Yves d'Allemagne a 53 ans, c'est un petit homme mince qui arbore des lunettes rondes sur un nez long et fin. C'est surtout le ministre de la Justice et ça, je ne m'y étais pas préparée. J'étais loin de m'imaginer qu'un type comme lui collaborait avec des criminels. Il est déjà visé pour conflits d'intérêts. La Cour de cassation vient d'ailleurs de confirmer son renvoi devant la Cour de justice de la République. Il me sera d'autant plus facile de l'atteindre puisqu'il est déjà dans la merde...
En sortant de ma chambre, je me rends compte que les Farès ne sont pas là. Ils ont dû sortir et je décide d'en faire de même. Prendre l'air me fera un peu décuver. Je passe l'après-midi à jouer la touriste. Je prends un billet pour le fameux bus touristique rouge et je découvre Big Ben, London Eye, Buckingham. Je descends au Borough Market, le plus ancien marché alimentaire de Londres. Je fais un dernier arrêt à Nothing Hill et je ne peux m'empêcher de poster des photos des maisons colorées sur Instagram. Je me sens plus légère qu'hier. Cette après-midi à flâner m'a permis de recharger mes batteries.
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