Chapitre 7 : L'autre Joshua

« —Qu'est-ce que c'est que ça encore ? demanda Ewen complètement ébahi.

—Ça doit être le frère de Joshua, lui répondit Béthanie toute aussi abasourdie, c'était indiqué dans le dossier qu'il a un frère.

—Ils ont tous des sosies dans la famille ? lança Djamila ironiquement. »

Béthanie hocha les épaules et se dirigea vers le frère de Joshua.

« —Excusez-moi, commença cette dernière, vous devez être le frère de monsieur Laseurier c'est ça ? »

L'homme en question se retourna vers son interlocutrice, la regarda de la tête aux pieds, puis lui sourit.

« —C'est bien moi. Et vous, vous êtes ?

—Enchantée, Béthanie Ferrier, détective privée. »

Ils se serrèrent la main.

« —Je vous présente Djamila Soudimi, Ewen Mercier et Maggie Annisterre, mes collègues. »

Il serra la main aux trois autres individus, toujours en leur souriant. La ressemblance avec son frère était frappante, d'autant plus qu'ils portaient les mêmes vêtements, au détail près. Ils devaient sûrement jouer de cette ressemblance. Et s'ils avaient échangé leur identité ?

« —Vous avez besoin de moi ? leur demanda le frère de Joshua.

—Oui, lui répondit Béthanie. Si vous pouviez nous emmener à l'écart de cette agitation, nous aimerions vous poser quelques questions.

—Ai-je le droit à un avocat ? »

La question ne parut pas déconcerter la jeune femme.

« —Si vous le voulez, vous pouvez.

—Je vous faisais marcher, bien sûr que je vais répondre à vos questions sans rechigner ! D'autant plus que je n'ai rien à cacher à personne. Suivez-moi, je vais nous installer dans un salon, nous y serons mieux pour discuter.

—Il y a votre frère qui est déjà dans le salon principal, nous venons de le voir et je pense qu'il serait préférable de le laisser seul.

—Mmmh. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée qu'il reste seul. Mais bon, nous allons trouver un autre lieu, il n'y a pas qu'un seul salon dans ce château. »

Il se tourna vers Guillaume.

« —Je reviens, lui dit-il, surtout ne les laisse pas seuls ici.

—D'accord. »

Il se retourna et se mit en route en direction du château, les quatre détectives sur ses talons. Il entra donc dans le château par une porte donnant sur le couloir, sous les escaliers menant au premier étage, qu'il emprunta. Une fois en haut des marches, ils se dirigèrent vers la droite, à l'opposé de l'endroit où était située la chambre d'Odile de Féniel. Il y avait uniquement des portes sur le côté droit du couloir, lorsqu'on venait des escaliers, l'autre côté n'étant composé que de fenêtres donnant sur le parc. Il en était de même lorsqu'on allait dans l'aile gauche du couloir, mais dans le sens inverse, c'est-à-dire avec les fenêtres à droite et les portes à gauche. Il y avait une troisième aile du couloir où on y accédait en contournant l'escalier car elle se trouvait face à ce dernier. Dans cette dernière pièce, il y avait des portes des deux côtés et deux immenses fenêtres au bout ainsi que deux escaliers en colimaçon.

Le frère de Joshua s'arrêta devant la porte la plus au fond de l'aile droite du couloir, la main posée sur la poignée de cette dernière.

« —Nous allons nous installer dans mon salon privé, leur indiqua l'homme. »

Il ouvrit la porte et entra dans la pièce, suivi des quatre détectives. Le salon n'était pas très grand mais suffisamment pour y accueillir cinq personnes sans qu'elles ne se sentent trop à l'étroit. Il y avait en son centre un grand tapis aux couleurs chatoyantes, deux canapés en bois usé avec du cuir de couleur vert, deux fauteuils semblables aux canapés, et une petite table, en bois également. Il y avait un petit lustre en cristal accroché au plafond et qui pendait au-dessus de la table basse mais il était éteint, la lumière provenant des fenêtres sur la gauche de la pièce étant suffisante. Sur la droite se trouvaient deux grandes bibliothèques remplies de bibelots et de livres en tout genre. Entre ces bibliothèques il y avait une porte. Il y avait aussi deux autres portes au fond de la pièce ainsi qu'un petit aquarium vide entre ces deux portes.

« —Asseyez-vous, leur dit leur hôte, je vous en prie. »

Les quatre détectives prirent donc place sur les canapés. Béthanie partageait le sien avec Djamila, dos à la porte, et Ewen était assis à côté de Maggie, en face de leurs deux collègues. Le frère de Joshua s'assit sur le fauteuil qui se trouvait face aux fenêtres et au second fauteuil, dos aux bibliothèques.

« —Je ne me suis pas présenté. Je m'appelle Émilien Laseurier. Comme vous devez vous en douter, je suis le frère jumeau de Joshua. Que voulez-vous de moi ?

—Eh bien, commença Béthanie, nous aimerions que vous nous parliez de votre belle-sœur.

—Elle était très gentille.

—Mais encore ?

—Elle était toujours prête à rendre service. C'était une femme adorable. J'ai beaucoup envié mon frère d'être fiancé puis marié à quelqu'un comme elle, vraiment.

—Vous n'êtes pas marié ?

—Non. Je ne sais pas pourquoi, mais je n'y arrive pas. Je manque de stabilité dans mes relations.

—La mort de Victorine vous a-t-elle touchée ?

—Bien sûr, c'était ma belle-sœur, la femme de mon jumeau. Je ne montre pas ce que je ressens, mais je suis profondément accablé par ce qu'il s'est passé cette nuit et cela m'attriste beaucoup. C'est encore pire quand je croise mon frère dans l'état qu'il est actuellement.

—Quand avez-vous appris sa mort ? Je veux dire, tout le monde a été au courant le soir-même ou certains d'entre vous l'ont appris le matin en se réveillant ?

—Tout le monde l'a su le soir. S'il y avait des personnes qui dormaient, elles ont certainement dû se trouver réveillées avec tout le remue-ménage qu'il y a eu.

—Et comment l'avez-vous appris ?

—J'étais ici quand j'ai entendu madame de Féniel hurler. Alors j'ai accouru voir ce qu'il se passait.

—Que faisiez-vous ici ?

—Je lisais. »

Il accompagna sa dernière phrase d'un mouvement désinvolte du bras en direction de ses bibliothèques. Il y eut un moment de silence, puis Maggie posa la question qui lui brûlait les lèvres depuis le début de l'entretien.

« —Pourquoi vivez-vous chez les parents de votre belle-sœur ? »

Émilien ne répondit pas immédiatement. Il appuya son dos au dossier de son fauteuil et sourit.

« —C'est vrai que c'est peu commun, commença-t-il. Mais si je vis ici, c'est que je n'ai pas vraiment le choix. »

Il s'arrêta mais Maggie l'incita à continuer.

« —Vous pouvez développer ? lui demanda-t-elle gentiment.

—Je n'ai plus la possibilité d'avoir une maison. J'étais marié il y a quelques années et j'ai eu deux enfants avec cette femme. Puis je l'ai trompée, elle l'a su et elle a demandé le divorce. À ce moment-là j'ai tout perdu. Elle m'a pris la garde de mes enfants, elle a gardé la maison, elle me demande une fortune en pension alimentaire. Je vous le dis, j'ai tout perdu. Alors mon frère a eu pitié et a demandé à ses beaux-parents si je pouvais m'installer au château avec eux. Et c'est comme ça qu'il y a onze ans je suis arrivé ici.

—Et vous n'avez jamais eu envie de déménager et d'avoir votre propre maison, ou appartement une fois que votre situation s'est stabilisée ?

—Non, je suis bien ici.

—Mais votre présence prolongée ne dérange pas les parents de Victorine ?

—J'imagine que non. Ils ont dû s'y habituer.

—Et votre frère, pourquoi habite-t-il ici avec sa femme ?

—Victorine ne voulait pas quitter le nid, elle aimait le confort de ce château. Elle a voulu y rester et mon frère ne sait pas lui dire non.

—Vous vous entendiez bien avec elle ?

—Assez, oui. Ce n'était pas dur de bien s'entendre avec elle. »

Personne n'enchaîna. Maggie observa longuement l'homme qu'elle venait d'interroger. Quelque chose la dérangeait, il n'avait pas été tout à fait franc avec elle sur quelque chose, elle le sentait, mais elle n'arrivait pas à trouver quoi.

« —Vous voulez autre chose ? leur demanda Émilien.

—Oui ! lança brusquement Maggie.

—Je vous écoute mademoiselle. »

Il lui fit un sourire qui la déconcerta un court instant mais elle n'en laissa rien paraître.

« —Pourquoi restez-vous à surveiller ce que font les policiers au bord de la piscine ?

—Nous nous relayons un peu pour le faire. On ne sait jamais, on ne peut faire confiance à personne.

—Que pensez-vous qu'ils pourraient faire ?

—Je ne sais pas, mais nous nous méfions.

—Qui ça « nous » ?

—Nous. »

Maggie n'insista pas, elle savait qu'elle n'avait plus rien à tirer de cet homme. Il s'était soudain refermé. Il ne souriait plus et son regard s'était noirci.

« —Vous n'avez pas d'autres questions ? demanda ce dernier froidement.

—Non, lui répondit Béthanie précipitamment, nous vous remercions de votre coopération.

—Vous connaissez le chemin vers la sortie. »

Les quatre détectives se levèrent et sortirent de la pièce tandis qu'Émilien restait assis sur son fauteuil et les suivait des yeux. Une fois la porte refermée, ils s'éloignèrent un peu de la pièce pour ne pas être entendus.

« —Il est spécial, lâcha Djamila.

—Complètement dérangé, renchérit Ewen.

—Fermez-la ! s'énerva Béthanie. Il pourrait nous entendre ! Abrutis. »

Ewen et Djamila se turent et lancèrent un regard foudroyant à leur collègue.

« —Bon, reprit Béthanie plus calmement, maintenant il faut encore qu'on trouve le père, le frère, le beau-frère et la locataire. On peut essayer de retourner à la piscine. »

Les trois autres détectives lui montrèrent qu'ils étaient d'accord avec elle grâce à un hochement de tête, et ils se mirent en route.

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