Chapitre 4 : Interrogatoires
« —Je suis Ségolène Cavalier. C'est ma mère qui a été retrouvée morte.
—Nous sommes vraiment désolés madame, fit Béthanie qui était décidée à prendre l'interrogatoire en main.
—Je vous dirais tout ce que je sais, tant que vous retrouvez celui qui a tué ma mère.
—Ne vous inquiétez pas pour ça, nous y arriverons. »
Ségolène avait un visage de poupée, comme celui de sa mère. Elle avait de beaux yeux bleus, mis en valeur par un léger maquillage charbonneux. Ses cheveux étaient naturellement bruns et bouclés. Elle se tenait très droite.
Elle portait un pantalon noir, un débardeur rouge et un foulard noir. Elle ne portait pas de talons mais elle était naturellement très grande.
« —Où étiez-vous au moment où le corps de votre mère a été découvert ?
—J'étais dans ma chambre, en train de travailler sur mon ordinateur portable.
—Quelqu'un était-il avec vous ?
—Non. Je travaille toujours seule.
—Que pouvez-vous nous dire sur votre mère ?
—C'était une femme formidable. Elle avait le cœur sur la main, et pensait aux autres avant de penser à elle-même. C'était aussi la meilleure maman au monde. Jamais je n'ai eu à me plaindre d'elle. Elle n'était pas sévère, mais savait se faire respecter, et elle a su me donner une éducation correcte.
—A-t-elle des ennemis ?
—Justement, non. C'était impossible ! Elle était tellement gentille !
—Comment était votre père avec elle ?
—Ils se sont toujours aimés.
—Étant donné que vous n'avez pas le même nom de famille que votre mère, j'en déduis que vous êtes mariée. Votre mari apprécie-t-il sa belle-mère ?
—Bien sûr que oui ! Il me dit souvent qu'il est plus proche de ma mère que de la sienne. Il a eu beaucoup de problèmes étant jeune avec ses propres parents.
—Vous n'avez pas d'enfants ?
—Nous en voulions après mes études, mais maintenant, ce n'est plus notre première préoccupation. Quand je pense qu'ils ne connaîtront jamais leur grand-mère... »
Ségolène ne termina pas sa phrase et elle se mit à pleurer de nouveau.
« —Voulez-vous vous arrêter là ?
—Oui. Souhaitez-vous que je vous amène mon mari ?
—Je veux bien s'il vous plaît. »
La jeune femme sortit de la pièce.
« —Elle a un comportement très mature par rapport à son âge, remarqua Béthanie. »
Un immense homme noir venait d'entrer dans la pièce. Il serra la main à chaque détective, puis s'assit à la place de sa femme. Il venait lui aussi de pleurer.
« —Bonjour, je suis Guillaume Cavalier, le mari de Ségolène, fit l'homme. »
Guillaume était très grand. Il avait les cheveux rasés et portait un costume noir, une chemise blanche et une cravate beige. Il était visiblement plus vieux que sa femme.
« —Où étiez-vous au moment où le corps a été retrouvé ?
—J'étais dans ce salon, en train de lire un livre.
—Que pouvez-vous dire sur votre belle-mère ?
—C'était une femme incroyablement gentille. Ségolène a sûrement dû vous le dire, mais, quand j'étais petit, mes parents s'occupaient très peu de moi. Ils étaient professionnellement trop occupés. Quand j'ai commencé à fréquenter Ségolène, sa mère m'a tout de suite porté beaucoup d'attention. Je lui en suis extrêmement reconnaissant.
—Depuis combien de temps êtes-vous avec sa fille ?
—Nous avons commencé à nous fréquenter il y a 3 ans et nous sommes de jeunes mariés depuis l'été dernier.
—Félicitations. »
Guillaume sourit faiblement.
« —Connaissez-vous des ennemis possibles à votre belle-mère ? reprit Béthanie.
—Non. Elle était trop gentille pour qu'elle puisse avoir des ennemis.
—Autre chose à ajouter pour le moment ?
—Oui, retrouvez le meurtrier.
—Nous allons le retrouver, je vous le promets.
—Je vous fais aisément confiance.
—Merci. Pourriez-vous nous faire venir quelqu'un d'autre s'il vous plaît ?
—Tout de suite. »
Guillaume se leva et sortit de la pièce. Quelques secondes plus tard, une jeune femme pas très belle, mais très distinguée entra dans la pièce. Elle était en train de pleurer.
« —Bonjour, fit cette dernière entre deux sanglots. Je suis Bénédicte Bouvier, la sœur de Victorine.
—Bonjour madame, lui répondit respectueusement Béthanie. »
Bénédicte s'assit dans le fauteuil vide, droite comme la justice. Elle avait des cheveux roux, coupés au carré. Ses yeux marron étaient rougis par les larmes. Son corps était recouvert de taches de rousseur. Ses dents n'étaient pas droites et son visage avait des traits assez prononcés, elle ressemblait énormément à sa mère. Elle portait une robe verte, toute droite, comme elle. Maggie trouva étonnant que deux sœurs, du même sang, puissent être aussi différentes physiquement.
« —Préféreriez-vous assister à l'interrogatoire ultérieurement ?
—Oui, s'il vous plaît. Je ne me sens pas encore la force de parler. Je suis sincèrement désolée, mais je viens de perdre ma petite sœur dans d'atroces circonstances, et je suis encore sous le choc. D'autant plus que c'est le deuxième que nous passons en une journée, je ne pourrais pas... J'ai donné le peu de forces que j'avais au lieutenant Messant tout à l'heure, je ne peux plus...
—Allez-vous reposer Madame, mais avant, pouvez-vous nous faire venir quelqu'un d'autre ?
—Pas de problème. Encore une fois, je suis désolée.
—Nous vous comprenons tout à fait. »
Bénédicte se leva et sortit de la pièce en reniflant. À peine fut-elle sortie, qu'une adolescente entra dans la pièce. Elle ne s'assit pas.
« —Bonjour, je suis Alice Bouvier, la fille de celle que vous venez de voir. Appelez-moi par mon prénom.
—Bonjour Alice, lui répondit Béthanie. »
Alice était rousse comme sa mère, mais avait la beauté de sa tante. Un visage de poupée avec une longue chevelure bouclée. Elle n'était ni trop grande, ni trop petite. Son corps était très harmonieux. Elle était habillée comme la plupart des adolescentes : un jean et un t-shirt, ainsi qu'une paire de baskets de marque. Elle n'avait pas l'air plus affligée que cela de la mort de sa tante, elle paraissait au contraire toute excitée par ce qu'il se passait.
« —Vous êtes plutôt forte de ne pas pleurer, lui dit Béthanie dans le but d'avoir des explications à propos de son comportement.
—J'ai appris à me contrôler, mais ce n'est pas pour autant que cette histoire ne me touche pas, bien au contraire. J'ai vécu des horreurs que vous ne pouvez même pas imaginer... !
—De quelles horreurs parlez-vous ?
—J'ai vu des gens mourir, je suis infirmière dans l'armée.
—Effectivement, ce ne doit pas être facile tous les jours. Mais quel âge avez-vous si ce n'est pas trop indiscret ?
—27 ans. »
Il y eut un silence gêné dans la salle. Apparemment, Maggie n'était pas la seule à penser que cette jeune femme était une adolescente. Elle avait à peu près le même âge qu'eux, et pourtant, tous l'avaient prise pour une lycéenne.
« -Qu'avez-vous à nous dire sur votre tante ? demanda Béthanie pour reprendre l'interrogatoire.
—C'était une femme très gentille. Nous étions très différentes dans notre caractère. Elle s'entendait plus avec ma sœur. Elle a souvent joué avec nous lorsque nous étions petites. Rien ne l'a jamais agacée. Elle était heureuse de vivre et elle pouvait rendre n'importe qui heureux grâce à sa gentillesse et sa bonté.
—A-t-elle des ennemis ?
—Oh je ne pense pas ! Il est impossible de la détester !
—Où étiez-vous au moment du meurtre ?
—J'étais dans le jardin, près des statuettes en pierre. C'est un endroit où j'aime aller pour réfléchir tranquillement. Un lieu très paisible. Lorsque j'ai entendu ma grand-mère crier, j'ai accouru vers la maison pour voir ce qu'il se passait. Vous connaissez la suite...
—Bien bien bien. Merci de votre coopération, nous reviendrons vous poser des questions demain. Pouvez-vous nous envoyer votre sœur ?
—Tout de suite. »
Alice sortit précipitamment de la pièce.
« —Elle a un comportement bien étrange pour quelqu'un qui vient de perdre sa tante, lança Djamila sur son ton toujours aussi froid. »
Personne ne répondit. Tout le monde était d'accord. Il y eut quelques minutes de silence avant que la sœur d'Alice n'arrive en pleurant. Elles se ressemblaient comme deux gouttes d'eau, elles devaient sans doute être jumelles.
« —Bonjour, fit Béthanie, asseyez-vous. »
Ce que fit la jeune femme.
« —Bonjour. Je suis Joanne Bouvier.
—Vous êtes sœurs jumelles avec Alice ?
—Oui. »
Joanne avait aussi l'air d'une adolescente. En la voyant, les détectives auraient pu imaginer qu'Alice avait changé de tenue, et s'était mise à pleurer tellement la ressemblance entre les deux filles était frappante. En fait, la seule chose qui les différenciait était leurs tenues. Joane était habillée d'une robe d'été rose pâle attachée dans le cou et ouverte dans le dos.
« —Vous pouvez ne pas assister à cet interrogatoire tout de suite et partir si vous ne vous sentez pas capable de répondre à nos questions.
—Non, je peux le faire.
—Bien. Que pouvez-vous dire sur votre tante ?
—C'était une femme admirable et tellement gentille... »
Béthanie attendit, pensant que Joane allait en dire plus ou fondre en larmes, mais ce ne fût pas le cas.
« —Avait-elle des ennemis ? reprit donc la détective.
—Non. C'est strictement impossible. Tout le monde l'adorait, il n'y avait pas moyen de la détester.
—Où étiez-vous au moment du meurtre ?
—Chez Masha.
—Qui est Masha ?
—La locataire de l'une des maisons qui sont louées ici même.
—Nous n'étions pas au courant qu'il y avait une locataire dans le parc, merci du renseignement.
—Vous voulez que j'aille la chercher ?
—Non, ce n'est pas la peine. Aujourd'hui nous ne verrons que les membres de la famille. Que faisiez-vous chez Masha, surtout à cette heure-ci ?
—Nous discutions, comme nous le faisons régulièrement car nous sommes amies depuis le lycée. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle vit ici, c'est moi qui lui ai conseillé la location.
—D'accord, merci beaucoup pour toutes ces informations, vous avez été très forte. Vous pouvez maintenant y aller et nous amener quelqu'un d'autre au passage s'il vous plaît ?
—Tout de suite. »
Joanne quitta le salon.
« —C'est dingue comme deux sœurs peuvent autant se ressembler physiquement et être totalement différentes dans leur personnalité, remarqua Béthanie. »
Personne n'eut le temps de répondre. Une femme d'une beauté éblouissante entra dans la pièce. Elle versait quelques larmes modérément.
Cette femme était le portrait craché de la victime. Mais en vivante. Elle avait les cheveux naturellement blonds, un visage de poupée, elle faisait incroyablement jeune et elle avait de beaux yeux bleus ciel.
« —Bonjour, je suis Judith de Féniel, la belle-sœur de Vicky.
—Bonjour Madame. Je pense qu'on a déjà certainement dû vous dire que vous lui ressemblez beaucoup ?
—Oui. Il est vrai que nous avons quelques airs de ressemblance. »
Pas qu'un peu, pensa Maggie.
« —Que pouvez-vous nous dire sur votre belle-sœur ?
—C'était une femme très agréable, très douce, et d'une gentillesse comme vous ne pouvez l'imaginer.
—Avait-elle des ennemis ?
—Je ne pense pas. Nous n'étions pas proches au point de nous raconter nos petits secrets mais je suis presque sûre qu'elle n'en avait pas. »
Judith portait une robe d'été bleue, qui faisait ressortir ses yeux. Sa robe laissait apparaître de grandes jambes très fines. Elle portait de petites sandales blanches.
« —Où étiez-vous au moment du meurtre ?
—Dans mon salon privé, je ne lisais pas dans ma chambre pour ne pas réveiller mon mari qui dormait.
—Bien. Ce sera tout pour aujourd'hui. Vous pouvez y aller.
—Je vous envoie quelqu'un ?
—Non, nous reprendrons cette après-midi, nous allons vous laisser manger tranquillement.
—D'accord. »
Judith se leva. Le ventre d'Ewen gargouilla si fort, qu'il rappela aux détectives que le temps était passé à une vitesse hallucinante et qu'il était déjà presque 12h30.
« —Les filles, je vous invite à manger au bistrot du village ! lança Ewen gaiement.
—La dernière fois que t'as voulu nous inviter à manger, c'est Djamila qui a dû compléter la note, intervint Béthanie.
—Si tu le prends comme ça chacun paye sa part, tant pis pour vous. »
Béthanie se mit à éclater de rire.
« —Bon, reprit-elle, pour ce midi c'est moi qui invite. Il est où ce bistrot ? »
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