Chapitre 24 : La reconstitution
Maggie demanda à Ewen, Béthanie et Djamila de rester avec elle après le repas. Ils acceptèrent tous, y compris Djamila qui en fût contrainte par Béthanie.
« —Donc voilà, commença Maggie avec le plus d'assurance possible, je voudrais rejouer le meurtre avec ce que j'en sais. J'ai quelques situations à analyser pour confirmer quelques soupçons, c'est pour cette raison que j'ai besoin de vous. Dans un premier temps, je n'aurais besoin que d'Ewen. Je vais me mettre à la place présumée de madame de Féniel lorsqu'elle a vu l'ombre entrer dans le château pendant qu'Ewen jouera le rôle du meurtrier pour reproduire cette ombre.
« Ensuite, je vais avoir besoin d'une femme. Pendant que je desservirai le reste de la table, que j'ai demandé à Sara de me laisser, je veux que deux personnes, peu importe le sexe, se mettent à l'endroit que je vais indiquer et que l'une d'entre elles fasse semblant d'étrangler l'autre, l'autre se débattant naturellement.
« Pour finir, je vais me mettre dans la cuisine et j'aimerai qu'Ewen et une autre personne aillent dehors. Ewen traînera l'autre personne jusqu'à la piscine, et, si possible, la glissera dans l'eau.
—Je pense que tu as tout ce qu'il te faut pour résoudre cette enquête maintenant, lança un homme derrière Maggie. »
La jeune femme se retourna et vit Patron, un léger sourire sur les lèvres ainsi que les bras croisés.
« —Si je comprends bien tu n'auras besoin que de deux personnes ? la questionna Djamila intéressée.
—Oui.
—Ok, vous me raconterez. »
Elle allait partir mais Patron posa une main sur son épaule et lui fit faire demi-tour.
« —Tu restes ici Djamila et tu observes, lui lança Patron sévèrement. »
Djamila ne dit rien mais soupira en reprenant sa place.
« —On commence ? demanda Maggie. »
Tous acquiescèrent. Elle avait demandé à Sara d'allumer les mêmes lumières qui étaient allumées le soir du meurtre. Elle avait également demandé à toute la famille de ne surtout pas venir les déranger de quelque façon que ce soit, ce qu'ils avaient tous accepté aussitôt, soulagés de ne pas avoir à revivre cette soirée cauchemardesque.
Maggie se posta dans la cuisine, à côté de l'évier, où la mère de Victorine était censée se trouver lorsqu'elle vit l'ombre. Elle apercevait effectivement son collègue, devant la porte du boudoir, qui attendait ses ordres. Elle leva le pouce en l'air pour lui indiquer qu'il pouvait entrer. Ewen s'exécuta et entra dans le boudoir pendant que Maggie observait attentivement son ombre, Patron, Béthanie et Djamila à ses côtés.
« —Alors Maggie, quelle conclusion peux-tu en tirer ? la questionna Patron.
—Djamila, peux-tu refaire la même chose s'il te plaît ? demanda Maggie en ignorant la question qui venait de lui être posée.
—Pourquoi moi ?
—Parce que tu es plus svelte de Béthanie. Excuse-moi Béthanie.
—Je suis plutôt fière que mes séances de musculation portent enfin leurs fruits, lui répondit l'intéressée nullement vexée. »
Djamila allait prendre la place d'Ewen dehors, mais Maggie la rappela.
« —Peux-tu mettre une grosse veste avant s'il te plaît ?
—Mon manteau ça ira ?
—Oui ce sera très bien. »
Cette fois, Djamila se rendit vraiment dehors avec son gros manteau d'hiver qu'elle était allée chercher rapidement dans sa chambre. Elle entra dans le boudoir après que Maggie lui eut fait le même signe qu'à son collègue.
« —Et maintenant ? demanda Patron à la jeune femme.
—Madame de Féniel aurait très bien pu se tromper sur le sexe de la personne qu'elle a vu entrer dans le boudoir.
—Comment en es-tu venue à cette conclusion ?
—L'ombre est trop indistincte pour qu'on puisse identifier la personne. Et c'est aussi trop rapide. Le témoignage de madame de Féniel est donc erroné lorsqu'elle nous parle de l'ombre. »
Maggie resta pensive, puis elle reprit :
« —On passe à la deuxième expérience ? Je vais donc faire des allers-retours de la salle à la cuisine en débarrassant mon assiette et mes couverts, pendant que deux d'entre vous feront semblant de lutter. Les deux volontaires iront se placer un peu plus loin sur la droite du château, là où il n'y a que très peu de lumière. Ça ne doit pas durer trop longtemps. Ni trop peu.
—Je laisse volontiers ma place à Béthanie, lança Djamila lassée, j'ai déjà donné pour ma part. »
Ewen et Béthanie jouèrent donc la scène comme Maggie le leur avait demandé, puis se retrouvèrent tous dans la cuisine. Patron se pencha vers sa nouvelle recrue d'un air interrogateur.
« —Je n'ai rien vu, dit-elle. Enfin si, je les ai vus, mais il fallait que je me concentre sur eux pour apercevoir leur silhouette. Sara et Rebecca n'ont donc probablement remarqué à aucun moment qu'il y avait un meurtre un peu plus loin.
—Bonne déduction, la félicita Patron. Mais cette expérience nous montre aussi autre chose.
—Oui, reprit Maggie. Elles ont aussi pu se tromper dans ce qu'elles disent avoir vu. Elles étaient occupées, cette petite balade était une routine pour Victorine et Judith, et il faisait sombre. Elles ont peut-être interprété la scène en fonction de ce qu'elles étaient habituées à voir. On fait la dernière scène ?
—Je suis d'accord pour qu'Ewen me mette à l'eau, fit Béthanie résignée.
—Merci de ta coopération. En plus je voulais que ce soit toi qui sois tirée par Ewen.
—Pourquoi ?
—Je vous expliquerai demain. »
Maggie aperçut Patron sourire très légèrement. Ewen et Béthanie se rendirent à l'endroit où avait eu lieu la simulation de lutte quelques minutes auparavant après avoir été éteindre la lumière de la salle. Béthanie s'allongea sur le sol et Ewen commença à la tirer, avec quelques difficultés car sa collègue était assez imposante, musculairement parlant. Pendant ce temps, Maggie attendait au niveau de la porte de la cuisine. Quand ils eurent atteint la piscine, elle commença à s'approcher doucement de l'évier. Elle distinguait très mal ce qu'ils faisaient. Madame de Féniel n'avait certainement pas une meilleure vue que Maggie, donc elle n'avait pas dû voir qu'il se passait quelque chose de particulier.
Lorsqu'Ewen glissa Béthanie dans l'eau, Maggie, qui essayait d'écouter plus attentivement, n'entendit rien. La piscine était beaucoup trop loin pour que l'on puisse voir distinctement quelque chose qui s'y passait, ou pour entendre un si léger bruit.
Ewen aida Béthanie à sortir de l'eau et ils rentrèrent au château. Malheureusement pour la détective, la piscine n'était pas chauffée.
Maggie put faire une dernière constatation grâce au trajet que ses deux collègues venaient d'effectuer. Béthanie était gelée alors, après s'être excusée de ne pas rester écouter ce que Maggie avait à dire, elle monta dans sa chambre pour se changer et se réchauffer.
Lancée par Patron, Maggie fit son commentaire de cette ultime scène :
« —J'ai fait une erreur pendant la scène, mais rassurez-vous, je ne vais pas vous demander de la rejouer. Je suis entrée trop tôt dans la cuisine car j'ai vu Ewen et Béthanie remonter. Madame de Féniel n'a certainement rien vu de tout cela, donc elle est entrée dans la cuisine au dernier moment pour n'avoir vu que l'ombre du meurtrier. Je n'ai pas non plus entendu de bruit alors que j'étais proche de la fenêtre. Personne n'a dû entendre le moindre bruit.
—Conclusion ? demanda Patron.
—Nous n'avons aucun témoin fiable dans cette affaire de meurtre. »
Un silence consternant s'abattit sur la petite assemblée.
« —Comment comptes-tu résoudre cette enquête dans ce cas ? la questionna sournoisement Djamila.
—Avec des témoignages antérieurs au meurtre. C'est uniquement sur eux qu'il faut se baser pour résoudre l'enquête. En écoutant attentivement tout ce que les gens ont à nous dire, nous pouvons trouver ce qu'il s'est passé. »
C'est Ewen qui posa la question que Maggie redoutait, celle qui pouvait clore définitivement l'enquête :
« —T'as trouvé hein ?
—Oui. »
Djamila leva un sourcil vers Maggie, elle paraissait à la fois impressionnée et perplexe, mais elle n'en dit rien. Le visage de Patron s'illumina quant à lui d'un énorme sourire.
« —Tu seras donc prête à tout nous dévoiler demain après-midi ? lui demanda ce dernier.
—Et pourquoi pas demain matin ? renchérit Djamila. Si elle a déjà trouvé, ça ne devrait pas lui poser de problème.
—Non, lui répondit Maggie. J'ai encore besoin d'un dernier délai. Je dois être sûre de mes propos et il faut que je choisisse mes mots correctement. Légalement, nous n'avons rien pour arrêter le meurtrier alors il faut qu'il avoue par lui-même.
—Sage décision, l'approuva Patron. »
Maggie se sentit rougir. Les trois détectives retournèrent dans leur suite. Djamila prévint Béthanie qu'ils allaient se coucher, puis chacun alla dans sa propre chambre dans le but de trouver le sommeil.
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