Chapitre 19 : Raphaël le sauveur

        Maggie allait sortir de la salle à manger pour se rendre sur la terrasse, mais au passage, elle croisa Raphaël Potéo qui avait à lui parler.

« —Ah Maggie ! C'est Patron qui m'envoie ! Il souhaiterait que tu ailles rendre visite à Masha, la locataire, quand elle sera rentrée ce soir. Il veut que tu ailles la voir seule.

—J'y veillerai. C'est tout ?

—Euh, il a aussi insisté sur le fait que tu devras bien choisir tes mots. »

       Maggie poussa un soupir et allait contourner le journaliste mais il l'en empêcha en se décalant légèrement.

« —J'ai cru comprendre que ça s'était mal passé avec Odile de Féniel ce matin.

—Ouais. J'ai essayé de lui dire pour Judith et elle s'est braquée. Elle ne veut plus nous voir.

—Et ?

—Et personne n'a pensé à lui demander plus d'infos à propos du moment où elle a trouvé le corps de sa fille.

—Personne sauf moi.

—Tu déconnes ?

—Absolument pas. Je suis le meilleur journaliste au monde.

—Et modeste avec ça. Comment t'as fait pour qu'elle accepte de parler à un journaliste ?

—J'étais l'un des premiers à arriver ici avant-hier soir et Patron m'a un peu aidé.

—Ok, maintenant raconte !

—Pas ici, viens. »

          Raphaël emmena la jeune femme hors du château. Ils s'en éloignèrent suffisamment et s'arrêtèrent dans l'herbe, au milieu de nulle part, pour être sûr de ne pas être entendus par une personne dissimulée.

« —Que veux-tu savoir ? demanda-t-il.

—Tout. Absolument tout.

—Alors je vais essayer de t'en dire un maximum. »

         Il prit une grande inspiration et commença son monologue :

« —Je l'ai interrogée juste après les policiers, elle était encore en état de choc et très fatiguée, donc ce fut bref. Elle m'a dit qu'elle était dans la cuisine pour prendre un verre d'eau et qu'elle avait vu quelqu'un entrer dans le château par le petit boudoir qui se trouvait de l'autre côté de la cuisine. Elle est donc sortie voir ce qu'il se passait dehors et elle a vu quelque chose flotter dans la piscine qui était ouverte exceptionnellement car le rideau électrique qui est censé la couvrir est foutu. Elle s'est approchée pour voir de plus près et elle a ainsi découvert le corps de sa fille.

        « Elle s'est  donc mise à hurler, puis elle s'est évanouie dans les bras du mari de Victorine qui est le premier à être arrivé. Ensuite, elle se rappelle seulement s'être réveillée dans son lit et, après que son médecin ait affirmé qu'elle allait bien, c'est là qu'elle a commencé les interrogatoires. Elle m'a aussi précisé que c'était une silhouette d'homme qu'elle avait vu entrer dans le boudoir. Elle m'a assuré qu'elle n'avait rien entendu d'autre. Ni bruit de lutte, ni bruit de chute dans l'eau. Elle n'a pas non plus remarqué d'agitation, rien du tout. J'ai compris un peu plus tard que c'est parce qu'elle est entrée dans la cuisine au moment où l'homme rentrait dans le boudoir. À quelques secondes près,  elle voyait tout. Je pense que j'ai fait le tour de ce que j'avais à dire.

—Tu ne m'apprends rien au final. Tout ça je le savais déjà.

—J'imagine, oui. Mais Patron m'a dit que c'était important que je te rafraîchisse la mémoire.

—C'est donc lui qui t'envoie encore une fois.

—Euh, oui.

—Pourquoi moi ?

—Comment ça ?

—Pourquoi est-ce qu'il t'envoie me voir moi et pas Béthanie, ou Ewen, ou Djamila.

—Il dit que tu es une détective hors-pair mais que pour le moment tu dois encore être énormément aidée. Mais il aide aussi les autres, nous, pour qu'on t'aide à notre tour. Tu les as devancés Maggie. Je ne sais pas comment tu as fait exactement, mais les faits sont là.

—C'est Béthanie qui avait droit à ce traitement de faveur avant que j'arrive n'est-ce pas ?

—Oui. Elle est arrivée la première, avant tout le monde. Puis petit à petit l'équipe s'est agrandie et nous étions là pour les aider. Mais t'es arrivée et tu l'as détrônée.

—Elle m'en veut ?

—Pourquoi tu crois que je suis censé savoir ça ?

—Tu as l'air de tout savoir. Alors ? Elle m'en veut ?

—Non. Elle s'incline. »

       Maggie se sentit rougir. Ça ne lui arrivait pas très souvent, mais quand elle rougissait, elle avait envie de disparaître.

« —Bon, reprit le journaliste, j'y retourne. J'ai un article à rédiger avant ce soir et j'imagine que Patron aura encore besoin de moi entre-temps alors faut pas que je traîne !

—J'ai encore deux questions à te poser, et après tu peux partir.

—Dépêche-toi.

—Comment Patron t'a-t-il recruté toi ?

—Tout bêtement. Il lisait le petit journal dans lequel j'écrivais, mes articles lui ont plu, il m'a proposé de travailler avec lui. J'ai accepté. Seconde question.

—Que sais-tu de lui ?

—Certainement autant que toi. Rien.

—Et ça ne t'inquiète pas ? Tu ne te poses pas de questions ? Tu t'en fous vraiment de qui te fait vivre ?

—On avait dit deux. Mais je serais ravi de répondre à toutes les questions que t'auras envie de me poser autour d'un verre quand l'enquête sera finie. Allez, à plus ! »

          Et il partit rapidement, laissant Maggie seule, au milieu de rien. Lorsqu'il disparût au coin du manoir, elle se mit en route à son tour vers le château. Elle se demanda ce qu'elle pourrait bien faire une fois qu'elle l'aurait atteint. Elle devait voir Masha le soir quand cette dernière serait rentrée de son travail, mais en attendant, elle ne savait pas à qui, des personnes présentes, il était judicieux d'aller rendre visite. C'est en effet dans ce genre de moments qu'elle aurait aimé avoir un peu d'aide de la part de Patron, un moment de flou total.

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