Je m'appelle Juliane. J'ai 38 ans.
La souffrance fait partie de ma vie. Ma vie... Si on peut encore qualifier mon existence de vie.

Aujourd'hui. 12 avril. Une date quelconque. Un jour parmi tant d'autres pour ceux que ça ne concerne pas. Pour moi, c'est un gouffre dans lequel je plonge chaque année depuis sa mort.
Je vis seule. Enfin, seule... seulement avec les personnages que je dessine, que je peins, ceux qui me regarderont toujours de la même façon parce qu'ils n'existent que sur papier.
Quand je repense à ma vie d'avant, je reconnais une femme heureuse, soignée, appliquée et loin d'imaginer la vie d'après.

Mon fils est mort. Je le sais et comme dit ma psychologue je dois l'accepter. Je l'accepte. J'ai depuis longtemps passé la phase inexpliquée de l'espoir le plus vain. Il est parti. Il était petit encore. Six ans, c'est petit. Trop petit. Il avait besoin encore de moi comme moi j'ai tant besoin de lui.
Depuis ce jour, je n'ai plus de coeur. Pas parce que je suis désespérée, pas parce qu'il s'est brisé et envolé. Non. Voyez-vous mon trésor était tellement petit que quand il est parti, j'ai mis mon coeur dans son petit sac à dos rouge et jaune pour qu'il l'emporte avec lui.
Mon mari aussi est parti. Il n'a pas supporté. Mais lui, il est parti quelques villes plus loin, avec une autre femme qui lui donna plus tard d'autres enfants. Deux, je crois.
Pense-t-il à son fils ? Je ne peux même pas le dire avec certitude. Comment peut-on trouver un jour quelqu'un génial avec d'innombrables qualités et très peu de défauts, et du jour au lendemain avoir envie de lui balancer le poing dans la figure tellement il vous dégoûte ?

Mon fils s'appelait Malone. Il était blond avec des yeux bleu gris. Je n'ai pas su le protéger. Est-ce qu'il est possible d'avoir tout raté dans sa vie ? Est-il possible de recommencer à zéro ?