CHAPITRE 8

"Pas là au premier jour de cours."

"Ordinaire", marmonais-je en fixant l'extérieur. Les arbres se balancent au gré du vent, leurs branches plient puis retrouvent leur place, clairement plus mal mené par les bourrasques vu leur grosseur bien moins imposante. Une journée grise qui s'agence parfaitement à mon humeur matinale.


Même si Jess a eu l'amabilité de nous laisser descendre de voiture juste devant la porte avant d'aller se stationner pour de bon, les quelques mètres de course que j'ai dû refaire ont anéantis la dernière once de patience que je gardais bien enfouie en cas de dernier recours.

"Il est peut-être juste en retard", propose Jess en tapotant l'efface de son crayon contre son cahier.

Je la regarde puis regarde Emma, haussant les épaules avant de me caler dans ma chaise. Pourquoi perdre son temps à excuser le retard ou l'absence d'un élève qu'on ne connaît même pas. Un sujet futile qui ne m'intéresse absolument pas aujourd'hui.

Première journée de ma dernière année à Trentwood. Une étape qui se terminera dans quelques mois, mais aucune autre qui m'attend. Ce sentiment d'ambiguïté qui ne me quitte pas m'énerve au plus haut point. Je ne sais pas quoi en penser. Ou tu ne désir simplement pas l'affronter.

Je souffle et me cale encore plus profondément dans ma chaise lorsque le prof commence à expliquer les premières notions contenues dans le chapitre de notre livre de mathématique.

Ma mère souhaite que je travaille dans une banque. Un emploi stable, un salaire stable, une vie stable. La stabilité. Cette foutue stabilité qui a géré presque toute ma vie. La stabilité me sortait de chaque pore de peau avant ma séparation et, pourtant, ça ne m'a pas empêcher de dégringoler, d'entrer dans le sol, retrouver les morts et continuer ma descente infernale jusqu' en enfer. Est-ce que je me vois vraiment derrière un comptoir ou dans une voute à calculer tous ces billets devant moi, chaque jour se déroulant exactement de la même manière. La réponse est non. Non, je ne veux pas que chaque jour se déroule comme le précédent. Vivre une répétition éternelle qui ne se terminera qu'à l'instant où je prendrai ma retraite.

Le cours est déjà commencé depuis trente minutes sans que je n'y ai porté le moindrement d'attention. Et je devrais passer ma vie entourée de chiffres. Certainement pas.


Pour passer les autres minutes interminables du premier cours de la journée, j'observe la pluie s'aplatir contre la vitre et couler. J'en viens même à prédire quelle gouttelette arrivera en premier sur le rebord de la fenêtre, une activité ridicule, mais qui me permet de ne porter aucune attention à ce qui se produit autour de moi. Ce n'est que lorsque le bras d'Emma passe de multiples fois devant mon visage que je daigne poser mon regard sur autre chose et sortir de mon petit monde de pluie où les gouttes se font la course. La classe est vide mise à part mes deux amies et moi. Je comprends que le cours s'est terminé sans que j'entende le son de la cloche. Décidément, j'étais vraiment cloîtré dans un autre monde, un autre univers où rien d'autre n'existait que ma propre personne et où le silence était roi, ou la surdité. Tout dépend comment on voit la chose.

De retour à la réalité, je suis mes deux amies dans le couloir, luttant contre ces adolescents encombrants que j'aime comparer à un ouragan dans une piscine: trop d'agitation et trop bruyant pour pas grand chose. On réussis à se faufiler jusqu' à nos casiers, laissant s'écraser mon matériel au fond du rectangle de rôle.

"Quelle grâce!", s'exclame Jess en m'offrant un sourire mi-rieur mi-inquiet.

Je lui réponds en exécutant une révérence qui fait bien rire Emma et évite ainsi toutes les questions perçues dans les yeux de la jolie fille aux cheveux de jais avant qu'elles ne s'échappent de sa bouche.

Ces quelques secondes de cacophonie ont été suffisantes pour me donner un mal de tête qui persiste en m'asseyant au pupitre de la dernière rangée du cours suivant et je n'en ai tellement plus rien à foutre du reste de la journée que j'en viens à souhaiter un tremblement de terre, un tsunami ou une invasion extraterrestre, peu m'importe, en autant que ça abrège cette journée infernale.

...

Non, non, non. Je me frappe la paume de la main contre le front tout en fixant la tâche de sang sur ma culotte lilas. Au moins, je suis faiblement rassuré que mon caractère merdique des derniers jours soit causé par un afflux d'hormones et qu'il ne soit pas un nouvel état d'esprit quotidien. J'examine bien trop longtemps et inutilement la tâche rouge, me débattant contre moi-même concernant la bonne décision à prendre vu la situation.

La voix de Jess me fait sortir de ma transe. "Lex, ça va?"

Je lui réponds à travers la porte de la cabine, encore assise, les pantalons aux genoux. "C'est le mauvais moment du mois."

"Oh." J'attends patiemment que quelques mots s'ajoutent puis en viens à la conclusion qu'elle n'a rien à ajouter.

En ouvrant la porte, je la vois accroupie, près des lavabos blancs, au-dessus de son sac, farfouillant à l'intérieur, visiblement à la recherche d'un petit objet en coton de forme cylindrique. Elle lève le bras victorieusement, le tampon dans sa main. Je force un sourire avant de me retourner.

"Oupssss." Maintenant, elle découvre ce qui me dérange réellement dans le fait d'avoir mes règles. "Et si on attache un chandail à ta taille?", propose-t-elle en coinçant sa lèvre entre ses dents, toute son attention sur le rond rouge et humide encré dans les mailles de mon jeans pâle.

Je contorsionne le haut de mon corps pour apercevoir le désastre réflété par le miroir au même moment où Fred pousse la porte des toilettes des filles et y passe la tête.

"Vous foutez quoi non de.. Oh." Il écarquille les yeux avant de sourire malicieusement. "Les dents de la mer 5."

"T'es con!", s'exclame Jess en lui balançant le tampon au visage ce qui provoque un retrait de la part du blondinet. Son rire résonne de l'autre côté de la porte tandis que je m'adosse au lavabo soufflant la mèche de cheveux qui pendait devant mes yeux.

"Je vais squatter ta voiture pour la dernière heure", dis-je doucement en ramassant le tampon et disparaîssant dans la cabine.

Je ressors quelques instants plus tard, attache ma veste autour de ma taille et emprisonne le trousseau de clé, que ma meilleure amie me tend, dans ma main. En sortant, j'assène une bonne claque sur l'épaule de mon ami, de ma main libre, ce qui fait erupter un autre éclat de rire de sa part, puis quitte le couloir. Direction la sortie. Hallelujah.

...

Je profite des rayons réconfortant du soleil sur mon visage quand Emma s'asseoit sur le siège passager. La température est bien plus clémente et l'air s'est réchauffée de quelques degrés, créant une envie de dénudement chez certains. La blonde semble lire mes pensées, disant à voix haute ce que je me disais tout bas.

"Pourquoi se donner la peine de mettre un haut quand il est aussi court."  Je regarde la même fille aux cheveux pastel, un haut argent qui lui arrive juste sous la poitrine, un centimètre en moins et je parie qu'on voit la courbe de ses seins.

Elle a maigri. Pas qu'elle était grosse l'année dernière. Au contraire, elle paraissait bien, même très bien, mais là, elle semble affamée. Malgré la distance sa peau laiteuse laisse transparaître les os de ses côtes et cette recherche de minceur maladive me fait pitié tout en me retournant l'estomac. Absorbé par l'image de ce corps cadavérique, je ne me rend pas compte de la présence de Jess derrière le volant jusqu' à ce que je l'entende.

"Putain", souffle-t-elle. J'approche mon corps entre les sièges de mes amies, quittant le confort du banc arrière de la voiture afin de démystifier la raison de ce soufflement injurieux.

Il traverse la cours, vêtu d'un chandail long rayé blanc et noir qui moule les muscles de ses bras et de ses épaules, une casquette bourgogne contient ses boucles rebelles qui vont du brun presque noir au brun noisette lorsque les rayons du soleil les frappent, des pantalons marine plus serré au niveau des mollets, son habillement complété par des Nike noirs au coût faramineux.

Lorsqu'il arrive près d'Avery, je pense à la même chose que Jess. Ce garçon est trop beau pour être vrai, mais quelque part en dedans de moi, je ressens que toute cette beauté cache une quantité immonde de laideur.

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Miley Cyrus est Avery Petterson

Je n'ai pas eu les 3 commentaires au dernier chapitre, alors on va le tenter ici! COMMENTEZ, VOTEZ ET PARTAGEZ.

Il y a déjà 2 autres chapitres d'écris depuis près de 2 semaines, alors go, go, GO :)

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