Chapitre 6 : Symptoms

Depuis notre retour, l'ambiance à la maison est... différente. Tout semble ordinaire en surface, mais il y a un poids dans l'air, une tension invisible qui rend chaque moment plus lourd.

Maman est devenue presque omniprésente. Elle s'assure constamment que je vais bien, me demande si j'ai mangé suffisamment, si je me repose assez. Au début, je trouvais ça attentionné. Maintenant, c'est étouffant. Elle entre dans ma chambre sans prévenir pour vérifier si je dors bien, ou elle passe un coup de fil rapide au milieu de la journée pour « juste m'entendre ».

Ce n'est pas qu'elle soit brusque ou autoritaire, mais son insistance me pèse. Et Papa... eh bien, il est encore plus silencieux que d'habitude. Il est souvent plongé dans ses pensées, et ses rares mots sont mesurés, comme s'il pesait chaque syllabe avant de parler. C'est comme si un secret flottait entre eux, un secret que je n'étais pas censée deviner.

Je fais de mon mieux pour me concentrer sur mes cours, sur mes devoirs. J'essaie de retrouver une routine, de me convaincre que tout est normal. Mais je ne peux m'empêcher de remarquer les regards échangés entre mes parents, leurs silences prolongés.

Dans les couloirs du lycée, alors que je regarde par la fenêtre, je ressens cette fatigue que je n'arrive pas à expliquer. Des maux de tête qui viennent et repartent sans prévenir. Ce n'est pas la première fois que ça m'arrive, mais je préfère ne rien dire à Maman. Si elle s'inquiète déjà autant, je n'ose pas imaginer comment elle réagirait si je lui avouais que je me sens un peu... fragile ces derniers jours.

Je souffle, un instant, en essayant de chasser toutes ces pensées. Mais ce poids, cette sensation que quelque chose ne tourne pas rond, refuse de me quitter.

Je rejoignis Clara et Elliot à notre table habituelle, comme chaque jour. Dès que je me suis assise, Clara me lança un regard scrutateur avant de poser son menton dans sa main, exagérant une expression de détective.

Clara : Alors, Miss Harrington, tu nous honores enfin de ta présence ? déclara-t-elle avec un sourire en coin.

Je roulai des yeux, amusée malgré moi.

Moi : Qu'est-ce que tu veux dire ? Je suis toujours là.

Clara secoua la tête, faussement dramatique.

Clara : Physiquement, peut-être. Mais mentalement ? Tu es ailleurs, Amelia. Et je parie que ce n'est pas à cause de ton cours de maths.

Elliot, assis en face de moi, leva les yeux de son carnet de notes pour intervenir.

Elliot : Clara a raison. Tu sembles... préoccupée.

Je haussai les épaules, jouant distraitement avec la sangle de mon sac.

Moi : Rien de spécial. Juste fatiguée.

Clara fronça les sourcils, sceptique.

Clara : Fatiguée ? Sérieusement, tu dis ça depuis des jours. Et je te connais. Ce n'est pas juste la fatigue.

Elle posa son coude sur la table et appuya son menton sur sa main.

Clara : Tu veux qu'on mène une enquête, ou tu préfères juste nous dire ce qui ne va pas ?

Je souris faiblement.

Moi : Franchement, c'est juste... les fêtes, les devoirs. Rien d'inhabituel.

Elliot, fidèle à lui-même, était moins enclin à plaisanter. Il croisa les bras, ses yeux me fixant calmement.

Elliot : Tu sais qu'on est là, hein ? Si jamais tu veux parler de quelque chose...

Je hochai la tête, touchée par sa sincérité. Mais je n'étais pas prête à tout déballer. Pas maintenant.

Moi : Merci, Elliot. Vraiment. Mais ça va, je vous promets.

Clara me regarda en coin, visiblement pas convaincue, mais elle ne poussa pas davantage. Elle se tourna vers Elliot avec une expression complice.

Clara : OK, Sherlock, laisse-la tranquille. Elle nous dira tout quand elle sera prête. En attendant, parlons de toi. As-tu enfin rendu ton devoir d'histoire, ou devrais-je t'ajouter à ma liste des perdants ?

Avant que je puisse intervenir pour les taquiner à mon tour, une silhouette familière apparut à côté de la table. Je levai les yeux et croisai le regard de Miles. Mon cœur fit un bond.

Miles : Salut, Amelia, dit-il avec un sourire tranquille.

Son ton était calme, mais chaleureux, et je sentis mes joues chauffer légèrement.

Moi : Salut, répondis-je, tentant de paraître détendue.

Miles : Je me demandais... tu as un moment après les cours ? On pourrait discuter, prendre un peu l'air.

Je fus prise au dépourvu, clignant des yeux tandis que mon cerveau tentait de rattraper son retard.

Moi : Euh...

Clara, bien sûr, ne put s'empêcher d'intervenir.

Clara : Oh, elle a plein de temps, ne t'inquiète pas, Miles. N'est-ce pas, Amelia ?

Elle me lança un regard malicieux. Je rougis davantage, mais hochai la tête.

Moi : Oui, bien sûr.

Miles sourit, un sourire qui avait cette manière agaçante de me désarmer complètement.

Miles : Super. On se rejoint à la sortie. Je pourrais te déposer après, si ça te va.

J'ai hoché la tête. Il s'éloigna, et je sentis Clara me fixer intensément.

Clara : Alors, Amelia ? Il te plaît, hein ?

Je soupirai, cachant mon visage derrière mes mains.

Moi : Clara... arrête.

Mais même moi, je ne pouvais nier que cette invitation avait allégé un peu le poids que je portais depuis plusieurs jours.

Après les cours, comme convenu, je retrouvai Miles près des grilles du lycée. Mon cœur battait un peu plus vite que d'habitude, une nervosité inhabituelle m'accompagnant alors qu'il m'accueillit avec son sourire facile et désarmant.

Miles : Prête pour une petite balade ? demanda-t-il d'un ton léger.

Je hochai la tête, serrant la sangle de mon sac.

Moi : Oui.

Nous nous rendîmes dans un parc à quelques rues de là, un endroit tranquille où les arbres bordaient des sentiers sinueux. L'air était frais, mais pas trop froid, et le bruit lointain de la circulation semblait s'effacer dans ce havre de paix. Je me sentais nerveuse, mais curieuse. C'était la première fois que je passais du temps seule avec Miles, et je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre.

Miles : Tu sais, je travaille sur un projet photo en ce moment. C'est pour un concours local. Le thème est « Contraste ».

Je tournai la tête vers lui.

Moi : Contraste ? Ça doit être intéressant à interpréter. Tu as déjà des idées ?

Il hocha la tête avec enthousiasme.

Miles : Oui, je veux jouer avec les ombres et les lumières dans des paysages urbains. Genre, montrer la vie qui s'épanouit même dans les endroits les plus sombres.

Son énergie était contagieuse, et je me retrouvai à sourire malgré moi.

Moi : Ça a l'air génial. J'aimerais voir ce que tu as déjà fait.

Miles : Un jour peut-être, répondit-il avec un clin d'œil. Mais seulement si tu me promets de ne pas être trop critique.

Nous continuâmes à marcher, parlant de sujets légers. Il me demanda mes matières préférées à l'école, je mentionnai l'anglais et l'histoire, ce qui ne le surprit pas. Il me parla de ses vacances d'été passées à faire du bénévolat dans un refuge pour animaux, un détail qui me fit sourire. Son côté attentionné était évident, et je me sentais étrangement détendue.

Miles : Quelles sont tes origines ?

Moi : Je te laisse deviner...

Miles : Je dois avouer, dit-il soudain, me jetant un coup d'œil. Je dirais que tu es métisse, ou à la limite hispanique.

Je haussai les sourcils, sans surprise. On me dit souvent ça.

Moi : Ah oui ? Pourquoi ?

Miles : Tes traits, ta peau... Tu as ce genre de teint naturellement bronzé. Je ne sais pas.

Je ris doucement.

Moi : Non, je suis italo-américaine. Ma mère a des origines italiennes.

Il hocha la tête, réfléchissant.

Miles : Ça explique certaines choses, mais honnêtement, tu pourrais facilement passer pour quelqu'un du Sud.

Moi : Du Sud ? répétai-je, amusée. Genre, du Texas ?

Il éclata de rire.

Miles : Non ! Genre, d'Amérique latine.

La conversation resta légère, et je me sentis plus à l'aise avec lui. Pourtant, il finit par poser une question plus directe, son regard sérieux.

Miles : Mais honnêtement, Amelia, ça va ? Je veux dire, parfois tu sembles... ailleurs.

Je baissai les yeux, hésitant à répondre.

Moi : C'est juste... beaucoup de choses. Les fêtes, les cours. Tu sais comment c'est.

Il hocha lentement la tête, mais son expression indiquait qu'il n'était pas entièrement convaincu.

Miles : D'accord. Mais si tu veux parler de quoi que ce soit, je suis là.

Son ton était sincère, et cela réchauffa mon cœur. Il partagea ensuite une anecdote amusante sur sa première tentative de photographie avec un appareil professionnel, une catastrophe impliquant un oiseau volant au mauvais moment, et je me surpris à rire, un vrai rire, pour la première fois depuis des jours.

Quand le soleil commença à descendre, il me raccompagna chez moi.

Miles : Je suis content qu'on ait pu discuter.

Je levai les yeux vers lui, surprise par la douceur de son ton.

Moi : Moi aussi. C'était... agréable.

Il hocha la tête, comme s'il pesait ses mots avant de parler.

Miles : Si jamais tu as besoin de te changer les idées, je suis là.

Il hésita un instant, puis ajouta avec un sourire en coin.

Miles : Et ce serait bien qu'on passe un peu plus de temps ensemble. Je te trouve vraiment chouette comme personne... mais aussi intrigante. C'est intéressant.

Je souris timidement, un mélange de gratitude et de nervosité.

Moi : Merci, Miles. C'est gentil.

Il me lança un dernier regard, comme s'il voulait dire quelque chose de plus, mais n'osait pas.

Miles : À bientôt, Amelia.

Il me fit un bisou sur la joue, avant que je ne descende de la voiture. Je le regardai s'éloigner, une vague de confusion et de chaleur mêlées dans mon esprit. Pourquoi étais-je aussi nerveuse autour de lui ? Il avait une manière de me mettre à l'aise tout en me troublant profondément.

Je ne pouvais m'empêcher de penser à notre conversation. Il y avait quelque chose de réconfortant chez lui, une présence apaisante qui allégeait le poids que je portais ces derniers temps.

Mes parents n'étaient pas encore rentrés, et Ilona n'était pas dans les parages. J'aimais ces moments où tout était tranquille, mais ce soir-là, ma curiosité me tenaillait. Les paroles de Miles, la tension persistante à la maison, tout cela formait un tourbillon que je ne pouvais ignorer.

Je pris une profonde inspiration et me dirigeai vers le bureau de ma mère. La porte était légèrement entrouverte, comme si elle m'invitait à entrer. J'hésitai un instant, mais ma détermination l'emporta.

À l'intérieur, tout était ordonné avec une précision presque intimidante. Je savais que ma mère détestait qu'on touche à ses affaires, mais je ne pouvais plus ignorer cette sensation qu'il y avait quelque chose qu'elle me cachait. Je m'approchai de son bureau et commençai à fouiller doucement, en prenant soin de remettre chaque chose à sa place.

Puis, dans un tiroir, je trouvai une enveloppe soigneusement rangée, presque trop bien dissimulée. Mes doigts tremblaient légèrement en l'ouvrant. À l'intérieur, une lettre manuscrite. Elle était adressée à Kate.

Mon cœur battait à tout rompre alors que je parcourais les mots. L'expéditrice, une certaine femme dont le nom ne me semblait pas familier, y exprimait un désir pressant de parler à Kate. Les phrases étaient ambiguës, mais pleines de sous-entendus troublants. Elle mentionnait un lien passé avec notre famille, un lien que je ne comprenais pas mais qui semblait important.

Je notai mentalement son nom et replaçai la lettre exactement où je l'avais trouvée avant de sortir précipitamment. Une fois dans ma chambre, je me jetai sur mon ordinateur et tapai son nom dans un moteur de recherche. Rien de concluant. Pas de réseau social, pas de profil clair. Juste une photo, attachée à un ancien article sur un événement communautaire.

Mon souffle se coupa en reconnaissant immédiatement celle qui était venue chez nous et qui avait presque eu une altercation avec ma mère.

Je me laissai tomber en arrière sur ma chaise, le cœur battant. Pourquoi ma mère avait-elle intercepté cette lettre ? Et pourquoi cette femme voulait-elle parler à Kate ? Rien ne faisait sens, mais une chose était sûre : je devais découvrir la vérité.

Alors que je fixais la photo de cette femme sur mon écran, mon esprit s'emballait. Trop d'informations, trop de questions, et aucune réponse. Mon cœur battait si fort que j'avais l'impression qu'il allait sortir de ma poitrine. Un vertige soudain me fit vaciller de ma chaise. Je pris une profonde inspiration, espérant que cela suffirait à me calmer, mais une lourdeur inhabituelle s'installait dans mon corps.

Je me levai, tentant de retrouver mon équilibre, mais mes jambes flageolaient. La pièce semblait tourner autour de moi. Incapable de tenir debout plus longtemps, je me laissai tomber sur mon lit, espérant que cela passerait.

Mais ce n'était pas le cas. La fatigue devenait écrasante, comme un poids insupportable sur ma poitrine. Ma respiration se fit plus courte, et je sentais ma conscience vaciller. Je fermai les yeux, essayant de me concentrer sur ma respiration, mais tout devenait de plus en plus flou.

C'est alors que la porte de ma chambre s'ouvrit brusquement.

Ilona : Amelia ? Tu pourrais me passer ton-

Elle s'arrêta net en me voyant.

Ilona : Hé, ça va ?

Je tentai de lui répondre, mais ma voix ne sortait pas. Je vis son expression changer du tout au tout : sa légèreté habituelle s'effaça, remplacée par une panique évidente. Elle s'approcha rapidement de moi, posant une main sur mon front.

Ilona : Tu es brûlante... murmura-t-elle. Amelia, dis quelque chose !

Sa voix était tremblante, et je pouvais entendre son souffle s'accélérer. Mais je ne pouvais pas lui répondre. Chaque mot semblait bloqué dans ma gorge. Je sentis ses doigts attraper mon téléphone sur la table de chevet.

Ilona : Ne t'inquiète pas, je vais appeler les secours.

Le reste était flou. Les sons semblaient s'éloigner, et mes paupières étaient trop lourdes pour rester ouvertes. Tout devint noir.

Quand j'ouvris les yeux, tout était trop lumineux. L'odeur stérile des produits désinfectants m'assaillit immédiatement, et je compris où je me trouvais : un hôpital. Je clignai des yeux plusieurs fois, essayant de m'habituer à la lumière.

Mes parents étaient là. Ma mère était assise près de moi, ses mains serrées autour des miennes, son visage marqué par l'inquiétude. Mon père se tenait debout près de la fenêtre, le regard rivé à l'extérieur, les bras croisés, mais la tension dans sa posture était évidente.

Moi : Maman...

Ma voix était rauque, faible. Ma mère releva la tête, et un sourire soulagé apparut sur son visage, bien qu'il soit accompagné d'une inquiétude sous-jacente.

Maman : Mon amour, tu es réveillée.

Elle me caressa doucement la joue, mais je pouvais sentir ses mains trembler.

Moi : Qu'est-ce qui s'est passé ? demandai-je, essayant de rassembler mes souvenirs.

Avant qu'elle ne puisse répondre, mon médecin entra.

Docteur : Amélia, comment te sens-tu ?

Moi : Fatiguée... répondis-je honnêtement.

Il hocha la tête.

Docteur : Tu as eu un épisode sévère de fatigue accompagné d'un déséquilibre, probablement lié à ton état de santé général. Ces derniers jours ont dû être stressants pour toi.

Je vis ma mère détourner les yeux, son expression se durcissant légèrement. Mon père, toujours près de la fenêtre, se retourna et fixa le médecin.

Papa : Que devons-nous faire pour éviter que cela se reproduise ? demanda-t-il, sa voix calme mais autoritaire.

Le médecin se racla la gorge.

Docteur : Nous avons ajusté son traitement. Elle devra le suivre scrupuleusement et éviter toute source de stress inutile. Pour l'instant, nous la gardons en observation pour la nuit, mais si tout va bien, elle pourra rentrer demain.

Je fermai les yeux, épuisée par ses mots, mais aussi par l'inquiétude évidente de mes parents. Tout semblait peser encore plus lourd qu'avant. Tandis que le médecin sortait, je sentis ma mère resserrer doucement sa prise sur ma main.

Maman : Tu es notre priorité, Amelia. Tout ira bien.

Mais en voyant leurs visages, je n'étais pas si sûre. Alors que je m'adossais sur l'oreiller, le poids des événements de la journée m'écrasait. Je pouvais sentir ma mère toujours à mes côtés, son regard inquiet fixé sur moi, tandis que mon père restait debout, immobile, mais tendu.

Leur inquiétude semblait sincère, presque déchirante, et pourtant, cela ne faisait qu'ajouter à mon trouble. Je repensais à la lettre que j'avais trouvée, aux mots soigneusement choisis qui ne faisaient que soulever plus de questions qu'ils n'apportaient de réponses. Et surtout, pourquoi avais-je l'impression que tout cela, d'une manière ou d'une autre, était lié à moi ?

Chaque pièce du puzzle semblait converger vers un secret bien plus vaste, un secret qui, j'en étais certaine, pourrait bouleverser tout ce que je savais sur ma famille, et peut-être sur moi-même. Même dans ma faiblesse, cette pensée était plus forte que jamais.

Ma mère pressa ma main, et son regard croisa le mien. Je pouvais lire une profondeur d'émotion rare dans ses yeux. Mais cette sincérité, ce mélange d'amour et de peur, ne suffisait pas à effacer mes doutes.

Je savais qu'ils cachaient quelque chose. Et peu importe à quel point ils semblaient me protéger, je ne pouvais plus les laisser diriger cette vérité. Je fermai les yeux un instant, cherchant à apaiser mon esprit tourmenté.

Maman : Repose-toi, Amelia, me murmura-t-elle avec douceur, comme si elle pouvait deviner l'agitation qui grondait encore en moi.

Mais comment pouvais-je me reposer alors que tout semblait s'effondrer autour de moi ?

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