7. Denial
"The trouble with denial is that when the truth comes, you aren't ready"
Nina Lacour
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Swann
Debout devant mon miroir, je tentai tant bien que mal de dompter mes cheveux. Je n'arrivais jamais à en faire quelques chose de potable, ils ne ressemblaient à rien, ils étaient d'un châtain basique et poussaient n'importe comment sur ma tête. C'était juste un gros bordel que je n'arrivais jamais à coiffer.
Je poussai un soupir et laissai mes mains retomber le long de mon corps. Ça ira bien, de toute façon je ne pouvais pas faire mieux. Je m'examinai une dernière fois, j'étais vêtu d'un simple jean clair troué aux genoux et d'un sweat à capuche blanc. Cela suffirait amplement pour la soirée d'Hugo, ce n'était pas un gala non plus.
Je ne me trouvais pas exceptionnel. J'étais tout ce qu'il y avait de banal. Je n'étais pas très musclé, j'avais juste ce que la pratique du football m'avait apporté, et je ne faisais pas non plus un mètre quatre vingt cinq, loin de là, mes cheveux étaient plats et mes yeux d'un bleu classique. Je savais que je n'étais pas affreux non plus, et je n'avais pas vraiment de complexes à part mes cheveux et mon nez mais c'était le problème, j'étais banal. Un garçon de dix-neuf ans noyé parmi ses congénères.
La sonnette qui retentit depuis la porte d'entrée me fit revenir à la réalité. Je devinais qu'il devait s'agir de Joyce, nous devions nous rendre ensemble à la soirée. Je mis rapidement mes baskets et descendis en trombe les escaliers pour aller lui ouvrir. Comme à son habitude, elle s'empressa de déposer un léger baiser sur ma joue avant de s'avancer dans mon salon.
- Salut ! lança-t-elle, toute enjouée. Tes parents ne sont pas là ?
- Non, ils sont au restaurant. Ils dînent avec je ne sais plus quel investisseur.
- C'est pour ça que c'est aussi calme alors.
Je relevai les yeux vers Joyce alors qu'elle me lançait une petite moue amusée. Je haussai les épaules, elle n'avait pas tort, après tout. Je me retournai et récupérai mes papiers et mes clés alors que mon amie restait là à m'observer.
- Du coup, vu qu'il n'y a personne, on pourrait peut-être rester là et regarder tranquillement un film, proposa-t-elle, un sourire dans la voix.
Je me retournai vers mon amie avec un sourcil haussé et un rictus amusé. Les poings sur mes hanches, j'observai sa petite moue adorable.
- T'as pas envie d'y aller, pas vrai ?
Elle secoua la tête d'un air enfantin. Au fond, je savais qu'elle n'était pas elle-même convaincue de sa tentative. Et puis elle s'était bien préparée pour l'occasion, habillée d'un joli top en dentelle prune surmonté d'une veste en cuir noire et arborant son éternelle queue de cheval. Elle savait qu'elle n'y couperait pas.
- J'ai promis à Hugo d'être là. Et à Brayden aussi, rajoutai-je en soufflant.
Joyce croisa ses bras et me regarda avec un sourcil haussé.
- Je suis certaine que, toi non plus, tu n'as pas envie d'y aller.
- Allez viens, ça va pas être si terrible, lançai-je en ignorant sa remarque. Et puis il y aura Austin, depuis le temps qu'il me demande de vous présenter.
- Non. Il est hors de question que tu me cases avec un de tes potes footballeurs. Et puis je ne veux rien avoir à faire avec ces tas de muscles sans cervelles ni conversations.
- Sérieusement ? T'es vraiment en train de me sortir ce cliché là ? Et puis je te rappelle que, moi aussi, je suis footballeur.
- Mais toi c'est pas pareil, toi tu es mon petit Swann super parfait que tout le monde aime, dit-elle en me tapotant l'épaule avant de passer devant moi. Mais tu dois bien avouer que t'es potes ne sont pas tous des lumières.
- Austin n'est pas comme ça, fais-moi confiance.
- Peut-être mais je suis pas intéressée. Et s'il passe la soirée à me tourner autour alors elle sera encore plus ennuyante.
Je la regardai se diriger vers la porte d'entrée qu'elle ouvrait pour ensuite s'avancer dans l'allée. Je la suivis sans un mot et m'approchai de ma Porsche. Je savais que Joyce avait souvent peur de s'ennuyer pendant ces soirées, après tout elle n'avait pas beaucoup d'amis à part moi. Mais j'essayai au mieux d'être présent.
- Tu ne t'ennuieras pas, Joyce, je resterai avec toi, la rassurai-je.
- Tu parles ! Je sais très bien que, dès qu'on arrivera, tu te feras alpaguer par Hugo, puis par Brayden.
Sans un regard pour moi, elle s'engouffra dans ma voiture. Je la rejoignis et m'installai au volant avant de mettre le contact.
- Et au fait, j'ai invité Yaël, lança soudainement Joyce.
Je freinai brutalement devant mon portail qui était en train de s'ouvrir.
- Quoi ? Mais pourquoi ?
- Justement parce que j'avais peur de m'ennuyer, répondit-elle en haussant les épaules.
Je tournai la tête uniquement pour lui lancer un regard blasé.
- Il ne viendra pas, assurai-je. Tu crois vraiment que ça le tente de venir à une soirée organisée par Hugo ?
- Figure toi que j'ai réussi à le convaincre. Il viendra, tu verras.
Je poussai un soupir discret avant de m'engager enfin sur la route. Je priai pour que Joyce ait tort, sans trop savoir pourquoi, je n'avais vraiment pas envie de le voir à cette soirée.
Je tentai pourtant de ne plus y penser, de le chasser de mon esprit et me concentrai sur la route. Nous ne mîmes pas longtemps pour arriver devant la villa d'Hugo. Je me garai et sortis de la voiture avant d'en faire le tour pour ouvrir la portière à Joyce. Elle passa son bras sous le mien tandis que nous nous avancions vers la porte d'entrée.
Il y avait déjà pas mal de monde, certains occupaient les extérieurs, un verre à la main. De la musique électro s'élevait depuis l'intérieur de la maison. A peine avions nous passé la porte que mon ami nous remarqua, s'avançant alors d'un pas rapide vers nous.
- Swann ! Je t'attendais ! s'exclama-t-il. J'ai bien cru que tu ne viendrais jamais !
- Je te l'avais promis, non ?
- Ouais, mais on sait jamais avec toi. Par contre, Joyce, fallait pas te sentir obligée de venir, ajouta-t-il en se tournant vers mon amie.
- T'inquiète pas, je ne suis pas non plus transportée par l'idée de passer la soirée chez un petit con arrogant, répliqua-t-elle. Mais je suis là pour Swann.
- Dommage alors, parce que je vais devoir te l'emprunter.
Sans plus attendre, Hugo passa son bras autour de mes épaules pour m'entraîner vers le salon tout en me refourgant une bouteille de bière dans les mains. Je me retournai légèrement vers Joyce qui était restée dans l'entrée et lui lançai un regard désolé tandis que, résignée, elle m'observait l'air de dire je te l'avais bien dit. Elle haussa les épaules et se dirigea vers la cuisine.
Moi, je fus poussé dans le canapé et je reconnu aussitôt le parfum de la personne qui se trouvait à mes côtés. Je tournai la tête et observai quelques secondes Brayden qui discutait avec un des membres de l'équipe de foot. Ses long cheveux bruns étaient bouclés, ses yeux étaient légèrement maquillés et ses lèvres étaient restées naturelles. Elle portait un jean noir et un haut blanc qui lui arrivait au dessus du nombril. Elle était belle, je ne pouvais pas le nier.
Brayden tourna soudainement la tête vers moi et ancra ses yeux couleur ambre dans les miens. Elle me fixa un instant alors que je ne savais pas trop comment me comporter face à elle, on ne s'était pas reparlés depuis la dernière fois. Finalement, un mince sourire illumina son visage.
- Je suis contente de te voir, dit-elle. Je suis désolée pour l'autre fois, j'aurais peut-être pas dû taper une crise mais, comprends-moi, je veux juste avoir l'occasion de passer un peu de temps avec toi. Je tiens beaucoup à toi, Swann.
- Je vais faire des efforts, lui assurai-je doucement.
Son sourire s'agrandit encore plus alors qu'elle s'approchait de moi pour déposer ses lèvres sur les miennes. Elles étaient douces mais je n'étais pas sûr de ressentir encore quoi que ce soit à leur contact. La main de Brayden trouva la mienne et elle se pencha jusqu'à ce que sa tête repose sur mon épaule.
Nous restâmes un long moment dans cette position, à écouter les différentes conversations de notre groupe formé, pour la plupart, de membres de l'équipe de foot et de quelques membres de l'équipe d'athlétisme de Brayden. D'un air détaché, je sirotais ma bière en ignorant les remarques d'Hugo sur Brayden et moi, préférant me concentrer sur Austin qui tentait de relever le niveau de la discussion.
Joyce ne tarda pas à nous rejoindre. Elle s'installa dans un coin, en face de moi, et tenta de se faire toute petite. Je savais que mes amis n'étaient pas forcément ses amis, mais je l'adorais pour être là et m'accompagner à chaque fois.
Du coin de l'oeil, je vis Austin se rapprocher d'elle et la saluer, un sourire bienveillant collé au visage. Malheureusement pour lui, Joyce restait distante et faisait semblant de s'intéresser à autre chose.
- Vous voyez, vous n'avez même pas besoin de moi pour vous présenter, fis-je remarquer.
- Tu m'en vois ravie, répliqua sarcastiquement Joyce.
Je levai les yeux ciel tout en gardant mon sourire amusé. Je souhaitais à Austin bien du courage s'il voulait se rapprocher de Joyce. Pour l'instant, mon amie était davantage occupée à regarder l'heure sur son téléphone.
- Il ne viendra pas, lançai-je à son intention.
Joyce releva subitement la tête dans ma direction avant que son regard ne dérive pour se poser derrière moi.
- Ah oui ? T'es vraiment sûr de ça ? répliqua-t-elle en faisant un signe du menton vers ce qu'elle regardait.
J'eus à peine le temps de me retourner qu'il apparaissait à mes côtés. Je retins à soupir d'exaspération. Je m'étais trompé, il était venu, et il était là, à côté de moi.
- Yaël ! Je suis trop contente que tu sois venu ! s'enthousiasma-t-elle alors qu'elle se levait pour le prendre dans ses bras.
Les yeux de Yaël croisèrent les miens et il me salua d'un signe de tête. Je ne lui répondis pas, préférant détourner le regard.
- Quelqu'un peut me dire ce qu'il fait ici ? intervint Hugo alors que, sans m'en rendre compte, je resserrai ma prise sur ma bouteille.
- Je l'ai invité, répondit simplement Joyce.
- Ah d'accord, donc toi tu te permets de distribuer tes propres cartons d'invitation pour ma soirée.
- Hugo...
- Jusqu'à preuve du contraire, on peut ramener qui on veut, non ? me coupa Joyce. Redescends un peu, tête de gland, t'es pas non plus en train d'organiser une soirée privée. Donc maintenant t'es bien gentil mais tu la fermes et tu nous laisses profiter tranquillement. T'as qu'à nous ignorer, comme ça tout le monde trouvera son compte.
Malgré la musique qui résonnait autour de nous, un gros blanc s'était installé dans notre groupe. Ce fut Austin qui tenta de briser la tension en tendant une bière au nouvel arrivant. Joyce et Hugo, eux, étaient toujours en train de s'affronter du regard. Ces deux-là se détestaient réellement.
Finalement, mon amie souffla un bon coup et se retourna vers Yaël en affichant un joli sourire. Joyce avait cette capacité de se reprendre et de retrouver son calme très vite.
- Qu'est ce que tu dirais d'aller danser ? proposa-t-elle à mon ancien meilleur ami.
- Avec plaisir, répondit-il en lui tendant sa main.
Je les regardai alors s'éloigner, mains dans la mains, s'enfonçant un peu plus dans le salon pour rejoindre les autres danseurs. Ils se mêlèrent à la foule et commencèrent à danser lorsque Yaël fit tourner Joyce sur elle-même.
Je poussai un soupir et lâchai la main de Brayden. Je finis rapidement ma bière avant de me lever.
- Je vais chercher à boire, annonçai-je avant de me diriger d'un pas décidé vers la cuisine.
Je déposai ma bouteille vide sur le comptoir, alimentant alors le cimetière de bouteilles d'alcool qui commençait déjà à se former, avant d'aller en chercher une autre. Je la décapsulai avant de revenir sur mes pas. Cependant, au lieu de rejoindre les autres sur le canapé, je préférais rester à l'entrée du salon, les bras croisés, ma boisson à la main. J'observai la pièce, les groupes qui discutaient, les gens qui dansaient, jusqu'à ce que mes yeux se posent sur eux, Joyce et Yaël.
Ils avaient l'air de vraiment s'amuser. Ils étaient proches, très proches. En fait, les bras de Joyce étaient enroulés autour du cou de Yaël tandis que, lui, avait posé ses mains sur les hanches de mon amie. Et ils se déhanchaient comme ça, en rythme. Je fronçai les sourcils alors que tout mon corps se tendait. Je ne savais même pas pourquoi je réagissais comme ça.
Je n'arrivais pas à détourner le regard. Je les observais danser collé serré. Il n'était pas censé préférer les garçons, lui ?
- T'es sûr que j'ai une chance avec Joyce ? lança soudainement une voix à mes côtés, me faisant sursauter. Je veux dire, elle me snobe complètement et elle a pas l'air intéressée du tout.
Je tournai la tête vers Austin qui se tenait là, à côté de moi, les mains dans les poches. Je ne l'avais pas entendu s'approcher.
- Prends ton temps, laisse là apprendre à te connaître, mais ne la brusque pas. Et surtout, ne fais pas le con avec elle, rajoutai-je en le regardant sévèrement.
- Promis. Mais pour l'instant elle semble plus intéressée par ton pote. Regarde les, ils sont super proches.
Je me concentrerai à nouveau sur eux, et je ressentais cet étrange sensation au creux de mon ventre.
- C'est pas mon pote. Et t'inquiète pas, Joyce n'est pas le genre de Yaël. Enfin je crois, soufflai-je doucement.
Austin n'eut pas le temps de répondre puisque quelqu'un vint soudainement nous interrompre. Brayden était arrivée de je ne sais où et avait posé sa main sur mon épaule.
- Tu viens danser avec moi ? me demanda-t-elle, un grand sourire aux lèvres.
- Brayden, je sais pas, tu sais bien que j'aime pas trop ça, tentai-je doucement.
- Allez viens, on va juste s'amuser, insista-t-elle. Et puis tu m'avais promis de rester avec moi.
Je poussai un discret soupir pendant qu'elle faisait une petite moue. Elle avait gagné, et elle le savait puisqu'elle attrapa mon bras pour me traîner sur la piste improvisée, sans un regard en arrière pour Austin qui resta planté là.
Brayden plaça directement ses mains derrière mon cou alors que je positionnai les miennes sur ses hanches. Elle me souriait, elle avait l'air heureuse d'être là, avec moi. Je tentai de me détendre, moi aussi, mais cela s'avéra être une tâche compliquée alors que je sentais un regard appuyé sur moi. Je relevai la tête et regardai par dessus l'épaule de Brayden pour rencontrer le regard sombre de Yaël. Il me fixait. Je ne savais pas depuis combien de temps exactement il faisait ça mais, pour une raison qui m'était inconnue, je n'arrivais pas à détourner le regard.
Joyce, qui était dos à moi, ne semblait rien remarquer, tout comme Brayden qui était trop occupée à se déhancher contre moi. Je ne savais pas pendant combien de temps nous restâmes à nous regarder mais le temps sembla s'arrêter. J'étais comme hypnotisé par ses yeux. Et putain je ne savais pas pourquoi je réagissais comme ça.
Ce ne fut que lorsque Brayden releva la tête vers moi alors qu'elle cherchait à m'embrasser que notre contact visuel fut rompu. Et lorsque je regardais à nouveau dans la direction où Joyce et Yaël étaient censés se trouver, ils avaient disparu. Je fronçai les sourcils et scannai discrètement la pièce du regard mais je ne parvenais pas à les repérer.
Alors je reportai mon attention sur Brayden. Je continuai de danser avec elle pendant quelques minutes mais je n'étais pas plus concentré qu'il y a quelques instants. Je ne cessai de repenser à cet échange de regard. C'était étrange, tout comme ce que j'avais ressenti. C'était comme si nous avions été envoûté l'un par l'autre. Pourtant j'étais avec Brayden, j'aurais dû me concentrer sur ma copine alors que je dansais avec elle.
Alors qu'une énième chanson se terminait, je m'éloignai de Brayden prétextant avoir besoin d'un verre. Je résistai malgré les yeux de chats et l'air boudeur de ma copine et me dirigeai vers la cuisine. J'avais chaud, et j'étais confus. J'avais besoin de ce verre que je me servis et bus dans la foulée.
En retournant dans le coin du salon où je me trouvai avant de danser, je remarquai que mes amis étaient toujours là. Ils riaient et semblaient bien s'amuser. Joyce aussi était là, souriante. Je crois qu'ils faisaient encore un de leurs jeux débiles. Je n'eus pas le temps de m'éloigner que Hugo m'avait déjà repéré.
- Swann ! On fait un action ou vérité, viens jouer avec nous, me lança-t-il.
Je levai les yeux au ciel. Ils avaient quel âge exactement ?
- Non merci, il faut que j'aille au toilettes de toute façon, dis-je, espérant que cette excuse leur suffirait.
- Allez, juste une question alors, après on te libère, insista mon ami.
J'hésitai encore quelques secondes, mais je savais très bien que ça ne servait à rien de se battre avec Hugo.
- Très bien, mais une seule question, soupirai-je en m'approchant.
Alors que j'avais rejoint le groupe, une personne attira mon attention, encore une fois. Yaël était là, adossé au mur, tenant un verre dans ses mains. Il me fixait, comme souvent aujourd'hui.
- Alors, action ou vérité ? me demanda Hugo.
Je secouai la tête et reportai mon attention sur mon ami. Je fronçai les sourcils et réfléchis, je n'avais vraiment pas envie de me lancer dans une de ses actions tordues.
- Vérité, soufflai-je finalement.
- Quel est le nom de la première personne que tu as embrassé ? lâcha-t-il simplement, sans réfléchir.
Je me figeai instantanément. Mon cœur avait raté un battement et mes mains devenaient moites. Pourquoi avait-il fallu que ce soit cette question ? Je tentai de ne pas montrer mon trouble mais c'était difficile alors que ses putain d'yeux m'observaient encore. Je relevai le regard pour le plonger dans le sien, il était si intense. Yaël avait un sourcil haussé, comme s'il attendait de savoir ce que j'allais dire.
Je détournai le regard et tombai dans celui de Joyce. Elle aussi m'observait d'un air à la fois intéressé et inquiet. Je reportai mon attention sur Hugo et vis qu'il s'impatientait.
- Joyce, répondis-je rapidement avant m'éloigner au plus vite.
Du coin de l'œil, je vis Yaël finir son verre d'un geste brusque, mais je ne m'en souciai pas, je me contentai de me précipiter vers l'escalier pour monter à l'étage. J'atteins rapidement la salle de bain. J'entrai dans la pièce et fermai la porte derrière moi.
Je me regardai dans le miroir, j'étais pâle et mes mains tremblaient encore. Pourquoi fallait-il que ça me mette toujours dans cet état ? J'en avais assez d'être comme ça, mais je ne pouvais rien faire.
Je poussai un soupir et allumai le robinet. Je passai de l'eau sur mon visage dans l'espoir de me calmer et d'alléger mes pensées.
Quelques secondes plus tard, je me tournai vers la porte et l'ouvris, seulement je n'eus pas le temps de sortir puisqu'un poids me repoussa à l'intérieur de la pièce et referma derrière lui. Je savais très bien de qui il s'agissait.
Je poussai un soupir et lui tournai le dos, cependant je pouvais toujours le voir à travers le miroir placé au dessus des vasques. Yaël était adossé au mur et avait croisé ses bras contre son torse.
- Qu'est-ce que tu veux ? soufflai-je.
Yaël continua de me fixer, sans dire un mot. Finalement il s'approcha de moi et, à l'aide de ses bras, il se hissa pour s'asseoir sur le meuble de la salle de bain, entre les deux vasques, juste à côté de moi.
- Alors comme ça, ton premier baiser était avec Joyce, lança-t-il doucement.
- Oui, juste un smack pendant le jeu de la bouteille, dis-je l'air de rien.
- Je ne crois pas, non, rétorqua-t-il.
Je relevai la tête vers lui et plongeai mes yeux dans les siens. Son regard était neutre, le mien était agacé. Je me reculai légèrement et croisai mes bras sur mon torse.
- Comment tu pourrais savoir si je dis la vérité ou non ? tentai-je.
Un léger sourire amusé se forma au coin de ses lèvres alors qu'il descendait du meuble pour s'approcher de moi.
- Swann, je crois que je suis très bien placé pour connaître la vérité.
Je ne détournai pas le regard, même si j'avais très envie de le faire et de m'enfuir. Donc il n'avait pas oublié ça, malheureusement.
- C'était la même soirée, comment peux-tu savoir quel événement a eu lieu en premier ? m'entêtai-je.
- Je le sais, c'est tout.
Il continuait d'avancer alors que moi je reculai, jusqu'à ce que mon dos rencontre le mur. Évidemment.
- C'était des conneries tout ça, c'était pas un vrai baiser, ça comptait pas, soufflai-je alors que j'avais perdu toute assurance. Et puis tu... c'est toi qui...
- Des conneries ? me coupa-t-il. Ton "smack" avec Joyce était ridicule à côté de ça, donc selon moi c'était bel et bien un vrai baiser. Et puis, si je me souviens bien ça n'avait pas l'air si désagréable pour toi. Rappelle-toi c'était à quelques mètres d'ici, dans la pièce d'à côté.
Je retins un frisson. Il s'était encore rapproché. Il était trop près de moi, il était trop près de mon visage qui devait désormais être tout rouge. Il devait arrêter ça. Je ne pouvais pas.
- Arrête, grondai-je. Arrête d'insister avec ça, et arrête de... d'être aussi près de moi.
- Pourquoi ? Parce que ça te met mal à l'aise, ou parce que tu es confus et que tu as peur de ne pas me détester tant que ça ?
J'avais du mal à respirer. J'étais bien trop confus et en désaccord avec moi-même, et ses lèvres étaient bien trop près des miennes. Je ne pourrais pas faire ça.
- Recule, s'il te plaît.
Yaël se pencha encore un peu. Je retenais mon souffle, anticipant son geste. Mais ses lèvres se posèrent sur ma joue, non loin du coin de mes lèvres. Je savais qu'il n'insisterait pas, qu'après ça il se reculerait mais je ne pus m'empêcher de le repousser moi-même violemment en poussant ses épaules de mes mains.
- Dégage ! m'énervai-je. Pourquoi tu fais ça, putain ? Pourquoi tu me pousses à bout comme ça ?
- Je sais pas ! cria-t-il à son tour. Parce que j'ai peut-être un peu trop bu, et peut-être parce que j'en ai marre de cette situation ! J'arrive pas à gérer ! Et j'arrive plus à te voir autant dans le déni. Que tu continues à être aveugle sur ce que tu ressens passe encore mais, merde, tu ne peux pas nier ce qu'il s'est vraiment passé ! Tu peux pas faire comme s'il n'y avait rien, comme si ça comptait pas, comme si tu n'avais rien ressenti.
- Bien sûr que si, puisque c'est la vérité ! rétorquai-je. Il n'y a rien. Je ne suis pas... je ne suis pas comme toi !
- Comme moi ?
- Je ne suis pas une putain de tapette ! m'écriai-je.
Les bras de Yaël retombèrent lourdement le long de son corps. Cependant je ne me souciai pas de son état et m'occupai plutôt de sortir de cette pièce. Le couloir était vide. Heureusement d'ailleurs, parce que je n'étais pas en état de m'inquiéter de ce qu'on aurait pu entendre ou deviner.
Je m'arrêtai alors que la voix de Yaël résonnait derrière moi, mais je ne me retournai pas.
- Je savais que tes parents étaient homophobes, mais je pensais pas que tu l'étais aussi, soufflait-il. Tu sais, ce n'est pas parce qu'ils le sont que tu dois l'être aussi. Ce n'est pas parce qu'ils pensent quelque chose que tu dois le penser aussi. Ce n'est pas parce qu'ils t'ont mis des conneries dans la tête depuis des années que tu dois t'empêcher de vivre pour continuer à leur faire plaisir.
- Arrête de me faire la morale ! crachai-je en me retournant. Je ne suis pas... homophobe. Et je n'essaye pas de leur faire plaisir, ça n'a rien avoir avec eux. C'est juste que... tu comprends rien.
- Bien sûr que si, tout a toujours un rapport avec eux. Et je crois que je te comprends plus que tu ne te comprends toi-même.
- Arrête ça, putain ! criai-je. Tu ne me comprends pas, et tu ne me connais pas ! Alors arrête d'insister ou de m'analyser et lâche moi ! Ne m'approche plus ! Tu ne me feras pas devenir comme toi !
Je me retournai et me dirigeai vers l'escalier, le laissant planté là. Juste en bas, au rez-de-chaussée, se trouvait une grande brune que je connaissais bien. Parfait.
- Brayden ! l'appelai-je. Je te cherchais.
Elle se retourna, toute souriante, alors que je me précipitai vers elle. Je n'attendis pas une seconde de plus pour poser brusquement et maladroitement mes lèvres sur les siennes.
- Tu voudrais pas qu'on aille chez moi ? lui proposai-je. On pourra passer la nuit ensemble.
Son visage s'illumina encore plus alors qu'elle m'embrassa à son tour.
- Avec plaisir, bébé.
Je plaçai ma main derrière son dos pour l'entraîner à ma suite. Avant de partir, je jetai un dernier regard en arrière. Yaël était au milieu des escaliers, les bras croisés. Il secouait la tête de droite à gauche en me regardant d'un air dépité, voir dégoûté.
Je détournai le regard et tentai d'ignorer ce sentiment d'inconfort et ce léger pincement au cœur qui me comprimait la poitrine.
Je devais simplement me contenter de sortir d'ci, sans me retourner.
♠️♠️♠️
Hey !
J'espère que vous allez bien et que ce chapitre vous aura plu ! Désolée de l'attente entre chaque updates mais j'ai du mal à jongler entre FALLING, One Year, et les vacances...
En tout cas ça y est, le chapitre de la soirée est là, il s'agit pour l'instant du chapitre le plus long.
Je suis vraiment impatiente d'avoir vos avis dessus !
Dites-moi tout :
Hugo ?
Joyce ?
Des premiers avis sur Austin ?
Et que pensez-vous de Yaël dans ce chapitre ? De sa conversation avec Swann ?
Le comportement de Swann ?
Hâte de tout savoir et de vous lire !
En attendant, je vous souhaite un bon week-end !
Je ne sais pas quand sera le prochain update, mais je peux déjà vous dire qu'il s'agira d'un flashback.
À bientôt, T.
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