-62-CONNOR
« Ce que je veux dire, c'est qu'elle avait des yeux où il faisait tellement bon de vivre que je n'ai pas su où aller depuis. »
Romain Gary - La promesse de l'aube
Connor
Je n'avais pas pu conduire l'interrogatoire de Greer, ce qui me foutait en rogne mais je le laissais dans les mains de Jared qui savait très bien y faire et le reste de l'équipe aussi. La raison était qu'il m'avait vu avec Charlie. Ce type avait parfaitement bien compris qui elle était pour moi et il n'était pas nécessaire de lui donner du grain à moudre et de le laisser se servir de mes émotions contre moi. J'étais entraîné à ce genre de chose, de rester imperméable mais concernant ma petite amie, je dépassais souvent les limites, comme dans la ruelle. J'étais prêt à lui mettre une balle dans le crâne pour qu'il s'éloigne de Charlie, pour ne pas voir ses sales paluches sur elle qui avait pris trop de risques pour m'aider.
Jared m'avait convaincu de le laisser faire au vu des propos que l'ancien sniper m'avait tenu une fois Charlie éloignée. Il s'agissait de menaces trop insistantes pour ne pas y prendre garde. Surtout quand on connaissait le pedigree du bonhomme, il valait mieux ne pas prendre de risque. Il m'avait fait tout un tas de compliments en la nommant de tous les noms possibles et promettant de lui faire sa fête si leurs chemins venaient à se recroiser, en gros. Moi aussi j'avais envie de lui faire voir un feu d'artifice à ce con mais pas de la même manière qu'il envisageait ma femme. Je ne voulais pas y penser parce que ça me foutait dans une rage folle rien que de les imaginer de nouveau dans la position dans laquelle j'avais trouvé ma petite amie, à la merci de ce gars.
Du coup, je ramenais ma copine à son domicile mais avant nous allions avoir une longue et pénible conversation, je pensais. Furieux était au delà des mots pour définir mon humeur. J'avais cru bondir d'horreur en la voyant s'approcher du Smoke Club dans sa robe trop courte et brillante. Je savais que ma colère était diriger par ma peur, c'était toujours le cas avec Charlie.
Avec ce que je venais de vivre, elle aurait dû y penser, merde! Comprendre que je ne voulais plus de drame dans ma vie. Le dernier avait été de trop et je n'étais pas capable d'en subir d'autre. Ouais, j'avais la capacité émotionnelle d'une petite cuillère mais j'étais fais ainsi. La perdre elle, c'était me perdre moi même. Je ne m'en remettrais jamais.
Mes arguments n'avaient pas dû être assez fort pour qu'elle imprime dans son cerveau brillant ce que je ressentais. J'allais en remettre une couche et pas pour rien. Pas de doute, ça allait grincer entre nous.
On avait l'habitude maintenant de se hurler dessus comme des chiffonniers. C'était sûrement ainsi que ça allait finir même si je ne voulais pas que ça se passe de cette manière. Je détestais toujours autant entrer en conflit mais depuis l'arrivée de Charlie dans ma vie, j'avais l'impression de l'être en permanence. Je me battais contre elle, pour elle, mes proches et moi même. Là en revanche, je savais que j'avais parfaitement raison de mon état de nerfs même si ce n'était pas bon de bouillir ainsi.
Je conduisais ma voiture avec un endroit en tête où nous amener. S'eloignant un peu du tumulte de la ville, je prenais le temps du voyage pour me calmer et respirer longuement. Charlie me guettait du coin de l'oeil, attendant que je lui saute dessus pour crier.
Pas question de lui faire plaisir en m'exécutant tout de suite, j'allais la laisser mariner dans son jus. Nous avions continué ce petit manège sur quelques kilomètres encore jusqu'à ce que je gare la voiture près de la plage dans un endroit exempté de toute population surtout à cette heure tardive.
Je lui intimais de sortir d'un coup de tête vers l'extérieur et Charlie me suivit sans râler même si je sentais son énervement. Elle devait lever les yeux au ciel dans mon dos. Je grimaçais quand elle fit le tour de la voiture en redécouvrant cette robe indécemment sexy qui en d'autres circonstances m'aurait sacrément plu. Pas de doute, ma nana était une bombe mais je ne me laisserais pas détourner l'attention. J'avais des choses à dire et je le ferais mais sans la regarder parce qu'une fois tourné vers ses yeux gris, je perdrais toute ma concentration.
Nous étions assez éloignés de la route pour ne pas être dérangés par qui que se soit ou même par la lumière des lampadaires un peu cru. J'étendais la couverture sur le sable et désignait à Charlie de poser son cul à côté de moi. Elle s'exécuta sans broncher une fois de plus consciente de la cocote minute que j'étais. Je regardais l'océan en soufflant avant de me lancer dans ma tirade. J'avais tout mis en place dans ma tête.
—Tu m'as menti encore une fois, à propos de Paul et volontairement en plus. Tu ne peux pas te cacher derrière ton passé ou une quelconque peur, Charlie. Tu l'as fais exprès, espérant sûrement t'en sortir par toi même. On me reproche d'être borné et têtu et j'accepte la critique mais tu es pareil.
—Non, c'est pas ce que tu crois.
—Si! Si, c'est ce que je crois. Mensonge par omission, on continue. C'est ton modis operenti Charlie ! A chaque fois, tu me fais la même et ensuite tu me dis qu' on doit se serrer les coudes ! C'est ta définition peut être mais moi j'ai regardé dans le dico et ce n'est pas ce que j'ai lu. Se dire les choses importantes même si ça fait mal ou que ça dérange plutôt que de tous laisser traîner et que la situation pourrisse. Une petite voix dans ma tête me disait bien qu'il y avait autre chose mais je te laissais le bénéfice du doute. Résultat des courses, j'avais raison et je déteste avoir raison dans ce genre de cas. C'est quoi ton excuse ?
Je ne la regardais toujours pas, me refusant à craquer devant elle et de la prendre dans mes bras. Charlie était ma plus belle faiblesse.
Le silence s'étirera sur de longues secondes.
—J'avais peur que tu lui tombes dessus et que tu mettes ta carrière en péril et ta vie aussi.
—Parce que tu me crois assez idiot en plus pour faire ça ?
Je tournais vers elle furibard alors qu'elle baissait les yeux. C'était ce qu'elle pensait de moi alors ? Putain, la chute !
—J'ai pas dis que tu étais idiot, grommela t-elle. Impulsif oui, en revanche.
Un point que je lui accordais mais je n'étais pas une tête brûlée non plus. Y avait une sacrée différence. Charlie m'exposait les faits. Paul la collait au cul depuis un trop long moment, toujours sous ses yeux, il la persécutait de sa présence. Elle m'assura qu'après aujourd'hui, il ne serait plus un problème mais je resterais juge de la situation et m'en assurerait personnellement. Elle n'avait rien rajouté se mordant la langue et triturant ses doigts.
Nous allions passer à l'autre partie de la journée et pas des moindres. Un frisson glacée me parcourait la colonne quand je la revoyais arpenter les rues de Hollywood Boulevard pour jouer les espionnes.
—Promets moi que plus jamais de ta vie, tu ne feras ça !
J'espérais que Charlie ne joue pas les dramaturges en criant au scandale et que je dépassais les limites.
—Je te jure ...
—Ne jure pas, je la houspillais.
Pas question de l'entendre me faire une promesse que dans le fond je savais qu'elle ne respecterais jamais.
—Mais c'est toi qui vient de dire de ....
—Alors c'est pour me faire plaisir Charlie, je demandais.
Elle avait beau être une surdouée, Charlie ne comprenait plus rien à mon charabia. Je ne démêlais pas mes propres phrases. Comme d'habitude dans mon cerveau, tout avait un sens mais une fois les mots sortis, c'était le festival du grand n'importe quoi.
—Jamais, je dis bien au grand jamais, tu ne mettras ta vie en danger pour m'aider.
J'avais l'impression d'en faire des caisses mais il fallait comprendre ma situation et mon trouble. Nous étions assis là tous les deux sur cette plage, plongés dans l'obscurité, à nous défier du regard puis elle reprit la parole.
—Je t'aime et j'ai constamment peur pour toi, tu sais, finissait par avouer Charlie. Peur que tu ne reviennes pas, que tu sois tué.
Je prenais un coup de poignard parce que c'est ce qui me terrifiait aussi. Finir dans une boîte trop tôt, peur de la laisser seule et désœuvrée.
—On a en déjà parlé à plusieurs reprises, Charlie. C'est mon travail.
Je tentais de me persuader.
—Tu peux le répéter autant de fois que tu veux ça ne changera pas que je suis terrifiée par ce que tu fais. Je n'ai pas mon mot à dire sur ta carrière, okay mais je m'inquiète. Et te mêler encore plus au merdier qui me colle au cul, c'était trop me demander. Connor si je te perds comme j'ai perdu Alec, je ne me relèverais pas. Un autre coup et je plonge.
Je hochais la tête, la gorge obstruée. C'était également ce que je ressentais pour moi même et surtout pour Charlie. Je n'avais pas de solution face à ce problème. Je ne quitterais pas mon travail, sous aucun prétexte, j'aimais trop ce que je faisais.
Tout me ramenait à ce que je ressentais depuis la mort de Mike. Le canon d'un revolver pointé sur moi, le bruit de la détonation et le noir total avant de revivre une nouvelle scène. La transposition de l'image d'une Charlie éplorée ne voulait pas quitter mon esprit. Plusieurs fois je m'étais réveillé en panique après avoir fait ce mauvais rêve.
Je passais mon bras en travers de ses épaules pour qu'elle vienne se blottir contre moi. D'abord les mains enserrant ses genoux, elle se laissa aller et finit par enfouir ses mains refroidies sous mon sweat.
—Je peux pas te promettre qu'il ne m'arrivera rien mais je prend toutes les précautions possibles. Je suis prudent.
Elle n'avait plus répondu se contentant d'observer vers l'océan et moi aussi. C'était loin d'être suffisant, je le savais. J'avais dû mal à faire quitter de sous mon crâne toutes les conneries qui le parcourait depuis un moment. Je voulais oublier tout mais pas moyen. Tous les dérivatifs possible, je les avais testé mais rien ne fonctionnait. Toujours ses mêmes images, ses même pensées et un ressenti qui me laissait un goût amer dans la bouche. Je voulais le jack pot, le gros lot, la fille et le boulot. L'un des deux en pâtirait mais lequel j'allais devoir laisser de côté pour tracer mon chemin ?
Je laissais couler ma tête contre l'épaule de ma femme. Je l'appelais de plus en plus de cette manière ces derniers temps. Elle était mon amour, ma moitié, celle qui comblait les parties manquantes de mon être. J'employais ce mot comme un signe d'appartenance et j'étais tout autant à elle, un réflexe profond et doucereux. La laisser était impossible, je m'y refusais. Rien que l'odeur de son parfum de cerise m'envoûtait, tout comme la douceur de sa peau semblable à du velours. Je levais ma main d'abord hésitant pour caresser son visage qui se leva vers moi. Ses yeux se plantèrent dans les miens et nos lèvres se trouvèrent de manière instinctive. Un baiser profond que je n'avais pas envie d'arrêter. Je voulais me perdre en Charlie. Reculant de quelques centimètres, je sentais son souffle chaud contre ma bouche et l'intensité qu'elle y avait mis par sa respiration entrecoupée comme la mienne.
—J'ai envie de toi.
J'étais cash et je vis ses yeux s'agrandirent sous la surprise. Je ne lui laissais pas le temps de lui répondre que je l'allongeais sur la serviette pour me positionner au dessus de son corps frêle mais terriblement tentant. Le peu de lumière me permit de voir que ses joues étaient rouges et ses yeux brillants. J'avais attiré son attention de la bonne façon. Je l'embrassais en me plaquant contre elle et je mordais sa lèvre inférieure. Ma colère, ma peur, je voulais les transformer en passion. Ma main descendit le long de son ventre pour atteindre le centre de son corps. Je passais la barrière de sa culotte ridiculement petite et faite de dentelle dans un grondement sourd pour atteindre la partie la plus sensible. Je passais mes doigts de manière délicate, de léger effleurement
J'allais la mettre au supplice.
Plus nous étions collés l'un à l'autre puis je sentais cette angoisse monter en moi et que je voulais faire disparaître. Je n'étais pas capable de choisir, je refusais de perdre ce dont j'avais envie. J'écarterais les obstacles les uns après les autres pour rester avec Charlie. Je résisterais de toute mes forces, de toute mon âme. Charlie avait su faire preuve de résilience dans sa vie. Elle avait pris ses doutes, sa tristesse pour en faire une force motrice. Je l'admirais pour cela alors il était temps pour moi d'en faire tout autant qu'elle, d'être à son image. Foncer sans jamais regarder en arrière.
Je sentais des frissons sur sa peau glacée. Elle devait se les geler vu le peu d'épaisseur de ses vêtements. Je me levais d'un bond en l'emportant avec moi dans le mouvement. Charlie poussa un petit cri de surprise puis suivit mon allure. Nous regagnions la voiture d'un pas rapide et je ne faisais entrer à l'intérieur mais sur les sièges arrière pour le jeter de nouveau sur sa bouche.
J'enlevais mon sweat d'une contorsion pas évidente dans un petit espace. Mon dos s'arc-bouta et je passais enfin le fil de mes bras alors que Charlie me regardait ahurie. Les yeux comme seize rond de flan, la bouche grande ouverte et les mains en l'air.
—On va pas faire ça ici, tout de même, argumenta t-elle à mon regard.
—Je vais me gêner tiens, je répliquais.
Ce n'était pas deux potentiels pèlerins perdus qui me ferait changer d'avis. J'avais envie de ma meuf, c'était pas un crime.
—Si on nous voit ?
N'importe quoi. Excuse pourrie. Moi j'avais envie et je savais très bien, qu'il en était de même pour elle.
—Charlie ! Il est trois heures du matin, au milieu de nulle part. Qui pourrait nous voir, des rongeurs ?
Je vis ses yeux faire des aller retour entre l'extérieur et moi jusqu'à ce que une petite ampoule s'éclaire au dessus de sa tête.
—T'as raison !
Depuis le temps que je lui disais que j'avais raison, elle aurait dû m'écouter. Sa veste ainsi que sa robe venait de faire un vol planée sur la plage arrière alors que je m'évertuais à vouloir retirer ma ceinture et mon pantalon. Charlie me fila un coup de paluche alors que je regardais ses seins enfermés dans une dentelle transparente de couleur noir bordée de fils dorés. De la lingerie fine et très très à mon goût. Elle allait me filer de la tachycardie à ce compte.
—C'est nouveau, je demandais en les pointant du doigt alors que ma nana avait déjà ses mains sur moi.
Un sourire de provocation de sa part, un haussement de sourcil évocateur.
—Okay, je m'inclinais. J'oublie toutes tes bêtises et je te pardonne si t'en remet tous les jours.
Son rire s'envola dans l'habitacle pour se déposer sur nous comme une pluie de douceur et ses yeux gris au couleur d'un ciel d'hiver me capturèrent. J'y étais chez moi et hors de question de m'en séparer.
Nous avions fait l'amour dans cette voiture de manière torride. De la buée sur les vitres nous rendaient invisible sans pour autant laisser place au doute. Nous étions en sueur l'un contre l'autre, Charlie se tenait encore sur mon torse essoufflée et un peu perdue tout comme moi. Nous étions grisés par des orgasmes violents qui avaient suivis l'un après l'autre. Je laissais glisser sa tête dans mon cou. La tension me parcourant m'avait quitté mais je n'étais pas apaisé pour autant. Il persistait cette lourdeur installé en moi, alimentée par la peur que j'avais pu ressenti pour la sécurité de ma petite amie. La peur de la voir blessée mais aussi terrifié par nous. Ce que nous étions capable d'entreprendre, sans limite, à prendre des risques inconsidérés pour l'un et l'autre. Ce qu'elle avait fait aujourd'hui n'était pas dirigé que dans le sens de m'aider dans mon travail. Charlie voulait me soulager de la peine que je ressentais depuis New-York. Cette blessure dans ma poitrine était à vif et je n'arrivais pas à la contrôler comme mes pensées.
Les yeux de ma belle se levèrent vers moi. Le gris clair de ses iris comme deux étoiles brillantes à l'attraction violente qui me parlaient. Par ses yeux, Charlie utilisait tout son langage me montrant son affection et tout son inquiétude. Je tenais encore un peu mon attention avant de détourner le regard.
J'y avais trouvé mon chez moi, ma source de bonheur. Malheureusement, il y avait cette petite voix en moi qui me disait que tout prendrait fin et bientôt.
Je refusais d'y croire alors je la prenais contre moi en serrant fort Charlie dans les bras pour me persuader du contraire.
****
On approche de la fin à grand pas.
Toujours perdu ?
Bises 😘
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