-53-CONNOR
"Tes fautes de fils sont mes défaillances de père."
Film - Gladiator
Connor
Mon père venait se positionner en face de moi tandis que les filles étaient en train de papoter dans la cuisine. Aydan était parti retrouver des potes qu'il s'était fait sur la plage, me laissant seul avec notre paternel, il faisait chier le gosse. Je m'étais calmé mais ce n'était pas pour autant que j'avais envie de jouer au bon fils. Je rongeais mon frein de ne pas exploser, d'envoyer balader tout le monde et arrêter cette hypocrisie ridicule.
Depuis deux jours, je mordais la langue, appliquant des exercices de respiration en vain. J'avais cru passer outre en partant avec mon père et mon frère l'autre matin. Nous avions passé un bon moment avec Aydan vraiment, sous le regard joyeux de mon paternel. Je savais qu'il aimait nous avoir tous les deux réunis mais il restait dans ma tête que moi je n'avais pas eu la chance de mon petit frère d'avoir mon père. Je me sentais bête de ressentir cette jalousie. Je me retenais et je le faisais pour Charlie qui m'avait poussé à accepter de créer une relation avec ma famille mais j'avais du mal à lâcher la bride. Des années de retenue et d'amertume à faire passer en un week-end n'était pas chose aisée et je sentais qu'il en faudrait plus, ça ne suffirait pas et je ne savais pas si j'en avais envie. Je regardais mon père qui lui aussi ne semblait pas très en phase dans ses pompes. Il tournait et retournait comme un prédateur autour de sa proie et j'étais la pauvre bestiole prête à être dévorée.
Celui-ci me proposa un verre que j'acceptais volontiers. J'étais tendu depuis notre arrivée. Niveau conversation c'était limité entre nous sans mon frère au milieu pour faire le lien ou Mary alors nous étions bon pour nous regarder en chien de faïence comme à cet instant. Je faisais tout pour éviter ces moments à deux mais parfois malgré moi, j'y étais obligé.
Charlie me laissait seul, elle aussi, c'était vache de m'abandonner de cette manière pour se casser tailler pour le bout de gras avec Mary. Elles s'étaient bien trouvé tiens. C'était pour cela que je ne voulais pas aller en Irlande trop souvent, je faisais tout pour éviter mon père comme je le faisais avec ma mère. Ma bande d'amis là bas quand j'étais à New York me permettait de ne pas être trop présent chez elle.
La famille était pour moi une plaie, un boulet que je portais à la cheville, je voulais m'en débarrasser mais au fond de moi un sentiment me retenait. Ce truc que j'avais tenté d'enfouir depuis gamin. Je ne pouvais pas m'empêcher que mes parents valident mes choix ou me portent de l'attention comme tout môme normal. Pourtant, j'avais été tellement déçu que j'avais fait abstraction des années en arrière afin de tout ignorer pour ne plus être atteint. Ça avait marché. Coquille, carapace en béton armé, toutes les expressions étaient les bonnes pour désigner la barrière que j'avais établi entre eux et moi. Aujourd'hui, dans cette situation, je ne pouvais pas m'empêcher de me sentir mis à nu devant mon paternel qui me fixait et mal surtout.
—Ta compagne est une femme charmante, finit par dire mon vieux en brisant le silence. On voit que c'est quelqu'un de bien avec la tête sur les épaules. Tu as fais le bon choix.
Je relevais la tête, un peu alerte. Un compliment mais je le prenais comme un affront contre celui que j'étais, ça recommençait.
—Tu vas critiquer mais mes anciens choix féminins ? J'ignorais t'intéresser à ce point, je demandais.
Mon père garda un visage impassible. Il comprenait très bien le sous entendu de la question. Il savait ce que je voulais dire. Que je n'étais pas prêt à supporter une deuxième salve de reproche mais il demeurait un saleté d'irlandais au caractère d'acier.
—Ce n'est pas ce que je dis.
Non, je savais très bien qu'il doutait de moi. Je n'étais pas le fils espéré, juste une déception mais maintenant je n'allais plus fuir. Au contraire, je devais l'affronter, ce que j'aurais du faire depuis longtemps.
—Avec toi, on ne sait jamais, je reprenais. Puisque tout ce que je peux entreprendre ne te satisfait jamais.
Non, je n'avais pas oublier notre arrivée et je l'avais encore en travers de la gorge. Je m'étais tue pour ne pas mettre à mal ma copine mais j'en voulais à mon père et pas prêt à lâcher mon os. Sous les indications de Aydan, je savais que Charlie l'avait remis à sa place et le bougre semblait plier sous les mots de ma copine. D'où l'approbation de mon vieux aujourd'hui mais ça ne me contentait pas.
—Je voulais te faire un compliment.
Ça me faisait rire, mon paternel faire des compliments? Ça ne lui ressemblait pas, ce n'était pas lui. Un compliment était toujours accompagné d'une suggestion. Il était un éternel insatisfait.
—En te servant de ma femme, quel compliment. Je ne suis intéressant qu'à travers elle alors, une valeur ajoutée.
Je lançais les hostilités clairement mais je n'arrivais pas à m'empêcher de le provoquer.
—Connor arrête de m'agresser comme ça, débutait mon père tendu comme la corde d'un arc. Je suis ton père, j'ai droit au respect.
Le respect évidement, cette fichue considération. Les irlandais qui plaçaient le respect et la fierté avant tout chose, rien n'avait changé tout ses années. Il ne comprenait rien à rien ou ne voulait pas le faire.
—C'est vrai que tu t'y connais en bienséance toi, j'argumentais avant d'avaler une gorgée d'alcool sec. Et tu appelles ça comment un mec qui se barre à l'autre bout du monde en laissant son gosse seul. Chez moi, c'est un connard, et toi ?
Mon père avait fait claquer son verre sur la table d'une humeur de chien pour essayer de me faire taire une bonne fois pour toute mais je n'étais plus un enfant et je n'écouterais plus. J'avais des envies de guerre au fur et à mesure des minutes qui s'étiraient. L'ambiance venait de changer pour devenir une énorme chape de plomb et l'air se chargeait en électricité. La table basse nous séparant, nous étions comme deux ennemis près à en découdre.
—Je ne vais pas tolérer ton comportement bien longtemps, me reprocha mon père qui montait dans les tours. Nous avons fait l'effort de venir à toi puisque tu ne dégaines pas toi le faire. Ne serait-ce que pour ton frère et j'exige que tu me respectes !
Un voyage et tout serait oublié ? Les efforts ne devaient s'en tenir juste à cela ? C'était trop facile et c'était encore moi qui me prenait une réflexion. Décidément, je faisais fausse route sur tout.
—Oh mais tu peux exiger autant que tu veux, papa. Ne mêle pas mon frère à cette histoire et n'essaie même pas de me prendre par les sentiments. Parce que ça me met dans une rage noire et je vais pas me contrôler longtemps, crois moi!
Je m'étais levé, pris dans ma colère. Je dominais mon paternel qui me regardait cette fois avec un air de chien battu.
—Je pensais que on avait dépassé ce stade depuis longtemps.
Une voix lourde de regret mais ça ne me touchait pas. On avait effectivement avancer dans notre relation chaotique mais ce n'était pas dans le sens que lui pensait, c'était tout le contraire. Je reposais mon cul sur le fauteuil, pesant mes mots mais la vague qui me submergeait avait débordé m'obligeant à dire ce que j'avais réellement au fond de moi. Cette rancoeur tenace dont je voulais me débarrasser.
— Charlie n'est pas un bon choix comme tu le dis si bien. Je ne suis pas avec elle pour ses qualités intellectuelles ou morales, ce n'est pas un objet de valeur. Ça va au delà de ça mais se sont des choses qui te dépassent. J'aime cette femme parce qu'elle me fait me sentir important, que je compte à ses yeux, je n'ai pas la deuxième place avec elle. Non, jamais. Elle m'aide de bien des manières et m'accepte tel que je suis, juste Connor. Elle s'en fout que je sois un flic ou procureur ou même le président des États Unis. Elle m'aime pour celui que je suis et point barre. Qu'as-tu fais toi, à part me rabaisser sans arrêt? Connor, fait plus, tu peux le faire encore et encore, dépasse tes limites. Fonce ! Plus haut, toujours plus, plus. Ça toujours était ton discours. Ce n'est pas ce je veux même si j'en ai la possibilité, accepte le.
Cet éternel discours. Ses mots pesants qui ne m'encourageaient pas. Ils me faisaient fuir.
-Tu sais que tu as commis des centaines d'erreurs et que j'en ai payé le prix, je reprenais. Quand j'avais le plus besoin de toi, tu es parti. Tu m'as totalement occulté, préférant fuir et faire l'autruche. Mettons la tête dans le sable en espérant que la tempête s'éloigne. Les culs pincés d'Irlande apprécieront l'hommage.
Je n'avais pas fini, tellement de chose à dire et tout se bousculait dans ma tête de manière désordonnée.
—Et aujourd'hui, tu voudrais que je fasse comme si de rien n'était et que je m'excuse de dépasser les bornes? Mais qui m'a demandé pardon à moi hein papa ? Qui ? Personne, voilà la réponse. Toi et maman, vous m'avez complètement oublié, me considérant plus comme un bagage dérangeant dans votre vie, que votre fils. Alors excuse moi d'avoir mener ma barque comme je l'entendais. Et de refuser ton aval dont je n'ai plus besoin.
Je n'attendais plus rien de lui, n'espérait plus voilà où moi j'avais avancé alors que lui restait sur ses opinions, son prétendu savoir.
—Comment veux-tu que j'essaie de réparer mes tords si tu passes ton temps à me rejeter, demandait mon paternel de plus en plus énervé lui aussi.
—Parce que c'est trop tard, je gueulais. Ça arrive vingt ans trop tard et ce n'est pas réparable. Tout a basculé, le jour où tu es parti sans te retourner sur moi pour fuir. Mon arrivée en Irlande n'était pas ton choix, nous le savons tous les deux. Si maman n'avait pas insisté pour que je quitte New-York à cause de mes conneries de gamin, tu n'aurais jamais pris la décision toi même de me faire venir. Je n'ai été qu'une obligation que tu t'es senti astreint à exécuter.
Mon père me regardait et je maudissais d'avoir ses yeux parce que nous étions tellement semblable physiquement et moralement. A bien des égards, j'avais moi aussi cherché la fuite, utilisée trop souvent. Je me sentais tout aussi minable de faire des reproches à mon paternel pour des fautes que j'avais commise moi même.
—Je n'ai pas besoin de toi papa et je ne veux pas de tes compliments ou même que tu essaies de rattrapper toutes ses années. Je ne suis plus un enfant.
Me relevant pour la dernière fois, j'allais rejoindre notre chambre mais en tournant, je vis Mary et Charlie qui avaient entendu toute notre conversation. Le regard peiné pour nous deux et j'étais frappé en plein cœur. Elles n'auraient jamais du entendre cette colère. Je me maudissais pour tout ce que je venais de dire mais il s'agissait de la vérité et même mauvaise à dire, elle devait l'être. L'abcès devait être crevé une bonne fois pour toute. Je n'avais rien contre Mary, c'était tout le contraire mais je savais qu'avec mon père le lien s'était brisé et impossible à recoller.
Charlie m'avait laissé de longues minutes seul avant de venir me rejoindre. Elle n'avait rien dis, juste entouré mon cou de ses bras. Je ne voulais pas être réconforté parce que je jugeais ne pas en avoir besoin ni même le droit pourtant je me laissais aller contre elle.
—Je sais que ces dernières semaines, notre vie à été compliqué, que on a traversé beaucoup de bas mais sache une chose, Charlie. C'est que malgré tout, je t'aime. C'est toi ma famille désormais.
Je n'avais plus qu'elle après tout mais ça me faisait mal de me le dire.
—Mon amour, me murmurait-elle en passant sa main sur ma tête.
Ses mots me faisaient du bien comme ça me faisait du mal. Je me sentais toujours en parti incomplet.
***
Nous allions rentrés plus tôt, je voulais me tirer parce que je ne supportais plus ce climat angoissant. Venir ne m'avait rien apporter de plus à part d'être perdu et je voulais fuir pour oublier. Pas seul, avec Charlie qui m'avait apporté tout son soutien. Elle accepta ma demande de rentrer chez nous.
Je fis part de cette décision quand mon petit frère réapparaissait une grosse demie heure après. Aydan ne disait rien mais je sentais sa déception. Ça me faisait chier de le quitter parce que je l'aimais mais j'avais besoin de me tirer loin et de reprendre ma vie comme je la voulais.
Les yeux de mon frère trahissait sa peine et c'était là que je me sentais le plus mal. Il n'avait rien demandé, rien de fait de mal mais je ne pouvais plus. Cette histoire ne concernait que mon père et moi. Je lui avais dis mais mon frère ressemblait à sa mère. Il voulait tout arrangé, que tout le monde soit heureux ensemble et c'est ce qui me confortait dans mon idée que lui saurait rebondir, pas comme moi. Je prenais mon petit frère une dernière fois dans mes bras et le laissait saluer Charlie. Les deux étaient devenus comme cul et chemise.
Mon père s'approchait de moi alors que j'étais déjà à la portière de ma voiture, sur le départ. Je n'attendais que Charlie qui prolongeait l'instant avec Mary comme un supplice.
—Connor, on ne peut pas ...
—Laisses tomber papa, je le coupais. C'est bon.
Je rentrais dans ma voiture sans lui dire quoi que soit et sans le regarder alors que Charlie lui disait au revoir en échangeant quelques mots avec lui. Leurs yeux me dardaient et je faisais semblant de rien.
Quand Charlie prit enfin place sur le siège passager, je démarrais en jetant un coup d'œil dans mon rétro intérieur pour voir ma famille fixée notre voiture, les bras ballants.
Avouer tout mon ressenti ne m'avait pas soulagé. Juste réussi à me faire sombrer dans une déception affreuse. Il me manquait toujours un morceau de mon puzzle. C'était l'impression que j'avais.
J'espérais qu'elle allait se réduire avec les kilomètres que j'avalais à la vitesse de l'éclair. Qu'est ce qu'il fallait faire de plus ?
****
On a découvert tout ce qui composait Charlie maintenant c'est au tour de Connor !
Parce que finalement, vous ne savez pas grand chose sur lui et son passé. Des brides de vie mais vous allez découvrir pourquoi il est ... lui ! 😅
Chacun son tour, pas de jaloux !
Il est bien rancunier aussi le Connor et y a qu'avec Charlie qu'il se radoucit, on dirait.
Bises 😘
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