-14-CONNOR
"Une chute sans fin dans une nuit sans fond. Voilà l'enfer"
Victor Hugo
Connor
J'avais eu ce que je voulais. C'est bon maintenant je pouvais arrêter d'y penser, tout était fini. Il n'y aurait plus de sorties au restaurant ou à moto, plus d'appel, de courses à pied. C'était terminé. J'avais tout gâché, volontairement. Je ne devrais pas ressentir ce que je ressentais en ce moment.
J'allais redevenir le Connor que tous connaissaient, concentré, sans attache et sans remord. Alors pourquoi j'avais envie de vomir ?
Il y avait ce sentiment de dégoût qui me tournait l'estomac. Pourquoi j'avais fais ça, putain, je frappais mon volant. Charlie avait été la personne la plus fantastique que j'avais rencontré. Le besoin de faire demi tour pour y revenir se faisait ressentir. J'appuyais sur l'accélérateur, je ne devais pas.
Ca ne rimait à rien. Pourquoi vouloir revenir ?
Ma voiture avalait les kilomètres dans la nuit pour remonter vers le Nord. Je voulais un coin isolé du monde pour me remettre.
C'est elle qui me faisait peur, là plus grande trouille que je pouvais ressentir. Elle en voulait plus, juste un petit ami sympa. Il n'y avait pas de mal à vouloir une vie à deux. J'en étais incapable moralement, je ne m'occupais que de ce que je ressentais sans prendre en compte les autres alors pourquoi c'était différent cette fois ?
J'avais passé tellement de temps à vouloir prendre soin de Charlie, à la sortie de l'ombre pour réparer son âme que je m'étais cassé pour elle. J'avais détraqué tout ce qui me composait pour une seule chose que je m'étais promis qui n'arriverait pas.
Je posais ma tête dans ma main et appuyais sur ma tempe, tenant le volant d'une seule. Un mal de tronche phénoménal me perforait le crâne. Des élancements soudain me collèrent des décharges qui me faisait grincer des dents à chaque fois qu'ils survenaient. Pour encore plus m'enfoncer, la radio débitait une chanson que Charlie adorait. Une de ces ballades où le mec disait qu'il ne voulait pas voir pleurer la fille et qu'il voulait être honnête.
Saloperie de chanson.
Je donnais un coup dans le poste pour faire taire la radio, je n'avais pas besoin que l'on me rabâche mes conneries .
Plus j'avalais les kilomètres au dessus des limitations de vitesse, plus je sentais mes muscles se contracter douloureusement. Un vide se créant en moi et de la bile me remontait, je fis un brusque écart pour me coller sur le bas côté, dans un tumulte de klaxon de la part des autres usagers.
A peine le temps de courir au dehors de la voiture que je dégueulais tripes et boyaux. Je me maudissais tellement que mon corps voulait faire ressortir la merde en moi. Puis je m'assoyais par terre ne tenant plus. J'avais la gorge sèche. La tête dans un étau prêt à exploser et toutes ces images qui passaient en boucle et ne voulant pas s'arrêter. Tous ce que nous avions partagé, ça revenait par flash douleur. La sensation de sa main sur moi, son parfum ...
Non !
Je levais ma carcasse du sol d'un bond en colère. J'avais besoin de faire quelque chose qui m'aiderait à faire ça sortir ça. Je ne me contrôlais plus, je frappais dans un caillou qui vola mais la sensation n'était pas assez forte. Un deuxième, un troisième, je me trouvais tellement idiot a hurler et frapper dans le vide que se fût pire. En revenant vers ma bagnole, je frappais d'un coup de pied le pneu pour gueuler sous la douleur. Décidément ce genre de comportement n'avait aucune sens.
Je ne respire pas mieux, c'est tout le contraire. Je suis en train de crever à petit feu.
Le sentiment de sa perte surpassait les autres.
Qu'est ce qui pouvait bien être aussi cramé en moi pour ne pas être capable de faire ce que tout autre homme aurait accepté avec joie ?
Je sortais mon téléphone de ma poche, un fois réinstallé dans la voiture. La gorge douloureuse et mes yeux brûlants. Une seule personne pouvait m'aider.
—Matt.
Il resta silencieux.
—Charlie, ma voix n'étant plus qu'amertume. Tu avais raison.
—Ça devait bien finir par arriver, me répondît mon ami. Tu passes jamais plus de deux mois avec la même fille pour baisser la garde et voir si ça peut fonctionner. Et plus tu vieillis plus ça empire.
La voix de mon pote n'était que consternation. J'avais été négligent, j'avais laissé ça prendre trop d'importance.
—Je sais plus quoi faire. Matt t'as toujours été là pour moi depuis que on est gosse.
Il prit un grande inspiration avant de me répondre.
— Cette fille tu traînes avec elle depuis plusieurs mois, c'était inévitable depuis le temps que tu me parles d'elle.
Non, rien n'était inévitable, c'était faux. Il suffisait d'ouvrir les yeux de ne pas se laisser aller. Garder le contrôle en permanence. Et je n'avais pas été prudent.
— Elle est fragile et tellement importante, Matt. Elle mérite tellement. Comment je vais survivre à ça putain !
J'avais vraiment l'impression que cette spirale ne prendrait jamais fin. Être emporté dans des profondeurs toujours plus noirs jusqu'à l'écrasement.
—Si tu m'appelles c'est que tu veux mon avis, me dit mon ami. Même si ça te fait pas plaisir, je vais te le donner. Tu te poses les mauvaises questions, Connor. Cette fille tu l'as dans la peau depuis le premier jour où tu l'as vu. Voilà la vérité.
Il en rajouta une couche qui m'enfonçait. Il ne m'aiderait plus en rien lui aussi.
—Tomber amoureux, ça préviens pas mon pote.
Il ne m'épargnait pas, jamais. Je savais que Matt avait raison, je ne répondais pas. Matt savait, il savait toujours bien mieux que moi, ce qui me torturait l'esprit.
—Je peux te dire comment rattraper le coup pour te mettre avec elle, m'asséna t-il, sérieux. Pas pour la larguer parce que c'est une grosse erreur de ta part. T'es qu'un con. Tu as peur de souffrir. C'est le lot de chacun mon pote. Et c'est pas en t'enfermant dans tes principes de merde que tu seras mieux protégé que le commun des mortels.
Toujours le silence de ma part. Je n'avais rien à dire sinon, en rajouter encore sur les adjectifs qui pouvait me désigner. Rien de sympa.
—Prend ce que je dis comme tu veux. Si je te dis tout ça c'est que je t'aime mon frère. Alors pinte toi la gueule ce soir et dort . Et demain sort tes couilles et va chercher ta meuf. Tu me rappelles quand c'est fait.
Et il me raccrocha au nez. Depuis qu'il avait décidé de se marier il pensait que on allait tous faire pareil mais merde, je n'étais pas lui.
Je n'avais pas sa vie, ni son passé. Le mien était un puzzle que j'avais renoncé à remettre dans le bon sens. Je n'avais jamais eu d'importance pour qui que se soit, pour personne. Toujours la deuxième place. J'en avais pris mon parti refusant tout ce qui pourrait me blesser. Tirer un trait n'avait pas été facile mais j'en avais eu la force nécessaire. La distance était la meilleure façon de se protéger. Je n'avais jamais lutter contre moi-même à ce point. Je menais une bataille ou quoi qu'il pourrait se passer je finirais perdant.
Mais rien ne me pousserait à vouloir recommencer, je me l'étais promis. Plus de confiance, plus d'attachements, c'était une vie de solitude oui mais plus de déception non plus.
Aujourd'hui mes certitudes s'étaient envolées. Pour une simple paire d'yeux gris, un sourire. J'étais pathétique, tombé comme les autres.
Je relevais la tête pour observer les vagues et prendre un peu d'air. Je me relevais de mon siège en avançant vers la plage. L'air marin me fouetta le visage emplissant mes poumons et faisant passer l'envie de vomir. Je ne me sentais pas mieux comme je l'avais imaginé. C'était même pire.
Et si j'avais accepté, si je l'avais laissé m'aimer et accepter moi même ce que je ressentais pour elle alors que serais-je devenu ? Meilleur ? Plus fort ?
****
Il est au fond de son trou et moi avec.
Heureusement que internet passe encore sous terre.
On vous adore hein mais tant que les arbalètes ne seront pas levées, on sortira pas.
Connor et Harmo
Bises 😘😘
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top