-10-CHARLIE
En fuyant le tonnerre, on tombe sous la foudre.
Proverbe espagnol
Charlie
Le vol avait été une horreur, des perturbations balançant le zing comme une girouette. Des mômes hurlants, une bouffe déplorable, le tout réunie dans cette boite de conserve dont je n'étais pas sûr de sortir vivante tellement la chaleur était prenante.
Nous avions eu plus d'une heure de retard et je n'avais qu'une envie, me glisser dans mon lit pendant deux jours.
Ces quelques jours à Washington n'avait pas été de tout repos non plus. Les réunions s'étaient enchaînées, partant confiante avec des rapports de mission plus que réussi, j'avais eu du mal à garder le rythme qu'imposait la cadence. Je n'étais pas facilement impressionnable mais être face à mes collègues des quatre coins du pays pouvaient avoir des allures d'arène.
Une fois l'avion au sol, je me dépêchais de récupérer ma petite valise et rejoindre la sortie. Nous avions convenue avec Sasha que se soit elle qui vienne me chercher, un peu comme à chaque fois.
Ravie de rentrer et de revoir mes amis, j'avais pour eux une série de cadeaux, des trucs de touristes un peu ridicule mais qui leur ferait plaisir. Mais avant de pouvoir ouvrir la bouche dans la voiture, Sasha me prit de court.
—Je suis fâchée après toi Charlie et pour de bon. C'était quoi ce numéro de vamp que tu nous as joué là ?
Le petit lutin s'agitait sur son siège et moi j'avais peur quand à sa façon de gérer la route.
—Je te demande pardon ?
—Pas de ça avec moi, ne joue pas à l'innocente. On peut dire que vous vous ressemblez tous les deux avec Connor, vous êtes la paire.
—Je ne comprends ...
Elle me coupa la parole. Je sentis qu'elle allait se lancer dans un de ces monologues qui me prenait la tête. Je venais de faire plusieurs heures de vols ainsi que le décalage horaire et je n'étais pas prête à supporter des remontrances mais une fois la machine Sasha lancée, c'était peine perdu que d'essayer de l'arrêter. Alors je me posais plus confortablement, la tête contre le carreau pour l'écouter brailler.
—Stop, j'en ai marre, dit-elle de sa voix haute perchée de poupée. Je supporte ton sale caractère depuis des années, jusque là, tu me faisais rire mais plus aujourd'hui.
Je le connaissais par cœur ce discours rébarbatif.
Charlie, tu es une tête de mule, une vraie bourrique.
Buttée, tu veux avoir toujours raison. Pas capable de plier et bla-bla-bla
— Tu vas aller t'expliquer clairement avec Connor et t'excuser. Ce n'est pas de cette manière que l'on construit une relation. Je sais que tu n'en as jamais connu de normale mais tu es une adulte aujourd'hui alors grandit.
Les vaches dansaient la polka.
Je me faisais traiter comme une petite écervelée et c'était moi qui devait demander pardon, allons bon !
Et quoi plus encore.
Pas prête à me laisser faire, je préparais ma riposte, prête à monter au creneau.
—C'est lui qui a commencé.
C'était nul de dire ça mais je n'avais rien d'autre sous le coude, un peu léger certes mais ma première défense.
Ma blonde monta en pression sous mes yeux.
—On est pas dans une cours de récréation, merde Charlie. Vous passez votre temps à jouer à « suis moi, je te fuis ». C'est tellement perturbant que j'en ai la tête qui tourne.
Elle sortait les gros mots maintenant. Attention à nous.
Je croisais les bras pour me caler dans le fond du fauteuil. Je refusais d'entendre ses conneries.
—On vous a très bien vu à mon anniversaire. Vous n'êtes pas discrets. Pourquoi tu l'as laissé sur le carreau ?
La coupe était pleine et je bordais. Repenser à ce moment me mettait dans tous mes états possible.
—Putain Sasha. Ferme ta grande gueule pour une fois. Ca ne te regarde pas Sasha, je gueulais, énervée, frustrée.
Silence. Bien nous pouvions réfléchir calmement.
Un coup d'œil m'indiqua que Sasha était mal. Les joues rouges, elle se contenait.
Puis sa voix revenue au calme continua pourtant sa route dans mon esprit échauffé.
—Tu t'es vengée, n'est ce pas ? Ça t'as fait du bien ? Tu es contente de toi, je suppose.
Mes bras redescendirent d'eux même, le couperet était tombé. Je sentis que j'attrapais le bout de mes doigts pour les tordre. Je ne faisais pas bonne figure très longtemps.
Je n'en revenais pas d'avoir pu hurler sur Sasha, de cette façon.
Le silence s'abattit dans la voiture, nous nous calmions quelques minutes puis Sasha reprit.
—Tu n'écoutes jamais Charlie. Tout ce que tu vas gagner c'est de le perdre. Vous êtes bien trop fiers tous les deux. Deux têtes de mules acharnées, vous jouez à un jeu dangereux où il n'y a pas de vainqueur. La seule chose que vous allez arriver à faire c'est de vous faire encore plus mal. Charlie, l'amour n'est pas une guerre à mener de front.
-Parle lui calmement et il te reviendra si il est fait pour toi.
C'est moi qui me sentait merdeuse mais je ne l'avouerais pas.
Je n'avais pas trop de doute à ce qu'elle me disait , à un moment donné.
Mais plus maintenant.
Aujourd'hui, tout était remis en question. Connor ne voulait pas de moi comme d'une petite amie potentielle. Juste une encoche de plus sur son tableau de conquête à la rigueur mais comme j'étais cataloguée dans la case « pauvre petite fille intouchable », je n'aurais pas le droit à cet honneur.
Ça me rendait furax. D'ailleurs, est-ce que c'est ce que je voudrais ?
Non. Je n'avais jamais recherché le frisson de l'aventure. Et si ça avait été le cas avec Logan alors j'en étais vite revenue. Ça me laissait un sale goût. Celui de l'inachevé et de la déception.
Il n'était pas question pour moi de revenir vers lui. Ca aurait été la fois de trop.
En tout premier, il y avait eu Zaine, tout ce que j'avais quitté pour lui, à quel point j'avais pu me pervertir pour entrer dans son monde et le suivre avait été une douche froide à son départ.
En deuxième, la mort d'Alec qui m'avait laissé inerte au sol. Il n'était pas question pour moi et d'aucune façon de laisser la chance à Connor de me faire souffrir. Il avait joué avec mon cœur et mon temps.
Sasha pouvait bien me sortir tous les arguments de la terre, hors de question. Je le laissais mijoter dans le bain de sa culpabilité et de ses tourments d'adolescent, bien fait pour lui.
***
Le lendemain après un peu de repos, je m'étais rendue dans le bureau de mon directeur accompagné de Logan. Je rendais compte de ce voyage, les chiffres étaient vraiment bon, nous avions une excellente progression et je fourmillais d'idée. Ma vie privée était un désastre mais professionnellement, je cartonnais. L'un dans l'autre, c'était une bonne moyenne.
Une fois ce rendez-vous terminé, je n'avais plus grand chose à faire mais je traînais dans les couloirs avec Logan.
—Tu as l'air ravie de ce voyage , me demanda t-il une fois que nous étions en salle de pause.
Je posais mes fesses sur un des tabourets remettant un peu d'ordre dans les sachets de sucre. Nous jouissions d'un très belle salle mais certains s'entêtaient à la prendre pour une salle de jeu. Souvent beaucoup de chose n'étaient pas à leur place et ça m'énervait.
—Je t'avoue que oui, je lui disais tout en procédant à mon petit rituel de ménage. Ce concentré d'idée m'a été favorable. J'avoue avoir piquer des idées à certains.
Bien qu'intense, les employés que j'avais rencontré étaient excellents,j'avais été bluffé par leurs expériences et leurs savoir faire. Un bain de culture qui était très enrichissant.
Mais là nous refaisions la réunion. Après tout Logan et moi n'avions pas grand chose à nous dire en dehors des platitudes concernant notre boulot.
—Je ne dirais rien.
Il me sourit. Logan s'attelait à nous préparer des cafés et je fus étonnée qu'il connaisse mes goûts alors je lui prenais la tasse des mains en le remerciant tandis qu'il prenait place, face à moi.
— Et comment ça se passe avec tes cliente VIP ?
—Bien. Certains ont des idées étranges mais j'essaie de me plier à leurs volontés autant que je peux. D'ailleurs, demain, je dois me présenter chez l'un d'eux.
Il me proposa de m'accompagner le jour où j'aurais besoin de lui, il me suffisait de lui demander.
Je lui souriais mal à l'aise. Nous n'avions plus rien à nous dire. J'entendais le tic tac de l'horloge et je cherchais une excuse pour fuir.
Mais il me coupa dans mon élan avant que je ne puisse ouvrir la bouche.
—Ca te dirait de venir déjeuner avec moi, on pourrait continuer la conversation autour d'un bon repas.
Je sous-pesais, le pour et le contre. Après tout, Logan était un bon ami et j'avais vraiment envie de dire oui.
Je me levais d'un petit bond pour lui montrer que j'étais ravie.
—Je prend mes affaires et on se rejoint dans dix minutes en bas.
Le sourire de Logan était sincère, sympathique.
—C'est super, je suis content.
Logan me conduisit dans un restaurant que je ne connaissais seulement de réputation. Nos assiettes étaient plus que copieuses et la conversation allait bon train.
Nous étions arrivés à un équilibre entre collègue de travail et amis ce qui me plaisait beaucoup.
Bien qu'un peu dragueur, ce qui faisait son charme finalement, Logan se trouvait être un homme plein d'humour et vraiment très intelligent. Ce dont, je ne doutais pas puisque pour obtenir son poste, il fallait en avoir dans le citron mais il possédait une culture générale qui m'impressionnait.
Je lui faisais remarquer ce qui lui provoqua un rire.
—J'ai l'impression que tu moques de moi.
—Mais pas du tout, Logan. Je te jures.
—Charlie, tu te souviens que je connais ton CV par cœur. J'étais là à ton embauche définitive.
Revenir systématiquement sur ce que j'étais. Une manie de tous et ça m'énervait un peu.
—Et alors ? Pourquoi, on met toujours sur la table mes pseudos capacités intellectuelles. C'est quoi le rapport avec moi ?
Logan comprit mon changement d'humeur. Il m'offrit un petit sourire et je me déridais un peu.
—Aucun. Ce que je voulais dire, c'est que tu es tout aussi impressionnante. Et je t'avoue avoir du mal à comprendre pourquoi avoir choisi le poste que tu as eu en commençant, tu devrais déjà être au sommet.
L'heure des confidences avait sonné. C'était plus facile avec Logan, il n'avait pas le même impact sur moi que d'autre pouvait avoir et je me sentais plus à l'aise. J'acceptais de me laisser aller.
—Je n'ai pas envie de ça. Je préfères ce que je fais maintenant. Je n'ai jamais visé les grands postes. Enfermée dans un grand bureau à donner des ordres tout en jouant les maîtres du monde, ce n'est pas ma personnalité. J'ai fais ces études là mais finalement je regrette un peu.
Logan me regardait intensément, vraiment captivé par mes propos. J'appréciais ce regard sur moi, je ne le nierais pas.
—Qu'aurais-tu voulu faire ?
Je ressentais de la joie qu'il me pose sincèrement la question . Il s'intéressait à ce que je souhaitais et ça faisait du bien.
—Littérature. J'ai toujours été passionné. Je pourrais me perdre des heures dans les livres. Arrêtons de parler de moi, revenons-en à toi, cher Logan, le surf, par exemple.
Il eut un petit rire qui le redait mignon. Repoussant son assiette, il croise les bras sur la table avant de me regarder de nouveau, p^ret à répondre à mes questions.
—Qu'est ce que tu veux savoir ?
Je haussais les épaules. Tant que la conversation serait alimenter de propos léger alors, il pouvait me raconter ce que il lui plaisait.
—Je n'en sais rien. Parle moi d'où te vient cette passion ?
—Des copains. Nous nous retrouvions systématiquement à la plage, dès tous gamins. Je vivais à quelques mètres de l'Océan. Je regardais les gars et ça m'a faisait envie alors un jour, je devais avoir à peine dix ans, je me suis lancé. Et ça ne m'a plus jamais quitté. Mes parents m'ont inscrit à des cours et de fil en aiguille, j'ai commencé les compétitions. Je ne m'attendais pas à aller si loin.
Je l'imaginais petit garçon, facilement. Courir avec une planche plus grande que lui.
—Ca ne te manque pas trop ?
La serveuse vint nous desservir et nous commandions des desserts. Nous avions fait le même choix sous les conseils de Logan. Il ne pouvait pas me répondre mais ne me lâchait pas de ses yeux brun, rieur.
—J'ai fais mon deuil. Une sale période pour moi, je me suis laissé sombrer quand je suis rentré en rééducation. J'avais vingt-deux ans en pleine gloire, à quelques doigts de la victoire alors la chute à été rude. J'ai repris goût au fur et à mesure, une très longue période de doute mais je suis content de ma vie aujourd'hui.
Logan se livrait si facilement sur cette partie de sa vie. Il avait réellement tourné la page. Je faisais le constat qu'il était plus facile de discuter avec lui, qu'avec Connor et j'étais soulagé. Parce que vivre en permanence dans les questions n'aidait pas à être confiante.
—C'est très bien. Je suis ravie pour toi.
Nous avions continué, allongeant le repas sur l'après-midi dans un air serein et enjoué et nous fixions un prochain rendez-vous rapidement.
****
Sous la pression de ma divine impatiente, un deuxième chapitre pour aujourd'hui.
Sasha tente bien que mal de réparer les dégâts.
Elle est là seule à tout connaître de Charlie dans les moindres détails de sa vie .
Ce que elle a fait dans le passé et comment ça s'est fini.
Ne lui en voulez pas, elle essaie de les réunir de toutes ses forces.
C'est elle qui me l'a dit.
Mais une équation entre dans le tableau et vient la compliquer.
Peut être la clé !?
Mon petit Logan est là et finalement je suis sûr qu'il n'est pas si mal que cela dans le fond.
Et vous, votre avis?
Bises mes moches 😘😘
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