Chapitre 3
« Ce qui distingue l'homme de la bête, c'est que la bête n'est pas toujours obligée de lutter pour ne pas se comporter comme un homme. », Charles Wolinski
Lentement, Céleste revint à elle. Une chaleur agréable entourait son corps encore un peu affaibli. Elle ouvrit lentement les yeux pour voir où elle se trouvait. Elle sursauta. Elle était dans une chambre qui lui était inconnue, allongée dans un lit large à baldaquin et à dorures : la pièce était luxueuse et grande. Sur les murs hauts, des ornementations exubérantes en stuc rejoignaient un plafond richement décoré. Au sol, quelques fleurs blanches étaient éparpillées, sûrement tombées des bouquets odorants décorant l'un des murs, disposés joliment sur des rebords savamment arrangés, dans de larges vases.
« Où suis-je ? », murmura-t-elle. Des bougies sur les tables de chevet illuminaient la chambre d'une lumière chaleureuse. Elle se passa une main dans les cheveux et se leva du lit. Elle grelotta lorsque ses pieds touchèrent le sol froid et avança jusqu'à une large fenêtre cachée par des rideaux. Elle leva une main et les tira de côté. Ses yeux s'agrandirent. Il faisait nuit noire et quelques étoiles scintillaient dans le ciel, doucement éclairées par une lune presque ronde. Céleste frissonna. Quelque chose de lugubre flottait dans les airs, quelque chose d'inquiétant et d'indéfinissable. Elle laissa retomber le rideau sur la vitre et fit un pas en arrière. La lumière des bougies trembla un peu et la jeune femme sentit son cœur accélérer un petit peu.
Que lui était-il arrivé ? Où était-elle ? Pourquoi était-elle là ? Elle se souvenait seulement avoir cueilli une rose après que le roi l'ait renvoyé froidement chez elle en compagnie de son étrange serviteur. Mais comment avait-elle fini dans un endroit pareil ? Elle inspira profondément et décida à aller voir ce qui se trouvait à l'extérieur. Peut-être trouverait-elle quelqu'un à qui poser la question ? Doucement, la porte s'ouvrit dans un grincement presque sinistre et Céleste passa la tête à l'extérieur. Elle regarda à droite puis à gauche. Il n'y avait personne, seulement un long couloir interminable sur lequel se suivait porte après porte, ornementations dorés et colonnes somptueuses.
La jeune femme déglutit, indécise par où commencer. Elle tourna finalement à droite et s'enfonça dans le couloir à pas lents.
« Il y a quelqu'un ? », demanda-t-elle dans le vide, mais seul le vide lui répondit. Elle reposa la question plusieurs fois et autant de fois qu'elle la soufflait dans le silence, autant de fois ce fut le silence qui lui répondit. Finalement, elle arriva dans une large salle, elle aussi éclairée par de longs cierges disposés le long des murs blanc et or. Les pieds de la jeune femme claquaient sur le sol en marbre et en face d'elle se trouvait un large escalier à côté duquel étaient disposées des canapés somptueux. Un peu fatiguée, elle s'avança vers l'un d'eux et s'installa confortablement contre les coussins soyeux, les yeux mi-clos. Elle ne savait toujours pas où elle était mais la fatigue avait un effet apaisant sur la peur qui sommeillait en elle.
Céleste laissa sa tête retomber doucement sur le côté. Brusquement, un bruit la fit sursauter et elle écarquilla les yeux. Elle agrippa les rebords du canapé. A nouveau, le même son. Plus près. Cette fois, elle en était sûre, il s'agissait d'un hurlement. Un hurlement bestial, ni humain, ni animal. La jeune femme sentit la sueur lui humidifier les tempes et sans réfléchir, alors que le hurlement retentit à nouveau, rebondissant sur les murs et faisant trembler le feu des bougies, elle se leva le plus rapidement et sortit en courant de la pièce.
Elle courut le long des portes du couloir, les passant les unes après les autres et tentant désespérément de se souvenir laquelle était la sienne... Malheureusement, elles étaient toutes pareilles, les mêmes ornementations, le même format. Le hurlement résonna à nouveau et elle sentit ses jambes se mettre à trembler un petit peu, il résonna plus fort encore, semblant se rapprocher de plus en plus. Sans réfléchir, elle appuya sur une poignée de porte. Fermée. La prochaine. Fermée aussi. Céleste courut, appuyant du coude sur chaque poignée qui lui tombait sous le bras. Aucune n'était ouverte.
Sa respiration était haletante, son cœur battant la chamade frénétiquement, un battement paniqué dans sa cage thoracique.
« Ouvre-toi, mais ouvre-toi ! », souffla-t-elle entre deux souffles angoissés, retournant en arrière, réessayant les portes les unes après les autres. Pendant quelques secondes, les cris cessèrent puis reprirent de plus belle, dans le silence macabre des hauts murs. Les mains tremblantes, Céleste fixa la dernière porte, la seule qu'elle est persuadée de ne pas avoir encore essayée. Si elle aussi était fermée... Respirant profondément, flanchant au prochain son, fermant les yeux, elle appuya de toutes ses forces sur la poignée dorée joliment courbée. Celle-ci s'enfonça et dans un grincement assourdissant, la porte s'ouvrit et Céleste pénétra dans la pièce derrière, sans même regarder où elle se trouvait, sans même réfléchir un instant de plus. Elle voulait seulement échapper à la cause de ces hurlements funestes, voulait seulement reprendre ses esprits et tenter de comprendre sa situation...
Elle ouvrit les yeux.
Un soupir soulagé échappa à ses lèvres.
Sa chambre. Elle avait retrouvé sa chambre. Les bougies brûlaient encore de leur lumière chaleureuse et il flottait encore cette odeur de fleurs délicates.
Céleste courut et se réfugia dans le large lit, entre les duvets odorants et chauds, pressant sa tête contre l'oreiller, le cœur tremblant. Elle referma les yeux et se passa la couverture par-dessus la tête, en espérant retrouver le sommeil. Mais brusquement, un bruit métallique résonna dans la pièce et la jeune femme ouvrit les yeux en grands. Elle hésita quelques instants, pris son courage à deux mains et ressortit, les jambes tremblantes du lit. Elle s'approcha à petit pas de la porte et tendit ses mais vers la poignée sur laquelle elle appuya doucement. Fermée. La porte était fermée, impossible à ouvrir alors que le cœur de la jeune femme se mettait à accélérer, apeurée.
Quelqu'un semblait avoir fermé la porte -
Elle appuya à nouveau sur la poignée, une fois, deux fois, désespérée. Mais pas un mouvement, pas un bruit : Céleste se mit à taper d'abord doucement sur le bois doré massif puis plus fort, un cri à l'aide étouffé dans la gorge, sous le choc. Pourquoi quelqu'un l'enfermait-il dans une pièce ? Où était-elle ? Que lui voulait-on ? Une larme salée de rage impuissante et de peur lui roula le long de la joue.
Sa main qui tambourinait contre la porte finit par retomber mollement contre le corps de Céleste qui glissa sans un bruit au sol.
« Laissez-moi partir. », murmurait-elle dans le vide, encore et encore, les yeux perdus dans le vide tandis que résonnait sans cesse les mêmes questions – pourquoi elle, pourquoi ici ? Encore et encore essayait-elle de reconstituer les évènements mais dans ses pensées emmêlées, elle ne voyait que cette fleur, cette rose miraculée, une tâche de rouge en plein milieu d'une clairière blanche de neige.
La jeune femme ferma les yeux et adossa sa tête contre la porte.
Brusquement, un craquement.
« Qui est là ! », s'exclama Céleste en serrant les poings, pour les empêcher de trembler, et se releva rapidement, manquant trébucher en avant.
Un grognement.
Un grognement qui n'était définitivement pas humain.
Céleste se sentait presque défaillir et s'appuya contre la poignée, pressant sa joue contre le bois, répétant à nouveau, cette fois d'une voix presque sans son :
« Qui est là ! »
La chose grogna à nouveau.
« Je ne sais pas qui est là, mais s'il-vous-plaît, laissez-moi partir ! »
Elle entendit une inspiration puis une voix sombre murmura un non entrecoupé. Céleste sentit son souffle s'étouffer dans sa gorge.
« Non ? Pour quelle raison ! Que vous ai-je donc fait pour que vous me gardiez prisonnière ! »
Cette fois, ce ne fut pas un grognement qui retentit mais un rugissement sonore et macabre, résonnant contre les murs et faisant vibrer le sol.
« J'ai dit non ! », hurla la même voix d'homme.
Céleste eut un mouvement de recul et sa lèvre se mit à trembler. Pourtant, la jeune femme tenait bon : elle ne pouvait pas, pour toujours, rester enfermée pour une raison lui étant inconnue !
« S'il-vous-plaît ! », s'exclama-t-elle, « Qui que vous êtes, dites-moi pourquoi vous me gardez ici ! »
« La chambre ne vous plaît donc pas ? », rugit l'homme derrière la porte et Céleste déglutit.
« La chambre est sublime. », murmura-t-elle, « Mais aussi jolie, riche et doré soit-elle, ma liberté m'est plus chère. »
« Vous n'avez pas le choix ! »
« Mais que vous ai-je donc fait ! », hurla-t-elle, des larmes lui roulant sur les joues drainées. Pendant quelques instants, seul le souffle bruyant de la bête lui répondit. Céleste ferma les yeux et se posa une main sur la poitrine qui s'abaissait et se relevait dans une respiration brisée, « Que vous ai-je donc fait ? », répéta-t-elle, doucement cette fois.
La bête poussa un son exaspéré. La jeune femme l'entendit s'éloigner de la porte puis se presser contre.
« Je vous le répète, vous n'avez pas le choix. Je ne peux pas vous en dire plus. », grogna-t-elle.
« Et qu'est-ce que vous allez faire de moi ? », souffla Céleste d'une voix désespérée ; l'énergie que lui avait provoquée la peur l'avait brusquement quittée et elle se retrouvait sans force et fatiguée, adossée contre une porte à parler à une voix monstrueuse.
La bête poussa un ricanement inhumain.
« Nous verrons bien, joli cœur, nous verrons bien ! », siffla-t-elle.
Céleste ne répondit rien. Elle ferma les yeux un peu plus fort, retint ses lèvres et serra les poings, dans l'espoir de se réveiller de ce rêve qui lui semblait bien cruel.
~***~
Au-dessus du château en haut de la colline, l'astre solaire se leva doucement, éclairant peu à peu le paysage de ses rayons dorés. Dans la plus haute tour du château en haut de la colline, une bête poussait un rugissement terrible tandis que quelques mètres plus bas, dormait une jeune femme dans un sommeil fébrile. La bête rejeta sa tête en arrière.
Ses poils drus devinrent peau, ses griffes devinrent ongles, ses pattes mains : son visage animal repris forme humaine. A sa place, un jeune homme d'une beauté sans pareil. Nu, pantelant, il se releva en tremblant un peu. Ses yeux sauvages ne purent s'empêcher de s'assurer qu'à nouveau, il était redevenu humain, qu'à nouveau, l'animal avait laissé sa place à l'homme. Il se passa une main sur le bras et se laissa tomber à genoux, ses yeux levés vers le soleil.
La jeune femme, quelques mètres plus bas, avait cueilli sa rose.
La malédiction allait prendre son cours.
Son destin était scellé.
Bonjour, bonsoir les amis!
L'histoire suit son cours... Où va-t-elle nous mener?
Je ne le sais toujours pas. Pour l'instant, j'essaie encore de trouver un prénom pour ce mystérieux prince et j'écris scénario sur scénario, hésitant entre quelle variante choisir. Vraiment, ce n'est pas simple mais en écrivant cette histoire, je réalise mon fantasme de petite fille devenue adulte du conte de fée - mais pas trop.
Enfin voilà: j'espère que ça vous plaît toujours, n'hésitez pas à me partager vos impressions!
Bisous, bisous,
Blondouille ♥
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top