VIII
Point de vue: Crystal
Je descendis et, étrangement, je n'allumai pas la lumière, me laissant guider par celle de l'écran de télévision allumé. C'était idiot de laisser la lumière éteinte, mais c'était comme si une force avait volontairement enlevé le réflexe d'allumer la lumière de mon esprit. Lorsque je me retrouvai devant la télévision, elle était éteinte. Enfin, presque. L'écran était noir, mais dessus s'affichait l'image d'un ballon. Un ballon rouge. Il avait l'air de se gonfler, puis se dégonfler, pour se regonfler ensuite. Une sorte de respiration constante. Intriguée, je fronçai les sourcils, examinant l'image. Je ne me sentais pas bien, une peur irrationnelle grandissait en moi. Je fis un pas en arrière et, levant les yeux vers la partie sombre de la pièce, derrière la télévision, je vis une paire d'yeux jaunes. La mâchoire tremblante, je reculai encore, alors que la chose qui se cachait dans la pénombre s'avançait jusqu'à se retrouver dans la lumière de l'écran. C'était le clown. Celui que j'avais vu en rêve.
- Salut, Crystal, dit-il, un large sourire aux lèvres.
- Qui... Qui êtes-vous?
- Moi? Moi, je suis Grippe-Sou. Grippe-Sou le Clown Dansant. Et toi, toi, tu es la bibliothécaire de Derry. Cette place appartenait avant à Mike Hanlon, n'est-ce pas?
- Qu'est-ce que vous faites ici!? demandai-je, tremblant sérieusement de tous mes membres.
- Tu es une femme courageuse, mais tout le monde a peur de quelque chose, non?
Je ne fis que hocher la tête, maintenant incapable de prononcer le moindre mot.
- Alors toi aussi, tu vas flotter, Crystal. Toi aussi, tu vas flotter. Toi aussi...
Alors qu'il prononçait ces derniers mots, je vis du coin de l'oeil, car je ne pouvais détourner le regard de ce visage, le ballon de l'écran grossir. Il grossit tellement qu'il remplit entièrement l'écran. Puis il éclata, et le bruit qu'il fit était tel que je dus me boucher les oreilles, mais ça n'avait pas sembler réel, car, à l'étage, il n'y eut aucune réaction d'Alexander, alors qu'il aurait dû être réveillé. L'écran était devenu blanc, et le clown avait disparu. Je restai quelques secondes immobile, respirant bruyamment, sentant les battements de mon cœur dans tout mon corps. Puis, je me réveillai peu à peu de ma paralysie. Je devais être devenu folle. À moins que tout avait été réel... J'étais incapable de le dire. J'allais retourner me coucher, me blottir contre Alexander et essayer de ne plus y penser. Mais avant, je devais éteindre la télévision. Si je l'éteignais, je n'aurais plus de lumière pour me guider dans le noir. Alors je décidai d'ouvrir la lumière du salon avant d'éteindre cette fichue télévision. Toujours comme aveuglée par cette force qui m'avait fait oublié de l'allumer en arrivant, j'oubliai qu'il y avait un interrupteur juste à côté de la porte menant au hall d'entrée, ou encore un à côté de celle menant à la cuisine. J'avais obstinément décidé d'utiliser celui qui se trouvait en haut des marches de l'escalier. Je montai donc doucement, tenant fermement la rambarde, comme si la suivre me sauverait de quelqu'un... Ou de quelque chose. J'allais appuyer sur l'interrupteur lorsque je sentis un souffle chaud dans ma nuque. Je me raidis. La poitrine se levant au rythme hâtif de ma respiration, je pivotai lentement sur moi-même, jusqu'à me retrouver face à deux grands yeux jaunes. Ce n'était plus ceux du clown... Ma respiration s'arrêta net. Je me tenais en face de la seule chose qui provoquait en moi une peur immense: un Dinosauroïde. J'avais perdu toutes réactions, incapable de faire le moindre geste. Il étira sa bouche en un sourire démoniaque, dégageant une multitude de dents affreuses et pointues. Cette vision d'horreur me fit retrouver mes moyens et, hurlant, je voulus m'enfuir, aller à l'étage. Dans la précipitation, je loupai une marche et dévalai l'escalier dans un boucan infernal. Je vis la lumière de l'étage s'allumer. Alexander avait dû être réveillé par mes cris et ma chute. J'étais à plat ventre, sur le sol du salon. Ma tête me faisait souffrir. Je levai le regard. Le reptilien descendait lentement les marches à quatre pattes, ou en rampant, je ne saurai le dire, comme un lézard. Il s'arrêta lorsque son visage était à quelques centimètres du mien. Je pouvais sentir l'odeur putride de son haleine. La silhouette d'Alexander se dessina en haut des marches.
- Crystal? Est-ce que ça va?
Le Dinosauroïde disparut, comme évaporé, et la télévision était maintenant belle et bien éteinte. Alexander ouvrit la lumière et descendit. Me voyant parterre, il se dépêcha et s'agenouilla à mes côtés.
- Ça va? Tu t'es fait mal? Qu'est-ce qui s'est passé?
Je me redressai et décidai de ne rien lui dire. Il me prendrait pour une folle. Je devais être folle. Cependant...
- Je... Je dois aller à la bibliothèque... soufflai-je d'une voix tremblante.
- Quoi? Mais il est quatre heures du matin! Tes joues sont recouvertes de larmes et ta lèvre saigne! Qu'est-ce qu'il y a?
- Je suis tombée... Dans le noir, j'ai loupai une marche...
Je levai une main à ma lèvre. Il avait raison. J'avais dû me blesser en chutant. Et ce mal de crâne qui persistait... Heureusement que je n'avais pas mis mes lunettes, que je portais tout le temps, ou elle aurait été cassées. J'insistai:
- Je dois aller à la bibliothèque.
- Bon... Si tu y tiens. Mais je t'y accompagne.
Je me levai lentement et me dirigeai vers la porte, mais il m'arrêta:
- En chemise de nuit?
Je regardai la tenue. Il avait raison. Alors nous allâmes nous habiller et nous partîmes.
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