Point de vue: Greg

  Pendant que nous retournons vers la bibliothèque, Crystal avait l'air pensive. Moi aussi, j'étais consternée par l'histoire du garçon. Je ne le croyais pas. Enfin, je ne l'aurais pas cru s'il n'avait pas parlé de ballon rouge. Cela m'avait rappelé ce ballon rouge qui avait précédé ma découverte sanglante. Alors j'avais un sérieux doute: l'enfant avait-il vraiment tout inventé? Je questionnai:
- Vous croyez à son histoire de Frankenstein et de clown et de... ballon?
- Déjà, il n'a pas vu Frankenstein. Frankenstein n'est pas un monstre. Il devait parler du monstre de Frankenstein.
- Vous n'êtes pas bibliothécaire pour rien.
  Elle sourit avant d'ajouter:
- Ma raison me dit qu'il a tout inventé, mais...
  Elle hésita, mais ne finit pas sa phrase. Elle resta pensive et silencieuse jusqu'à la bibliothèque. Je lui tins la porte et entrai après elle.
- Vous avez mangé ensemble? s'étonna Christie.
- Ne t'imagine rien, rit Crystal, qui devait prévoir les taquineries de son amie.
- J'oubliais le beau Alexander, sourit la rousse.
- Tu peux garder le comptoir encore quelques minutes? changea-t-elle de sujet.
  D'un signe de tête, Christie accepta. Crystal me fit signe de la suivre, ce que je fis. Elle m'amena au rayon horreur, sûrement pour me conseiller le livre qu'elle m'avait défié de lire. À peine étions-nous dans le rayon que je remarquai une pile de journaux, parterre à côté d'une porte.
- Qu'est-ce que c'est?
- Les journaux des derniers que je devais descendre aux archives, mais...
  Elle hésita à nouveau, mais acheva cette fois sa phrase:
- Mais je n'ai pas pris le temps. Alors, ce livre?
- Conseillez-moi celui que vous avez préféré.
- Mon livre préféré est sans conteste "Dracula", de Bram Stocker, mais, même s'il est considéré comme un livre d'horreur, je le qualifierais plus comme fantastique.
  Je souris en pensant que j'avais eu un des rôles plutôt importants de la comédie musicale de Dracula, en France, mise en scène par le chorégraphe Kamel Ouali. Elle continua:
- Alors je pense que vous devriez lire... "Shining".
- "Shining"!? Mais, d'après la réputation, il est terrifiant!
- Pas plus qu'un autre, vous verrez.
  Je pris donc le livre qu'elle me tendait, pas très rassuré. Je questionnai:
- Vous n'avez peur de rien, n'est-ce pas?
  Elle rit avant de répondre:
- Tout le monde a peur d'au moins une chose. C'est juste qu'il n'y a aucun livre d'horreur sur ce dont j'ai peur.
- Qu'est-ce que c'est? demandai-je, curieux.
- Depuis que je suis toute petite, je suis passionnée par la paléontologie. Dans un livre, je devais avoir six ans, je suis tombée sur une photo d'une créature appelée Dinosauroïde, qui est une créature inventée par les scientifiques pour voir à quoi ressembleraient les hommes si nous descendions des dinosaures. Vous allez vous moquez de moi, mais cette chose me fiche une trouille bleue. Je ne peux même pas supporter la vue d'une simple photo! ajouta-t-elle en riant, se moquant d'elle-même.
- On ne peut pas contrôler ses peurs, même les plus absurdes, répondis-je.
- Vous êtes psychologue? interrogea-t-elle sur un ton taquin.
- Non, pas du tout, ris-je. Mais en parlant de psychologie... Je lis votre livre d'horreur, si vous lisez un livre que je vous conseille. Il y a bien des livres que vous ne lisez pas.
- D'accord, accepta-t-elle. Quel est votre littérature préférée?
- La littérature psychologique, celle qui aide au développement personnel. Vous en lisez?
- Non, pas du tout. Venez, le rayon est là-bas.
  Elle m'entraîna vers un autre rayon, rempli de livres comme "Les Quatres Accords Toltèques" ou encore "Le jour où j'ai appris à vivre", de Laurent Gounelle. Je pris ce dernier et le tendit à la jeune femme.
- Celui-là est vraiment bien.
- J'ai eu de bons retours de ceux qui l'avaient empruntés, confirma-t-elle. Je le lirai.
  Nous échangeâmes un sourire, elle reprit sa place au comptoir de la bibliothèque et, quant à moi, je saluai les deux jeunes femmes et partis.