Chapitre 1
NDA : il y a pas de dialogue pour ce premier chapitre mais ils arrivent dès le chap 2, no worries !
NDA 2 : en lisant les 4 premiers paragraphes vous allez vous dire "mais wtf ça ressemble pas au résumé" svp, continuez, vous allez comprendre ! ;)
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Appuyé contre la balustrade massive de ma terrasse, je contemplai mon majordome — appelons le Clarke — qui s'activait à débarrasser les pétales de la surface de l'eau. Il y en avait toujours beaucoup dans cette piscine. Celle-là, précisément. La raison était parfaitement logique puisque tout autour, se dressaient de magnifiques magnolias en floraison.
Dans ce quartier huppé de la banlieue éloignée d'Orlando, c'était peut-être ce qui différait ma propriété des autres ; ces dernières étant plutôt constituées de palmiers imposants et de gazon à l'allure artificielle. Rien de tout cela chez moi. Plutôt des mauvaises herbes et un ensemble de buissons volontairement peu entretenus. J'affectionnais le contraste entre cette apparente sobriété et la marque d'excès quelques mètres plus loin, là où étaient garés mes trois véhicules, et plus particulièrement, ma Bugatti Centodieci aussi imaginaire que tout ce qui l'entourait.
Quoi qu'il en soit, ce petit moment de délectation n'allait pas tarder à être rompu. Bientôt, mon associé allait m'appeler afin de m'annoncer, à l'instar de la veille, d'excellentes nouvelles. Les chiffres étaient particulièrement bons, ces derniers temps. Il fallait le dire, mon entreprise n'était pas touchée par la crise.
Ainsi, installé sur ma chaise longue, j'allumai mon MacBook que je déposai sur mes cuisses. Comme chaque matin, une bonne vingtaine de mails m'attendaient. D'investisseurs, pour la plupart, souhaitant placer des capitaux. Parfois, d'anciens amis ou connaissances qui m'avaient oublié jusqu'à ce qu'ils aient écho de ma fortune. À ce sujet, il était important de préciser que j'étais généreux mais non stupide. Je donnais à ceux qui le méritaient, notamment mes plus proches amis qui n'avaient pas attendu ma réussite pour m'aimer. Les autres pouvaient toujours cour...
Aïe !
Après avoir jeté un regard noir à l'homme qui m'avait poussé contre le poinçonneur, je me frayai un chemin à travers les passagers de ce bus insuffisamment fréquent pour la densité de l'agglomération. Je n'espérais pas une place assise, mais au moins un espace assez grand. Je désirais survivre jusqu'au lycée, sans suffoquer du manque d'oxygène.
À l'issue d'une lourde lutte, je repérai enfin l'endroit qui rendrait les vingt prochaines minutes moins éprouvantes. Situé devant la sortie arrière, ce petit espace me permettait de m'adosser à la paroi, et, de surcroît, observer les visages tout autour de moi. À en constater leur expression désespérée (digne d'un lundi matin, et, à coup sûr, avais-je la même), je devinai à leur âge avancé que le lycée n'était, hélas, pas la seule épreuve que nous traversions dans notre vie.
Pas la seule, non. Mais l'une des plus pénibles... Était-ce pour cela, d'ailleurs, que j'avais peiné à m'endormir, hier soir ? À force de penser. Penser à mon retour dans ce bagne.
Mes potes et moi avions parlé jusqu'à minuit, et puis, s'était ensuivi une incapacité totale à fermer l'œil. Il s'agissait là d'une étape obligatoire chaque nuit de pré-rentrée, en plus de mes troubles de sommeil habituels. Finalement, j'étais arrivé à mes fins en me projetant dans un de mes scénarios favoris, le même que celui quelques minutes plus tôt. Je me baladais pieds nus sur le marbre froid de ma villa en Floride, là encore, en appel visio avec mon associé. Après avoir raccroché, je n'avais pas hésité à faire deux, trois plongeons dans ma piscine, parce qu'il fallait bien se rafraichir sous quarante-trois degrés.
Pourtant, malgré ce décor réjouissant, le sommeil avait été si médiocre qu'il n'avait pas contribué à rendre la sonnerie du réveil moins douloureuse. Dans l'incapacité même de lever le bras pour la faire cesser, Maman avait débarqué dans ma chambre afin de me tirer du lit. Elle se réjouissait. Ce jour marquait la fin de mes mauvaises habitudes, pour reprendre ses propres termes. Ce qu'elle nommait ainsi n'était rien d'autre que mon penchant à me coucher à l'aube et à me réveiller en fin d'après-midi. Routine qui avait le don de la mettre hors d'elle. Par moments, elle usait de stratagèmes afin de me forcer à faire ce qu'elle nommait les sorties intelligentes (rejoindre mes amis le soir, par exemple, n'en faisait pas partie) : elles consistaient à amener Céleste au musée, au cinéma ou encore à la piscine. J'appelais parfois un ami en renfort. Souvent Victor, Léandro ou Abel, afin de ne pas me retrouver en tête-à-tête avec ma sœur de onze ans toute une après-midi. Cela étant, peu d'entre eux se montraient volontaires dès lors qu'ils comprenaient que je ne venais pas seul.
Avec le recul, toutefois, j'admettais que les sorties avec Cécé n'étaient pas si mal. Le soleil brillait, au moins. Là, il me suffisait de lever la tête pour constater les gouttes d'eau qui glissaient contre la grande vitre, témoignant que l'averse ne faiblissait pas. Mais, qu'attendre d'un mois de septembre et d'un jour de reprise, qui plus est ? C'était un jour à pleuvoir, il était rare que cela ne soit pas le cas. D'ordinaire, il y avait du soleil jusqu'à la fin des vacances, et puis, dès lors que celles-ci étaient sur le point de se terminer, le temps commençait à s'assombrir un peu plus chaque jour et la pluie venait s'inviter à la rentrée.
Une sorte d'obligation de l'existence, de façon que nous nous morfondions encore et encore, parce que le désarroi de quitter notre liberté et la panique de ne pas nous retrouver avec nos amis ne suffisaient pas.
Cette éventualité m'avait traversé l'esprit bon nombre de fois ces dernières semaines, et cela me terrifiait. Nous avions pourtant tout œuvré pour nous retrouver ensemble, optant pour les mêmes spécialités, et bien sûr, à l'échelle individuelle, je m'étais adonné à divers défis tout au long de l'été, parmi lesquels mes concours d'apnée avec un feu de signalisation.
Malgré ces efforts autant rationnels que fantaisistes, si le proviseur et le CPE n'avaient pas des troubles de mémoire, ils devaient certainement garder des souvenirs amers de notre groupe infernal et il aurait été logique qu'ils jugent bon de nous séparer.
Alors, tandis que le bus continuait de filer et que mes espoirs s'amenuisaient, j'essayai de me souvenir d'éventuels élèves avec qui je pourrais me retrouver si je venais à être séparé des autres. Il y avait forcément au moins une ou deux personnes dans chaque classe qui usaient du même humour que nous et avec qui je pourrais aisément me lier d'amitié.
Plusieurs prénoms défilèrent dans ma tête jusqu'à l'arrivée à destination. Je me frayai un chemin avant que les portes ne se referment sur moi. Lorsque cette malencontreuse situation était arrivée l'an dernier, je n'avais pas osé crier au chauffeur de rouvrir son bus au nom de ma dignité. Je m'étais alors résolu à descendre à l'arrêt suivant et je m'étais coltiné huit bonnes minutes de marche tout en me reprochant ma fierté démesurée.
Arrivé devant le lycée, je devinai à l'attroupement situé devant un mur que les listes de classe étaient accrochées à cet endroit. Tout en dégageant une cigarette de mon paquet, j'observai les élèves agités qui luttaient pour atteindre la fameuse liste tandis que d'autres s'extirpaient de l'attroupement. Je m'en approchai en gardant une certaine distance, comme si j'espérais lire à plusieurs mètres mon nom minuscule.
Il valait mieux attendre que le monde se dissipe, je refusais de pénétrer dans une foule humaine après en être tout juste sorti. De toute façon, un ami n'allait pas tarder à crier mon prénom. Je n'étais jamais seul bien longtemps, sans que cela ne m'empêche de haïr du plus profond de mon âme cet endroit.
C'était pour cette raison que, dès lors que je franchissais cette grille verte, j'endossais mon costume habituel et feignais d'être à mon aise. Cela faisait partie de mon jeu de rôle depuis le début du collège jusqu'à maintenant. Parce qu'il fallait l'admettre, dans cet endroit nuisible, il était préférable de jouer le parfait élément insignifiant. Il aurait été risqué d'exprimer une image trop authentique. Puis, il y avait un côté amusant à jouer une personnalité factice, d'être libre de montrer ce que l'on souhaite, de sorte qu'autrui ne voit qu'une version édulcorée de nous-même. Mon petit manège avait pris naissance au collège, lorsque les autres avaient commencé à me porter de l'attention. Les prémices de cette insoupçonnée popularité m'avaient contraint peu à peu, de manière insidieuse, à adopter le comportement qu'ils attendaient de moi. Un simulacre de confiance en soi, un léger air présomptueux, et, il pouvait même m'arriver, de parfaire toute cette comédie avec une pincée d'arrogance.
— Gabriel !
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