꧁Prologue꧂
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𝕵𝖊 𝖏𝖊𝖙𝖆𝖎𝖘 𝖚𝖓 𝖈𝖔𝖚𝖕 𝖉'œ𝖎𝖑 𝖋𝖚𝖗𝖙𝖎𝖋 à mes petites mains d'enfant et remontai mon cartable sur mes épaules, impatiente. Tout était parfait. Mais je ne savais pas ce qu'il m'attendait.
À l'époque, les autres n'étaient pas particulièrement gentils avec moi, ils m'évitaient et me lançaient des regards méfiants...mais ça s'arrêtait là. Et puis, il faut dire que je ne sortais pas souvent.
Je tâtais ma tête, soucieuse. J'avais passé des heures à trouver une solution potable pour les camoufler. À mon grand soulagement (enfin, en partie), je tombais finalement sur deux petites pointes enrobées de bandages roux-beiges, et la petite marguerite que j'avais mise pour décorer.
Mes cornes.
Deux petites pointes noires cachées du mieux possible par mon imagination, et décorées. Avant, je me fichais un peu d'elles, et je ne les haïssais pas, quoique j'avais trouvé ça mieux pour moi de ne pas les dévoiler à toute la classe le 1er jour.
La rentrée du CP...je ne saurais pas qualifier ce jour, franchement.
Je respirais un grand coup, regarda une dernière fois la route boueuse de mon village de campagne et enroulant sous ma jupe d'uniforme mon "pic du Diable". Pic du Diable, c'est comme ça que j'appelle ma queue car elle ressemblait a un pic. C'était une longue ligne rouge sombre ornée au bout de deux traits horizontaux et d'un triangle...semblable à un pic.
J'avais des ailes, aussi, qui flottaient derrière mon dos sans le toucher, mais elle n'apparaissent que quand je suis en colère.
J'avais des cornes, un pic et des ailes car je suis un démon. Et je le serais toujours.
Alors, je poussa le portail de l'école primaire et déboula dans une cour de récré sablonneuse déjà remplie d'élèves qui jouaient et couraient partout. Des élèves 𝖓𝖔𝖗𝖒𝖆𝖚𝖝. 𝕳𝖚𝖒𝖆𝖎𝖓𝖘.
Moi, à six ans, je me fichais bien d'être un petit diable et comptait me faire un tas d'amis, sans me soucier de mon apparence plutôt détestable. Sauf mes "attributs" de démon, j'étais plutôt normale : rousse, avec des cheveux longs à l'époque, une tresse un peu en pagaille et des grands yeux verts émerveillés pour un rien. Mais ce que les gens voyaient principalement, c'était mon autre côté.
Ainsi, j'entrai fière et assurée dans la récréation et déposai mon cartable en cuir sur une bordure en pierre, qui devait être mon rang, puisqu'il y avait écrit "CP". Bien vu Sherlock.
Il n'y avait qu'une classe pour chaque niveau, puisque je vivais dans un trou paumé, mais je trouvais ça immense.
La cour était rectangulaire, parsemée d'arbustes et de buissons, et faisait la taille de la façade de l'école, un vieux bâtiment plutôt rustique fait de briques rouges. En haut, il y avait marqué en grandes lettres blanches : "ÉCOLE ÉLÉMENTAIRE", avec une grosse cloche dorée qui venait surplomber le tout.
Puis moi, en admiration totale...
Petite, je n'avais pas vu grand-chose et je sortais rarement dans le village, je passais mon temps à jouer avec mon chien ou à contempler la route derrière chez moi, en me demandant où elle menait. Ma mère, une personne plutôt nerveuse qui vivait seule avec moi, m'interdisait de sortir longtemps et m'excluait du monde extérieur. Elle ne me confiait que des tâches du genre : va chercher des tomates au potager, ou aller acheter du pain, mais uniquement si elle ne pouvait pas le faire.
Elle disait que personne ne devait savoir qui j'étais, pour mon "bien". Mais moi, je m'ennuyais, j'étais avide de voir autre chose que ma petite maison, que les deux rues du village que j'avais à peine fréquentées, que mon potager ou mon poulailler.
Au final, elle a fini par céder à mon envie de découvrir le monde et m'a inscrite à l'école.
Je parcourus d'un œil vif la cour à la recherche de potentiels enfants sympas avec qui je pouvais m'amuser, mais tous semblaient déjà se connaître et ne me calculaient pas du tout.
Mon moral un peu descendu, je traînais les pieds et me promenais dans la cour en effleurant les arbres. Puis, d'un coup, derrière un grand chêne et tout au fond de la récré, je vis une petite fille roulée en boule contre le mur de l'école. Et...elle sanglotait.
D'abord surprise, je n'osais pas bouger. Je n'avais jamais vu quelqu'un pleurer, à part moi, et je ne savais pas trop quoi faire.
Prenant mon courage à deux mains, je m'assis aux côtés de la petite fille et bafouillai :
— Euh...tout va bien...?
Elle releva la tête, surprise, et je vis qu'elle était adorable, avec des joues roses et un visage fin, ses yeux bleus profonds mouillés et rougis par les larmes. Des mèches de cheveux châtains cendrés se mêlaient à son visage. Elle renifla, me dévisagea puis dit d'un ton mal assuré :
— C'est...c'est mes amies, fit-elle entre deux sanglots, elles m'ont laissée tomber...
Perplexe, je tournai la tête vers deux petites filles de mon âge qui chuchotaient entre elles en nous regardant. À l'époque, je ne connaissais absolument pas les conflits amicaux, mais j'avais à peu près compris ce que la fille aux yeux bleus voulait dire.
— Oh. C'est pas sympa.》Je regrette toujours cette phrase.
Mais, la fille qui sanglotait ne parut pas vexée, et sécha ses larmes peu à peu.
《 À cause d'elles, je suis toute seule, insista-t-elle.
Ça fit comme un 𝕥𝕚𝕝𝕥 dans ma tête, et je me retournai vivement vers elle.
— C'est vrai ? Moi aussi ! Je connais personne, me suis-je exclamée.
La petite fille sourit, satisfaite, et me tendis la main.
— Je m'appelle Aurora...et toi ?
— Avalon, ai-je répondu, mais appelle moi Ava sinon c'est trop long !
C'était sûrement la rencontre la plus banale qui soit, mais je m'en fichais. J'avais quand même une amie.
Quand je lui serra la main, soudain, une bourrasque de vent nous cingla, et mes bandages s'envolèrent d'un coup en se perdant dans les cieux.
Et mes cornes étaient dévoilées.
Au début, Aurora fit comme un blocage, son regard focalisé entièrement sur mes deux petites pointes noires, tandis que moi, je n'avais pas encore réalisé.
Puis, quand je vis les bandes s'envoler plus loin, je poussai un petit cri de stupeur et cachai ma tête sous mes mains, en reculant brusquement. Aurora descendit les yeux vers moi, un regard à la limite du vide et de l'incompréhension, qui me glaça jusqu'aux os.
— Alors tu es... murmura-t-elle.
J'hochais timidement la tête. La petite fille plissa les yeux et indiqua ma tête pour me demander d'enlever mes mains. Je m'éxecutais avec méfiance. Comment savoir ce qu'elle allait faire ? En plus, je réalisai que je craignais plus mon apparence que je ne le pensais.
Aurora examina mes cornes, ses yeux écarquillés, les effleura puis se recula doucement. Elle sourit timidement devant mon air terrifié, comme pour me dire de me calmer.
— Je les trouves mignonnes, avoua-t-elle.
Perplexe, je ne dis rien pendant un instant, puis mes yeux se mirent à étinceler. J'étais tellement soulagée ! Je me jetai dans ses bras en riant et elle me rendit mon étreinte.
Malheureusement, les autres ne réagirent pas tous comme elle, mais au moins, j'avais une amie.
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