Chapitre 3: Embauchée contre son gré

- Tu as perdu. 

Perséphone haussa un sourcil, puis regarda le jeu. En effet, elle ne menait pas la danse, au vu des atouts que Isaac avait posé sur la table... Elle regarda ses jetons, elle n'en avait plus qu'un seul, un blanc, représentant le moins d'argent. 

- Tu veux mon jeton ? railla-t-elle légèrement, même si elle commençait à être mécontente de sa défaite.

- Oh, je crois que j'aimerais troquer ce jeton contre autre chose. Comme tout tes jetons, d'ailleurs. Reprend ton argent. J'en ai assez pour éviter de dépouiller une belle dame.

Perséphone regarda le chevalier lancer sur la table les jetons qu'elle avait initialement mis en jeu. Intérieurement, elle était rassurée. La petite somme qu'elle avait pu rassembler avant de partir lui était précieuse et une femme de son rang n'aurait pas pu vivre avec un peu moins sous peine d'être humiliée. Elle reprit les jetons, les faisant tourner dans ses mains aux ongles longs et limés.

- Que veux-tu en échange, alors, Isaac ? 

- Une danse, très chère, dit-il d'un ton léger, mais ses yeux brillaient d'une intensité qui ne laissait rien au hasard.

La musique, jouée par un petit groupe de musiciens dans un coin, s'éleva doucement, emplissant l'espace d'une mélodie envoûtante. Les murmures des autres joueurs de cartes s'éteignirent alors qu'Isaac, toujours aussi confiant, tendit une main vers Perséphone.

Perséphone hésita un instant, son regard oscillant entre la main tendue et le sourire charmeur du chevalier. Finalement, avec un soupir exagéré et une expression mi-amusée, mi-agacée, elle posa sa main sur la sienne.

- Très bien, Isaac. Mais je te préviens, je mène la danse.

Isaac inclina légèrement la tête, un sourire en coin.

- Je n'en attendais pas moins.

Ils se dirigèrent vers le centre de la salle, où quelques couples s'étaient déjà formés. Isaac posa une main sur la taille de Perséphone, tandis qu'elle plaça la sienne sur son épaule. Sa poigne était ferme mais respectueuse, et leurs pas s'accordèrent dès les premières notes.

La musique était douce mais rythmée, une valse empreinte de mystère. Perséphone guida les premiers mouvements, ses pieds glissant avec grâce sur le sol, ses jupons tournoyant légèrement à chaque pivot. Isaac suivait sans difficulté, ses bottes traçant des cercles précis autour d'elle.

- Tu danses bien, commenta Perséphone d'un ton neutre, bien qu'un léger sourire jouait sur ses lèvres.

- Je pourrais dire la même chose de toi, répondit-il. Mais je pense que tu le sais déjà.

Perséphone arqua un sourcil, mais elle ne put s'empêcher de sourire un peu plus.

- Les compliments trop faciles ne m'impressionnent pas, chevalier.

Isaac rit doucement, resserrant légèrement sa prise autour de sa taille pour un tour rapide. Perséphone sentit son souffle se couper brièvement, mais elle se rattrapa immédiatement, pivotant avec élégance pour reprendre le contrôle.

- Et qu'est-ce qui t'impressionne, alors ? demanda-t-il en la fixant droit dans les yeux, ses paroles se faisant plus basses, presque murmurées.

Perséphone soutint son regard, ses pupilles étincelant dans la lumière vacillante. Elle mordilla sa lèvre, hypnotisée.

- Tout ce qu'elle n'avait pas. C'est à dire pas mal de choses.

Un éclat amusé traversa le visage d'Isaac. Cependant, il ne fit pas de commentaire sur l'apparente ancienne relation homosexuelle de son ex-petite amie.

- Alors, cela veut-il dire que je suis en bonne voie pour t'impressionner ?

- Peut-être, répondit-elle, un sourire énigmatique sur les lèvres.

La musique s'accéléra légèrement, et Isaac, saisissant l'opportunité, prit l'initiative pour un moment. Il l'entraîna dans une série de mouvements fluides et inattendus, la forçant à suivre son rythme. Perséphone, prise par surprise, sentit son cœur battre plus vite, mais elle se laissa porter, appréciant secrètement l'audace de son partenaire.

- Tu ne m'avais pas dit que tu savais mener, murmura-t-elle, son ton mi-sérieux, mi-taquin.

- Je te rends simplement la pareille, répondit Isaac.

Leurs visages étaient maintenant proches, leurs respirations se mêlant presque. Le monde autour d'eux sembla s'estomper, les autres danseurs et la musique n'étant plus qu'un murmure dans leur esprit.

- Perséphone, commença Isaac, sa voix douce et plus grave.Elle sentit une chaleur familière monter en elle, mais elle garda un masque imperturbable.

La musique dans le bar était forte, le rythme d'une guitare électrique accompagnant les conversations animées et les rires des clients. Lupa était assise au bout du comptoir, son verre d'alcool à moitié plein entre ses mains. Son regard était fixé sur la piste de danse, où Isaac et Perséphone tournaient et riaient, leurs mouvements fluide et complices.

Elektra, la barman, essuyait un verre derrière le comptoir. Ses cheveux blonds étaient relevés en une tresse désordonnée, et ses yeux perçants passaient de Lupa au duo sur la piste. Finalement, elle rompit le silence.

- Alors ? demanda-t-elle en s'appuyant sur le comptoir.

Lupa détourna rapidement les yeux, sa mâchoire se contractant.

-  Rien. 

Elektra haussa un sourcil, posant le verre propre de côté.

-  Sérieusement ? Parce que vous avez la  tête du loup qui va mordre, Patronne.

Lupa soupira et baissa les yeux sur son verre, jouant distraitement avec le bord.

- C'est rien d'important. Juste... de mauvais souvenirs.

- Un mauvais souvenir qui danse au milieu de la piste, on dirait, répondit Elektra, un sourire en coin, doux.

Lupa lança un regard noir à la barman, mais Elektra ne bougea pas, ses yeux pétillants de malice.

- Mmhhr. Ouais, grogna Lupa en vidant son verre d'un trait.

Elektra croisa les bras, attendant que Lupa développe. Quand rien ne vint, elle reprit :

- Allez, crachez le morceau. C'est qui ? Le gars ? La fille ? Ou les deux ?

Lupa plissa les yeux en regardant à nouveau la piste. Perséphone riait de bon cœur à une plaisanterie d'Isaac, et Lupa sentit un pincement familier dans sa poitrine.

- La fille, admit-elle finalement, sa voix rauque.

Elektra inclina la tête, intéressée.

- Elle vous a fait quoi ? Volé la vedette sur la piste ou votre cœur ?

Lupa fronça les sourcils, son ton se faisant plus tranchant.

- Elle n'a rien volé. Elle n'a rien à voir avec moi. Je... Connais pas cette salope. 

- Ah, bien sûr, dit Elektra en roulant les yeux. Et c'est pour ça que vous la fixez comme sivous alliez lui arracher la tête ou... l'embrasser. 

Lupa se crispa, ses doigts serrant le verre vide.

- Je veux juste qu'elle parte. 

Elektra observa Lupa un moment, puis haussa les épaules. Elle se dirigea vers la piste s'éloignant de la sa patronne qui disparaissait dans un autre coin du bar, où d'autres paris faisaient rage. Elle détourna les yeux, ses doigts tapotant nerveusement le comptoir. 

La musique dans le bar s'apaisa légèrement, laissant place à une ambiance feutrée propice aux conversations intimes et aux jeux d'argent. Elektra, le sourire habituel accroché à ses lèvres, posa une bouteille de whisky sur le comptoir et essuya une table en coin, où trônait un jeu de cartes bien usé.

Perséphone, élégante dans sa robe noire, approcha d'un pas assuré, son port altier attirant les regards autour d'elle. Elle s'arrêta près de la table et croisa les bras, regardant le main de la barman essuyer la table

- Vous voulez commander ? demanda Elektra, levant un sourcil, faussement innocente.

- Un whisky, s'il vous plait.

Elektra la détailla, son sourire s'élargissant.

- Il est deux heures du matin. Normalement on ferme pour les consommations... Si vous restez, autant rendre la soirée mémorable. Une partie de poker, ça vous dit ? 

Perséphone plissa légèrement les yeux, intriguée.

- Pourquoi pas.

Elektra tira une chaise pour s'asseoir. Après un moment d'hésitation, Perséphone prit place en face d'elle. Elektra distribua les cartes avec une habileté déconcertante, comme si elle était née pour ça.

- Qu'est-ce qu'on mise ? demanda Perséphone, son ton neutre mais ses yeux brillant d'un intérêt calculé.

Elektra tapota son menton, feignant une réflexion intense.

- « Tout ce que vous avez. Moi, je mets ma caisse de la soirée. Si je gagne, vous répondez à une question. Juste une, avec sincérité. 

Perséphone esquissa un sourire sarcastique.

- Et si je gagne ?

Elektra haussa les épaules.

- Tout ce que j'ai misé est à vous. Et je vous paie un verre pour fêter ça.

La vampirette hésita une fraction de seconde avant de hocher la tête.

- Très bien. Mais ne soyez pas déçue si vous perdez.

Le jeu commença. Les jetons s'amassèrent au centre de la table, et les regards autour se tournèrent vers elles, curieux. Elektra jouait avec assurance, mais ses yeux brillaient d'une lueur malicieuse chaque fois qu'elle relevait les cartes.

Entre deux tours, elle lança une question, son ton détaché :

- Alors, qu'est-ce qu'une femme aussi noble que vous fait dans un bar comme celui-ci ?

Perséphone, impassible, fixa ses cartes.

- On m'a recommandé cet endroit. J'y ai retrouvé une connaissance.

Elektra hocha la tête, amusée par l'évitement.

- Une connaissance avec qui vous semblez proche. 

- Personne ne me connait vraiment.

Lorsque les cartes furent retournées, Elektra dévoila un carré de rois, un sourire tranquille aux lèvres. Perséphone, qui avait misé tous ses jetons sur une couleur, sentit son estomac se nouer.Les murmures autour de la table s'élevèrent tandis qu'Elektra rassemblait méthodiquement les jetons et les posait dans une pile impeccable devant elle. Elle leva ensuite les yeux vers Perséphone, dont le masque d'assurance commençait à se fissurer.

- Eh bien, madame... On dirait que la chance n'était pas de votre côté ce soir.

Perséphone tenta de garder son aplomb, redressant légèrement les épaules.

- Ce n'est qu'un jeu. Vous avez été meilleure. Félicitations.

Elektra croisa les bras, appuyée nonchalamment contre le bord de la table.

- Un jeu, oui. Mais les paris étaient réels. Vous avez misé tout ce que vous aviez. Alors... comment comptez-vous rembourser cette petite dette ?

Perséphone sentit son sang se glacer. Elle jeta un rapide coup d'œil aux jetons amassés devant Elektra, réalisant qu'elle avait mis en jeu plus qu'elle ne pouvait se permettre.

- Je... Je n'ai pas cette somme, admit-elle à contrecœur, sa voix teintée d'une froideur destinée à masquer sa nervosité.

Elektra haussa un sourcil, son sourire s'élargissant, mais sans méchanceté.

- Ce n'est pas un problème. On trouvera un arrangement. Je suis quelqu'un de raisonnable.

Perséphone fixa Elektra, méfiante.

- Et quel genre d'arrangement proposez-vous ?

Elektra se pencha légèrement, rapprochant son visage de celui de Perséphone, suffisamment pour que seule elle puisse entendre ses mots.

- Vous travaillez ici, jusqu'à ce que la dette soit réglée. Vous semblez avoir un certain talent pour attirer l'attention. Avec un peu de chance, vous pourriez même apprécier l'expérience. 

Perséphone se redressa brusquement, outrée.

- Travailler ici ? Vous plaisantez. 

- Pas du tout, répondit Elektra calmement. Mais si vous avez une autre idée, je suis tout ouïe.

Le silence s'installa un instant, pesant. Perséphone jeta un coup d'œil autour d'elle, consciente des regards curieux posés sur leur échange.

Elle serra les dents, sa fierté lui hurlant de refuser. Mais au fond, elle savait qu'elle n'avait pas d'autre choix.

- Très bien, finit-elle par lâcher, chaque mot lourd de frustration.

Elktra hocha la tête, satisfaite, et lui tendit la main.

- Marché conclu. Hâte de savoir qui vous êtes... Je crois avoir déjà entendu parler de vous.

- Ça m'étonnerais.

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