Chapitre 23



PDV Sacha 🎨

Mon appartement ressemble à un champ de bataille.

Il n'y a que le cadeau de Mad qui est encore accroché au mur, pour le reste tout n'est que vestige.

Une fois que je suis remonté après avoir regardé Madelen s'engouffrer dans ce taxi sans que je ne puisse rien y faire, la colère m'a submergé, m'a englouti.

Et ce putain de mobile qui n'arrête pas de sonner.

Je ne sais pas combien de temps je suis resté prostré sur le sol de mon salon, un t-shirt de Madelen contre mon nez, pour sentir cette odeur de doudou, qui me fait tant chavirer, mais la nuit c'est installé. Sombre, sans lune, même les étoiles ont foutu le camp.

A croire que mon petit chat les a emportés avec elle.

Encore cette sonnerie.

Avant de faire une connerie, et de le balancer contre un mur, je l'éteint en vérifiant que ce n'est pas Mad, c'est son frère Liam, il attendra, évidemment que non ce n'est pas elle. Pourquoi m'appelarait-elle ?

Je l'ai blessé, déçu, trahi.

J'avais promis que jamais de ma vie je ne lui ferai du mal.

Ben c'est mal barré mec.

Mes pupilles se portent sur les feuilles qui me narguent depuis tout à l'heure.

Marié.

Je me suis uni, moi, Sacha avec une fille que je connais pas, et à Las Vegas en plus.

Mais qu'est-ce que j'ai foutu...

Un flash. Violent.

Je recule contre le canapé, comme si cela pouvait le faire partir et l'empêcher de me rattraper.

Des images plus ou moins claires, me reviennent en rafale de cette soirée. Je fixe de nouveau le contrat, d'un air incrédule.
Plus rien n'est à détruire dans mon appartement, à part moi. Alors je me saisie de la bouteille de whisky qui traîne sur la table, je bois au goulot directement, l'alcool me brûle, je prends une nouvelle gorgée, j'allume une clope, reprend une salve d'alcool, les effets commencent à se faire sentir, mais pas assez pour oublier.

Flash.

Ma mémoire fait de la résistance.

C'était il y a six mois. Liam, Jayden et moi dans l'avion qui nous emmène passer le week-end dans la ville des péchés. Les filles ne pouvaient pas nous accompagner. Yazel, parce qu'elle dansait à Atlanta et mon petit chat, parce qu'elle avait un partiel important le lundi matin. On devait fêter la fin et la réussite de notre année, mais aussi la signature de l'achat du TBD par Jayden.

Je me cramponne à la bouteille, comme si elle pouvait me sauver du naufrage qui s'annonce avec la suite des souvenirs qui maintenant ne s'arrêtent plus.
Je penche ma tête en arrière pour l'appuyer sur l'assise du fauteuil et je me laisse dériver...

Nous venons de percevoir notre suite.
Jayden n'attend pas et vide le mini bar.
— On commence les mecs.
On trinque, puis nous décidons de descendre dans un des casino de l'hôtel. Dans l'ascenseur trois meufs nous dévisageaient comme si elles voulaient nous bouffer. Inutile de préciser que Liam et Jayden n'ont pas attendu pour faire connaissance. Moi je suis sur mon portable en train de rédiger un message pour mon petit chat.

Moi :
Tu me manques... en plus le lit est assez grand pour nous deux...
Et j'ai plein d'idées...

— Sacha, laisse ma soeur et profite mec, me distrait Liam coller à sa proie du soir.
Je lui fait un doigt d'honneur, mais ce con m'arrache mon IPhone pour le glisser dans la poche de son blouson.
— Rend le moi Liam.
— Vient le chercher, me provoque-t-il.
Je m'avance d'un pas, quand Jayden ouvre sa bouche.
— Les mecs, nos nouvelles amies, il appuie sur le dernier mot, on a tous compris le sens, vont vous prendre pour des tarés.

Je me redresse, péniblement, l'alcool commence à faire son effet, pour me saisir de mon portable. Je fais défiler mes conversations avec Madelen pour remonter jusqu'à ce fameux sms le jour de ce week-end de merde. Et là, je me fige. Le mot brouillon me nargue. Je n'ai jamais envoyé ce message... je n'en ai pas eu le temps et ensuite, le programme de notre soirée a été plus que flou.

Je replonge dans mes pensées.

— Bon les filles, peut-être nous recroiserons nous plus tard, assure Liam en sortant de la cabine.
Je sens le regard insistant de l'une d'elle. Elle a essayé d'engager la conversation, mais en colère contre Liam, même après qu'il m'ait rendu mon portable, je n'ai pas fait d'effort.
Elle est mignonne mais ce n'est pas ma Madelen. La fille qui fait battre mon cœur, sans qu'elle le sache, ma meilleure amie.
Le reste est dans le brouillard, je me revois au bar, puis au casino, jouant nos numéros fétiches à Mad et moi, et Jayden qui nous entraîne vers une boite de nuit.

Je frotte mes yeux. Passe une main dans mes cheveux, allume une autre cigarette.
Je dois continuer mon introspection pour trouver à quel moment j'ai merdé à ce point.

— Merde les mecs je ne sais pas où regarder, bafouille Liam d'une voix d'ivrogne. En plus je vois en double, du coup si je m'en tape une, elles seront deux non ?
Jayjay et moi éclatons de rire.
— Commence par une et on en reparle...
— Deal, Jayjay. Oh mais qui voilà ! S'exclame-t-il.

Nous tournons la tête dans la direction qu'il fixe, geste qui me fait tanguer, signe que je suis complètement fait, et apercevons les trois filles de l'ascenseur qui nous reconnaissent aussi. Elles se rapprochent, Liam les invite à notre table, je reste en retrait, mais plus la soirée avance, plus les shots s'enchaînent, plus la musique augmente, et plus je me laisse aller... je danse, la fille me colle, je l'embrasse...

Les larmes se mettent à couler sans mon autorisation. Je les essuie d'un geste rageur.

Nous revenons dans notre chambre, on continue de boire, une pub passe sur l'écran de la télévision allumée, à propos de la chapelle de l'hôtel, qui célèbre des mariages... Liam qui nous lance un cap ou pas cap, Jayden qui refuse, moi qui accepte, qui enchaine les verres... et c'est le trou noir.
— J'ai un perforateur dans la tronche, me plaigne-je quand je me réveille quelques heures après dans mon lit, seul et complètement nu.
Une alarme sonne dans mon crâne, mais un haut le cœur plus violent que les précédents me la font oublier...

— Putain ! si j'avais été plus attentif à tous ces signaux qui clignotaient aussi violemment que les enseignes dans le quartier Rouge d'Amsterdam, me dis-je dans un souffle, je n'en serais pas là, pathétiquement seul et ivre. Et surtout ma Madelen serait dans mes bras et non pas en pleur à cause de moi.

Je porte la bouteille à mes lèvres, elle aussi est vide... puis je sombre... dans un sommeil sans rêve.

Je me réveille le lendemain en fin de matinée, hagard, dans la même position, la nuque en vrac, le cerveau où un concert de klaxons s'éclate, et un corps complètement ankylosé.

Le jour éclaire la pièce, le ciel est sombre, les nuages sont bas, il va neigé pensé-je, et ce constat me ramène des semaines en arrière, dans un autre pays, dans une autre maison où la cannelle, des sous-vêtements en dentelles rythmaient mes journées.
Je frotte mon visage, puis je décide de me lever. Je regarde l'heure. Treize heures.

Bon j'ai raté les cours de la matinée, pas grave.

Je rejoins ma chambre où les souvenirs reviennent en force. Je tiens toujours le t-shirt le Mad dans la main, d'autres de ses affaires sont là, notamment son sac de cours... ce qui agit comme un uppercut.

Elle est partie.

Les larmes reviennent.

Non. Non. Non.

Je balance mon poings de rage contre la cloison.

— Tu peux pas me quitter Mad. Toi et moi c'est pour toujours.

Je sais ce qu'il me reste à faire.

Encouragé par mes propres résolutions, je me dirige vers la salle d'eau pour évacuer un maximum de fatigue sous l'eau chaude.

Une heure plus tard, je suis dans la cuisine, un verre d'eau et deux cachets avalés, une tasse de café à la main, je réfléchi à mon plan d'action.

Mes yeux sont attirés par le post-it rose fluo collé sur l'accord de séparation. Une fois mon breuvage avalé, je récupère mon sac à dos, celui de Mad, je rentre le numéro inscrit sur le mot, mes clés de voiture et abandonne mon logement.

Je pris pour que ma mère n'ait pas l'idée de me rendre visite, car j'aurais du mal à lui expliquer les raisons du bordel qui y règne.

Enfin un jour ou l'autre il faudra bien leur dire.

Ouais mais pas encore. Pas temps que je n'ai pas récupéré mon petit chat.

Je me gare sur la première place que je trouve, pas à côté du bâtiment de Mad, mais marcher à l'air frais ne me fera pas de mal. J'ajuste mon bonnet, attrape mon paquet de cigarettes dans la poche de ma doudoune, en allume une, inspire la première bouffée, m'encourage en récupérant mes burnes, puis avance jusqu'à l'entrée du bloc B.
Mon portable vibre, le nom de Liam s'affiche, je le bascule sur messagerie, je le rappellerai plus tard, puis je pénètre à l'intérieur après avoir écrasé mon bâton de cancer. Les couloirs sont vides, je me dirige directement vers celui où l'amphi de Mad s'y trouve et je me plante contre le mur face des doubles portes.
Deux filles me dévisagent en passant devant moi. Je leur fais mon sourire de connard, accompagné de mon regard le plus noir. Elles baissent le leur. Les premiers étudiants qui commencent à sortir, attire mon attention et notamment une brune magnifique qui regarde ses pieds alors qu'un mec lui parle.

Prêt. Trop près de son oreille.

Recule mec où je te défonce.

Madelen hoche simplement la tête, et au moment où elle relève son visage, nos pupilles se croisent. On m'aurait transpercé le cœur avec un poignard que la douleur n'aurait pas été plus atroce.

Ses iris sont brillants, des cernes mangent ses magnifiques yeux, ses épaules sont voûtées, elle souffle en arrivant vers moi.

L'autre abruti qui ne voit rien continue de lui parler en souriant.

— Mad ? l'appelé-je alors qu'elle passe devant moi sans s'arrêter. Attends !

Je la vois tressaillir, marquer un temps d'arrêt.

— S'il te plait.

Je me décolle pour la suivre. Arrivé à sa hauteur, j'enroule mes doigts autour de son poignet.

— Lâche-moi Sacha.

Son ton se veut dur, mais je décèle une faille.

Je la lâche à regret.

J'ouvre la bouche mais l'autre suicidaire me devance.

— Un problème ?
— Ouais, c'est toi mon problème la de suite...
— Sacha arrête.

Je m'avance en même temps que le collègue de Mad.

— Stop ! Ordonne-t-elle.
— Je dois te parler mon petit chat.

Je me reconcentre sur la fille en face de moi.

— Pas maintenant.
— Madelen on va être en retard...

Mais il va la fermer ce con. Si il peut encore parler c'est uniquement à cause de mon petit chat. Je ne veux pas aggraver mon cas plus qu'il ne l'est déjà.

— Alors quand ?
— Plus tard, Mick et moi devons nous rendre à la bibliothèque... Je ne sais pas pourquoi je me justifie, se dit-elle pour elle-même.
— Mick, hein ?

L'autre fait le coq. Je vais lui faire avaler son rictus et tampi pour mon cas désespéré.

— Oui c'est comme ça qu'il se nomme.

Elle souffle.

— Ok.

Ma gorge me brûle. J'ai de plus en plus de mal à respirer.

— Ok. Tiens je t'ai apporté ton sac.
— Merci.

Nos doigts se frôlent et un courant électrique passe entre nous.
Madelen retire sa main, puis tourne les talons sans aucun mot de plus, je reste planter là à la regarder partir suivi de son toutou.

Mon mensonge par omission me brûle les entrailles, me grignote de l'intérieur, parce que je l'ai blessé, trahi.
Cette nouvelle sensation qui arrive de mes tréfonds, je ne suis pas sûr de la supporter. Elle fait mal, elle me met à terre, elle est en train de m'enlever celle que j'aime le plus au monde...
Dans un cri rageur, je prends le chemin de la sortie, je sors mon iPhone, sélectionne le dernier numéro enregistré et attend.

Une sonnerie.
Deux sonneries.

— Allô.

— C'est Sacha Castex.

— Bonjour Sacha, comment...

— On oublie les politesses. Quand es-tu libre pour que l'on se voit ?

— Ce soir si tu veux.

— Très bien.Tu connais le TBD ?

— Oui.

Je ne veux pas lui laisser le temps de réfléchir ou même argumenter.

— Très bien, rendez-vous là- bas à vingt heures. Et n'oublie pas tes papiers.

Je raccroche sans que Melly ait pu ajouter quoi que ce soit.

Si Madelen pense que je vais abandonner, elle rêve. Je lui ai promis que c'est elle que j'épouserai et je le ferai.
Tu as le droit de m'en vouloir petit chat, je te donne de l'avance, mais je suis derrière toi.
Toujours. Et à jamais.



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