Chapitre 22
PDV Madelen 📸
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Allongée dans la baignoire sabot de la salle de bain de Sacha, de la mousse au parfum de jasmin recouvre mon corps. J'en attrape dans ma main puis je souffle dessus pour les voir virevolter avant de se poser sur l'eau. Je le fais plusieurs fois, avant que des larmes que je n'aie pas senti arriver coulent le long de mes joues, contournent mes lèvres, pour se mélanger à l'eau du bain.
Je les essuie d'un revers de la main et plonge entièrement sous l'eau.
Le silence m'apaise, j'essaye de vider mon esprit de toutes ses images insidieuses qui se faufilent dans mon esprit, mais ce n'est pas facile quand le visage de cette Melly reste imprimé derrière mes paupières closes.
Qui est cette fille ?
Que cherche-t-elle ?
A-t-elle compté pour Sacha ?
L'a-t-il aimé même le temps d'un week-end.
Le chagrin te fait délirer... comment pourrait-il en aimer une autre ?
Pourquoi réapparaître maintenant en faisant temps de mystère avec cette satanée enveloppe ?
Mon cerveau bouillonne devant tant de questions sans réponse. Pour le moment. Car je compte bien tirer des réponses de Sacha.
Je remonte à la surface en fermant les yeux tout en faisant attention de ne pas inonder le sol en parquet quand je sens deux bras me tirant violemment hors de l'eau par les épaules, me faisant paniquer.
Sacha est trempé, debout dans la baignoire, tout habillé, il se tient face à moi, ses deux mains qui me maintiennent droite. Sa respiration est bruyante. Il tremble.
— Non mais ça ne va pas ! Crié-je en enlevant des mèches de mon visage, une fois que j'ai repris mes esprits.
— Toi ça ne va pas Mad ! Putain, j'ai cru que tu ne remontais pas. Je t'ai appelé, mais voyant que tu ne répondais pas, je suis venu et quand je t'ai aperçu sous l'eau sans bouger...
Sacha passe sa main dans ses cheveux pour les ramener en arrière, de la peinture macule ses mains colorant quelques mèches.
— ... J'ai flippé.
En face de moi, j'ai un Sacha vulnérable comme je ne l'ai jamais vu. Sa respiration est hachée.
Et j'ai mal.
Mes mains encadrent son beau visage.
Il souffle de soulagement.
Je voudrais lui parler, mais mes cordes vocales restent muettes.
Je me rapproche, colle mon corps trempé contre le sien encore revêtu de ses vêtements. Il m'encercle de ses bras, en murmurant des mots contre ma nuque dont je ne distingue pas le sens, mais peu importe l'essentiel est d'être là où je suis. À l'abri dans ses bras puissant.
Puis quelque chose change, l'atmosphère devient électrique, les doigts de Sacha s'animent pour me caresser le long de ma colonne vertébrale, ma peau se pare de chair de poule, ses lèvres butinent, mordent, la peau tendre de ma clavicule, remonte vers ma mâchoire avant de happer mes lèvres dans un baiser brutal, impatient.
Mes mains s'activent pour enlever son t-shirt, je le laisse tomber dans l'eau, je m'attaque ensuite à son jean, le fait qu'il soit mouillé me rend la tâche ardue, Sacha m'aide et l'envoie valser quelque part sur le sol, puis reprend mes lèvres possessivement. Je me colle à lui, bascule mon bassin, et sans me lâcher, il passe ses bras sous mes cuisses pour me soulever, j'enroule mes jambes autour de sa taille, toujours sans un mot, il n'y a que les gestes qui parlent, les mots nous les prononcerons après, mais là, lui et moi voulons encore croire que tout va bien.
Qu'il n'y pas une épée de Damoclès qui nous attend au salon. Sacha sort de la baignoire, se foutant de mettre de l'eau partout, il nous emmène jusqu'à sa chambre, où il me dépose sur le lit, indifférent à nos corps trempés.
Sans attendre, il se cale entre mes jambes après avoir enlevé son boxer et s'insère en moi en une seule poussée.
Un gémissement sort de mes lèvres, un râle de satisfaction mêlé de désir s'extirpe de sa cage thoracique.
Mes cuisses encerclent son bassin pour le sentir au plus profond de moi, Sacha entrelace nos doigts et lève nos mains au-dessus de ma tête. Son rythme est saccadé, nos respirations haletantes, nos yeux ne se quittent pas, ils plongent au tréfonds de nos âmes. Je sens monter en moi, les prémices de ce qui va me propulser dans une autre galaxie, Sacha le perçoit, il accélère encore, son regard se fait plus perçant, ses iris brillent, sa bouche s'ouvre et au moment où il prononce ses mots, je me disloque en un millier de fragments.
— Je suis désolé.
Trois mots.
Qui vont tout changer.
Qui me préviennent.
Sacha s'écroule sur moi, m'écrase, me serre à m'en faire mal, je le laisse faire, j'enfouis mon visage dans son cou, je le parsème de baisers, caresse son dos, le temps que l'on s'apaise, que notre respiration redevienne normale.
— Je t'aime Sacha.
Il relève la tête, me fixe.
— Moi aussi Madelen. Plus que de raison. Je ne voulais pas être brutal, mais j'avais besoin de te sentir avec moi, j'ai...
Je pose un doigt sur sa bouche pour le faire taire.
— Chut Chacha, je serais toujours là...
Il bascule sur le flanc en m'entrainant avec lui. Je frissonne alors Sacha remonte la couette sur nous. On reste un long moment comme ça dans les bras l'un de l'autre, à se caresser, s'embrasser, aucun de nous deux ne parle, on est conscient que l'on recule le moment fatidique.
La sonnerie de son portable retentit depuis le salon.
— Tu ne vas pas répondre ? Questionnè-je alors que Sacha ne bouge pas.
— Non, je suis trop bien là.
— Tu sais qu'à un moment donné il va falloir sortir de ce lit ?
Et pour donner du poids à mes paroles, mon estomac se manifeste.
— Ok, ok je ne peux pas lutter contre la gloutonne que j'ai à côté de moi.
Je prends une mine offusquée.
— Tu plaisantes ! Moi ! Je suis une gloutonne ?
J'attrape un oreiller et le balance sur mon mec qui évidemment pare mon coup. S'ensuit une bataille de polochons dans des éclats de rires jusqu'à ce que mon ventre grogne de nouveau.
— Bon allez debout mon petit chat, allons te nourrir.
Sacha m'embrasse sur la tempe avant de sortir du lit.
Cet aparté nous aura fait du bien. Mais la réalité nous rattrape bien trop vite, quand une fois que nous sommes vêtus, moi d'une chemise blanche appartenant à Sacha, lui d'un t-shirt noir avec un bas de survêtement, dès que l'on pénètre dans le salon.
— Japonais, ça te va Mad ?
Mon attention est focalisée par le sac de Sacha, mais j'arrive à lui répondre.
— Oui, c'est parfait mon cœur.
— Vas-y installe-toi sur le canapé, je commande et je te rejoins.
Je suis assise par terre contre la banquette, les bras entourant mes jambes, je lève les yeux vers le triptyque photographique accroché sur le mur en brique, que j'ai offert à Sacha pour Noël, cela me semble si loin... et pourtant seulement un peu plus de deux semaines se sont écoulées, je délaisse le visage de Sacha quand mon regard est attiré par la porte entrebâillée de son atelier.
L'appartement de Sacha est composé de deux chambres, dont une qu'il a transformé en atelier de peinture, avec chacune leur salle de bain, d'une grande pièce à vivre séparée de la cuisine par un bar et d'une terrasse arborée de taille moyenne.
Il est dans la plus pure architecture New-yorkaise, on y retrouve le bois chaud des parquets, le métal des fenêtres et la brique des murs. Il en a fait un cocon dans lequel j'aime venir m'y réfugier. Léane n'est pas pour rien dans sa décoration cosy, mais la touche de mon mec est visible, avec un mur représentant Gotham tout en graph'mur .
Je regarde par-dessus mon épaule, mais Sacha est toujours occupé à passer la commande pour notre dîner, alors sans un bruit pour ne pas attirer son regard, je me lève pour me diriger vers sa pièce interdite. Car oui, personne n'a le droit d'y pénétrer, sauf moi.
Je pousse le battant, avance jusqu'au milieu et je reste sans voix devant le tableau qui me fait face.
Tout est sombre, du gris, du noir, jetés sur la toile, rien n'est représenté si ce n'est une tache plus claire, minuscule, au milieu de ce chaos.
— Il te plaît ? Me souffle une voix où perce l'émotion, contre mon oreille.
Perdue dans les méandres de cette toile, je n'ai pas entendu Sacha arriver.
Il pose son menton sur le haut de mon crâne, m'entoure de ses bras, je me laisse aller contre son torse.
Je me replonge dans l'âme de Sacha, car il s'agit bien de ça, et de moi, représentée par la minuscule lueur blanche.
— Il est sombre, triste, mais c'est toi... alors oui, je le trouve magnifique Sacha, dis-je en me retournant pour le fixer.
Il se penche pour déposer un baiser sur mes lèvres.
— Exactement, et j'ai espoir que cette lumière, timide pour le moment, éclate tout le reste...
— Je l'espère, mon amour.
Et je suis sincère à ce moment-là.
Ma paume caresse sa joue dans laquelle il se love.
— Moi aussi ma puce. Bon le repas est là, tu viens ?
Je hoche la tête.
Sacha a tout installé sur la table basse du salon où l'on a pour habitude de manger.
Mon estomac est noué. Mais Sacha a commandé tous mes plats préférés, alors je prends une bouchée.
— C'est délicieux.
— Ne te force pas Mad. Je peux le comprendre tu sais...
Je lâche mes baguettes pour me tourner vers lui. Sacha n'a pas touché à ses plats, il joue avec les baguettes, ses yeux font des aller-retour entre son assiette et son sac.
— Tu veux qu'on l'ouvre maintenant ? Ou tu préfères attendre d'être tout seul.
— Oui. Non. Je désire le faire avec toi chérie.
— Ok.
J'essaye de garder un air impassible, mais je bous à l'intérieur. Je me lève pour attraper le sac puis en sortir ce qui plombe notre soirée. Je tends l'enveloppe à Sacha pour qu'il la décache.
Dès que l'en-tête apparaît je me fige.
Accord de séparation.
Sacha continue de sortir les deux pages agrafées entre elles, et plus il progresse, plus l'envie de vomir se fait sentir.
Accord de séparation (« l'Accord ») en date du —————
Entre :
Melly Walter
.....
-Et-
Sacha Castex
....
Impossible pour moi de continuer la lecture.
Sacha tape du poing sur la table en bois, me faisant tressaillir.
— C'est quoi ce bordel, hurle-t-il.
— Ça me parait clair, j'ose dire.
Il balance l'enveloppe d'où s'échappe un post it rose fluo.
La blague.
Un hoquet de stupeur fait remonter la bile acide de mon estomac quand j'arrive à lire ce qu'il y a écrit.
Le nom et le numéro de téléphone de cette fille avec un appelle-moi en lettres capitales.
J'ai juste le temps d'arriver jusqu'aux toilettes pour déverser le peu de nourriture que j'ai avalé. Mon œsophage me brûle, mes larmes inondent mes joues, une main vient retenir quelques-unes de mes mèches en arrière.
Sacha me tient toujours par les cheveux quand je m'écroule au sol. Incapable de bouger, je reste prostrée, le regard vide, Sacha s'agenouille en face moi, une main sur ma nuque, l'autre sur ma joue.
— Hey, mon petit chat.
Rien.
Je ne suis plus là. Ça fait trop mal.
— Regarde-moi, Mad.
Non.
Rendez-moi mon Sacha.
Celui qui ne m'a jamais rien caché.
Celui qui ne s'est pas uni à une autre.
— Madelen, avec une douceur qu'il doit être loin de ressentir au fond de lui, il soulève mon visage.
Je me force à fondre mes iris dans les siens.
— Je te jure que je ne sais pas d'où ça sort... je n'ai aucun souvenir putain !
Je secoue la tête.
C'est son excuse ça ?
Je crois que c'est ce qui le fait réagir. Et j'explose. Une bombe à retardement. Plus rien, ni personne ne pourra me retenir.
— Tu te moques de moi, éructé-je. Comment peut-on oublier une chose pareille ? Tu t'es marié putain Sacha !
De rage, je le pousse de mes mains sur son torse, ce qui le déséquilibre et le fait tomber sur les fesses, puis j'en profite pour sortir en trombe des toilettes.
Il faut que je m'éloigne. De lui, de nous, d'ici.
Je l'entends me suivre en m'appelant, mais c'est trop tard, je suis déterminée à quitter cet endroit pour retrouver le mien, me calmer et apprendre à vivre sans Sacha, mon amour, mon meilleur ami.
Je précise appendre, parce qu'en vingt-trois ans il n'y pas eu un jour, Ah ben si apparemment, son fameux week-end à Las Vegas, où lui et moi ne nous avons pas donné de nouvelles, nous nous sommes toujours tout dit.
Enfin je le pensais jusqu'à maintenant.
Car malgré mon esprit, ankylosé par cette révélation, il est certain qu'un nous ne peut plus exister. Pas alors que quelque chose de sérieux existe entre cette Melly et lui, même s'il ne s'en souvient pas.
D'ailleurs comment peut-il avoir oublié un truc pareil ? Las Vegas n'efface pas la mémoire une fois que l'on quitte la ville, si ?
Je récupère mon sac, tant pis pour mes vêtements, je vais certainement passer pour une folle dingue en chemise et tennis, mais rien à faire. Je ne veux pas perdre du temps à m'habiller et donner la possibilité à mon traître de... ex-meilleur ami de me retenir et m'embobiner avec des excuses minables.
— Madelen où comptes tu aller comme ça ?
Là où tu n'es pas, ais-je envie de répondre.
Sacha me tient par le poignet pour me retenir alors que je déverrouille la porte d'entrée.
— Loin d'ici, rétorqué-je d'un ton dur, en tirant sur mon bras.
— Attends Mad, s'il te plaît. Tu m'as promis bordel... que tu resterais avec moi...
— Je sais Sacha, murmuré-je, en baissant la tête. Mais je... je suis... désolée... je ne peux pas.
Sur ces dernières paroles, j'ouvre le battant, Sacha ne fait aucun geste pour me retenir, et je m'enfuis en courant par les escaliers où les cris de mon amour perdu rebondissent sur les murs.
Une fois sur le trottoir, je réalise mon idiotie de ne pas avoir enfilé un pantalon ou du moins ma parka. Les regards des passants me mettent mal à l'aise, mais la chance est avec moi, enfin sur ce coup-là, car un taxi s'arrête à ma hauteur dès que j'ai levé le bras.
— Où je vous emmène, ma petite dame ? Ses yeux me fixent par le rétroviseur, un air de pitié sur le visage.
Bonne question.
Yazel est à l'autre bout du pays.
Jayden doit être au boulot et puis lui aussi est un menteur.
Si je vais chez mes parents, je vais avoir droit à un interrogatoire que je n'ai absolument pas envie de subir. Pareil chez Léane et Aaron.
Il me reste chez moi. Sauf que mon traître de frère doit y être.
Finalement, je donne mon adresse.
Les larmes se remettent à couler sur mes pommettes quand par la vitre, je distingue Sacha sur le seuil de l'immeuble en pleur, qui suit des yeux le taxi dans lequel je suis montée qui s'éloigne pour mettre un point final à ce que nous que je croyais inébranlable.
J'appuie ma tête contre la vitre, je regarde le paysage défiler, mes yeux sont brouillés de larmes, je remonte mes genoux contre ma poitrine et je me laisse aller à mes souvenirs... douloureux, mais indispensables pour encore me sentir vivante.
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