Chapitre 1
Oona avait toujours été différente des autres enfants de l'orphelinat. Dès son plus jeune âge, elle avait compris que les murs qui les entouraient étaient des barrières qu'il fallait briser, des limites qu'il fallait dépasser. L'orphelinat était une vieille abbaye. Cette abbaye de pierre était située en haut d'une montagne, au coeur d'une forêt de chêne. La bâtisse était vieille, les murs usés par le temps et les fenêtres en ogive qui ornaient les murs de la grande salle laissaient passer une lumière tamisée. Cette lumière était filtrée par les arbres de cette majestueuse forêt. Les chênes, que l'on pouvait apercevoir semblaient anciens et imposants, avec leurs troncs épais et leurs branches noueuses qui s'étendaient dans toutes les directions. Oona ressentait une atmosphère paisible et sereine lorsqu'elle était assise pour le repas dans la grande salle. Ces arbres créaient un semblant de calme et de tranquillité auprès des enfants. En réalité, rien n'était tranquille, et Oona avait cette idée en tête depuis quelques années déjà; avec sa meilleure amie Madeleine, elle allait réaliser l'impossible : s'enfuir.
Elle avait déjà essayé de grimper les murs de l'abbaye qui leur servait de maison pour s'échapper, mais à chaque fois, quelque chose avait empêché leur évasion : Madeleine qui s'était blessée, Oona qui s'était fait prendre par les soeurs; mais cette fois c'était différent. Cette fois-ci elles allaient y arriver.
Il était 22h30, elles devaient normalement être dans leur lit mais Oona et Madeleine se tenaient là, le souffle court, les yeux rivés sur les murs de l'abbaye. Depuis des mois, elles avaient préparé leur évasion, creusant des trous dans les pierres avec des outils improvisés, planifiant chaque étape avec soin. Mais maintenant que le moment était venu, elles étaient prises de panique. Elles savaient que les conséquences de leur évasion seraient terribles si elles se faisaient attraper, mais elles étaient déterminées à prendre le risque.
"On y est Madeleine. Tu es prête ? demanda Oona
-Oui, murmura Madeleine tremblante, qu'est-ce qu'on fait si on se fait attraper ?
-Ne t'en fais pas, on a tout prévu. Tout ira bien. Tu me fais confiance ?
-Oui, dit-elle en plongeant son regard dans les yeux bleu-gris d'Oona, je te fais confiance, je ne veux pas qu'on soit séparées.
-Tout va bien, je ne te laisserai pas. Maintenant; allons-y."
Soudain, elles entendirent des pas qui s'approchaient. C'était les sœurs de l'abbaye. Les jeunes filles se cachèrent dans les hortensias. Les nonnes s'assirent sur un banc, dos au mur, et discutèrent. Trop loin pour les entendre, les deux jeunes fille se décidèrent à y aller : tant pis, il fallait tenter, c'était leur dernière chance. Oona et Madeleine se mirent à courir en direction du mur et elles commencèrent à monter.
Soudain, une voix stridente résonna dans les murs de l'abbaye : "Alerte, alerte ! Elles tentent de s'évader !"
Les nonnes se levèrent d'un bond d'un banc sur lequel elles étaient assises, alarmées. D'autres soeurs sortirent de l'abbaye en courant dans tous les sens, cherchant les deux jeunes filles. Madeleine haletait de fatigue.
"Tiens bon, nous devons sortir d'ici." L'encouragea Oona.
Le soeurs étaient en bas du mur tandis que les deux jeunes filles étaient au milieu de celui-ci.
"Arrêtez-vous, mes enfants! leur demanda soeur Agnès. Les deux jeunes filles s'arrêtèrent
-Jamais ! hurla Oona
-Vous ne pouvez pas partir. C'est trop dangereux. Vous allez mourir si vous partez. leur annonça soeur Anna d'une voie mielleuse, Vous pensez que l'enfer est ici car on ne vous laisse pas sortir mais nous faisons cela pour votre bien.
Nous préférons mourir plutôt que de rester enfermées ici. lança Oona, elle avait un regard noir et dur.
-Je ne peux pas vous laisser partir. Vous êtes nos enfants. Nous devons vous protéger. insista soeur Agnès.
-Je suis désolée, mes enfants. Mais vous devez rester ici. C'est pour votre propre bien. Soeur Anne s'approcha du mur une carabine à la main.
Oona grippa à toute vitesse, en oubliant même de regarder derrière elle pour Madeleine. Elle entendit un coup de feu. Elle s'arrêta un instant. Etait-elle morte ? Non, elle était toujours là. Quelques centimètres et elle pourrait atteindre le haut du mur. Elle ne pensait plus qu'à sa vie, une balle frôlât ses cheveux et elle entendit des bourdonnement dans ses oreilles. Puis une deuxième balle s'écrasa dans le mur. Elle atteignit le haut, haletante, se hissa dessus, debout et se tourna, prête à aider Madeleine.
Mais Madeleine avait disparue. Oona la vit disparaite, trainée par les cheveux, dans l'abbaye. Elle ne l'avait pas entendu tombée, ni crier. Elle voyait à présent uniquement des traces de sang par terre.
-Oona soit raisonnable, cria soeur Agnès, tu vois ce que tu as fais ? Madeleine a pris une balle, à ta place. Je te laisse deux choix : rester et nous essayerons de soigner Madeleine ou partir et nous la laisserons mourir.
La jeune fille fixa ses yeux bleus gris sur l'arme que tenait soeur Agnès, elle savait que si elle revenait elle aurait une chance de sauver Madeleine mais, en pensant à cela, elle sentit les cicatrices sur son corps, de toutes ces évasions ratées où elles avaient été "éduquée". Elle ouvrit la bouche après quelques secondes, le vent souffla fortement, c'était à présent la seule chose que l'on pouvait entendre. Puis Oona prononça ces mots :
-Je ne reviendrai jamais, sœur Agnès. Je préfère mourir plutôt que de vivre enfermée ici.
Oona tendit les bras sur les côtés et se jeta dans le vide.
Oona avait le souffle coupé par le vent qui hurlait dans ses oreilles alors qu'elle tombait dur mur l'abbaye. Les arbres en contrebas se rapprochaient dangereusement, mais elle gardait les yeux fixés sur le ciel étoilé au-dessus d'elle. Elle avait l'impression de voler, de s'élever au-dessus de tous les problèmes qui l'avaient tourmentée depuis si longtemps. Elle avait finalement réussi à s'échapper de l'orphelinat, mais à quel prix ?
La jeune fille atterrit lourdement sur un tas de feuilles mortes en contrebas. Elle ressentit une douleur intense dans la jambe, mais elle ne pouvait pas s'arrêter pour la soulager. Elle se releva rapidement et se mit à courir dans la forêt. Elle ne savait pas où elle allait, mais elle savait qu'elle ne pouvait pas s'arrêter.
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