Ever after
Un corps sans vie enveloppé dans un linceul blanc comme la neige.
C'était à quoi j'eu l'impression de ressembler quand subitement j'ouvris les yeux.
D'un geste vif, je dégageai le couvre-lit qui m'étouffait la poitrine et le jetai par dessus le lit.
D'où venait-il même ?
Jamais de ma vie je ne me suis permis de posséder des couvertures blanches ou des draps correspondant à un suaire. La couleur blanche dans les couvertures m'avait toujours provoqué un effroi.
Je retirai les coussins d'un coup puis m'assis et ramenai mes jambes à mon torse que j'enlaçais désespérément en déposant mon front en sueur sur mes genoux. Ma respiration devenait laborieuse sous l'effet de cette nuance blanche qui recouvrait la pièce toute entière et qui m'opprimait et me voilait les yeux. je ne voyais que le blanc et cela accentuait mon angoisse. Je percevais mes bras qui s'hérissaient lentement tout comme mes fins poils qui se dressaient lorsqu'un froid glacial s'échappa de mes pores.
Je relevai doucement ma tête pour la caler sur celle du lit et dégageai quelques mèches de mes cheveux bruns en soupirant, respirant et expirant afin d'apaiser mon anxiété tout en balayant ma chambre du regard quand soudain, un dring à la porte ainsi que la sonnerie d'un téléphone me firent tressaillir. Rapidement, je descendis de mon lit et à la seconde où je déposai mes pieds sur le parquet froid, les frissons renchérirent dans mon enveloppe charnelle. Je mettais mon kimono jeté précédemment avec la couverture pendant que je me dirigeais vers la source du bruit qui avait faillit me causer un AVC. J'aperçus la lumière de l'écran de l'appareil où je remarquai qu'il y'avait une photo de moi avec quelqu'un dont curieusement, seule une partie de ses cheveux noirs apparaissait. Il m'était manifestement impossible de reconnaitre la personne dont je ne pouvais voir ni les yeux ni le visage.
J'avançais d'un pas vers la table basse qui trônait au milieu du salon et pris mon téléphone en m'affalant sur mon vieux canapé en cuir noir. Je découvris alors qu'il y'avait une dizaine d'appels manqués en plus de plusieurs messages qui bizarrement, provenaient d'un contact que je ne reconnaissais pas.
10 appels manqués:
J kook❤️
+82**** **** ****
08 messages non lus:
De J kook❤️ 13:40
«Salut. Je viens d'arriver à Tiffany' s breakfast, je t'attends comme d'habitude :) <3 »
De J kook❤️ 14:25
« Où est-ce que tu es ? »
De J kook❤️15:00
«Tu vas encore tarder ? »
De J kook❤️ 15:35
«Je t'appelle depuis un moment, pourquoi tu ne me réponds pas ? »
De J kook❤️ 17:14
« Tu ne vas pas venir à la fin ? :( »
De J kook❤️17:55
« Tu me poses un lapin là c'est ça ? »
De J kook❤️ 19:30
«Tu sais quoi ? La prochaine fois c'est toi qui m'attendras »
De J kook❤️ 19:45
«Surtout ne te pointe pas. Je suis déjà parti »
Je continuais de tapoter ma joue avec mes doigts en lisant et relisant les messages.
Alors comme çà, quelqu'un m'avait donné un rendez-vous au quel je ne m'étais pas rendu. Ce n'était pourtant pas dans mes habitudes de poser un lapin au gens. Et puis...
Qui était-ce J Kook ?
En quittant l'application messagerie, mon téléphone s'éteignit et j'étais incapable de le remettre en marche sans raison apparente. J'appuyais de plus en plus violemment sur le bouton démarrer alors que ça semblait être une peine perdue. Agacé comme jamais, je lançai l'objet de ma colère et celui-ci tomba à quelques infimes mètres du canapé dans un bruit assourdissant accompagné par celui de la porte. La sonnette qui clochait et que j'avais préalablement oubliée à cause de la sonnerie du téléphone m'indiquait que la personne était revenue frapper encore. Je me relevai en peignant ma tignasse brune tout en sifflant à cause du froid, puis marchais en trainant lourdement mes pieds nus vers la porte d'entrée en criant "j'arrive !", déterminé à insulter la personne qui s'acharnait ainsi sur la sonnette. Qui que se fut qui me harcelait en persistant à faire exploser ma boite de sonnette subirait ma colère de bon matin. J'attrapai le poignet et ouvris âprement la porte et d'une voix haussée je lançai:
-Ne vous gênez pas, faites-la explo-
Un courant d'air froid aromatisé d'une senteur que je ne pouvais ne pas reconnaitre parmi tant d'autres me frappa brutalement au visage. Je fis un premier pas à l'extérieur, puis après quelques secondes d'hésitation, je fis un deuxième pas réticent, par la suite un troisième et un quatrième et enfin sans tarder, un autre de plus. Plus j'étais réticent, plus le parfum m'attirait malgré la peur et la crainte qui barraient l'accès à ma respiration et la bloquaient dans mon thorax. Et comme pour me sortir de ma frayeur afin de me projeter dans une autre au degré un peu plus élevé, j'entendis des bribes de rire d'enfant qui provenaient des escaliers. Je me retournai brusquement, incrédule, attendant l'apparition de ce gosse qui pourtant ne se révéla pas. La seule chose que j'arrivais à discerner fut une masse d'air invisible à mes yeux qui s'amusait à se frayer un chemin à travers mon corps suspendu dans le hall tel un pantin. Cette masse au sonore joviale venait de traverser le couloir en me transperçant comme un fantôme. Plus les secondes et les minutes passaient, plus j'étais incapable de reprendre mes esprits, et au moment où le courant d'air au parfum familier me frôla encore, une voix retentit dans l'atmosphère :
- Taehyung mon chéri, tu ne vas pas rentrer ?
Plus j'avançais dans le couloir les yeux figés, le cœur palpitant, plus le chemin semblait vide et sans couleur. Je n'apercevais plus les portes adjacentes à mon appartement. Nettement, je n'avais plus la conviction de me retrouver dans ma résidence. Mes pieds nus continuaient de ramper lentement à leur guise sur le sol, suivant la voie que la voix m'indiquait de poursuivre tandis que je tendais ma main afin de toucher la silhouette presque transparente dont je pouvais néanmoins distinguer les mèches de cheveux grisonnantes en plus de ses petits yeux remplis d'amour mais aussi de chagrin.
-G-grand-mère ?!
J'étais éberlué, ahuri. Mon ton se fit hésitant, comme un enfant perdu dans un milieu déserté sans trace et sans repère. Toutefois et étrangement, je n'avais pas peur d'elle, même si censément, des chaines invisibles me trainaient là où l'ombre se tenait malgré moi.
Alors que je poursuivais à contre cœur le chemin que la silhouette de ma grand-mère me montrait en l'entendant répéter « viens mon petit Tae » de sa voix douce et rassurante, j'ouïs une autre voix, masculine cette fois si, m'appeler d'un ton qui sonnait suppliant et chagriné, me solliciter de rebrousser le chemin.
-Reviens. Je t'attends Taehyung.
Cette voix.
Si le début de ce calvaire avait commencé par la peur et la crainte, à cet instant là, ce fut une douleur inqualifiable que je ressentais me broyer la poitrine.
-Je t'attends toujours Taehyung .
-Je t'attends toujours Taehyung .
Ce fut en réalité le son de sa voix brisée qui me déchiquetait le noyau de chaire.
-Je t'attends toujours Taehyung .
Et dés qu'il prononça la dernière syllabe de mon prénom, une lumière blanche fantasque et brûlante éclata et je sentis mon corps fondre dans cet amas de fragments lumineux puis...
Plus rien.
Un cri assourdissant éclata dans la pièce toujours plongée dans le noir puisque les volets étaient toujours baissés. J'ignorais seulement par quelle force j'avais pu ouvrir les yeux et me rendre compte que je venais de me réanimer d'un sommeil apocalyptique. Je fis balader mes mains sur mon corps dans le l'optique de vérifier si j'étais toujours en un seul morceau. Mon torse dénudé était imbibé de sueur à force d'avoir transpiré. De même que la couverture de mon lit ainsi que mon visage et mes cheveux. Je tirai sur la couette et m'extirpai du matelas sifflant de douleur qui s'abattît impétueusement sur mon corps et je marchai péniblement jusqu'à la fenêtre. J'ouvris les volets à la hâte afin de me rafraîchir et remarquai qu'il pleuvait des cordes. Et lorsque j'essuyais la buée cumulée sur la glace par mon souffle, je m'égarais encore dans les songes de la peine et le regret.
Ce fut encore ce mauvais rêve.
Le rêve où je me retrouvais à errer, happé dans le néant le plus total.
***
J'vais rodé et rodé inlassablement dans mon appartement, frôlant chaque recoin, essuyant la poussière qui s'était accumulée sur toutes les surfaces et les meubles. Même si je n'avais pas le moindre souvenir d'avoir délaissé mon habitacle délibérément pendant un certain temps, la sensation d'être dans un coin abandonné, que je n'avais par mégarde jamais occupé m'étourdissait, en particulier lorsque je contemplais les cadres qui étaient disposés sur le meuble chaussure à l'entrée, où deux hommes étaient enlacés dans les photos. Seul mon visage demeurait intacte tandis que l'autre était vague, comme si une main avait fait exprès d'effacer ses traits.
Dans l'après midi de cette journée qui avait mal commencé, je me retrouvais une nouvelle fois encore en train de déambuler le boulevard. Bien que, loin de moi l'envie que le froid de ce mois de festivité m'écorche la peau, mon esprit refusait catégoriquement de retourner m'engouffrer dans mon humble habitacle de 60 m², fermer les rideaux, augmenter le chauffage, me faufiler dans une couette épaisse et regarder un bon Drama comme tout être humain normal, savourant un bon chocolat chaud avec du marshmallow. Cependant, il fallait que je revienne dans ce café.
Je me maudis à voix haute de ne pas avoir pris mon cache-nez bien aimé. Ce dernier était un des souvenirs les plus chers de ma défunte grand mère. Je me souviens comme si c'était hier, de mamie assise sur son rocking chair, une grosse boule de laine bleue nuit trainant à ses pied, deux énormes aiguilles en bois dans chaque main, entrain de tricoter, comme chaque début de saison hivernale au bon vieux temps. Ce fut le dernier cadeau d'anniversaire que j'avais eu de sa part à mes dix huit ans. Elle avait rendu l'âme un mois après que j'ai quitté ma ville natale pour venir ici à la capitale et intégrer l'université, emportant avec elle la joie de mon enfance vécue à ses côtés.
-Si tu savais grand-mère, j'ai encore rêvé de toi la nuit dernière. Pensais-je à voix haute en ayant les yeux rivés vers le ciel gris encombré de boules de coton grisâtre promettant de s'éclater, égoutter et déborder ainsi l'allée de son déluge .
Epaisse comme la laine d'un mouton, mon écharpe avait toujours été mon meilleur bouclier contre les pincements du vent glacial. Je regrettai déjà de m'être précipité à sortir car j'avais le sentiment que mon cou se tordais malgré mon pull col roulé. Je fourrai mes mains dans les poches de mon caban marron à carreaux, assez vieux et classique et accélérai mes pas. La délicieuse odeur de viennoiseries et de café commençait à me chatouiller les narines en dépit de la centaine de mètre qui me restait à parcourir.
Ayant toujours la tête baissée au risque d'avoir la nuque tordue et congelée, je basculai accidentellement un corps que je vi tomber à terre. Honteux d'avoir été ainsi maladroit, je me penchai vers le corps de cette jeune femme qui s'était fort heureusement emmitouflée dans une grosse doudoune qui amortit tout de suite le choc de la glissade et tendis ma main droite pour l'aider à se relever et m'excuser au passage. Or drôlement, la masse féminine râla contre le sol qui n'avait pas demandé à être imbibé de résidus de grêle et de pluie et causer des incidents aux gens et se releva d'elle même brusquement. Était-elle aveugle ?
Cette jeune femme venait de littéralement ignorer la main que je lui tendais. Sans abdiquer, je clarifiai ma gorge et prononçai timidement:
-Excusez-moi, j'avais la tête ailleurs . Pourtant, la personne que je venais de heurter se releva d'un cou, ramassa son sac et souffla un" saleté de grêle ! " tout en continuant son chemin comme si j'étais invisible.
C'était moi ou la société perdait ses bonnes manières?
-Drôle de comportement ! Dis-je en guise de réponse à son comportement déplaisant.
Je secouai la tête et continuai moi aussi mon chemin droit vers Tiffany's Breakfast, le café tant prisé qui n'avait cessé de m'interpeler depuis un moment. Ce fut la troisième fois de la semaine que je me rendais dans ce modeste salon à l'allure française, au style quelque peu ancestral mais dont l'atmosphère demeurait très conviviale et chaleureuse. Le personnel aussi était très sympathique et accueillant.
En parlant du loup, l'un des serveurs, le même que les fois précédentes où je m'étais rendu ici se précipita vers moi alors que je franchis à peine le seuil de la porte. C'était quand même drôle lorsque l'on apercevait quelqu'un qui, à vue d'œil on ne connaissait pas forcément mais que quelque chose dans notre fort intérieur nous communiquait que cette personne faisait partie de notre quotidien, de notre entourage, de notre vie.
Cette sensation.
La sensation de connaitre ces personnes, connaitre ce lieu, le connaitre lui. C'était comme si j'avais vécu ces moments dans une autre vie. Une vie antérieure.
Je sursautai légèrement lorsqu'une voix m'interpella:
-Taehyung !
Tiens ! d'où est-ce qu'il connaissait mon prénom celui là ?
J'ouvris à peine ma bouche pour répliquer mais je me résignai. Je ne dis rien. Je le suivais silencieusement alors qu'il m'indiquait de me placer à une table, la même que la dernière fois d'ailleurs, placée au fin fond de la pièce d'où j'avais une vue totale sur celle-ci ainsi que la fenêtre à ma droite. Je tirai sur la chaise en bois vernis et m'assis en soupirant lentement après avoir retiré mon caban. Je posai mon menton sur mes deux mains croisées après les avoir bien frottées pour les réchauffer et alors que mes globes oculaires commencèrent à scruter les lieux, mes battements de cœur eux, déclenchèrent.
Mon centre battait à chaque mouvement optique, chaque battement de cil, suivant la trajectoire que mes yeux prenait afin de scanner chaque recoin du salon, chaque objet décorant cet espace me créait une boule invisible qui me bloquait l'œsophage. Bizarrement, la sensation de reconnaitre chaque angle de ce café me revenait de plus belle. Tout semblait me crier le: "déjà vu".
-Pourquoi diable cette angoisse ? Murmurais-je en pressant ma poitrine de ma main.
Et comme les fois précédentes, personne ne fit attention à moi, aucun des membres du personnel ne daigna m'adresser la parole et me demander ce que je désirais commander. Plus franchement, personne ne me regardait, sauf celui qui m'accueillit à l'entrée. Le garçon aux jolies fossettes qui lui creusaient gracieusement ses joues rebondies. Il ne cessait de faire des vas et viens avec sa tenue de serveur rouge rubis, ornée de fins fils dorés qui serpentaient sur les épaulettes et où, trônait le nom du café en italique ambré sur le pan gauche , et à chaque fois que nos regards se croisaient, il me faisait un adorable sourire réconfortant.
Cependant, mon remous s'accentua lorsque je le repérai lui. Assis seul à la même table que les dernières fois. Un autre serveur tenant élégamment un plateau dans sa paume gauche vint de déposer un gros croissant fourré, saupoudré de sucre avec une tasse de café viennois quand lui, il gardait la même posture que lorsque je franchis le pas de la porte. Ses yeux fixaient la fenêtre, admirant le paysage qui avait déjà changé de costume, passant de la pluie au soleil, égaré dans ses songes, ignorant complètement l'odeur du café qui m'avait longtemps hanté. Pourtant, il était toujours si magnifique, il avait de beaux cheveux noirs corbeau que je désirais ardemment plonger ma main dedans pour soigneusement démêler sa tignasse épaisse. Il avait les mêmes traits juvéniles, si beaux et si innocents, ses yeux étaient tout aussi grands, brillants et ... Brillants ?
- Merde ! Il pleure ? Me demandais-je silencieusement, les lèvres légèrement entrouvertes
Tout à coup, il pivota de l'autre côté et mit une main dans la poche de sa veste accrochée au dos de la chaise, il sorti un mouchoir en reniflant puis s'essuya les yeux rougis par les larmes. J'implantais mon regard morose sur sa silhouette tout en la fixant tristement, inapte à tenter ne serait ce qu'un minuscule geste pour le consoler rien qu'avec un regard car j'étais paralysé, perclus par une douleur qui s'empara de mon être et m'enracina sur place comme si un milliard d'aiguilles pointues me transperçait par tous les pores de mon derme.
Je me levai en poussant la chaise doucement pour ne pas provoquer de vacarme et déranger les autres clients et tentai de m'approcher de sa table en remarquant qu'il continuait de chasser les perles salinées de ses yeux, le regard attaché à la chaise vide qui lui faisait face, délaissant son café désormais refroidi et sa petite viennoiserie sur la planche en bois.
Plus j'essayais d'avancer vers lui, plus je sentais une chaîne invisible me retenir de ne pas aller plus loin. Plus je doublais d'effort, plus la distance entre nos tables se faisait longue et plus mon âme se faisait martyriser par le chagrin et le regret jusqu'à ce que sans crier gare, une main douce se posa sur mon épaule et que j'entendis quelqu'un souffler d'une voix navrée:
-Taehyung !
Je me retournais peu à peu et l'aperçu. Le serveur aux fossettes.
-Tu n'as jamais pu lui dire adieu Taehyung. C'est pour cela qu'il vient ici chaque après midi depuis ce jour, commande la même viennoiserie et la même boisson. Tes préférées d'ailleurs.
Je le fixais hébété, coincé dans l'incompréhension la plus totale. Alors qu'il me regardait d'un air désolé j'osai enfin prononcer:
-J-je ne c-comprends pas ?
-Il t'attend toujours Taehyung.
Le sourire réconfortant qu'il m'avait adressé plus tôt se transforma en un rictus terne et mélancolique. Il teint ma main et me laissai trainer sans ambages vers l'entrée du salon jusqu'au comptoir où, un caissier semblait occupé à faire le compte de la recette. Là, il se dressa derrière moi, le torse contre mon dos, ses deux mains désormais sur mes épaule et m'ordonna de jeter un œil sur le mur d'en face.
Un papier jauni collé sur la surface, sur lequel je dirais que la petite photo du serveur aux fossettes le décorait si on avait été dans un autre contexte hors celui-ci.
R.I.P KIM Namjoon
Nous tenons à présenter nos condoléances les plus sincères à notre cher défunt collègue KIM Namjoon.
Nous partageons cette peine atroce avec ses proches et ses amis en ce moment de deuil, souhaitant ainsi qu'il repose en paix et qu'il soit serein là où il se retrouve désormais.
Kim Namjoon. Mon ami de longue date
-Toi et moi nous avons péri le même jour, dans le même accident de train Tae.
Face à mon mutisme perpétuel, il continuait d'un ton brisé:
-Nous ne somme que des spectres errants parce qu' il y'a toujours quelque chose qui nous retient dans ce monde. Mais il faut partir maintenant Taehyung. Il est grand temps.
Mais oui, évidemment.
Moi qui me demandais pourquoi mes journées se ressemblaient-elles.
L'invisible que j'étais.
Les rêves que je faisais, d'où les appels et les messages qui provenaient de lui.
Je reculais d'un pas incertain, je reculais et me retournais dans la salle actuellement vide. Seul le jeune homme que je contemplais demeurait à sa table, puis les souvenirs refirent surface comme une rafale dans un panneau, affichant mes derniers moments vécus auprès de mon amour.
Jungkook.
«Mais je te l'ai dit Jungkook. Je te dis que c'est de l'histoire ancienne, Jimin est mon meilleur ami et tu le sais depuis le début.
-Oui mais n'empêche que je me sens toujours jaloux de votre complicité. Avait-il répliqué en se levant du canapé pour aller dans la chambre. Je me levai une seconde après et suivi sa cadence dans le couloir pour lui attraper le poignet
-Bébé. Rien. Regarde moi Jungkook bébé. Je répétai. Jimin est mon meilleur ami d'accord ? Je pars à Busan avec Nam, on assiste au mariage de son frère et je reviendrai le jour d'après.
Puisqu'il avait l'air de vouloir continuer de faire la tête dure, et par parfaite connaissance de ses moindres faiblesses, je l'attirai vers moi et sans encombre, il laissa tomber sa tête noiraude sur mon torse . Jamais au mon plus grand bonheur il ne résistait à ce genre de numéros affectueux.
-Je te prépare une surprise. Lui avais-je intimé dans le creux de son oreille et je sentis tout de suite son derme parfumé à la fleur de coton frissonner sous mon léger souffle chaudement exhalé.
-Je peux aller préparer mes affaires tranquillement maintenant ? Tu me promets que tu arrêteras de bouder ?
Jungkook avait levé le son visage qui nichait dans ma nuque et me regarda d'un air suppliant en prononçant incertain :
-Mhm... J- j'ai comme un mauvais pressentiment m-. Je le coupai en posant mon indexe sur ses lèvres de velours rosi pour nous épargner une autre crise existentielle car, parmi les milliards de défauts que le créateur pouvait attribuer à Jungkook, il fallait que ça soit les superstitions. Et moi, je désirais seulement le mettre dans une bulle sécurisée loin de ses: j'ai la sensation que.... Je prédis que....J'ai peur que....
-Tu penses trop Kook. Crois-moi, tout s'arrangera dés mon retour. Tu me fais confiance ? Lui avais-je intimé tout bas. Je voulais toujours le rassurer, l'apprendre à se faire confiance, à me faire confiance.
-Hum. Je t'aime Tae. Je t'aime.
Avoir confiance en notre relation.
-Deux jours hein ? Tu ne tarderas pas plus n'est-ce pas ?
Avoir confiance en la vie.
-Je t'attendrai .
Faire confiance au destin.
-Je reviendrais vite je te le promets .»
Mais le destin s'avérait être un méchant pantin farceur.
Nous nous somme harmonisés quelques minutes plus tard, sous l'éclaire que projetait la lune à travers la fenêtre de sa chambre odorante, sous les draps soyeux embaumés. J'avais parcouru l'entièreté de son corps velouté de baisers doux et ardents et j'avais aussi permis à mes dextres de sillonner toutes les courbes de son anatomie et plus encore. Nous avions ainsi pris tout le temps que l'univers nous accordait pour déchaîner tout l'amour que nos âmes contenaient et irriguer l'un l'autre de nos moiteurs combinées après avoir atteint l'apogée. Tous le éléments spectateurs de notre ébat auraient pu jauger la scène et affirmer que nous vivions tous les deux notre première fois comme deux fous amoureux savourant leur première nuit de noce tandis qu'ironiquement, nous vivions notre dernière.
Après de longues heures passées à coïter amoureusement, nous nous étions promis de se voir dans le salon Tiffany's où nous nous somme rencontrés la première fois. Où nous avons partagé le premier moment en amoureux, où nos doigts se sont entrelacés pour la première fois et où j'allais lui proposer d'habiter ensemble après six mois de relation fusionnelle.
Mais le sort cruel m'avait devancé, encore une fois.
-Alors c'est moi que tu attendais depuis tout ce temps. Que tu attends toujours Jungkook ?
Je m'approchais de lui les lèvres tremblantes et les yeux larmoyants, espérant pouvoir le frôler, le toucher, le sentir une dernière fois, le prendre sauvagement pour ensuite le dorloter chaudement. Lui dire à quel point je l'aimais une dernière fois. En revanche, les sévices de la fatalité ne me toléraient que de le regarder de si près mais à la fois si loin, tellement loin, impuissant, incapable.
Hélas, le dernier vœu de pouvoir essuyer ses larmes une ultime fois était irrémédiablement et regrettablement irréalisable.
***
-Monsieur ?
Je relevai la tête soudainement, intrigué par la petite voix hésitante qui m'interpella, me coupant dans mes songes alors que je contemplais tranquillement le paysage crépusculaire, témoignant la transition de cette gracieuse fin de journée et le beau mariage de nuances roussâtres accordé par la bénédiction du ciel en dépit de la rudesse de ce mois hivernal.
-Excusez-moi mais... votre café est froid. Voulez-vous que je vous en apporte un autre ? Me fit part le serveur, muni de toute sa politesse. Je soupirai puis détachai l'air las que contenait ma poitrine depuis un moment. L'employé semblait passablement surpris lorsque je relevai mon visage arrosé par les larmes que mes glandes oculaires ne pouvaient plus contenir.
-Non, merci. Tranchai-je calmement tel l'automate que j'étais devenu.
Je dérivai mon regard exténué vers la fenêtre observant tantôt les passants qui marchaient les mains enlacées, ceux qui se pressaient à regagner leurs cocons afin d'achever une longue journée de travail, tantôt le ciel qui muait, troquant sa robe écarlate par un rideau noir qui commençait à assombrir l'atmosphère.
Combien d'heure étais-je resté dans ce salon ? Je ne saurais le dire. J'avais depuis un moment cessé de compter le temps que je passais dans ce café. Passer mes après-midi à attendre des heures, à contempler les passants, compter les véhicules ou même deviner de quelle humeur mère nature allait être devint mon quotidien. La notion du temps, je la perdais toujours dés que je mettais les pieds dans ce café et je restais toujours le dernier à assister à la fermeture, comme ce jour. Cette fois ci cependant, le serveur n'était pas venu me prévenir qu'ils allaient fermer comme les fois précédentes. Il s'était contenté de tamiser l'éclairage de la salle pour que je puisse profiter du peu de lumière avant que je ne m'engouffre dans la pénombre de la nuit dépouillée de strass argenté.
La brise fraîche me frappa le visage terne et fit frissonner mon corps ivre de fatigue. Je commençais à trainer des pieds, le regard rivé sur le bitume calculant les trois milles pas que j'avais à parcourir. Trois mille pas si on considérait que chacun prenait une seconde. Trois mille secondes équivalaient à cinquante minutes de marche. Cinquante minutes multipliées par trente en référence aux jours d'un mois, équivalaient à mille cinq cent. Mille cinq cent minutes de marche.
Compter les heures nous aiderait-il à oublier ?
Calculer le temps et la distance nous apprendrait-il à nous habituer ?
J'en étais à mon énième calcule et pourtant, je demeurais toujours sans réponse.
Quelques pas supplémentaires et je pénétrai dans mon lamentable appartement garni d'obscurité et agrémenté de solitude où je fus accueilli par des couinements désespérés. Je parvins malgré ma réticence à mettre la main sur le bouton mural dans l'espoir d'apporter ne serait-ce qu'un peu de lueur afin de rassurer la petite boule de poil qui vint m'accueillir. Je m'accroupis et commençai à caresser le petit être alors que ses pupilles noires semblaient voilées par une infime pellicule de larmes de tristesse. Ce dernier remuait sa tête à gauche puis à droite, quémandant plus de caresses et d'attention. Choses dont je ne le privais jamais.
-Il te manque n'est-ce pas ? Lui demandai-je connaissant parfaitement la réponse qu'il me transmit dans la seconde à travers son regard et ses petits crissements peinés à peine audibles.
-Evidemment. Il me manque atrocement à moi aussi. J'arrivais difficilement à sortir ses quelques mots tout en essuyant les quelques gouttes salées qui revenaient de plus belle pour tracer leur chemin sur me joues autrefois pleines et rebondies et que je n'avais toujours pas pu drainer.
Un dernier sifflement s'évacua de mon creux buccal et je me relevai en essuyant mes yeux larmoyants du revers de mes mains puis, je me dirigeais vers la cuisine en quête de quelques croquettes à la viande qui résidaient au préalable dans leur paquet depuis deux semaines suite à la perte de l'appétit du chien. Yoentan se contentait uniquement de quelques bouchées depuis ce jour, pressé d'aller se terrer dans son petit coin afin de pleurer à sa manière, l'absence de son maître.
-Tant pis Tannie, tant pis. S'il n'est pas venu aujourd'hui, je reviendrai demain. Celles-ci furent les dernières paroles que j'avais prononcées à son égard avant qu'à mon tour, j'aille me réfugier sous mes draps, me privant encore une fois d'un simple dîner afin de compter de nouveau les secondes, les minutes et les heures jusqu'à l'aurore d'un nouveau jour.
Peut être demain, peut être plus tard, peut être dans les prochains jours, il se pointera.
***
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