Il n'en avait pas toujours été ainsi. Cory n'avait pas passé sa vie à pousser des gens du toit de ses écoles, ou à accepter n'importe quel défi stupide juste pour impressionner ses copains.
Il était même plutôt exemplaire. Au collège, il était discret et assez solitaire, mais il ne quittait jamais son joli sourire et il travaillait extrêmement bien. Tout le monde le félicitait tout le temps. Mais comme tout excellent élève, il avait eu son lot de souffrances et de coups de la part des jaloux. En arrivant au lycée, il avait donc décidé de ne plus se laisser marcher dessus, mais cette décision fit de lui l'un des pires délinquants de son établissement. Il faisait croire qu'il aimait ça, mais ça ne l'amusait pas du tout de faire souffrir ses parents et de les décevoir, tout en ruinant ses chances d'intégrer Sciences Po. En poussant Céleste du haut du toit, il pensait avoir débarrasser son lycée d'une chose inutile repoussée par l'univers entier. Mais ses amis avaient beau ne pas aimer cette fille, ils ont complètement paniqué en constatant les dégâts causés par l'adrénaline du garçon. Ils se mirent à l'éviter comme la peste, craignant pour leurs vies également. Lui qui cherchait la reconnaissance, il avait fini dans la solitude la plus complète.

Durant toute l'année qui a suivie, c'est à peine si il s'est rendu en cours. La plupart du temps, il s'asseyait quelque part pour réfléchir à la meilleure façon de mettre fin à ses jours. La
pendaison ? Non, il se sentait incapable de mourir d'une telle façon. La noyade ? Surtout pas ! Il avait horreur des profondeurs et il voulait qu'on retrouve son corps. Sauter du toit de l'école en hommage à Céleste ? Impossible, après l' "accident", des grilles avaient été fermement implantées. Peut-être qu'avaler des médicaments suffirait ? Mais il ne savait pas lesquels prendre et il avait peur que cela le fasse vomir, et il détestait cela. Au final, la malchance s'était occupée elle-même de son cas en envoyant son avion pour l'Espagne dans une grande zone de turbulences. Il était plutôt heureux, quand il avait compris que la fin arrivait, même si il aurait préféré éviter que près de 170 personnes y passent avec lui. En arrivant à Evaresson Blue, il ne comprenait rien. Était-il  vivant ou mort ? Il avait longtemps tapé du pied et enragé, jusqu'à ce que Moly vienne l'arrêter et lui expliquer avec toute la tendresse du monde où il se trouvait, et pourquoi. Peu importe où il avait atterri, il était mort, et c'est tout ce qui comptait pour lui. Il avait hâte que ses souvenirs s'effacent, et avec, sa culpabilité plus lourde que le poids de Jupiter. Il avait donc fait connaissance avec le reste des habitants, qui lui avaient rapidement parlé de Mercure, mais jamais il n'aurait pensé qu'il s'agirait d'elle. Il n'en revenait pas. Dans la grotte, il l'avait vue, mais à cause de l'obscurité, il ne l'avait pas tout de suite reconnue. Elle lui ressemblait, même dans le noir, mais il repoussait cette idée, ça ne pouvait pas être elle, impossible. Le karma ne peut pas être aussi cruel. Lorsqu'elle s'était enfuie, il avait eu des doutes, mais encore une fois, il refusait d'y croire.

Mais maintenant, elle était là, juste devant lui. Elle était pâle, ses yeux noirs écarquillés et ses traits déformés par la haine. Elle serrait les poings tandis que tous ses membres tremblaient, et ses jambes hésitaient à se jeter sur lui. Elle montrait les dents, telle une bête féroce prête à immobiliser sa proie. Il pouvait voir le feu consumer son regard.
Cependant, malgré la colère qui grandissait au fur et à mesure dans son corps, Cobalt remarqua qu'elle n'avait pas changé.

Elle était toujours aussi jolie.