Ludus
Bonjour !
Cet OS a initialement été écrit pour le recueil Saint-Valentin de ku_suri nommé Amours sublimes !
Je vous invite à aller lire ceux des autres participantes et je vous souhaite une bonne lecture ♡
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Depuis une semaine, la vie de Jungkook était devenue un enfer.
Lorsqu'il avait vu un immense camion débarquer dans sa rue et qu'il l'avait vu se garer face à la maison voisine, Jungkook n'avait tout simplement eut aucune réaction, si ce n'est un soupir. Cette demeure était bien connue dans son quartier résidentiel. De la rangée, elle était la dernière, peinte en violet, alors que celle des Jeon était bleue. Mis à part ça, elle ressemblait à toutes les autres, elle était banale. Et tous les jours de sa putain de vie, le brunet se demandait quelle idée était passée par la tête du constructeur immobilier pour transformer tout un quartier en un rainbow cake raté. Sans oublier de le maudire, lui et ses parents pour avoir acheté cette maison. Toutes ces couleurs criardes lui filaient d'affreuses migraines une fois les beaux jours revenus.
En voyant les déménageurs sortir les cartons et déplacer les meubles, avec son air blasé sur le visage, Jungkook n'avait eu aucune idée de ce qui l'attendait véritablement. Il aurait pu tout prévoir sauf que sa vie ne prenne un pareil tournant.
Cela faisait des années que cette maison changeait constamment de propriétaire, comme si au bout de six mois les nouveaux résidents se rendaient compte que la demeure était hantée par un esprit malfaisant. Les premiers jours, les petits nouveaux se comportaient bien souvent de la même façon : heureux, naïfs, ravis de voir que les façades formaient un arc-en-ciel, contents que les gens soient sympathiques et que tout leur sois mis à disposition. Ils venaient se présenter, sonnant aux portes de tout le quartier, un panier de gâteaux et des bouteilles à la main. Ils iraient dîner partout, rencontreraient du monde et s'intègreraient rapidement. Et du jour au lendemain, au détour d'une journée d'orage, ils disparaîtraient de la maison, déserteraient la ville et on n'entendrait plus jamais parler d'eux. Comme tous les autres avant eux.
Cette coïncidence étrange avait toujours beaucoup amusé Jungkook et ses parents. A chaque fois que le camion s'arrêtait devant la maison voisine, ils se lançaient directement un pari sur le nombre de mois où les nouveaux resteraient. Au vu de toute leur expérience en cette estimation de temps, ils étaient presque devenus capables de déterminer au jour prêt quand les autres allaient partir. Les précédents n'étaient pas restés plus de huit mois et ceux qui étaient restés le moins longtemps n'avaient pas tenu trois semaines avant de déménager à nouveau. Après toute une vie à voir cette valse incessante, estimer était devenu pour eux comme une seconde nature. Mais ce jour-là, quand le père de Jungkook était revenu du travail avec sa mère, pour la première fois, ils n'avaient pas réussi à se mettre d'accord sur la date de leur départ. Les écarts étaient bien plus importants que d'habitude, le doute s'était installé et les deux hommes de la maisonnée avaient rapidement haussé le ton, bien que cela n'ait pas duré longtemps.
Après cela, ils n'en avaient plus reparlé et la vie était redevenue normale ; jusqu'au jour où le camion fut remplacé par une rutilante voiture de luxe. Quand Jungkook l'avait entendue pétarader à huit heures un samedi matin, il avait grogné, s'était enfoncé le coussin sur la tête pour se rendormir mais s'était finalement levé, curieux. Il ne connaissait pas ce bruit de voiture. Il s'était posté à sa fenêtre, enroulé comme un sushi dans sa couette et avait entrebâillé le rideau opaque de sa chambre.
Sa bouille endormie s'était faufilée dans le petit espace qu'il avait créé avec ses doigts et il avait regardé avec toute l'attention que son esprit ensommeillé le lui permettait les nouveaux voisins sortir de la magnifique voiture noire. Des gens à première vue tout à fait normaux, habillés confortablement, le couple de cinquantenaires portait des vêtements confortables et accordés, mais leurs lunettes clinquantes et les sacs de voyage Louis Vuitton qu'ils sortirent de la voiture eurent raison de Jungkook qui s'étouffa avec sa salive. Au travers du toit panoramique, il crut même apercevoir sommairement des sièges en cuir dans cette voiture luxueuse.
Cela aurait pu s'en arrêter là, Jungkook aurait pu finalement détourner le regard, les voir déjà quitter les lieux dans son esprit, mais il eut fallu que ses yeux tombent sur le plus tentateur pêché que la Terre n'eut jamais porté. Nonchalamment habillé de son jogging gris, d'un tee-shirt d'un noir abyssal sous la lumière du matin et d'une paire de basket neuves, les cheveux d'un rouge aussi éclatant que celui du sang, le fils du couple captura sa curieuse attention.
Ses jambes étaient fuselées dans son survêtement, sa taille et son ventre taillé dessinés lorsque la brise faisait s'embrasser les tissus sur son corps, son air las et son visage de dieu grec reflétaient la lumière du jour, sa mâchoire dure semblait taillée dans le marbre et Jungkook voyait bien qu'il dépassait d'au moins une tête et demi son petit père. Il balança son sac à dos sur son épaule, pris des sacs de luxe, faisant contracter les muscles de ses bras de la plus magnifique des façons. L'ombre de ses veines ressortait, tout comme les reliefs de ses bras puissants. Le garçon s'imaginait déjà porté entre ses bras charmants, la force qu'il exercerait sur son corps faible-
Jungkook s'étouffa encore une fois, mais cette fois il dû briser le contact pour se retenir de mourir asphyxié. Le rideau retomba, effaçant les traces de son crime, et l'enferma de nouveau dans la noirceur de sa chambre. Il s'avança jusqu'à la bouteille d'eau entamée sur sa table de chevet, en bu quelques gorgées et s'affala sur son lit une fois ses convulsions calmées.
Il crevait de chaud. Et ce n'était pas à cause de sa couette qu'il avait abandonnée en cours de route. Il sentait ses poils se hérisser tout en suant à grosses gouttes. Il fut pris d'un frisson et se passa le bras sur le front. Son corps fébrile semblait atteint d'une fièvre subite, anormale. Sa tête lui paraissait extrêmement lourde, son corps drainé d'énergie, l'image du jeune homme était gravée dans son esprit.
Depuis ce moment-là, Jungkook ne put plus s'empêcher de penser à son nouveau voisin. Quel que soit le jour, quelle que soit l'heure, quel que soit le moment, le brunet pensait au garçon aux cheveux rouges, l'imaginant avec son jogging, sans son jogging, avec ou sans son tee-shirt, avec tout ou rien du tout. Il l'obsédait.
Ce ne fut que le début d'une longue descente aux Enfers, car, le lendemain de la découverte de son nouveau voisin, tout s'empira.
Le matin qui suivit, Jungkook était allé, comme à son habitude, à la fenêtre de sa chambre pour regarder un peu l'extérieur afin de se réveiller en douceur. Il appréciait se réveiller face à la façade violette éclairée, regarder les arbres plantés dans le jardin d'à côté, les corbeaux se chamailler et écouter les mésanges piailler dans la maisonnette qu'il leur avait installée. Il ne dérogeait jamais à son habitude. Et si par malheur il ne pouvait pas se relaxer pendant son petit moment de calme quotidien, il passerait à tous les coups une mauvaise journée et ne pourrait s'empêcher de bouder au monde entier. Sauf que ce matin, face à sa vitre, où se trouvait une fenêtre jumelle à celle de la maison bleue, se dessinait dans son cadre la silhouette aux cheveux rouges de son voisin. Nu.
Les fesses nues du jeune homme se balançaient dans l'intimité violée de sa chambre, une serviette bleue était enroulée autour de ses épaules et ses cheveux humides semblaient goutter contre le parquet de la pièce. Quand il se pencha pour ramasser des vêtements, ses fossettes de Vénus ressortirent dans la lumière tamisée de la chambre et Jungkook, bouche-bée devant ce spectacle, ne réagit pas lorsqu'un bout de tissu vint lui obstruer la vue. Puis un tee-shirt, puis un pantalon, le brunet ne pouvait maintenant que suggérer. C'était passé trop vite.
L'esprit du brun s'était comme gelé, mis sur pause, ses yeux avaient étés rivés sur le bas du corps du rouge et il regrettait déjà de ne pas avoir pu explorer plus de cette chair à l'apparence douce et ferme. Telles des pommes appétissantes, elles l'avaient affreusement tenté et lui avaient mis l'eau à la bouche alors que ses mains le démangeaient atrocement, s'agrippaient de façon désespérée à son bas de pyjama. Et tandis que le voyeur restait le nez collé à la vitre, ses pensées délirant vers de nouveaux horizons, son vis-à-vis avait terminé de s'habiller. Il était sorti ; mais cela ne réveilla pas Jungkook de sa transe.
Et toute la journée qui suivit, le jeune homme avait été dans la lune, mou et aussi bavard qu'une limace, répondant par grognement et l'esprit focalisé sur la joliesse des fesses de son voisin.
Le lendemain, Jungkook s'était levé à la même heure, dans l'optique de se poster à nouveau face à sa fenêtre. Bien que cela fasse partie de ses habitudes, il stressait à l'idée de se perdre une nouvelle fois sur le corps magnifique de son voisin au lieu de regarder les oiseaux. Il était resté quelques minutes dans son lit avant de se lever. Son cœur battait fort ; il hésitait. Il sentait ses tripes se tordre de curiosité et de stress, il appréhendait sa réaction devant le magnifique tableau qu'était le rouge, mais en même temps, il crevait d'envie de le regarder, de caresser ses courbes du regard, de s'enivrer de la vue de son corps, de sombrer dans la chair qui lui serait indécemment offerte.
Et cela n'avait pas manqué. Il s'était levé et se trouvait maintenant dans un pire état encore que la veille, car après avoir apprécié la vue du postérieur galbé de son vis-à-vis, il était partit explorer du regard son dos et ses épaules qui n'étaient cette fois pas couvertes par une nuisible serviette. Les muscles roulant sous sa peau avaient fait monter une chaleur indescriptible au creux de son ventre et de ses reins, sa gorge s'asséchait considérablement et il sentait son corps trembloter face aux mèches en bataille du jeune homme.
Cette fois-là, il s'était reculé et n'avait pas osé sortir de sa chambre de tout le lundi. Heureusement qu'on était en pleines vacances d'été.
Il ne comprenait pas ses réactions, il ne comprenait pas pourquoi son voisin le mettait dans un état pareil. En fait, il se sentait faible face à lui, il perdait tous ses moyens, il perdait ses esprits et cela lui faisait très peur. Qu'est-ce que cela serait si un jour ils devaient se faire face, se rencontrer ? Comment réagirait-il ? En plus, les nouveaux arrivants allaient très certainement venir se présenter dans les jours à venir. Jungkook était fichu.
Cela faisait maintenant une semaine depuis que le rouge était sorti de la voiture et que sa vie était devenue un enfer.
Cela faisait également une semaine que le brunet regardait tous les jours son voisin se changer avant de partir dans le jardin ou de déménager des meubles, cela ne le lassait pas. Il était juste à chaque fois pris d'une immense culpabilité à chaque fois que sa petite « séance » quotidienne s'achevait, mais il trouvait cela bien trop addictif pour trouver la force de s'arrêter. Qui aurait le courage, la pureté de ne pas regarder un chef d'œuvre vivant quand il passe à côté de soi ? Pas Jungkook. Il raffolait de ce corps, il le dévorait du regard, il pourrait le lorgner pendant des heures et des heures, même s'il était maintenant pris d'une intense envie de toucher toute cette peau, de sentir la chaleur sous ses doigts. Il se sentait comme un animal en cage nargué par un bout de viande. Ses envies étaient brutales, intenses, incontrôlables, caché derrière la vitre de sa chambre. Il ne pouvait pas s'en empêcher. La situation le dépassait, alors il se laissait faire.
Mais cette première semaine s'acheva, et il se fit griller.
Le rouge s'était brusquement retourné quand Jungkook était en train de le regarder. Il devait se sentir épié, brûlé du regard, alors il avait vérifié. Le brun s'était rapidement caché, il avait fui pour dissimuler sa honte. Mais il avait senti son regard s'accrocher dans le sien pendant quelques millièmes de secondes. La profondeur abyssale de ses orbes l'avait transpercé, un long frisson avait dévalé son dos et avait fait se raidir les muscles de ses jambes. Le voyeur avait attrapé sa couette et s'était enroulé à l'intérieur, dos à la fenêtre. Le temps n'était finalement rythmé que par les battements effrénés de son cœur qui martyrisaient sa poitrine. Il savait que l'autre savait. Il avait tout découvert, avait gravé son visage dans sa mémoire. C'était fichu.
Honteux, le jeune homme n'avait pas recommencé les jours suivants. Mais, comme toute addiction de laquelle on pensait s'être sevré par la honte, Jungkook avait rechuté.
Il avait repris ses petites séances de voyeurisme malsain, ne prenant même plus la peine de regarder les arbres ou les mésanges, qui criaient de mécontentement face à cette ignorance soudaine. Les arbres avaient commencé à plier sous la chaleur écrasante qui s'installait, l'herbe du jardin voisin jaunissait et les corbeaux avaient abandonné la ville. Mais Jungkook n'avait rien remarqué de tout cela. Lui, tout ce qu'il voyait, c'était le corps du voisin.
Ses coups d'œil étaient certes toujours présents, cependant ils étaient plus furtifs, plus timides, bien moins appuyés à cause de la honte et de la culpabilité. Et puis c'était aussi à cause d'autre chose. Le garçon avait remarqué que le rouge se comportait différemment depuis que leurs regards s'étaient croisés. Ses gestes lui semblaient bien plus lents, bien plus exagérés, devenus si sensuels que le regard de Jungkook n'arrivait tout simplement pas à maintenir le contact visuel. C'était comme si son vis-à-vis aux cheveux rouges avait compris, et jouait mesquinement de ses attributs pour faire tourner la tête au brunet. Comme si cela ne le dérangeait pas le moins du monde qu'un jeune homme mate son corps sans aucune discrétion ni retenue, comme si cela lui semblait flatteur et bien venu. Mais Jungkook ne pouvait s'empêcher de penser que tout était dans sa tête. Après tout, elle était déjà renversée, son voisin était passé tel un tsunami dans son crâne et n'y avait laissé que désespoir, destruction et chaos. Il se sentait tel une âme en perdition en proie à tous les péchés existants sur cette planète.
Et un beau jour, leurs regards se croisèrent bien plus longtemps que quelques millièmes de secondes.
C'était une journée comme toutes les précédentes, le brunet commençait à regarder son voisin se changer. Cela faisait près de deux semaines que les voisins avaient emménagé. Sous la lumière du jour, il était toujours aussi sublime, toujours aussi enchanteur, toujours aussi sensuel, toujours aussi addictif. Et cette fois-là, l'habitant de la maison bleue ne put détourner son attention. Ses yeux avaient étés faits prisonniers par le magnétisme du regard de celui de la maison violette. Ils s'étaient regardés de longues secondes, l'un dos-nu, le même jogging gris qu'à son arrivée tombant sur sa taille, l'autre hébété, le cœur incendié, pivoine, se sentit défaillir quand le dénudé lui adressa un sourire moqueur, son rictus en coin faisant monter une brusque bouffée de chaleur dans son corps.
Maintenant, c'était certain. Il l'avait vu. Le rouge s'était tourné complètement, exposant son torse, et avait plongé son regard dans celui du brun. Le temps cessa.
Une, deux, trois minutes, peut-être cinq, peut-être dix, mais le voisin souriait, une flamme curieuse dans le regard.
Sous les yeux envoûtés de Jungkook, il glissa ses doigts dans l'élastique de son jogging et le fit doucement descendre le long de sa hanche, avant de le remonter d'un coup, claquant contre sa peau, faisant sursauter le brun. Il lui glissa un petit sourire charmeur, et enfila vite son tee-shirt avant de s'en aller, adressant un dernier signe au jeune homme déstabilisé.
***
Comme un rêve, la scène se répéta en boucle pendant plusieurs jours. Le voisin attendait patiemment que Jungkook ne se lève, patientant presque nu à sa fenêtre, et en faisait profiter le brunet tous les jours avant que la réalité ne les rattrape et que leur vie ne les sépare. Il dévoilait parfois son torse, ses épaules, ou ses jambes musclées, pour le plus grand plaisir du voyeur qui n'avait rien à dire des prestations du rouge, bien qu'il en veuille toujours plus. Mais bon, à cette distance, difficile de le faire savoir.
Ils pourraient très bien ouvrir les fenêtres, Jungkook pourrait lui crier de se déshabiller plus, ou tout simplement toquer à la porte de l'autre, mais le brunet ne le voulait pas. Il avait l'impression que cela casserait le charme de ces petites entrevues. Et puis, pour dire la vérité, il était terrifié à l'idée de faire réellement face à son voisin. Il se voyait déjà bégayer et rougir de honte face au dieu grec qu'était le rouge, qui le regarderait de haut, avec son habituel petit rictus en coin, son corps tout près du sien. Il ne survivrait pas à l'amas de honte et de chaleur qui se propageraient dans son être.
Alors, pour communiquer, il avait eu une idée.
Comme leurs deux fenêtres étaient proches, bien qu'éloignées de plusieurs mètres, Jungkook avait trouvé un moins plus efficace d'effacer la distance sans bouger d'un pouce. Cette nuit, il avait fabriqué des avions en papiers, plusieurs, aux matériaux différents, de différentes formes pour trouver la plus aérodynamique. Puis il avait noté son prénom, et lui avait demandé le sien. Il avait patienté toute la nuit pour les lui envoyer, mais maintenant qu'il était sur le point de le faire, il se sentait se dégonfler.
Dans sa main se trouvait un des avions, d'une forme longue et pointue, soigneusement plié, prêt à être envoyé. Son vis-à-vis avait commencé son petit spectacle quotidien, avait montré un morceau de son torse avant d'enlever son tee-shirt. Mais Jungkook ne montrait aucun signe d'appréciation, lui d'ordinaire si réactif aux gestes du voisin, il se contentait de fixer un point au loin, et ça, l'autre l'avait bien remarqué.
Alors il ouvrit sa fenêtre, ce qui fit réagir le brun. Le rouge lui fit signe de faire de même, et cela réveilla le voyeur qui s'exécuta aussitôt. L'air frais du matin balaya son visage encore un peu endormi, et il dirigea son attention vers son voisin, accoudé à la fenêtre, sa joue reposée sur son poing. Il avait haussé son sourcil, en signe d'interrogation, et Jungkook lui montra timidement son avion en papier, un air gêné sur le visage. Il l'avait serré si fort l'endroit tenu par sa main s'était froissé, la moiteur de sa paume avait fait gondoler le papier. Face à cette vue, même si les yeux du voisin s'agrandirent. Cela ne dura pas longtemps, il reprit son air charmeur et lui dit de le lui envoyer avec un petit signe de doigt.
Les joues aussi rouges que les cheveux du voisin, Jungkook obéit. Il visa doucement, mordillant sa lèvre inférieure, et envoya habilement le petit avion jusqu'à son destinataire. Il avait fendu l'air avec grâce, sa course en forme de cloche avait reflété la lumière et son atterrissage se fit le plus simplement du monde. Ce dernier l'attrapa tranquillement et lui fit un pouce en l'air, toujours avec une expression sublime sur le visage. Jungkook ne comprenait pas comment ce garçon pouvait rester magnifique en toutes circonstances, pourquoi son visage ne possédait aucune expression disgracieuse ni défaut visible. Même sa peau mielleuse coulait au soleil, brillait de milles éclats et donnait envie à Jungkook de croquer dedans.
Le petit avion blanc se fit déplier sous le regard gêné du brunet. Le rouge scrutait avec attention l'écriture délicate du brun et sourit avant de disparaître de l'encadrement de la fenêtre. Jungkook pouvait le voir dévaler les escaliers, puis revenir quelques dizaines de secondes plus tard, une feuille blanche à la main, puis il le vit écrire avec un feutre, plier rapidement la feuille et se poster à nouveau près du rebord. Il se concentra aussi, fronça légèrement les sourcils, lui donnant un air concentré séducteur, et envoya à son tour son avion qui s'écrasa lamentablement dans le jardin de Jungkook.
Les deux jeunes hommes se regardèrent, la bouche ouverte, avant que Jungkook ne file dans le jardin récupérer la petite lettre de son voisin. Il dévala les escaliers, courut le long du couloir, et allait sortir dans le jardin quand la voix de sa mère retentit.
« Jungkook ! Attends s'il-te-plaît ! »
L'appelé s'arrêta d'un coup, le souffle court, et tenta discrètement de s'échapper en passant par la baie vitrée, sauf qu'une poigne tomba sur son épaule gauche.
« Et bien ? Tu ne m'as pas entendue ?
- Si, si, qu'est-ce que tu veux ? Demanda Jungkook, impatient. C'est pas grave ?
- Non, non, les nouveaux voisins sont venus se présenter tout à l'heure. D'ailleurs, tu n'es même pas venu les saluer ! Tu n'as pas entendu la sonnette ? Je suis sûre parce que tu avais encore la musique trop fort dans les oreilles, tu sais que tu vas finir sourd à force ? »
Jungkook ne répliqua rien et baissa la tête, acquiesçant silencieusement. Il n'allait pas la corriger en lui disant : « Mais Maman, je n'écoutais pas de musique ! J'étais juste si occupé à mater le corps du fils des voisins que je n'ai ni vu le temps passer, ni entendu la sonnerie ! En plus on s'envoyait des avions en papier ! »
« Ah ! J'ai failli oublier l'essentiel ! Reprit-elle avec énergie. On a prévu de faire un dîner de bienvenue, on ira manger chez eux dans deux semaines, le temps qu'ils finissent de s'installer, tu savais qu'ils avaient un fils de ton âge ?
- Non maman, j'en savais rien. »
Menteur.
« La voisine m'a aussi dit qu'il allait venir dans ton lycée ! C'est génial ! Tu vas pouvoir lui faire visiter, et au moins il ne sera pas seul ! Je compte sur toi, ne crée pas de tensions entre nous, même si je ne pense pas qu'ils vont rester longtemps.
- Oui maman, souffla-t-il avant de s'extraire de sa poigne et de se ruer dans le jardin. »
Sans demander son reste, il courut vers la lettre négligemment tombée dans le jardin et l'attrapa. Quand il releva la tête, le rouge n'était plus à la fenêtre. Déçu, il allait la glisser dans son haut et repartir dans sa chambre quand il entendit un cri. C'était son voisin, qui lui faisait un grand coucou des bras et qui, avion à la main, lui demanda de rester là où il se trouvait. Bien que surpris, Jungkook attendit et un nouvel avion se crasha à ses pieds. Il le ramassa, et il rejoignit le premier, sous son tee-shirt. Le petit brun remonta, sous le regard attendri de l'autre.
Quand il fut enfin à sa fenêtre, Jungkook ouvrit les avions, impatient de découvrir le prénom du voisin.
« Je m'appelle Taehyung, enchanté : ) »
Un numéro de téléphone était écrit sur le deuxième, ainsi qu'une petite phrase en bas de page :
« J'aime beaucoup les avions en papier, mais ce ne sera pas très pratique avec la pluie, et puis (comme tu l'as vu) je ne suis pas un bon lanceur, alors peut-être que la technologie sera plus pratique ? »
***
Jungkook n'avait pas envoyé de message à Taehyung, mais ils avaient continué de s'envoyer des avions en papier. Souvent, ils tombaient dans les jardins, parfois les oiseaux les emportaient avant qu'ils n'aient eu le temps de descendre, de temps en temps ils se coinçaient dans les arbres et disparaissaient au moindre coup de vent. Cette méthode n'était vraiment pas pratique, mais elle avait cependant le mérite de bien faire rire les deux adolescents. Ils devaient toujours courir pour les rattraper, s'échangeaient des sourires heureux et amusés ; cette petite activité innocente était un jeu simple et tout à fait divertissant. Il créait cette petite étincelle au creux de leur poitrine, ce sentiment de puissance renversant qui les faisait se sentir sur un petit nuage. Et Jungkook n'échangerait ces moments pour rien au monde, rien ne remplacerait la magie du monde réel.
Au-delà de son aspect physique, Jungkook appréciait énormément la personnalité de son voisin. Taehyung était à la fois joyeux et mystérieux, gentil, très affectueux, énigmatique. Il lançait des avions en papier de toutes les couleurs, lui demandait souvent comment il allait, il faisait des petits signes de mains adorables à Jungkook et lui envoyait même de petits bisous volants que le brun adorait attraper et poser sur ses lèvres. Le rouge était plein de choses à la fois, ce qui rendait la tâche de le définir en quelques mots assez complexe.
Tout ce que Jungkook comprenait, la seule chose dont il était sûr, était que son cœur battait chaque fois à peu plus vite à la vue de Taehyung. Alors quand il avait reçu le premier message de celui-ci, quelques jours après lui avoir aussi donné son numéro, le brunet se serait cru sur le point de défaillir.
« Sors, j'ai une idée. »
Bien que tremblotant, il n'avait pas hésité une seconde avant de sortir de chez lui, se posant sur le palier de sa maison. Taehyung avait fait de même et patientait sous le porche, un regard lancé en direction de Jungkook. Le jeune homme accourut auprès de lui tandis que Jungkook ne bougea pas d'un pouce, tétanisé. Le brunet ne savait pas comment réagir. Plus Taehyung se rapprochait, plus il avait l'impression que le petit nuage sur lequel il se trouvait allait disparaître, que le rouge allait l'intimider, que leur relation ne serait plus la même et que-
Taehyung était face à lui. Tout près.
Sous la chaleur étouffante de la fin de l'été, le rouge se tenait là, face à lui, son corps bouillant à quelques centimètres du sien. Jungkook pouvait presque sentir sa chaleur se rajouter à celle de l'extérieur, il pouvait sentir son parfum de cèdre dans ses narines, voir chaque millimètre de la peau de son cou. Taehyung était plus grand d'une demi-tête ce qui faisait que son nez reposait dans le creux de sa clavicule, que ses yeux devaient se relever pour s'ancrer dans ceux de son voisin. Il n'osait pas.
Lever les yeux lui semblait bien trop dur, bien trop insurmontable pour le brunet qui savait que dès que ses orbes plongeraient dans celles de Taehyung, sa fin serait imminente. Un des doigts du rouge se posa doucement sur le menton de Jungkook, le faisant relever la tête et rencontrer leurs prunelles. Et ce fut comme le brun l'avait prédit : la fin du monde.
Ses prunelles envoûtantes, profondes et pétillantes l'avaient captivé. De longs cils tels des plumes ornaient ses orbes et à cette distance, sa peau sans imperfections et veloutée lui donnait envie de la toucher, de poser ses doigts, ses lèvres contre elles, la caresser sans interruption.
« Regarde-moi, je ne suis pas si moche, si ? »
Taehyung était sûrement la plus belle personne que Jungkook ait rencontrée durant sa courte vie.
« Non, non ! C'est juste... bizarre, ricana-t-il de gêne.
- Mais non, c'est pas bizarre ! Fit le rouge avec un petit sourire adorable. Viens, je vais te montrer un truc ! »
Et il tira Jungkook à sa suite, l'emmenant chez lui. Ils contournèrent cependant la maison et avant que le brunet ne se rende compte de quoi que ce soit, son voisin l'avait emmené dans le garage. Dans la pénombre, le brun put distinguer des cartons, du matériel de bricolage, un petit établi ainsi qu'un bazar monstre dans le coin tout près du plan de travail. Taehyung s'en approcha, alluma la petite lumière dirigée vers l'atelier improvisé et fit signe à Jungkook de venir auprès de lui. Sur le bois étaient posées deux étranges manivelles, une corde parfaitement enroulée ainsi qu'un panier de pique-nique en osier en excellent état. Le brunet ne comprit pas.
« L'idée que j'ai eue, c'est de connecter nos deux fenêtres avec un panier. En fait, on installerait ce système entre nos vitres, et on n'aurait qu'à se passer le panier en faisant tourner les manivelles. Qu'est-ce que t'en dis ? »
Jungkook avait les yeux grands ouverts de stupéfaction. Taehyung était un véritable MacGyver. Ou alors seulement très inventif.
« Mais c'est génial ! T'es un génie !
- Ce ne sera pas pratique quand il pleuvra, mais on peut toujours aller l'installer, qu'est-ce que t'en dis ?
- Oui ! Allons-y ! S'écria le brun, enjoué. »
Tout sautillant, il prit une des manivelles et le panier en osier tandis que Taehyung portait le reste, le suivant à l'extérieur. Ils se séparèrent pour aller dans leur chambre et une fois chacun à leur fenêtre, ils disposèrent le matériel comme il le fallait.
Tout l'après-midi, ils installèrent le système, galérant à attraper la corde qui tombait presque à chaque fois dans le vide, sans compter que Jungkook faisait semblant de n'avoir rien compris de ce qu'il était supposé faire, ce qui avait valu au rouge de s'infiltrer dans la maison bleue sous les yeux surpris des propriétaires. Il ne l'avouerait jamais, mais sa venue chez lui avait fait battre son cœur et leur proximité lorsqu'ils avaient installé la manivelle l'avait retourné. Son odeur l'avait tout de suite frappé. Elle était diablement attirante et il s'était, sans le voir, rapproché de sa nuque, où son parfum avait dû être déposé plus tôt dans la journée. Leurs doigts s'étaient effleurés de trop nombreuses fois pour que cela soit une coïncidence et Taehyung lui avait même défendu de toucher aux manivelles pendant l'installation, de peur qu'il ne se blesse. Le brunet avait donc dû attendre tout près, attentif aux gestes de son aîné, qui avait engagé la conversation. Durant ce moment, les deux jeunes gens avaient beaucoup échangés et s'étaient trouvé de nombreux points communs, avaient bien rigolé et la petite caresse dans les cheveux à laquelle Jungkook avait eu droit avait violemment coupé son souffle. Ils avaient terminé à la tombée de la nuit, satisfaits, et s'étaient quittés dès que possible pour enfin pouvoir réaliser leurs premiers échanges.
Jungkook avait écrit un petit mot à la hâte en attendant que le rouge rentre chez lui, puis l'avait glissé dans le panier qui patientait, posé sur le rebord de sa fenêtre. Une fois Taehyung en vue, le brunet avait fait tourner la petite manivelle en fer, un petit crissement s'envolant dans l'air jusqu'aux oreilles du voisin, qui s'était détourné de son bureau pour s'accouder à la fenêtre, regardant avec attendrissement la mine concentrée et heureuse de Jungkook. Ce dernier s'amusait beaucoup du son et de la vue de la corde qui s'enroulait hypnotiquement autour de la roue qui la maintenait. Au bout d'une petite minute, le panier était arrivé à destination. Taehyung le récupéra avec un sourire aux lèvres avant de piquer le petit papier et de le lire.
« Tu sens vraiment bon... »
C'était ce que Jungkook avait osé écrire sur son fragment de feuille. Il en avait les mains moites de voir la réaction de son voisin de fenêtre, il avait peur d'être trop direct, de le mettre mal à l'aise. Mais bon, Taehyung ne s'était-il pas beaucoup amusé à répondre aux sollicitations voyeuristes du brunet ? Si.
De son petit rictus à la fois moqueur et attendri, le jeune homme partit avec le papier en main dans la chambre. L'autre le vit faire quelques allers-retours et poser un morceau de tissu dans le panier en osier. Il s'empressa de tourner à son tour la manivelle, son petit gloussement de satisfaction caressant les oreilles du brun.
Une chemise. Sous la lumière de sa chambre se dévoilait une chemise. Et pas n'importe laquelle. Celle de Taehyung. Sur celle-ci était posé un mot écrit par sa main gracieuse.
« J'espère que tu apprécieras t'en servir de doudou :) »
Le jeune homme se sentit étouffer sous la chaleur qui venait de monter en lui. Il lança un regard à Taehyung qui lui fit signe de retourner le bout de papier, ce qu'il fit dans la seconde, les mains tremblotantes.
« Ne sois pas trop enivré par mon odeur, ce serait bête que tu sois déjà accro à moi, non ? »
***
Jungkook n'arrivait pas à croire qu'il faisait vraiment cela.
Après leurs petits échanges plus tôt dans l'après-midi, ses parents l'avaient appelé pour dîner et une fois assis, il avait été bombardé de questions à propos de sa relation avec Taehyung. Alors il avait inventé, leur faisant croire qu'ils s'étaient rencontrés en sortant la poubelle il y a une semaine et que depuis, ils s'envoyaient régulièrement des messages. Incapable de supporter une nouvelle vague de questions, le brun avait prétexté un mal de ventre soudain pour s'éclipser, sous les yeux amusés de ses parents qui ne dirent rien.
Une fois de retour dans son antre, Jungkook avait pris ses affaires pour prendre sa douche, avait exécuté sa petite routine de nuit et s'était assis sur son lit, les écouteurs dans ses oreilles et un livre à la main. Sauf qu'il n'arrivait pas à se concentrer. Il n'avait pas lu une ligne depuis qu'il s'était installé, il y a vingt minutes de cela. La seule chose qui tournoyait dans son esprit était Taehyung et leur après-midi. Les deux lui avaient parus magiques, comme si la magnificence du rouge avait transporté Jungkook dans une autre dimension, donnant à cet après-midi un aspect surréaliste et incroyable, le meilleur que le brun n'avait jamais vécu.
Et puis, il y avait la chemise. Cette putain de chemise qui avait embaumé toute sa chambre pendant qu'il mangeait, dissipant toute odeur qui lui était auparavant familière. Ses narines étaient imprégnées du parfum séduisant de son propriétaire, sa chambre aussi, son esprit aussi, il n'était pas loin de tourner de l'œil sous l'assaut de sensations.
Elle lui faisait de l'œil, affalée contre le dossier de sa chaise de bureau. Ses carreaux noirs et blancs captaient naturellement son regard. Jungkook se souvenait l'avoir posée là juste après l'avoir reçue, s'empêchant à tout prix de laisser son nez s'égarer entre ses plis. Mais non. Il ne se laisserait pas avoir. Il ne voulait pas donner raison à Taehyung, qui le taquinait déjà assez par message durant la journée. A chaque fois le jeune homme lui envoyait maintes et maintes allusions taquines et cela avait le don de mettre le brun dans tous ses états.
Mais là, il ne tenait plus. Il en avait beaucoup trop envie. Balançant ses écouteurs par terre, il se leva précipitamment de son lit et atteignit la chemise, l'agrippant avant de la tirer près de lui, tout près de son nez, serrée contre son cœur battant la chamade. Il inspira doucement le tissu, se laissant transporter par l'odeur agréable qui s'en dégageait. Il avait l'impression que Taehyung se trouvait là, juste à côté de lui, allongé à ses côtés, collé à lui dans son lit une place. Jungkook soupira d'aise. Le velouté de la chemise caressait son nez et le bas de son ventre dévoilé par son tee-shirt trop grand. Des frissons. Encore et encore. Il humait l'odeur envoûtante sans relâche, transporté dans ses rêves auprès du corps sensuel du rouge.
Et malgré son excitation du début, l'odorat de Jungkook était si saturé par le parfum de Taehyung que ses sens s'embrouillèrent, le plongeant dans une étrange torpeur rassurante. Le jeune homme se sentait si bien avec cette chemise qu'il se laissa doucement porter par son esprit fatigué, la silhouette délicate du rouge se découpant dans la fenêtre éclairée d'en face.
***
« Jungkook, dépêche-toi ! On va être en retard ! »
Le jeune homme enfila ses chaussures à la hâte, manquant de glisser sur le parquet et suivit ses parents qui l'attendaient sur le perron de la maison, son père tapant du pied à cause de son impatience. La famille Jeon devait se rendre chez les Kim pour dîner, comme ils se l'étaient promis deux semaines plus tôt. La mère de Jungkook avait un saladier contre sa poitrine tandis que son père tenait à bout de bras deux bouteilles de rosé qui sortaient tout juste du frigo ; le fils, lui, ne portait rien à part son embarras et son impatience.
Il avait hâte de retrouver Taehyung, de découvrir pour de vrai cette chambre qu'il avait seulement aperçue de loin, de rester à ses côtés, loin des regards, pendant des heures alors que leurs parents feraient plus ample connaissance dans la salle à manger. Alors pour l'occasion, le brunet s'était fait beau, sans en faire trop. Il avait mis son plus joli bermuda, un tee-shirt blanc large et presque transparent ainsi que ses baskets assorties, troquant son pyjama difforme pour cette tenue qui le mettait bien plus en valeur. Cependant, ce qu'il ne n'oserait jamais révéler, s'était le problème qu'il avait eu devant sa garde-robe, incapable de trouver une tenue décente. Pendant toute l'après-midi, il avait retourné son placard de fond en comble dans l'espoir d'y retrouver un joli tee-shirt ou une pièce un peu plus élaborée. Mais cela avait été un échec. Alors Jungkook avait enfilé un de ses hauts de tous les jours le plus tentateur ainsi que son joli bermuda préféré.
Le brunet sortit de la maison, la fermant à clé, puis rejoignit ses parents qui l'attendaient, déjà arrivés devant celle des voisins. Ils appuyèrent sur la sonnette pile quand leur fils se posta près d'eux, la porte s'ouvrit dans la foulée. La maîtresse de maison leur fit un sourire avant de les inviter à entrer, serrant la main de ses invités avant de les emmener dans le salon où son mari terminait de disposer l'apéro. Durant le premier quart d'heure, tout ne fut que politesse et banalités, leur fils n'était pas encore descendu.
« Taehyung, descends s'il-te-plaît ! Nos invités sont là ! »
Elle retourna auprès des Jeon après avoir crié dans les escaliers, une mine décomposée sur le visage.
« Jungkook est pareil, cru bon de dire la mère Jeon, il ne se bouge jamais assez vite et il faut toujours tout lui répéter !
- Mais maman ! S'indigna le brun.
- Tu sais quoi ? Monte dans sa chambre, peut-être qu'il y est encore ! Il devrait te laisser rentrer, j'ai cru comprendre que vous vous appréciez déjà, fit-elle avec un petit sourire ravi. »
Oui, Jungkook appréciait beaucoup Taehyung, s'était le cas de le dire. Tout souriant, il se leva, se dirigeant déjà vers les escaliers.
« J'y vais ! Amusez-vous bien, leur souhaita doucement le jeune homme.
- Sa chambre est sur la gauche, face à ta maison ! Amusez-vous bien aussi. »
Sur ces mots, le brun monta, tourna à gauche et une porte lui barra la route. Malgré l'atmosphère apaisante de la maison, il sentit son cœur rater une pulsation, ses mains devenir moites alors qu'il approcha prudemment son poing contre le bois de la porte, comme s'il pouvait potentiellement le manger. Il hésitait encore jusqu'à ce qu'elle ne s'ouvre sur son voisin haletant, aux joues rougies et les cheveux humides d'une douche prise à la hâte. Le col de son tee-shirt état mal mit, ses cheveux ébouriffés, ses pieds nus et ses jambes encore humides portées à la vue de Jungkook qui ne s'en plaignit pas. Quelle que soit la situation, Taehyung était incroyablement séduisant.
Une fois la surprise passée, le jeune homme à la chevelure flamboyante lui prit délicatement le poignet pour le faire entrer dans sa chambre et refermer derrière eux. La chambre de son voisin ne ressemblait en rien avec ce que Jungkook avait pu s'imaginer pendant des heures sur son lit. Ses murs avaient étés recouverts par une immense collection de photos et de posters de différents groupes, de reproductions pas chères de tableaux célèbres, majoritairement des impressionnistes, et les meubles épais et à l'allure moelleuse donnaient une atmosphère chaleureuse que le brunet n'aurait jamais pu soupçonner.
« Installe-toi, je vais nous chercher à boire. »
Il partit. Jungkook en profita pour marcher dans la pièce, pour poser son derrière sur le lit rebondit du rouge et se laissa tomber en arrière, la tête soutenue par les draps. Comme la chemise qu'il avait reçue, ceux-ci étaient imprégnés de l'odeur de Taehyung, faisant frémir de bonheur ses narines qui ne s'habitueraient sûrement jamais à son parfum.
Le jeune homme se redressa rapidement quand il entendit des pas précipités grimper les escaliers, se remit droit, les battements de son cœur toujours aussi vifs, mais tentant de garder un visage relativement neutre. Le rouge avait du coca, des verres et une moue boudeuse sur le visage.
« J'ai pas eu le droit de prendre des bières, se plaignit-il en posant son petit butin sur le sol. »
Jungkook le rejoignit par terre et l'aida à déballer les paquets de chips et à ouvrir les cannettes.
« Pas grave, j'aime pas ça, répondit le brun.
- Quoi ? T'aimes vraiment pas ? »
Sous la mine étonnée du beau rouge à ses côtés, l'invité secoua négativement la tête avant de prendre quelques gorgées de sa boisson.
« Heureusement que t'es mignon, sinon je t'aurais renié. »
Jungkook s'étouffa à ces mots, le pétillant du coca remontant dans son nez et le liquide s'échappant de sa bouche pour venir s'écouler contre sa peau pâle, jusqu'à se faire aspirer le col du tee-shirt blanc qu'il portait. Il se mit à tousser et le rire de Taehyung se faufila dans ses oreilles alors qu'il venait tapoter son dos gentiment. Le rouge se leva ensuite pour aller lui chercher un verre d'eau que le brun avala d'une traite avant de s'avachir contre le bord du lit, fatigué. Son torse se soulevait encore douloureusement, la piqûre des bulles toujours présente, mais il se remettait doucement, son voisin avait commencé à lui faire des papouilles dans les cheveux tout en le regardant avec tendresse.
« Ça va mieux ? demanda-t-il.
- Oui, ne t'inquiète pas. »
C'était vrai, la chaleur de sa main, sa proximité enivrante, la légère fatigue qui l'embrumait, tout était agréable, tout le faisait se sentir bien. Voulant être discret, il rapprocha sa tête de la paume du rouge, désireux de plus de contact. Sauf que ce dernier l'avait bien compris et accéda à sa requête sans rien ajouter, seul son petit sourire s'accentua.
D'où ils se trouvaient, ils pouvaient entendre quelques bribes de conversations entre leurs parents, leurs rires, difficilement le tintement des verres, la chambre étouffait tous ses sons et les enfermait dans une petite bulle de bien-être où les deux jeunes hommes se prélassaient en silence, le dos tout contre l'armature du lit. Jungkook avait posé sa tête contre la clavicule du jeune homme, humant toujours plus son odeur alors qu'une flamme commençait à grandir en lui. Son corps se mettait à gigoter, comme s'il était mal à l'aise.
« Tout va bien ? Tu te sens mal par terre ? »
Jungkook hocha la tête, les joues rougies par la gêne. Comment pourrait-il lui avouer que non, il était très bien par terre, tout contre son torse et chouchouté comme il l'était ? Il n'oserait jamais.
Le jeune homme sentit son cœur se serrer quand Taehyung s'éloigna de lui, que sa main se retira de ses cheveux, qu'il se leva et les resservit, la mine concentrée à ne pas renverser du coca sur le parquet. Il tendit de nouveau un verre à Jungkook qui le but avec précaution sous la mine amusée du rouge qui s'assit sur son lit, tapotant la place près de lui. Le brunet s'installa à ses côté une fois son verre fini, et les deux garçons s'allongèrent, face à l'autre.
Leurs genoux se touchaient, leurs visages n'étaient séparés que de quelques centimètres, leurs souffles s'abandonnaient sur les lèvres de l'autres, celles de Jungkook frémissaient à chaque effleurement, se mordaient entre elles tandis que le bout de sa langue passait tout contre elles. Taehyung avait l'attention rivée sur elles, reproduisant les mêmes actions sur les siennes. Les mirettes embuées du petit brun s'humidifiaient de plus en plus sous le regard brûlant du rouge, ses jambes se serraient et ses muscles se contractaient sous la tension instaurée dans la pièce.
Puis la main de son voisin se perdit contre sa hanche, dériva sur sa taille sur laquelle le bout de ses doigts fit des petits cercles. La bouche de Jungkook s'entrouvrit, surpris, puis regarda l'intruse qui s'était fait une place sur son corps. Elle était grande, ses doigts immenses et mielleux entouraient sa taille, la douceur de sa peau perceptible au travers de son tee-shirt, comme si ses sens avaient étés décuplé au centuple ; sentant une légère moiteur sur sa paume, signe d'un stress que Taehyung devait ressentir à l'idée de la réaction de son invité. Le brunet expira bien plus fortement qu'à l'accoutumée, sa respiration se faisait courte alors que ses yeux faisaient tout pour ne pas se confronter à ceux de son vis-à-vis.
Mais malgré tout, ce dernier s'avança encore plus près, rapprocha son corps du sien, fit glisser lentement sa main le long du torse du brun avant qu'elle ne termine sa traversée contre sa joue rebondie. Son pouce la caressait, dériva sur sa mâchoire, sous sa lèvre, sur sa lèvre inférieure qu'il abaissa de quelques millimètres, découvrant ses petites dents blanches.
« Je peux ? »
Ce ne fut qu'un souffle, mais il suffit à électriser Jungkook qui hocha timidement la tête, toujours attiré par le regard profond de son voisin.
Fébrilement, leurs lèvres se rencontrèrent. Elles se détachèrent dans la seconde, comme un rêve fugace qui leur glissait entre les doigts, avant de se reconnecter, leurs bouches toujours aussi tremblantes d'un désir mal maîtrisé. Ils sentirent bien mieux le rebondi des lèvres de l'autres, leur goût sucré, l'extase qui les ravageait et qui les rapprochait toujours plus, le rythme s'accélérant et le désir foudroyant qui prenait leurs corps, se donnant des baisers si fiévreux et si passionnés que plus rien n'existait autour d'eux. Leurs lèvres devenaient humides sous les coups de langue et les mordillements incessants, ces dernières s'invitant chacune leur tour dans la cavité buccale de l'autre avant de sortir et de recommencer à se picorer les lèvres. Jungkook était terrassé par l'incendie qui prenait son cœur, par les fourmillements délicieux qui léchaient son corps, par la tension folle qui les reliait et appelait leurs enveloppes charnelles à se fondre l'une dans l'autre. Leurs corps étaient collés, étroitement enlacés et leurs jambes s'étaient mises à s'entremêler, puis, même leurs pieds nus étaient devenus avides de contact. Les mains se baladaient sur un torse, une taille, des épaules, une cuisse, tiraient sur des cheveux, le tout dans une chambre réchauffée par leur brasier intérieur.
« Les enfants, on mange ! »
Arrêtés dans leur élan, les deux jeunes hommes séparèrent leurs lèvres, les yeux écarquillés. Taehyung avait ses mains sur les joues du brunet tandis que celui-ci les avait fourrées dans la tignasse rouge de son voisin. La position dans laquelle ils se trouvaient les fit affreusement rougir quand leurs esprits se reconnectèrent à la réalité. Jungkook était pivoine, les lèvres gonflées et luisantes, ses yeux noisettes pleurnichaient de bonheur et ses cheveux en désordre lui donnaient un air que l'autre pourrait admirer toute sa vie. Taehyung avait vraiment une magnifique vue.
« On devrait y aller, non ? susurra le rouge.
- Oui... »
Les deux jeunes hommes se levèrent péniblement, tristes de devoir se séparer l'un de l'autre. L'atmosphère s'était refroidie à cause de la nuit tombante et la proximité entre eux leur manqua instantanément, comme un besoin vital et rassurant, comme un refuge tout doux et passionné dans lequel les deux auraient bien voulu se laisser sombrer. Mais ils devaient y aller.
Alors Taehyung regarda Jungkook, qui tentait désespérément de lisser son tee-shirt froissés par leurs baisers. Il en profita pour se poster face à lui et le recoiffer tranquillement, concentré, et lui essuya les lèvres de son pouce pour effacer leur aspect brillant. Malgré cela, ses grands yeux de biches étaient toujours remplis de désir et d'émotions, ce qui chamboula le jeune homme qui aurait bien voulu retourner dans son lit avec lui.
Le rouge lui prit la main, lui fit un petit sourire rassurant et ils s'engagèrent dans les escaliers, rejoignant les adultes qui ne se doutaient de rien.
***
Le temps était passé, les cours avaient repris et leur idylle était loin d'être terminée.
Depuis cette soirée fatidique où tout ce qu'ils pensaient tout bas avait éclaté, les deux tourtereaux ne se lâchaient plus. Ils partaient dormir chez l'un, chez l'autre, traînaient tout le temps ensemble après les cours, s'échangeaient de longues embrassades et quelques caresses de plus en plus appuyées. Leur amour tout neuf et tout beau, euphorique et joueur prenait de plus en plus d'ampleur. A chaque seconde qui passait avec l'autre, leur attachement se renforçait et leurs sentiments grandissaient.
Quand ils ne se voyaient pas, ils avaient le don pour se croiser aux endroits les plus banals. La dernière fois, ils s'étaient rencontrés au détour d'un rayon du supermarché du coin, tous les deux exploités par leurs parents qui en avaient assez de faire les courses tout seuls. Et pendant que les adultes papotaient entre eux en plein milieu d'une allée, les deux jeunes s'étaient cachés dans le coin des épices où personne ne passait. Taehyung en avait profité pour étreindre son copain et lui avait laissé plein de petits bisous dans son cou, alors que le brunet gigotait de gêne à l'idée de se faire repérer par leurs géniteurs. Et en réponse à ça, le rouge n'avait rien trouvé de mieux à faire pour le taquiner que de lui attraper furtivement les fesses avant de les relâcher, laissant un Jungkook pantelant et plein de désir derrière lui.
Et comme si cela n'avait pas été assez, le résident de la maison violette avait annulé leur soirée en amoureux d'aujourd'hui pour aller faire la fête avec ses nouveaux amis, rendant Jungkook tout triste. Comme Taehyung était d'un an plus âgé, il était normal qu'il veuille s'amuser et nouer de liens plus forts avec ses nouveaux potes, mais cela attristait le petit brun de voir son rendez-vous annulé.
Ce soir, pour se remonter le moral, il avait décidé de prendre du temps pour lui, de s'amuser avec lui-même et d'apprécier sa propre compagnie. Tout à l'heure, il avait piqué un masque en tissu à sa mère, s'était acheté de la glace et avait mis en arrière-plan toute sa musique préférée alors qu'il jouait un peu aux jeux vidéo, son masque à l'avocat sur le visage. Il régnait une bonne odeur grâce à ce dernier, l'ambiance de la musique était calme et Jungkook, après avoir joué quelques parties, avait décidé de lire un peu, confortablement installé dans son lit.
Alors qu'il revenait dans sa chambre après avoir retiré son masque de beauté sur les coups de vingt-trois heures, il entendit des petits cailloux frapper contre la fenêtre. Intrigué, il s'était stoppé, puis avait lentement marché vers sa vitre, les graviers ne s'arrêtant pas de maltraiter le verre.
Il se posa devant la fenêtre et jeta un coup d'œil rapide à l'extérieur. Taehyung était là.
La tête levée au ciel, le souffle haletant, sa capuche noire rabattue sur sa chevelure, faiblement éclairé par les lampes frétillantes du jardin des Jeon. Le jeune homme lui fit signe de descendre sans bruit, alors que le brunet, toujours aussi perplexe, ne savait pas comment réagir. Il sursauta et ne reprit ses esprits que quand Taehyung s'impatienta et se mit à sauter dans tous les sens, dans l'espoir de faire réagir son petit-ami.
Jungkook ferma sa fenêtra, enfila un jogging, un sweat, ses baskets, éteignit ses appareils et sa lumière avant de sortir discrètement dans le jardin. Contrairement à ce qu'il pensait, il faisait frais en cette nuit d'été et même avec son pull, les poils de ses bras se hérissaient sensiblement. Il ferma la porte à clé derrière lui, glissa le trousseau dans sa poche et trottina jusqu'à Taehyung, qui se rapprochait de lui.
« Qu'est-ce que tu fais là ? demanda le brunet, toujours surpris.
- J'en avais marre, tu me manquais, expliqua-t-il en enfouissant sa tête dans le cou de Jungkook.
- Oh... »
Tout gêné, le plus jeune se contenta de passer ses bras autour de la taille du plus vieux, le berçant tendrement alors que ce dernier s'amusait à lui laisser de petits bisous dans le cou. Comme ils étaient presque sur le trottoir de leur rue, ils étaient éclairés par la lumière rassurante des lampadaires qui brisait la peur de cette nuit noire. Taehyung se détacha de son amoureux, le regarda dans les yeux et lui prit la main, l'emmenant derrière lui.
« Je voulais t'emmener quelque part. Je peux ? »
Jungkook hocha la tête, bien que peu rassuré par l'idée de se balader en pleine nuit.
« Ne t'inquiète pas, ce n'est pas loin. »
Le rouge s'était mis à faire des cercles contre sa paume, l'encourageant à le suivre. Le brunet ne résista pas bien longtemps et marcha à ses côtés, main dans la main, dans les rues désertes de leur quartier résidentiel. Les couleurs des façades avaient beau faire mal à la tête de Jungkook, cette fois-ci, il leur était infiniment reconnaissant de renvoyer l'éclairage public, lui qui était affreusement froussard. Pour lui changer les idées, son copain avait commencé à faire se balancer leurs bras comme des enfants, faisant adorablement sourire Jungkook qui mit plus d'énergie dans le mouvement tout en marchant d'une façon ridicule.
Ainsi, ils sortirent rapidement du quartier pour se diriger vers un autre qui se trouvait à la fin de la route principale. Là, Taehyung emmena Jungkook dans un petit chemin dissimulé entre des buissons, le traînant à sa suite alors que le plus jeune commençait à sentir la peur monter malgré tous les stratagèmes mis en place par le rouge.
« Hey, tu ne m'emmènes pas dans une cabane au milieu de la forêt pour me démembrer et me manger tout cru, n'est-ce-pas ? »
Le plus vieux se mit à rire franchement, toujours aussi étonné de l'immense imagination que possédait son cadet.
« Non, non, au pire je pourrais bien te manger tout cru... Mais d'une façon différente, le taquina-t-il. »
Jungkook ne rétorqua rien, comme à son habitude rouge comme une tomate et suivit Taehyung sans rien dire, juste en serrant sa poigne autour de sa paume. Ils entrèrent dans le passage, la noirceur de la minuscule forêt les englobait et l'aîné s'amusait à faire peur au brunet, chatouillant sa nuque avec une feuille ou lâchant sa main brusquement. Au bout de quelques minutes à se chamailler et à crapahuter dans l'herbe et les racines qui avaient effacé le chemin, les deux tourtereaux arrivèrent devant une cabane suspendue dans un immense arbre.
Elle était illuminée de toutes parts, des dizaines de guirlandes de LEDS embrassaient ses contours, ainsi que l'échelle en fer qui menait à son entrée. Des piliers de bois en soutenaient le sol et le tout semblait avoir été créé par un véritable architecte tant l'habitation avait l'air robuste. Jungkook crevait d'envie d'y monter.
« Wow.
- C'est la cabane de mes amis Jin et Namjoon. L'oncle de Namjoon leur a construit cette cabane pour qu'ils puissent se retrouver tranquillement, puisque sa famille n'est pas très ouverte sur le sujet. Ils nous la prêtent pour ce soir. »
Le brunet avait écarquillé les yeux, surpris par l'histoire aussi étonnante que romantique de cette petite cabane perdue entre deux quartiers résidentiels. La bouche entrouverte, il ne remarqua pas que son petit-copain s'était dirigé vers l'échelle et qu'il avait commencé son ascension, bandant ses muscles. Le plus jeune trottina à sa poursuite, rejoignant le bas de l'échelle quand le rouge était déjà arrivé au sommet. Ce dernier laissa s'échapper un petit rire tout en le narguant de son perchoir et la vue de son petit-ami déjà arrivé donna à Jungkook l'envie de monter le plus vite possible. Sans compter qu'être seul dans le noir était assez stressant.
« Bah alors ? Fais pas ton Papy et monte ! »
Tout en marmonnant, Jungkook prit la décision de grimper pour aller embêter son copain. Une fois en haut, il entra dans la cabane qui sentait le vieux bois et un peu l'humidité. Plein de coussins et de plaids la tapissaient et une petite fenêtre leur offrait une vue suffisante sur l'extérieur, des petites lumières à piles étaient disséminées aux quatre coins de l'unique pièce et Taehyung était en train d'allumer la dernière quand le brunet arriva à ses côtés. Jungkook avait perdu son air ronchon qui s'était transformé en un visage radieux. Celui-ci se laissa tomber sur un gros coussin et s'enroula dans une couverture tout en gloussant de bonheur, les yeux rivés sur le rouge qui le rejoignit dans la foulée.
Le jeune homme aux cheveux rouge s'enfouit sous le plaid, se collant à Jungkook pour partager leur chaleur et il passa un bras autour de sa taille avant de le chatouiller, puis de lui tirer les joues. Les deux amoureux se sentaient si bien, si heureux dans cette minuscule cabane que leur esprit s'était tout simplement mis en pause, toutes leurs barrières s'effondrant dans ce lieu magique et intime, perdu et inconnu aux yeux des autres. Les quatre murs de la cabane, bien que loin d'être solides comme ceux d'une maison, leurs paraissaient aussi efficaces que des portes en béton armé. Ils sentaient qu'aucun de leur problème ne pouvait y pénétrer, comme si un sortilège les tenait loin de l'ambiance chaleureuse que la maisonnette perchée renfermait. Comme si le temps s'était arrêté, les tourtereaux en profitèrent pour s'amuser, jouer aux cartes, boire des bières qui semblaient avoir été déposées exprès pour eux et laisser libre cours à leurs sentiments démultipliés.
Puis Taehyung avait commencé à franchement chatouiller Jungkook qui se tortillait sur le sol tout en gloussant adorablement alors que le plus vieux le regardait avec des étoiles dans les yeux, son immense sourire collé aux lèvres. A bout de souffle, les deux jeunes hommes s'étaient vite calmés, haletant dans les coussins moelleux, le brunet ayant déposé sa tête sur les cuisses de son aîné. L'ambiance était bien plus détendue et s'était réchauffée sous les assauts du rouge qui les avaient fait bouger dans tous les sens. Soudain, Jungkook ouvrit les yeux, plantant un regard sérieux sur le visage de son petit-ami qui était en train de comater, une main dans les cheveux de son aimé.
« Hey, dis...
- Hm ?
- Tu m'aimes ? »
Taehyung rouvrit un œil confus et souleva son sourcil gauche, étonné de la question.
« Bien sûr que je t'aime. C'est quoi cette question ?
- Pour rien ! Merci Tae. »
Et le plus jeune referma les yeux, calme, un petit sourire satisfait sur le faciès. Le rouge, toujours interloqué, eut beaucoup de mal avant de comprendre ce qu'il venait de se passer. Jungkook était un véritable petit emmerdeur.
« Hey ! Tu ne m'as pas dit que t'aimais aussi ! Se révolta Taehyung. Je suis outré, tu te fiches de moi ! »
Le petit brun se mit à rire, les yeux pleins de malice. Son petit-ami, qui n'appréciait pas la petite blague, fit remonter le jeune homme contre lui, comme s'il ne pesait rien, et l'encercla de ses bras puissants, ceux qui avaient fait baver Jungkook la première fois qu'il l'avait vu. Et cela serait mentir que de dire que cela ne lui fit rien. Ses idées lubriques lui revinrent d'un coup et c'est les joues en feu et les muscles faibles qu'il feignait de vouloir s'échapper de l'étreinte dans lequel il était gardé captif. Car oui, entre temps, Taehyung avait décidé de lui faire pleins de bisous et de lui laisser de nombreuses petites morsures sous le col de son sweat large. Le brunet sentait même que le rouge tentait de le lui enlever car il avait glissé ses mains sous son haut et le tirait en grognant à plusieurs reprises.
« Tu avais dit que tu n'allais pas me manger ! Rigola Jungkook.
- Faux, rétorqua l'autre, j'ai dit que je n'allais pas te démembrer et te manger au sens littéral du terme. Alors chut et laisse-moi te manger au sens imagé.
- T'es bête.
- Et en plus de ça tu m'insultes ? Tu vas voir ! »
Et c'était reparti pour un tour.
Toute la nuit se déroula de cette façon, l'un provoquant l'autre et le taquiné partait toujours dans les extrêmes. Ils se chamaillaient constamment, comme de jeunes enfants amoureux, comme si n'avait d'importance que le moment présent, celui qu'ils partageaient ensemble. Le lendemain n'existait pas, seule subsistait cette envie vitale que celle de rester auprès de l'être aimé. Cette passion grandissante leur grignotait les tripes, les plongeait dans un tel état d'euphorie que ni la faim, ni la soif, ni le sommeil ne se firent ressentir pendant plus d'une nuit, comme si leur seul attachement pouvait supporter le manque de toutes ces choses vitales inintéressantes. Leur jeune amour avait la puissance d'un surhomme, la force de déplacer des montagnes, de repousser ses limites, de vivre pleinement avec ses sentiments qui tournaient à plein régime. Les taquineries fuseraient encore et encore, Jungkook et Taehyung continueraient de s'amuser tous les deux, leurs cœurs rateraient encore des milliers de battements et leur petit nuage de douceur mettrait bien du temps avant de s'évaporer dans le ciel, sous le regard attendri des étoiles.
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