1.

C'était un après-midi comme les autres. Il y avait du soleil, une brise légère et une jeune fille en pleine crise de mode. Jetant affaires sur affaires, Eva semblait prise d'une frénésie que rien ne pourrait arrêter. Et pour cause. Aujourd'hui, un banal 13 juillet, alors que les vacances d'été débutaient, elle avait rendez-vous avec Chris Brantford, son objectif du moment. Et rien ne pourrait l'en détourner, enfin c'était ce qu'elle pensait. En effet, Hana Harley, sa best friend forever, était plutôt d'avis qu'elle devrait se pencher sur le cas Léo.

Un charmant garçon de leurs âge, un brin timide, serviable à souhait et gentil comme pas possible. Et justement, c'était là le problème. Eva n'aimait pas les garçons trop gentils, qu'un rien faisait basculer. Son type, c'était les bad boys, de ceux qui lancent blagues salaces sur blagues salaces avec un sourire Colgate. Exactement comme Chris, en fait. Un jeune homme aux cheveux d'un blond soleil, à la peau hâlé, aux muscles saillants et aux yeux d'un orageux gris. Parfait, juste ce qu'il lui fallait pour oublier son ex et gagner son pari.

Eva, il fallait le dire, n'était pas une petite fille bien sage. Certes, elle avait de bonnes notes, un potentiel en violon, et une voix enjôlante, mais elle enchaînait les mecs, et du haut de ses dix-sept ans, méritait largement son surnom de « Lolita ». Il n'était pas difficile de deviner qu'elle n'était plus vierge depuis longtemps. À vrai dire, depuis sa première année de lycée, qu'elle avait redoublé.

Une année coloré de punitions, mauvaises notes, et fugue pour rejoindre les racailles du coin. Elle s'était repris depuis, et heureusement. Enfin bref, la jeune fille, pas encore une femme à son plus grand malheur, sortait aujourd'hui. Il faisait beau, elle avait un rencard, sa meilleure amie avait préparé pour elle une soirée filles le lendemain, et ses parents travaillaient à Londres pour un bon bout de temps. Deux semaines, ou trois peut-être. Eva était habituée.

 
Avant, ils engageaient une baby-sitter pour s'occuper d'elle, mais depuis qu'elle avait fait fuir la dernière en l'enfermant dans une pièce vide du troisième étage, l'année de ses seize ans, ils n'avaient pas réitéré. Ils lui disaient bien de n'ouvrir à personne, d'être sage, de rapporter de bonnes notes, et partaient. Ses parents n'étaient pas négligeant, ni de mauvaises personnes, seulement, pour eux, il y avait d'abord le travail et la vie de couple, puis les enfants.

Eva ne leur en tenait ni colère ni chagrin. C'était une jeune fille indépendante et autonome. Elle ne se droguait pas, ne fumait pas, buvait de façon raisonnable, sans compter les cuites de temps en temps, pour s'amuser, après tout elle avait la vie devant elle pour le regretter, mais enchaînait coup d'un soir sur coup d'un soir. Elle en avait brisé, des cœurs, la vilaine fille.

M'enfin, c'était une jolie poupée, Eva. Une peau d'ivoire, des lèvres charnues, des boucles d'un noir profond coulant comme un ruisseau et venant s'arrêter dans le creux de ses reins, un nez aquilin, de grands yeux de biche d'un bleu cobalt et argent ensorcelants, une taille fine, et un corps élancé. Pas trop de poitrine, et un air innocent placardé sur le visage. Une fille à la vie heureuse, gâtée par la nature, mais au cœur bondissant, et à la vie amoureuse bien tumultueuse.

Sa meilleure et presque seule amie, le lui faisait remarquer bien souvent. Hana Harley, seize ans, un mètre soixante-dix et les yeux bridés, la supportait depuis qu'elle avait redoublé, en seconde. C'était une gentille fille, douce, mais orgueilleuse, japonaise de mère, française de père, aux cheveux lisses et courts, bruns. Une fille qui malheureusement, était enfant unique, et qui souffrait beaucoup de la solitude. La rencontre d'Eva l'avait littéralement changé.

Eva, qui avait finalement porté son choix sur un top crème, une jupe plissée couleur lait et des Converse blanches. Une décision bien influencé par le soleil ardent dehors, desséchant la belle pelouse verte et brûlant la peau. La jeune fille opta d'ailleurs pour une bonne dose de crème solaire. Les coups de soleil, franchement, ça n'aidait pas à mettre un garçon dans son lit, et c'était vraiment pas esthétique. Enfin, sourire aux lèvres, la jeune fille était prête à sortir, avec bien sûr, une dizaine de minutes de retard.

-Bien ! s'écria t'elle. Coiffure, check ! Vêtements, check ! Hum...

Un peu de maquillage, peut-être. La jeune fille se saisit d'un pinceau, et appliqua une touche d'ombre pailletée noir sur ses paupières, ainsi qu'un gloss à la pêche. Son parfum préféré. Sourire avenant et yeux cobalt, Eva, belle et fatale jeune fille, était prête pour son rencard. Elle sortit, saisit son sac et une veste en cuir ivoire, et enfin, envoya le message disant au jeune homme qu'il pouvait passer. Eva n'était pas encore majeure, à son plus grand dépit, et n'avait que la conduite accompagnée, quand de ses dix-huit ans, Chris, redoubleur acharné, le possédait déjà. Il la prenait donc, et ensuite, direction le ciné.

Ce ne fut pas long. À peine dix minutes, et il était là, souriant de toutes ses dents, et regard ensorcelant. Il la draguait, à ne pas en douter. Ils auraient sûrement conclu ce soir, et elle pourrait passer à autre chose. Quoique, il ferait peut-être un bon mec pour ce mois-ci. Cela dépendait de son talent pour le sport de lit. Sinon, elle l'oublierait bien vite, pour passer à autre chose. Même si sa Porsche, elle devait bien l'avouer, était un bijou de fabrication, et sûrement très coûteuse.

Environ une demi-heure plus tard, les deux étaient assis, un pot de popcorn sur les genoux, les yeux fixés sur l'écran gigantesque. Le film, c'était à n'en pas douter Eva qui l'avait choisie. Un thriller, et de l'action, bon, malgré le titre quelque peu étrange. « Split ». Ils ressortirent de la salle complètement fan. Chris avait eu l'air d'apprécier, et même si Eva avait plus pensé à la suite qu'au film, elle c'était surprise à aimer. Mais, à présent, il fallait enchaîner, et c'est un coup de téléphone au jeune homme qui s'en occupa. Un parent à lui venait de débarquer chez eux et ses géniteurs lui ordonnaient de rentrer tout de suite. Eva se retint de laisser échapper un juron.


Sa soirée était belle et bien fichu en l'air, tout comme ses projets. Bien, soupira t'elle intérieurement. Puisque elle ne pouvait l'avoir ce soir, et qu'elle avait perdu son pari, alors il perdait toute ses chances. Non, décidément, il n'était pas fait pour elle, cela se voyait. Tant pis. Elle baissa la tête, alors que Chris éteignait son téléphone. Vingt minutes après, et ils étaient tout deux devant chez elle, sans un mot ni une parole. Eva laissait tomber l'affaire, et le garçon ni aurait pas son mot à dire. Maintenant, restait à lui dire.

-Désolé Eva, commença le jeune homme, mais mes parents ne me laisse pas vraiment le choix.

-Je sais. Écoute Chris, j'ai vraiment passé un bon moment alors...

-Tu veux qu'on recommence ? Le week-end prochain, je suis là, on—

-Non. Je veux te dire que même si j'ai passé un bon moment avec toi, je crois qu'on est pas fait pour être ensemble. Je t'aime bien, mais tu risque de souffrir avec moi, et ce n'est pas ce que je souhaite.

Simple, droit, et froid. Si il ne comprenait, alors elle ne pouvait plus rien pour lui. De toute façon, elle pensait déjà au suivant.

-Mais, tenta le jeune homme, je croyais que—

-Désolée de te décevoir Chris. Bonne soirée.

Et elle lui claqua la porte au nez, le visage de marbre. Un d'éliminé. Par la fenêtre du salon, elle l'observa un moment, alors qu'il restait indécis. Puis, il baissa la tête, et tourna les talons pour rejoindre sa voiture, garée un peu plus loin. Il partait rejoindre sa famille. Eva sourit, et haussa les épaules, avant de se diriger vers la cuisine et se servir un verre de lait. De calcium, bon pour les os. Sitôt qu'elle l'eu finis, elle s'en retourna vers la porte, puis l'ouvrit et sortit. Il était vraiment partit. Alors, elle se dirigea vers la boîte aux lettres.


Sortant ses clés, la jeune fille chercha la bonne, puis, la tourna dans la serrure. Pas de déclic. Elle retourna dans l'autre sens. Non plus. Quelque chose dans la caisse en métal verte bloquait l'ouverture. Soupirant, Eva appuya plus fort, et enserra de l'autre main la boite pour qu'elle ne bouge pas. Là, elle tourna encore une fois, plus fort. Clic. C'était ouvert. Doucement, elle tira, et la porte de fer se décoinça. Dedans, rien d'anormal. Juste des enveloppes et... et une grosse pochette de carton. Dessus, juste un nom. « Colibri Eva ».

Penchant la tête d'un cté, un mauvais tic dont elle ne parvenait pas à se défaire, elle le saisit, ferma l'ouverture, et rentra chez elle, avant de gravir quatre à quatre les escaliers, et se jeter sur son lit. Dans ses mains, l'étrange colis marron. Elle ne prit ni gants ni précaution, et déchira le papier. Après tout, c'était à son nom. Dedans, à sa grande surprise, un cahier en cuir noir. Simple. Elle le saisit d'une main, repoussant de l'autre l'enveloppe. Elle ouvrit la première page.

« Je m'appelle Eva Angelique Lynd. Et ceci, est mon cauchemar. »

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