XXV

Pdv Katsuki :

Même le café me parût plus acre que d'habitude. J'avais passé mon samedi soir à broiller du noir et mon dimanche à tenter de discuter en "adultes responsables" avec ma soeur. Et il s'était très vite avéré que nous n'en étions pas capables...

Aussi aujourd'hui j'étais de mauvaise humeur, je n'avais pas encore eu l'occasion d'en faire profiter mes équipes, mais ça devrait venir dans l'après-midi. En attendant je passais mes nerfs sur la vieille machine à café toute rouillée et sur l'imprimante beaucoup trop lente de la salle de pause. J'adorais les machines, elle ne se plaignaient jamais et pourtant dieu savait que j'étais irascible avec elles.

- Putain de merde... c'est quand même pas dur de sortir cinquante pauvres papiers !

- Tu parles tout seul ?

Je ne l'avais pas entendu entrer, et c'est avec un air surpris que je me retournai pour faire face à Eijiro Kirishima. Il avait retiré sa veste, profitant sûrement de la pause pour se relâcher. C'était étrange de le voir ainsi, très sérieux avec sa cravate bien nouée et sa coupe plus conventionnelle. J'avais encore du mal à me départir du souvenir d'un garçon porc-épic galérant sur un contrôle de maths quand je le voyais.

Je lui fis un vague sourire et me retournai vers la maudite machine.

- Non je me défoule sur la seule chose que j'aie le droit d'engueuler ici : ce truc à boutons là.

Je posai mon café sur le bord de la table et le laissai s'approcher pour constater de l'enfer que me faisait vivre ce robot.

- Je vais passer toutes ma pause à attendre des photocopies, c'est triste quand même...

Il éclata de rire avant de se détourner. Je fus d'abord vexé par ce manque de compassion mais ce sentiment se transforma bien vite en honte quand je le vis revenir avec une cartouche d'encre neuve.

- C'est sûr que tu vas avoir du mal si tu lui donnes pas de carburant, monsieur l'ingénieur.

Je virai au rouge cramoisi et perdis mon calme.

- C'est pas à moi de changer les cartouches ! Ya des stagiaires pour ça !

- On en a pas en ce moment, et puis franchement c'est pas compliqué.

Carrément blessé dans mon égo je lui pris le petit boîtier des mains et m'affairai à recharger l'encre de cette foutue machine. J'étais encore plus sur les nerfs maintenant, d'autant plus qu'une fois l'imprimante pleine, les dernières photocopies arrivèrent sans faire d'histoire. Le soufflement de nez amusé d'Eijiro ne fit que m'énerver encore plus.

- Roh ça va hein !

- Ne t'en fais pas je n'irai pas raconter à toute la boîte que tu t'es battu contre une imprimante et qu'elle a gagné.

Je me sentais de moins en moins respecté dans cette histoire.

- Toi je te jure que s'il y a une seule coquille dans ton prochain rapport de budget je te le ferai savoir.

- Oui Monsieur !

Il me fit un sourire éclatant tout en jouant les subordonnés modèles. Cela me mit un peu de baume au coeur et un fin sourire se dessina malgré moi sur mes lèvres. Je me détournai pour ne pas montrer à quel point cet échange m'avait attendri et fis semblant de m'affairer à ranger ces fameuses copies. Sentir son regard sur moi me fit un effet étrange. Je n'étais plus le jeune homme aveugle et perdu, incapable de comprendre qu'on puisse s'intéresser à lui. Et maintenant il ne m'était plus très difficile de deviner tout ce qu'un coup d'oeil lancé pouvait porter. Comment lui en vouloir ? Plus le temps passait plus j'avais l'impression que nous ne nous étions jamais vraiment quittés.... Mais ce regard changea et avant même qu'il n'ouvre la bouche, je sus que l'ambiance n'était plus à la plaisanterie :

- A propos de samedi après-midi... Il y a deux trois trucs que je voulais savoir.

Je repris mon café pour garder une contenance et me retournai vers lui en prenant soin d'éviter son regard.

- Terumi t'as expliqué notre petit différent depuis que je suis revenu ici ?

J'avais peur de ce sujet. J'avais peur de ce qu'elle avait pu dire de moi. J'étais loin d'être un saint mais dans la bouche de ma soeur j'avais l'impression d'être diabolique... L'air un peu perdu mais surtout embarrassé d'Eijiro me rassura étrangement. Si elle l'avait convaincu d'une façon ou d'une autre de tout ce qu'elle pensait de moi je n'aurais vu que du mépris dans ses yeux.

- Elle a surtout dit qu'elle ne te reconnaissait pas... Je ne m'attendais pas à ce que votre relation se soit détériorée à ce point.

C'était peu dire... Je l'invitai a prendre une chaise et m'assis en face de lui.

- Elle n'a pas digéré le fait que je sois parti si longtemps et que je n'aie pas donner de nouvelles. Je peux la comprendre, je l'ai laissée seule face à des parents aussi perdus qu'elle, et surtout je l'ai laissée seule face à Naraku et toi. Elle a dû avoir l'impression de tout supporter à ma place, et de ne pas pouvoir vivre comme elle l'entendait à cause de mes choix.

Le souffle d'Eijiro s'accéléra et il ouvrit la bouche pour parler. Je l'interrompit d'un geste de la main.

- Ça c'est ma part de torts. Elle a entièrement le droit de m'en vouloir pour toutes ces raisons là. 

Le regard de l'homme face à moi se fit plus grave.

- Mais ?

- Mais... Elle a eu une réaction qui ne m'a pas plu quand je suis rentré. Elle a fait comme si elle allait tout me pardonner, elle m'a proposé de revoir les parents, de m'installer près de chez elle, de faire comme si de rien était. J'ai appris quelque jours plus tard, à la première réunion de famille, que c'était pour mieux m'exhiber comme un traître.

Mes mots pouvaient sembler durs, mais ils étaient amplement justifiés lorsque je repensais aux premiers mois suivant mon retour. J'avais eu droit à tellement de sous-entendus, de remarques acerbes et de "Comment pourrais-tu savoir ? Tu te la coulais douce à New York à ce moment là". Tout ce qu'elle m'a dit parfois devant mes propres parents ne m'aurait pas paru si horrible si elle ne répétait pas inlassablement "Je suis contente que tu sois de retour !" ou encore "Tout va pouvoir revenir comme avant maintenant !".

Je fis une courte pause, j'avais peur de ne pas être clair...

- Je n'aurais pas vu de problème à ce qu'elle m'ignore ou me déteste ouvertement. Je le mérite peut-être après tout. Mais jouer la soeur parfaite et aimante tout en me faisant passer pour un lâche me met hors de moi. Elle n'est pas sincère et ça me rend fou...

A mon grand étonnement, les lèvres d'Eijiro s'étirèrent. Je me sentis rougir ne sachant si c'était à cause de la honte de m'être emporté ou du soulagement que je ressentais face à cette ébauche de sourire.

- ...Tu comprends ?

Son sourire ne se fit qu'un peu plus grand.

- Oui je comprends, ça te ressemble de dire ça.

Comme par mimétisme une moue joyeuse s'étala à son tour sur mon visage.

- Et qu'est ce que tu en déduis ?

Il chercha ses mots un instant, son menton calé contre sa paume, les yeux dans le vague avant de les reposer sur moi.

- Que le comportement de Terumi est bizarre. Je ne dis pas que tu n'as aucun torts hein, mais je crois ta version plus que la sienne. Elle me semble plus cohérente... Tu as une idée de pourquoi elle... déformerait la vérité ? Et de pourquoi elle aurait un double discours avec toi ?

- Je ne suis pas trop sûr... Au début j'ai cru que c'était juste pour se venger, pour me faire du mal et me déstabiliser. Mais j'étais sûrement juste en colère et maintenant je crois que c'est plutôt pour vous protéger, toi, Naraku, même mes parents...

- Elle croit que tu vas disparaître à nouveau ?

- Peut-être, ou alors au contraire elle pense que je ne peux que ramener de mauvais souvenirs et compliquer les choses en revenant. Je n'en sais rien je t'avoue, je ne lui ai pas demandé.

Étrangement son visage se fendit d'une moue amusée.

- Tu m'étonnes... je pourrais peut-être essayer d'éclaircir tout ça ?

- Tu peux essayer mais ne te prends pas la tête. Ce serait pas cool de notre part de te mêler à nos histoires.

Il eut un léger froncement de sourcils et se redressa.

- Ça me concerne un peu quand même... Et puis si tu veux vraiment renouer avec moi et notre enfant il faudra que ça passe par une réconciliation entre Terumi et toi. Elle a pris une place importante dans nos vie tu sais.

La mention de ce simple "notre" fit éclater une bulle de joie dans ma poitrine. Il ne l'avait quasiment jamais dit jusque là et l'idée qu'il pourrait un jour y avoir de nouveau un "nous", quel qu'il soit, me mit du baume au coeur.

- Oui tu as raison, je ne disais pas ça pour te laisser de côté.

- Je m'en doute ne t'en fais pas ! Au fait Katsuki pour samedi prochain... Bon on se verra sûrement avant au boulot, et surtout c'est dans longtemps. Mais je pensais qu'on pourrait aller ailleurs, je sais pas où ? Et comme Shoto ne pourra sûrement pas venir et que je ferai pas la boulette d'inviter Terumi deux fois, je pensais... Enfin comme on a pas mal de choses à se dire, à mettre au point, tout ça, tu ne voudrais pas...

Le voir s'empêtrer me décrocha un sourire tendre et je l'interrompis avant qu'il ne s'embrouille un peu plus.

- Oui on pourra se voir tous les deux si tu veux.

- Ah oui ? Ça ne te dérangerait pas ?

- Tu l'as dit toi même, on joue selon tes règles maintenant. Et non ça ne me dérange pas.

Son air perplexe me fit me demander s'il n'espérait pas que je dise non. Je chassai cette pensée au plus vite, je me faisais des idées, Eijiro ne m'aurait rien proposé qu'il ne veuille pas faire. Et puis il avait raison, nous avions des choses à nous dire tous les deux, juste tous les deux.

- Oh ok, oui c'est vrai... Eh bien on en rediscute ? La pause va se terminer.

J'hochai la tête pour toute réponse et me levai le premier. J'embarquai avec moi les fameuses photocopies.

- Pas de souci, merci pour cette conversation Eijiro. Et merci de me croire.

Il opina du chef a son tour, l'air un peu plus détendu tout en me regardant partir.

- C'est normal. C'était important.

Je ne sus quoi répondre de plus, au moment de passer la porte j'hésitai à me retourner, croiser de nouveau son regard et lui lancer un dernier mot. Un sourire aussi. J'aurais voulu rester un peu plus longtemps car c'était aussi étrange qu'agréable de voir cette distance s'effacer. Mais il était temps de revenir à la réalité.

Je me retrouvai donc à nouveau seul le long des couloirs et dans l'ascenseur, mon paquet de feuilles sous le bras. Les deux femmes qui montaient avec moi se turent immédiatement lorsqu'elles remarquèrent ma présence. Je ne me crispai même plus, trop habitué à ce genre de comportement chez les alphas.

Et ce fut encore pire lorsque j'entrai dans la salle de réunion. Une autre raison pour laquelle j'avais apprécié la compagnie d'Eijiro était que son regard n'était emprunt d'aucune trace de mépris ou d'agacement, contrairement à celui des ces hommes et femmes assis face à moi. La salle était grande si bien qu'on aurait pu croire qu'ils étaient peu nombreux, mais c'était une bonne vingtaine de personnes qui me toisait à la recherche du moindre défaut, de la plus petite raison de dire "Vous voyez ? Il ne mérite pas d'être ici." On ne s'habituait jamais à ce regard là.

Aussi je mis de côté mon orgueil et mon caractère rageur une fois de plus et me contentai de déposer les feuillets sur la table centrale pour qu'ils se servent. Mon regard parcourut l'assemblée.

- Il manque quelqu'un non ?

Un court silence s'ensuivit, le temps que l'un d'entre eux ravale sa fierté et daigne me répondre. Ce fut un homme dans la quarantaine, aux cheveux déjà grisonnants qui se leva pour prendre une feuille et marmonner.

- Kogami a été muté, on attend sa remplaçante.

- Pour Kogami on m'a prévenu. Mais il me semblait qu'elle devait arriver aujourd'hui ?

- Je ne sais pas je ne suis pas ingénieur en chef.

En apparence je ne fis pas l'ombre d'un mouvement, mais au fond de moi je lui arrachais les dents une à une. Il se rassit d'un air satisfait, sachant pertinemment que malgré ma supériorité hiérarchique je n'avais aucun droit de répondre. Heureusement mon humiliation fut de courte durée, un coup de pied dans la porte faisant sursauter toute l'assemblée détourna l'attention de moi.

- C'est ici pour les ingés ? C'est un vrai labyrinthe cet immeuble jvous jure !

L'air perplexe de mes subordonnés me tira une moue satisfaite qui se changea bien vite en rictus de terreur lorsque je reconnus le sourire pointu de la petite blondinette infernale qui se tenait devant moi.

- Oh mais donc t'es vraiment le Bakugou de ma promo ! Le bêta pas vrai ? C'est dingue t'es monté en grade tellement plus vite que moi. Comme quoi faut arrêter de se plaindre des inégalités !

Sur ces mots qui me firent paniquer, Himiko Toga prit place en secouant les mèches folles de ses petits chignons, l'air toujours aussi déjanté. Je serrai les poings devant cette entrée fracassante. Je n'aimais pas cette fille, je ne l'aimais déjà pas pendant ma dernière année de prépa que nous avions partagé. Elle était trop extravagante, trop bruyante, trop curieuse, et surtout maintenant elle était trop proche du moment où j'avais changé de classe. Que se passerait-il si elle se rappelait des incohérences dans mon dossier ? Ou des rumeurs ? Et si elle décidait de parler de moi à un collègue ou même un supérieur ?

Je me forçai à ne pas y penser, à diriger ma réunion comme prévu. Je tentai de me dire que son petit sourire fou lorsqu'elle m'écoutait parler venait simplement du fait qu'elle s'amusait de me rencontrer là, ou qu'elle avait une autre raison propre a son cerveau bizarrement foutu. Malgré tout mes mains tremblaient un peu, et ma voix me paraissait un peu trop aiguë. Je ne voulais pas être découvert, je ne voulais pas qu'on apprenne que j'avais menti, pas comme ça. L'angoisse me monta à la gorge tant que la fin de la réunion me fit souffler de soulagement. La sensation d'être pris au piège s'atténua un peu mais remonta en flèche lorsque la jeune femme partit en me faisant un signe de la main.

- Au revoir "Monsieur" Bakugou !

Je restai un instant seul dans la salle, le coeur battant la chamade. Tout à coup les mots de Mr. Stain me revinrent en tête, me faisant l'effet d'un coup de poing.

"L'étau se resserre."

********
Bonjour ( bonsoir ? ) !!

Mon dieu je suis désolée pour tout ce temps sans chapitre ! Évidemment les raisons sont simples : le temps, les cours, les devoirs... Mais tout de même je m'en excuse et j'espère que ça ne vous a pas embêté ^^'

J'admets ne pas avoir grand chose de plus à dire... Ce chapitre est court, pas très satisfaisant mais je suis en train d'écrire le suivant donc il devrait arriver plus vite !

Sur ce bonne journée ( soirée ? ) et bonne lecture sur Wattys !

Patatarte-chan 🎩

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