VIII
PDV Katsuki :
Je me levai bien plus tôt que d'habitude. J'avais le sourire aux lèvres dès le matin, ce qui était rare avec moi, et ce pour une simple raison : Tête d'orties allait porter toute une semaine une pancarte « Free Kiss ». J'avais vraiment hâte de le voir tout rouge et forcé d'embrasser n'importe qui.
Même si je faisais partie des vainqueurs du terrible donjon de fin de jeu qu'était la piscine municipale, c'était Momo qui avait trouvé le gage. Bien évidemment, j'avais imposé que ce soit lui qui reçoive une punition, après tout il avait évité délibérément de me regarder pendant tout le cours et je n'appréciais pas qu'on m'ignore. Ochako s'était faite toute petite et Tsuyu avait approuvé.
La jeune brunette me faisait vraiment de la peine. En temps que bêta, elle craignait tout le reste de la classe et s'était confortée dans l'idée qu'il valait mieux qu'elle se taise et qu'elle écoute les grands alphas parler. Du coup, la pauvre se retrouvait manipulée par Izuku qui profitait de sa soumission et de sa timidité avec un sourire innocent. Il n'était pas forcément le seul à apprécier et tirer un peu profit de la gentillesse de la brune, mais il en abusait assez souvent. D'autant plus qu'elle avait vraiment du mal à dire non de peur de mal se faire voir.
J'avais pendant un temps tenté d'aider Ochako à se sortir de cette situation assez inconfortable. Mais je compris finalement qu'elle agissait ainsi sans être dérangée outre mesure et qu'elle arrivait tout de même à se reposer sur certaines personnes de la classe.
Elle m'avait montré une autre façon de s'éviter des ennuis. Et bien que je n'approuvais pas vraiment cette méthode, elle me montrait que chacun se débrouillait comme il pouvait pour survivre dans ce milieu hostile qu'était le lycée Yuei.
Je sortis de chez moi toujours avec le même sourire sadique ce qui inquiéta fortement Terumi. Elle se levait bien plus tôt en ce moment et travaillait tard le soir. Sa première période d'examens avait beau approcher, je craignais tout de même qu'elle se surmène.
Je me dirigeai non pas vers l'école mais vers la jolie et grande demeure de la famille Kirishima. J'avais le temps et je voulais être sûr que mon ami accomplissait son gage dans les règles.
Je m'apprêtai à sonner à la grande porte en bois sombre de la maison quand celle-ci s'ouvrit dans un bruit sec. Je tombai nez à nez avec le hérisson qui me regarda d'un air surpris. Je remarquai alors qu'une ficelle rouge passant derrière sa nuque maintenait un joli morceau de carton taillé en rectangle où étaient inscrits au stabylo rose « Free Kiss » le tout accompagné d'un petit cœur. Je ne pus retenir un fou rire en le voyant avec son placard ridicule sur le torse.
- Je pensai pas que tu pourrais avoir l'air plus con que d'habitude !
- À qui la faute ?
Eijiro rit quelques instants avec moi avant de me regarder d'un air joueur qui m'amusa plus qu'autre chose. Ses lèvres s'étirèrent en un demi-sourire qui se voulait sûrement charmeur mais dont la crédibilité était mise à mal par le carton tagué en rose bonbon.
- Tu viens pour être le premier à profiter de mes services ?
Je ris de plus belle. Bien évidemment, j'étais tenté de profiter de son gage pour gouter les lèvres pleines dont provenait une si jolie voix. Mais je savais aussi que j'avais trop de fierté pour l'admettre et surtout que si ce con voulait un baiser, il aurait du me mater à la piscine. Il ne pouvait pas faire comme tout le monde ? Même Shoto y était passé !
Je poussai sa tête vers l'arrière comme pour le maintenir loin de moi. Il se recula pour éloigner ma main plaquée sur son visage.
- Nan, je laisse à un autre ce privilège !
- Tu sais pas ce que tu rates...
- Pas grand chose je pense !
Il fit une moue irritée qui m'arracha un nouvel éclat de rire et nous nous dirigeâmes ensemble vers le lycée. Plusieurs personnes dans la rue lançaient des œillades amusées à notre duo. Une femme ayant environ la cinquantaine s'arrêta pour nous regarder passer en disant.
- Comme quoi, les temps ne changent pas vraiment. Je faisais déjà ça à mon époque !
Nous lui répondîmes d'un signe de tête amusés et poursuivîmes notre chemin jusqu'au grand portail de l'établissement.
Et là.
Ce fut la ruée.
Toute une troupe d'ados qui patientaient dans la cour et que nous ne connaissions ni d'Eve ni d'Adam se jeta presque sur nous. Je me fis bousculer et projeter au loin par ce raz-de-marée humain en manque d'amour.
Le porc-épic fut alors entouré par une flopée d'étudiants, tous voulant accaparer pour quelques secondes ses lèvres avant le début des cours.
Dans le fond je les comprenais, Eijiro était plutôt beau et méga bien foutu, mais autant de gens d'un coup ? Quelqu'un avait dû les prévenir ce n'était pas possible autrement.
Et en effet, en me retournant, je vis Denki et Kyouka hurler de rire leur portable à la main. Je reçu alors une notification toute bête.
« Kyouka vous a ajouté au groupe Tous sur Eijiro !!! »
La gamine haute comme trois pommes me rejoignit en sautillant, un immense sourire plaqué sur les lèvres. Elle jeta un coup d'œil à la ribambelle de filles et de garçons venus récupérer leur baiser tandis qu'Eijiro embrassait à tout va. Pourquoi il posait la main sur la nuque de tout le monde comme ça ? Il en rajoutait là ! C'était un honteux manque de professionnalisme ! En plus pour un tout petit baiser... Il abusait totalement.
J'étais dégoûté et je compris bien trop tard que le gage que j'avais trouvé génial se retournait contre moi.
La sonnerie retentit enfin me libérant de mon calvaire. Notre camarade se tourna vers nous le sourire aux lèvres.
- Je sais que je suis beau comme un dieu mais à ce point ? Vois avez manigancé quelque chose c'est pas possible !
Les deux comparses pouffèrent et lui montrèrent le groupe. Momo et Shoto arrivèrent à ce moment précis. Momo sourit apparemment très fière de son gage.
- Alors ? La foule en délire s'est calmée ?
Je grognai.
- Ouais et on est en retard à cause de ses conneries.
Elle me lança un regard plein de sous-entendus que j'ignorai royalement. Puis elle se mit sur la pointe des pieds pour attraper le menton d'Eijiro. Cette fille était de celles qui faisaient se sentir tout petits, je ne serais même pas étonné si Shoto se retrouvait en dessous lors de leurs premiers ébats. Toute la petite bande la regardait plonger son regard rieur dans celui assez étonné du hérisson.
- Dites-moi garçon, est-ce que c'est service illimité chez vous ?
Il lui sourit comme le meilleur des tombeur et rapprocha son visage. Shoto fulminait et il était fort possible que ma mâchoire se soit décrochée tant j'étais ébahi. Denki se roulait par terre en voyant nos têtes.
- Normalement non, mais pour d'aussi jolies lèvres, je peux bien faire une petite exception...
- C'est trop gentil !
Et comme ça, après leur petit jeu pourri, elle lui vola deux smacks du bout des lèvres ce qui acheva de faire exploser le bicolore.
- Momo ?? Pourquoi tu fais ça ??
- C'est des bisous et c'est le jeu ! Pourquoi t'es jaloux ?
Elle glissa doucement la main dans la ceinture de son pantalon, à la vue de tous, enfin, vu que nous étions en retard, il n'y avait plus grand monde. Et dire que nous avions Mr.Aizawa juste après... ce n'était vraiment pas le bon jour. Double-face vira au rouge mais se laissa faire quand elle remonta un peu sa chemise afin de mieux palper la peau nue de son ventre tout en l'embrassant. Je soupirai en me disant qu'ils n'avaient vraiment aucune pudeur.
- Ban, pendant que ces deux tourtereaux nous façonnent une œuvre pornographique dans une cour de récré, on va en cour ?
Les compères acquiescèrent et nous nous rendîmes donc tous les quatre en salle H_154 où devait se dérouler le cours le plus fatigant avec le professeur le plus fatigué.
Notre entrée fut saluée par un tonnerre d'applaudissements. Le prof fut abasourdi par autant d'énergie pendant ses explications.
- Qu'est ce que vous foutez ici à cette heure ?
- Désolés du retard Monsieur.
- Kirishima c'est quoi ça ?
Il pointa du doigt la pancarte comme si c'était l'objet du démon. Il fallait avouer que l'affection et lui ça faisait dix mille alors des free kiss... Denki attrapa Tête d'ortie par le col et se tourna vers la classe.
- ÇA MONSIEUR ?? C'est mon premier baisé... GRATTTTTTIIIIIIIIIIISSSS !!!
Et sans plus de préambule. Il tira encore un peu sur le col et posa ses lèvres de pokemon foudre sur celle de Eijiro dans un grand bruit de claquement tout bonnement horrifiant.
- Mouah~ !
Il se tourna alors vers l'assemblée.
- Pour la petite confession, c'était le deuxième. Hanta, la primaire, toi même tu sais !
Le grand brun vira au rouge devant le manque de gêne de son ami d'enfance qui éclatait de rire sous le regard assassin du prof. Il devait sentir son cours lui filer entre les doigts. Mais Pikachu ne s'arrêta pas là.
- Mesdemoiselles, Messieurs, il a les lèvres toutes douces alors... RÉGALEZ-VOUS !!
Ce fut à ce moment là que je compris que ma semaine sensée être jouissive allait devenir un véritable enfer. Et en effet, il ne me fallut qu'une heure pour trouver cela agaçant, un jour pour bien le faire sentir à tout mes proches, et trois pour être carrément enragé vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Au point que vers la pause midi du troisième jour, il m'était difficile de parler sans vociférer :
- DÉGAGE !!
- Pourquoi t'es bougon ?
Je pianotai rageusement sur mon téléphone portable. Kyouka jouait à l'enfant et me collait littéralement aux basques. Par là j'entendais qu'elle avait passé les bras autour de mes chevilles et qu'elle n'en décrochait pas.
Mais ma mauvaise humeur n'était évidemment pas due au pot de superglue fermement agrippé au bas de mon pantalon. Elle avait pour raison principale les quelques personnes qui, pendant la pause de midi de cette fraîche matinée de novembre, volaient les lèvres de mon ami, sans mon accord.
Nous n'en étions qu'à la moitié de la semaine et je devais me rendre à l'évidence. Je crevais de jalousie.
D'autant plus que je me refusais de l'embrasser malgré l'envie permanente et envahissante dans le seul but de faire rager le porc-épic. Ce qui ne semblait absolument pas marcher puisque le garçon avait l'air d'être le plus heureux du monde avec sa stupide pancarte autour du cou. Je ferais tout pour pouvoir annuler ce gage maudit qui me mettait au supplice.
Kouyka me mordit le mollet.
- AIE MAIS T'ES MALADE ?
- Pourquoi tu rages ?
- J'ai ragequit le ventre de ma mère parce que ça me soulait de pas pouvoir respirer et tu me demandes ça ?
- T'es serré du cul toi. T'es sûr que tu manques pas d'affection ? Raconte-moi ton enfance Katsuki.
- Ta gueule Kyoukasticot. T'es aussi crédible en psy que moi en prof de yoga.
- Tu veux un bisous ? Eijiro peut t'en faire tu sais. Il sait faire que ça en ce moment.
- Tête de chardon il peut se fourrer ses bisous de merde dans le postérieur épais de sa daronne.
- Que de blasphèmes... Je suis sûre que t'aimerais bien en plus.
- Va te faire foutre par un écureuil espèce de Tête de cul.
- Tu sais que les gens violents sont ceux qui sont à court d'arguments ?
Je ne déniai même plus répondre et me contentai de lui taper rageusement le haut du crâne avec mon cartable. D'après les scientifiques, ça faisait perdre des neurones, mais elle était tellement bête que je n'avais vraiment rien à craindre pour son QI.
Le reste de la mauvaise troupe nous rejoignit sur la table et Eijiro se posa en soupirant. Un silence pesant s'installa autour de la tablée. Une chose terrible était survenue, une chose qui expliquait la présence de mon amie lilliputienne sur ma jambe, une chose qui nous faisait comprendre tous les malheurs du monde, une chose qui révélait enfin pourquoi One Piece était infini et pourquoi Sirius Black était mort.
Denki et Kyouka, les amis de délires, les compères inséparables, s'étaient disputés.
C'était un moment tragique. Les deux enfants qui avaient quand même réussi à s'engueuler sur une histoire de Disney se faisaient la tête et se retrouvaient donc chacun à un bout de la table rectangulaire.
Du coup personne n'osait déclencher une bataille de petits pois pourtant bien méritée. Et des petits pois à la cantine sans bataille, c'était la preuve d'un grand désespoir.
Les secondes s'écoulèrent. Puis les minutes.
J'avais une furieuse envie de me prendre des pois verdâtres pleins de sauce industrielle sans ingrédients précis dans la tronche.
- Oh et puis merde.
Je pris ma fourchette et tirai.
Ce fut le carnage.
Tout volait dans tous les sens, la table des SN-K juste à côté s'y était mise et tout le monde tapait sur tout le monde. Une certaine Annie s'était pris la carafe dans la tête ce qui n'était pas pour arranger son nez déjà assez conséquent. Les deux fous de la dernière fois attrapaient les pois au vol pour mieux les gober, un des miens atterrit dans l'œil du chauve. Un petit blond au carré médiéval agitait sa cuisse de poulet comme une arme de guerre. Mais où diable avait-il pu se procurer du poulet ce petit bâtard ?
La grande bataille, qui nous valut à tous d'être virés de la cantine pour une semaine, avait eu le mérite de réconcilier les deux abrutis. Ils avaient ensemble fait front dans le camp adverse tels les frères d'arme sans peur et sans reproches qu'ils étaient.
Mais mon initiative avait fait des dégâts. Nous étions plusieurs à nous bousculer devant les lavabos des toilettes pour retirer les débris de sauce et de yaourt de nous cheveux et de nos vêtements. Comme quoi, il fallait arrêter de penser que les lycéens étaient matures.
- Eh mec c'est quoi la pancarte que t'as autour du cou ?
C'était un grand type châtain avec une tête de cheval qui avait parlé. Eijiro que j'épouillai minutieusement de tous les pois coincés dans sa coupe démentielle se retourna sans aucune considération pour mon travail. J'allais me mettre en grève si il continuait, déjà qu'il bougeait tout le temps.
- Oh ça ? C'est parce que j'ai reçu un gage. Je fais des Free Kiss à tout va pendant une semaine !
Je grognai devant son enthousiasme. Un type presque aussi petit que Kyouka s'approcha de lui. Eijiro le dépassait de plus d'une tête ce qui était particulièrement drôle.
- Ah ouais ? J'peux en avoir un du coup ?
Il avait parlé sur un ton blasé qui m'horripila au plus haut point. Encore un qui allait en profiter. Je m'apprêtai à sortir rageusement quand Eijiro se prit un magnifique coup de pied dans les parties.
- Tsk. T'es trop grand.
Et le brun lui roula un patin sans plus de cérémonie. J'en perdit mes mots, partagé entre fou rire et larmes. Du coup je pleurais de rire devant tête d'ortie qui se tenait les castagnettes tout en roulant une galoche à un nain. J'étais encore plus bas que lui puisque j'étais littéralement plié en deux.
- Allez. Salut gamin.
La plupart des élèves de SN-K le suivirent en riant et en faisant des blagues sur sa taille. À en juger par le comportement du garçon aux cheveux noirs, je ne donnais pas cher de leur peau. Eijiro qui était encore au sol me regarda avec un sourire crispé.
- Ce sont les aléas du métier mon gars.
Je lui tendis la main en riant, l'étirement de ses lèvres se fit un peu plus visible.
Le reste de la semaine continua ainsi, entre les fous rires qu'apportaient la situation d'Eijiro et ma rage de ne pas pouvoir en profiter.
Nous arrivions au bout du septième jours soleil et face à nous le soleil se couchait, nous étions tous les deux sur un trottoir sale. Tête d'ortie triturait la ficelle bleue de sa pancarte. La rouge avait lâché le cinquième jour et il avait fallu la remplacer.
Aujourd'hui, cette torture prenait fin. Eijiro subissait son dernier jour de Free Kiss. Ce n'était évidemment pas pour me déplaire. Mais je n'en disais rien et me gardai surtout de répondre à toutes ses petites provocations. Comme par exemple le fait que dès qu'il embrassait en ma présence, il me regardait droit dans les yeux. C'était tout simple et je tentai de l'ignorer mais cela me remueait vachement plus que je ne le croyais.
Mais ignorer ses lèvres dont un bon quart du lycée vantait les mérites pendant une semaine avait finit par produire son petit effet. Le hérisson semblait lui aussi mourir d'envie que je fasse comme tout le monde et profite de l'occasion.
Mais je n'en faisais rien. Nous étions à cinq-cent mètres du carrefour où nous nous séparions, et aucun de nous deux n'évoquait l'idée d'un baiser pourtant bien présente dans l'air. La tension était si palpable que j'aurais pu la couper au couteau. Mais nous étions l'un comme l'autre décidés à ne pas céder et le moment de se quitter approchait à grands pas.
Une jeune fille très grande et très fine nous arrêta alors. Elle portait de grandes créoles en or sur sa peau brune et une jolie écharpe claire pour mettre en valeur son tain. Personne ne pouvait nier qu'elle était très belle.
- Salut !
- Salut ! Ça va ?
S'aurait été la conversation la plus étrange et la pas étonnante de toute ma vie si mon ami ne portait pas sur le torse un panneau impliquant que n'importe qui pouvait lui bouffer la bouche.
- Ta pancarte. On peut vraiment la faire ?
Le garçon à côté de moi eut un sourire en coin et me coula un regard pas discret du tout. Il était insupportable parfois.
- Bien sûr ! Tu veux en profiter ? Ça ne tiendra plus dans une heure !
Il avait sorti son sourire de tombeur avec toutes ses dents dehors. Je me sentais un poil de trop, étrangement. La jeune fille minauda et lui rendit son sourire. La drague ambiante me mettais mal à l'aise et pourtant dieu savait que j'aimais jouer avec le hérisson.
- Oh je serai dans les dernières ? Quelle chanceuse je fais !
Et pour la énième fois, il plaqua les lèvres de quelqu'un d'autre que moi contre les siennes. Je les voyais bien se mouvoir légèrement et doucement contre celles plus fines de sa partenaire de quelques secondes. Je ne pus m'empêcher de passer ma langue contre les miennes. Je rêvais de leur goût, leur image me hantais, je m'imaginais leur touché le soir avant de dormir et je regrettai aussitôt. Je le vis me fixer encore une fois puis fermer les yeux et j'eus très mal. Les secondes me parurent des heures tandis qu'une frustration folle s'emparait de mes tripes. J'envoyai au diable toutes mes résolutions pour lui mettre la misère. Je me laissai emporter. Je voulais l'embrasser contre ce foutu mur à la place de cette foutue fille. Je voulais le sentir approuver cette démarche et lui faire oublier les dizaines d'autres personnes passées avant moi. Je voulais aventurer mes lippes dans chaque recoins de ses lèvres pour y découvrir tous les endroits encore inexplorés où aucun ne s'était attardé. Je le voulais pour moi. Rien que pour mon plaisir et sans qu'il y ait de gage qui tienne.
Alors quand elle partit enfin, une expression heureuse placardée sur la face, je n'hésitai pas. Je le poussai jusqu'à ce que son dos soit bloqué par le mur d'un petit immeuble de la vieille ville.
- Retire cette pancarte.
- Katsuki...
- Retire moi cette foutue pancarte !!
Il s'exécuta en silence, me regardant droit dans les yeux. Je le fixai les bras croisés, le regardant la déchirer en petits morceaux et la laisser tomber à ses pieds.
- C'était ça que tu voulais depuis le début pas vrai ?
Je hochai la tête, plus si sûr de moi. Pourquoi me comportais-je comme un enfant de deux ans qui avait dû prêter son jouet ?
- Qu'est ce que tu attends ?
Il avait dit ses mots avec désinvolture, il avait gagné et il le savait très bien. Alors j'arrêtai de lutter et je m'avançai pour laisser mon visage se rapprocher dangereusement du sien.
Puis ce fût un soupir, un frôlement. Un frisson tenu entre nos deux bouches se cherchant encore même à cette distance.
Et nous nous embrassâmes, sans gage, sans que rien de soit fait pour le jeu, avec pudeur, sans rien forcer. Comme si cet équilibre fragile que nous instaurions pouvait éclater en milliers de morceaux de verres à chaque seconde de plus où ses lèvres se baladaient sur les miennes. Où mes mains fouillaient dans ses cheveux à la recherche de ma raison égarée. Où ce qui nous sépara furent nos souffles rendus saccadés par un pourtant si simple contact.
Je m'éloignai de lui à contrecœur, mes mains lâchant ses cheveux pourtant restés intacts.
- À partir de maintenant tu n'as plus la moindre excuse pour embrasser quelqu'un d'autre que moi.
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