Lui
C'était un jour d'automne. Quand les nuages et la brume sont de sortie.
Les rues étaient bondées, en dépit du vent et de la bruine, qui étaient bien décidés à importuner les passants. La tristesse du temps avait l'air de déteindre sur les habitants. La mine des badauds était tout aussi sinistre que les immeubles qui les surplombaient.
C'est au milieu de cet océan de mélancolie, qu'un jeune homme, le visage emmitouflé dans une longue écharpe rouge, avançait d'un pas vif en direction d'un parc. Il était grand, plaisant à regarder et paraissait agréable à vivre. Il avait l'air pressé, préoccupé, mais en même temps perdu dans ses pensées.
Se battant contre le vent, il parvint enfin à atteindre l'entrée du parc. Essoufflé par son trajet, il regarda sa montre. Il était à peu près onze heures du matin. Alors qu'il se dirigeait vers l'étang, il se retrouva nez à nez avec elle.
Cette rencontre le fit sourire, il la reconnaissait, renfrognée dans son éternelle parka rouge qui la rendait minuscule.
Ils se regardèrent un moment sans un mot. Les yeux de la jeune femme paraissaient fatigués, elle avait dû beaucoup pleurer. Son maquillage avait coulé le long de ses joues blafardes, ses cheveux blonds étaient en bataille, lui donnant un air sauvage. Ce contraste la rendait magnifique malgré la situation.
Enfin, elle rompit ce silence pesant avec quelques phrases presque inaudibles. Le sourire de l'homme disparaissait à mesure qu'il l'écoutait et le ton de sa réponse trahissait son énervement. La dispute ne dura pas longtemps, car la jeune femme se mit à pleurer. Attristé à son tour, l'homme lui offrit l'abri de ses bras et un mouchoir. Pour apaiser son cœur et sécher ses larmes. Il la guida jusqu'à son propre appartement pendant qu'elle lui en disait plus sur ce qui l'avait mise dans cet état.
À peine arrivée elle se débarrassa de son manteau et se dirigea dans la cuisine pour prendre une bouteille d'alcool, qu'elle déboucha pour s'en abreuver. Elle se laissa tomber sur le canapé. C'était comme si elle vivait là avec lui depuis des années. Vêtue d'une jupe en vinyle et d'un simple pull trop grand pour elle. Elle regardait par la fenêtre. Son regard morne en disait long. Elle semblait essayer de rendre la bouteille et sa tête aussi vide que ses yeux.
Lui restait là, immobile, à la regarder, leurs manteaux dans les bras. Le fait de la voir à cet endroit précis, dans cette tenue précise le rendait heureux. Il lui avait offert ce qu'elle portait, et maintenant, il lui offrait son toit.
Après avoir enfin rangé leurs vestes il prit place à ses côtés sur le canapé. Il se décida à entamer une discussion. Mais au vu de sa réaction il était évident qu'elle n'en avait aucune envie. Il voulu la regarder dans les yeux mais la crainte de se trahir l'en dissuada. En effet, les yeux du jeune homme étaient eux aussi fatigués et abattus. Le soulagement de la retrouver ne suffisant pas à éclipser son accablement et son éreintement.
Elle posa sa tête sur son épaule, et tout en lui caressant les cheveux, il tentait de trouver les mots ; le regard posé sur une photo d'eux plus jeunes, trônant sur sa table basse comme unique décoration. Un sourire maussade passa sur son visage. Qu'est-ce qu'ils avaient l'air heureux là-dessus. Leurs rires complices n'auraient pu laisser présager un si sombre avenir.
Derrière le cadre, on pouvait y lire, en dessous du premier mot manuscrit :
"Je serai toujours là, quoi qu'il arrive."
Pierre.
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