Chapitre 9
Syml - Where is my love ou Jérome Rebotier - Mercédès
Alexandre n'en savait rien. Il ne savait pas qui allait l'interviewer et pourtant il rêva de Margot cette nuit-là. Le destin avait décidé de lui envoyer des signes plutôt clairs mais pourtant, il ne parvenait pas à les décrypter. Il avait pensé que Eurydice allait lui permettre de franchir un pas, de s'échapper de l'image du souvenir de Margot en l'assumant pleinement. Seulement ce souvenir n'était pas destiné à en rester un. Alexandre ne pouvait pas s'empêcher de se demander ce que Margot avait pensé de sa nouvelle œuvre. Eurydice. L'avait-elle même seulement écoutée ?
Il ne pouvait s'empêcher d'imaginer les différentes réactions qu'avait eu sa muse et cela lui fit tristement réaliser qu'ils s'étaient réellement bien connus en seulement quelques mois. Il se souvenait de son anniversaire, des cicatrices qu'elle portait sur son corps, et même de sa couleur préférée. Ce n'était pas anodin que la couverture de album contenant Eurydice était entièrement coloré de nuance de vert. Ce n'était en aucun cas une référence au serpent qui mordit la nymphe. D'un certain point de vue, si, car la nymphe d'Alexandre, c'était Margot.
Au contraire, Margot savait en partie à quoi elle devrait s'attendre le lendemain. Elle redoutait ce moment et pourtant elle était aussi dans un flou partiel. Ça va aller, elle se répétait en pensant que plus elle persistait plus il y aurait de chance que ce soit vrai. Son sommeil était perturbé, entre sa difficulté à s'endormir et les pensées qui tourbillonnaient dans sa tête. Son excitation était palpable, car elle sentait son cœur battre comme un fou à la simple idée de revoir le chanteur.
Ça va aller
Cependant cette éréthisme était trop vite rattrapée par sa nervosité que Margot ne parvenait pas à dompter. Elle se tourna et se retourna dans son petit lit une place tout en serrant inconsciemment son oreiller et en maltraitant sa couette de toutes ses forces.
Ça va aller
Sa respiration était instable, elle accélérait et puis elle parvenait à se stabiliser, Margot entendait son cœur se frapper contre sa cage. Elle ne pouvait le blâmer de vouloir sortir et éviter cette humiliation. Le pire dans tout cela était que, ils allaient forcément évoquer, Eurydice, la chanson dont elle était sure qu'il avait écrite en souvenir d'elle. Et d'eux. D'un coté elle voulait entendre comment il allait en parler, et elle demandait aussi si il assumerait en la voyait. Bien sur que non. Cela embraserait la toile, et bien que les Maelström n'avaient jamais cherché à confirmer la rumeur de couple entre Mélanie et Alexandre, ils voulaient à coup sur continuer de surfer sur ce buzz. Il leur profitait à tous les deux de plus. Ainsi pendant qu'ils parleraient d'Eurydice Margot allait devoir faire comme-ci ce n'était pas de elle dont il parlait, alors qu'elle serait en train de brûler de l'intérieur.
Ça va aller
Ses muscles étaient tendus comme si elle était prête céder à la moindre émotion. Les nœuds se formaient dans son estomac. Ses mains étaient moites, elle les passa machinalement dans ses longs cheveux lisses, les torsadant nerveusement. Mille et une questions l'assaillaient et l'empêchaient de trouver un instant de paix.
Ça va aller
Margot s'était faite une promesse il y a trois ans qu'elle avait peur de ne pas réussir à tenir : elle vivrait son rêve de journaliste peu importe ce que deviendrait Alexandre. Encore une fois Margot n'eut pas le choix des circonstances, elle était comme un surfeur, forcée à suivre la vague pour la ramener aux cotes. Elle n'avait pas assez de force pour aller à contre courant. Cependant dans cet état, elle se fit une autre promesse : celle de tenir la première le lendemain. De cette façon, elle était persuadée que tout irait.
C'était une chose qu'Alexandre et elle avaient en commun, les promesses étaient sacrées sinon il valait mieux ne pas en faire du tout.
Ça ira, je me le promets.
Avant le début de l'interview le groupe se réunit en avance dans leur loft commun à Londres bien que chacun avait préféré passer la nuit dans leurs appartements respectifs. Il devait être dix huit heures lorsqu'ils laissèrent tomber la composition musicale. Jusqu'ici c'était plutôt mauvais ce qu'ils avaient composé. Jusqu'à dix neuf heures ils se firent maquiller pour les caméras présentes pendant que Marc leur donna le traditionnel le speech d'avant interview. Alexandre savait qu'il y aurait trois journaux numériques différents : les trois plus conséquents d'Angleterre qui voulaient absolument joindre des vidéos à leur article. Ils seraient tous présent : Marc et Claire seraient dans les backrooms pour s'assurer de la bonne tournure des événements. C'était le grand jour que Margot attendait, tandis que pour Alexandre, c'était de la routine qui l'agaçait.
Chacun des trois journaux disposait de leur propre équipe vidéo. Il avait Natasha Nicholas du Velvet Rope : c'était une grande brunette aux cheveux très bouclés, très classe en toutes circonstances et Edward Clinton, un moustachu à l'allure grognon mais plutôt sympathique d'Elegance. Natasha aussi avait ramené sa stagiaire, Abigail qui devait avoir le même age que Margot, ce qui la rassura un peu. Dans la salle commune, ils parlaient tous ensemble mais Margot n'arrivait pas à prononcer un seul mot, elle ne tenait pas en place.
- Ça va bien se passer, t'inquiète pas, la réconfortait Georges, qui n'a en réalité aucune idée d'à quel point Margot se contenait, la gorge nouée elle lui fit simplement un léger signe de tête. Ah et j'ai préparé quelques questions, lui annonça gentiment Georges.
Ça va aller
- Pour moi ? Elle lui demanda, en écartant grandement les yeux, elle déglutit aussi silencieusement qu'elle le put.
Ça va aller
- Oui, il dit enjoué, tiens, il dit en lui tendant cinq petites cartes faces cachées.
Ça va aller
Margot se sentait mal, elle était en réalité à deux doigts de dire à Georges qu'elle ne pourrait pas le faire. Sa phrase resta coincée au fond de sa gorge, elle s'était faite une promesse : celle de ne pas craquée, alors elle se résigna. Cela lui donna un second souffle. Georges était avec elle, ils étaient en tout cinq interviewers, et cela la rassura. Pour se rassurer, elle relut les messages que Jules lui avait envoyés la veille, elle souffla et se força à reprendre le dessus sur ses émotions. Elle tremblait toujours comme une feuille mais elle parvenait au moins à le rendre moins visible. Elle prit le temps d'aller se rafraîchir un instant avant d'aller s'installer sur les chaises qui leurs étaient dédiées.
Les Maelström n'étaient pas encore arrivés et cela permis encore une fois à Margot de se préparer à ce qui allait arriver. Elle allait feindre l'indifférence. Elle s'assit entre Georges et Abigail sur la première rangée de chaise, car elles étaient très petites comparée à Natasha sur ces échasses bordeaux et Edward, qui leur mettaient bien au moins une tête de hauteur. On leur donna quelques consignes durant lesquelles Margot serrait ses cartes de la même manière qu'elle avait comprimé sa couette et son oreiller la nuit dernière.
Ça va aller
- Eh ? Ça va ? Lui demanda gentiment Abigail.
Ça ira, je me le promets.
Margot ne devait pas avoir l'air abattue bien qu'elle simulerait indifférence : elle savait qu'une partie allait être enregistrée par une camera pour leur journal, elle devait avoir ce mindset. Elle n'eut pas le temps de répondre à l'autre stagiaire que le bruit des portes se fit entendre. Ils venaient d'entrer, et Margot ressentit un pic de stresse, son cœur loupa un battement lorsqu'elle vit Alexandre.
Il n'avait pas changé, et pourtant, tout avait changé. Elle. Et eux. Lorsqu'il posa ses yeux sur elle, elle vit une lueur d'étonnement qui se transforma en un regard distant. Il resta stoïque. Elle baissa la yeux, c'est ce qu'elle pensait : il n'avait plus rien en commun. Alexandre resta relativement impassible contrairement aux autres membres qui adressèrent un rapide sourire poli à l'ensemble des interviewers avant de les saluer un à un. Un frisson la parcourut. Le temps sembla s'arrêter.
Ils ne s'étaient pas contactés pendant trois longues années, ils ne s'étaient même pas dit au revoir correctement, et ils allaient maintenant devoir se serrer la main.
Margot se leva machinalement comme si un fil invisible la tirait vers lui. Margot, ta promesse. Chaque pas était une épreuve. Elle se sentait à la fois légère comme une plume et lourde comme du plomb. Ses mains tremblèrent légèrement lorsqu'elle lui tendit la main. Il fit mine de rien et l'accepta d'un geste automatique, leurs doigts se frôlèrent un instant en provoquant un choc électrique à chacun des deux anciens amants. Les yeux d'Alexandre étaient perçants, perdus en train de détailler discrètement le visage de Margot qu'elle ne parvenait pas à affronter.
- Alexandre Lambert des Maelström, il dit en copiant la manière avec laquelle Amine salue Abigail, il retint ses dents de grincer.
- Margot Rousseau du Tinseltown, elle répondit de manière presque aussi détaché avec un léger accent français tout en relevant la tête pour lui lancer un regard glacial remplis de mélancolie, car elle savait qu'il le savait déjà.
Margot retint un hoquet dans le fond de sa gorge, son cœur en prit encore un coup, troisième trahison, mais Margot tacha de le cacher autant qu'elle le put. Elle se souvenait encore de comment ils s'étaient rencontrés. C'était dans un bar, l'alchimie passait bien et quand elle lui avait dit son prénom il lui avait demandé : Comme le vin ou l'actrice ? Elle lui avait répondu en souriant : Comme l'actrice, et il lui avait confessé : Tant mieux, je préfère les demoiselles aux vins. Ils avaient continué à parler et avaient fini par déguster un verre de Margaux sur le balcon d'Alexandre. Voila comment avait débuté leurs fameux trois mois de relation.
Ils s'étaient bien connus, et maintenant ils se saluèrent comme des inconnus. Pour Margot, la couleur de cet entretien avait été annoncé. Ce serait rouge, comme le sang versé lors de guerre.
Ça va aller
Alexandre n'en revenait pas. Des frissons s'aventurèrent le long de sa colonne en partant de sa main, et plus précisément des endroits ou Margot avaient déposé la sienne. Alexandre ne voulait rien montrer cependant la personne qui peuplait ses nuits et ses rêves se trouvait face à lui. Il la trouva plus belle qu'avant. Il avait envie de lui relever la tête, car il devina que Margot était mal à l'aise de la situation, et de l'enserrer dans le creux de ses bras. Comme la dernière nuit. Il essaya de rester professionnel malgré tout, mais il savait qu'Hugo et Étienne allaient vite le démasquer. Il avait besoin d'aller se nettoyer l'esprit, de se réfugier ailleurs, cependant cela éveillerait les soupçons de ses amis. Il ne l'oubliait pas, il avait, lui aussi, une promesse à tenir. Il se sentait à la fois vivant et mort, emporté par un tourbillon d'émotions contradictoires, Alexandre avait l'impression d'être pris en étaux.
Ça va aller
Mais Alexandre ne pouvait pas. Il ne pouvait pas se permettre d'encore générer un fiasco. Autant Alexandre que Margot marchait sur des œufs et ce n'était que le début de la soirée. Il avait peur des sujets de discussion, et il avait très bien vu que Margot tenait des pancartes dans ses mains tremblantes qu'elle peinaient à lui cacher. Elle allait donc parler.
Ça va aller
Il la regarda silencieusement et un peu secoué, saluer ses autres compagnons et cela ne manqua pas à Hugo qui n'y prêta pas grand attention sur le moment.
Ça va aller
- Ça va ? lui demanda Hugo en faisant exprès de parler trop doucement pour que les journalistes puissent entendre.
Ça ira, je me le promets.
Il lui fit un petit signe pour signifier que oui, alors que la femme qu'il voulait au bras était celle à quelques pas de lui.
Ils étaient si proche et pourtant si loin à la fois.
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