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- Eh eh eh regarde ! s'écria Jisung avec son grand sourire d'abruti qui venait de faire un vilain coup.
Il s'était brusquement levé pour me montrer les feuilles qu'il venait d'imprimer par dizaines. Je voyais des centaines de noms, prénoms et métiers et juste au dessus, en très gros y avait écrit « LES INVITÉS À LA FIESTA »
- Quelle fiesta ? je lui demandais d'une voix détachée, perplexe face à tous ses noms, là où je ne connaissais vraiment personne.
Il y avait bien quelques noms qui revenaient, ceux que j'avais mis sur la liste des invités de la fête pour la nouvelle année mais là il y en avait d'autre, des noms impossibles à prononcer, des noms inconnus au bataillon, je me sentais affreusement perdu face à cette mêlasse d'inconnus.
- Gros con, répondit Jisung en tapant l'arrière de ma tête.
- Mais réponds au lieu de m'insulter et, AÏE ! je criais avant de poser ma main sur ma tête, pile là où ce crétin venait de poser ses sales pattes.
- C'est la fête pour le lancement de la toute nouvelle collection imaginée entièrement par James Lee en personne, aidé bien sûr par Felix Lee, tu sais la super star qui te sert de mec ?
Un long silence gênant s'en était suivi alors que je le regardais dans les yeux à me demander qu'est-ce qu'on pourra en faire. Il savait parfaitement que ça devait encore rester un secret et mon cher collègue prenait un malin plaisir à jouer avec le feu depuis qu'Adam avait eu la révélation divine de ses sentiments pour moi.
- Bien... je repris quelques temps plus tard en m'étant assuré que personne n'avait entendu. En vrai, même si quelqu'un nous avait entendu qui aurait cru à ça ? Absolument personne. Qui pouvait croire que Felix Lee sortait avec un déchet. Je suis le déchet. Et qu'est-ce que tu veux que j'en fasse ? Elle est pour quand sa nouvelle collection ?
- Pour octobre.
- Octobre prochain ?! je m'ecriais. Mais on a même pas fini d'organiser la fête de Noël tu me parles d'octobre ?!
- Ah non non, octobre de l'année suivante, pas celui qui arrive, pouffa Jisung. Eh oui, faut s'y prendre tôt pour les événements comme ça.
Mes yeux s'étaient écarquillés, c'était du grand délire, s'y prendre presque deux ans à l'avance pour trouver les invités super limités d'une fête pour fêter les nouveaux fringues qui atterriront dans quelques années dans un bac de vieux vêtements des friperies du monde entier. C'était tellement tôt que j'étais certain que beau papa n'avait même pas encore prévenu Lix sur ça.
- Bon, super, je soupirais a encore me demander pourquoi je m'étais levé ce matin. Et alors ? Dans deux ans y a peu de chance que je sois encore là.
- Oh bah non, regarde la dernière page... bougonna Jisung.
- Euh pourquoi ?
- Regarde ou je t'étripe.
- D'accord, je commençais déjà à feuilleter.
Y avait beaucoup de pages. Tellement de pages. Ah, je venais de me couper le bout du doigt, j'étais à deux doigts de crier quand Jisung s'était emparé de mon doigt pour le mettre dans sa bouche avant de me faire signe de continuer à tourner les pages.
Soit. Donc, je continuais à tourner à une main ces foutus feuilles remplies de noms quand enfin, j'atterrissais dans la dernière page. J'aurai peut-être dû commencer à la fin, ça m'aurait épargné de finir avec le doigt dans la bouche de Jisung et des collègues qui nous regardent par les vitres à se demander est-ce que notre relation était toujours saine.
Après avoir bien analyser la feuille, j'y voyais toujours rien d'intéressant. Jisung finit par enfin lâcher mon doigt. La sensation du doigt visqueux plein de bave qui n'est pas la mienne n'était franchement pas ouf.
- Tourne la feuille.
J'avais donc fait ce qu'il m'avait ordonné (encore) et un nouveau gros titre s'afficha « INVITÉS SPÉCIAUX ET BEAUX GOSSES. » Deux noms y étaient.
- Péter ? je fronçai les sourcils.
- Hein ? grimaça avant de prendre la feuille.
- Tout le monde sait que tu sens pas la rose mais de là à t'appeler Prout c'est un peu dur sur l'homme...
- Mais non ! s'agaça Jisung. C'est Peter Han !
- Peter Han ? C'est qui ?
- C'est moi !
Je clignais des yeux plusieurs fois lorsque je m'étais soudainement mis à rire à gorge déployée. Bordel de merde y avait que lui pour se dégoter un nom aussi pourri. Jisung, enfin Peter, me regardait tellement confus que c'était encore plus drôle. J'avais vraiment mis du temps à me calmer, pour ma défense je m'y attendais vraiment pas. Quand j'avais pu effacer les larmes de mes yeux j'avais pu voir juste dessous son nom : Changbin. Ça me représentait bien, dernier des pas voulus.
- Lourd. J'irai pas.
- Mais pourquoi ?! Cette fête va être LA fête du siècle tu t'en rends pas compte ! Le compte en banque de ton beau père va peut-être TRIPLER !
- Cool, je m'en fous. Au cas où t'aurais pas compris, je hais mon beau-père, je lui fis remarquer en remettant bien les feuilles comme il faut puis je lui avais rendu sa liste de blases donc je m'en fichais comme de l'an 40.
- Tu peux pas me faire ça ! cria Jisung.
- Eh si.
- Non ! Avec qui je vais y aller moi ?! Je vais avoir l'air d'un bouffon tout seul !
- Bah vas-y avec Minho, je lui suggérais.
En fait j'avais vraiment envie qu'il me foute la paix et qu'il me laisse dans mon aigreur et mon sentiment d'avoir tout raté.
- Il est pas invité... marmonnait Jisung en retournant à son bureau.
- Justement, si tu l'invites de toi-même il va être tellement heureux qu'il te sautera dessus.
Mon ami s'était soudainement mis à réfléchir tandis qu'un sourire démoniaque s'était formé sur son visage de démon. Je l'observais depuis mon misérable bureau et ça sentait pas bon, je voyais clairement qu'une idée s'était formée derrière sa petite tête.
- J'ARRIVE ! il avait hurlé en courant d'un coup, laissant toutes les feuilles voler partout par terre.
Mes yeux étaient rivés sur la porte, abasourdi puis un lourd soupire avait traversé mes pauvres lèvres. Le temps était long ces derniers temps, heureusement que la paye arrivait ce soir. Et encore, c'était vraiment peu comparé à la masse de travail qu'on se coltinait chaque jour, mais c'était pas mal. La seule motivation à enfiler un caleçon et à jouer un rôle en venant ici c'était de faire plaisir à mon adorable petit copain. Sans ce travail, je retournais au stade de larve totalement dépendante et ça c'était hors de question. Depuis quelques mois je pouvais payer des cadeaux à Felix sans lui demander de me passer de l'argent juste avant. Je pouvais rentrer en retirant ma cravate et lui dire que j'étais trop crevé pour du sexe. C'était amusant parce qu'au final on le faisait quand même. Depuis quelques mois j'étais devenu indépendant financièrement mais en revanche j'avais perdu toute forme de liberté, ça c'était clair. J'avais pu passer une semaine de vacances avec mes amis grâce à Felix qui devait sûrement avoir négocié avec son cher papounet mais c'était la seule et probablement la dernière pour l'année à venir. J'avais promis de tenir au moins un an, donc jusqu'à septembre. Il ne me restait plus que neuf mois, je pouvais tenir. C'était comme si j'étais enceinte, le plus dur allait être la fin avant d'être libéré.
***
- COMMENT ÇA PLUS DE MILLE DOLLARS RETIRÉS DE MA PAIE ?!?!
Felix était soudainement sorti de la salle de bain en panique, totalement nu mais pour la toute première fois de ma vie ça ne m'avait rien fait tellement j'étais choqué. Bon j'étais mauvaise langue, j'avais quand même pris le temps de le reluquer alors qu'il s'asseyait à côté de moi sur le lit pour prendre ma fiche de paie et constater avec moi les dégâts.
- C'est quoi cette histoire ? pesta-t-il. Mille vingt trois dollars en moins pour « mauvaise conduite et absence de plusieurs jours non signalées » ?
- MILLE VINGT TROIS DOLLARS FELIX NON MAIS IL A PÉTÉ UN PLOMB TON DARON ?!
- Eh n'accuse pas mon père, jamais de sa vie il n'a géré les finances pour les salaires.
- JE LE SAIS, CE MOIS-CI JE M'EN SUIS CHARGÉ ! J'avais particulièrement accentué le "je". J'avais pris une très lourde respiration pour m'arrêter de crier sous le choc. Après quelques secondes de silence, j'avais pu reprendre. Je m'en suis chargé et il n'y avait rien de tout ça ! C'est forcément lui qui a voulu se venger !
- T'es parano... avait soupiré Lix.
- Ah ouais ? Le fait que mon seul soutien dans ce monde de brute sans émotion n'était même pas de mon côté sur ce coup me faisait mal. Vas-y, appelle le alors, on sera fixé !
Mon petit ami avait pris le soin de lever les yeux au ciel tandis qu'il s'emparait de son téléphone pour appeler son ENCULÉ DE CONNARD de père. Il avait bien pensé à mettre en haut parleur, pour être sûr qu'on entende la même chose.
- Bonsoir mon grand, tout va bien ? avait résonné d'un coup l'horrible voix de cet horrible homme.
- Salut papa, oui oui, j'ai.. Il avait pris ma feuille de paie. J'ai reçu la fiche de paie de Changbin et ça dit qu'il y a plus de mille dollars déduit de son salaire et je voulais savoir si tu savais pourquoi...
Il parlait sur un ton beaucoup trop aimable et gentil à ce démon. J'avais tellement la rage et surtout j'étais triste. Je bossais comme un chien pendant des jours pour rendre mon petit ami fier de moi mais au fond avoir l'approbation de beau papa me ferait plaisir aussi.
- Ton horrible tas ne s'est pas présenté plus d'une semaine sans motif et le contrat dispose clairement que dans ce genre de cas, l'employé verra sa paie nettement diminué.
- Mais enfin papa ! s'écriait Felix en constatant que j'avais raison.
Ouais, j'étais une belle merde au final, même passer du temps avec des potes c'était pas possible. J'avais envie de pleurer, Chan et Hyunjin me manquaient, j'étais crevé, entendre la voix de mon beau père dans ma chambre me donnait la chair de poule en plus.
- Tu ne peux pas faire ça, à Changbin en plus ! continuait Lix. Je t'avais envoyé un message pour te prévenir qu'on resterait avec des amis !
Mon homme faisait les cent pas totalement nu dans notre chambre tandis que mon regard se perdait sur son formidable fessier mais pour une fois, j'étais vraiment déprimé au point de juste vouloir poser ma tête dessus pour pleurer. J'étais triste de constater à quel point j'avais un terrible manque de considération sur ce que je m'efforçais de faire depuis des mois, sur tout le travail que je fournissais dans un domaine qui n'était pas et n'avait jamais été le mien.
- Oh je t'en prie, soupira le père au combiné. Il vit à ton crochet depuis des années, ce n'est qu'un misérable millier de dollars qui ne va pas changer quoi que ce soit.
Les yeux de mon copain s'étaient écarquillés alors qu'ils se posaient sur ma misérable personne. J'avais définitivement aucune considération et ma fierté venait de prendre un énorme high kick. Ça m'avait achevé.
- Arrête de dire n'importe quoi. T'as intérêt à rectifier ça si tu ne veux pas rencontrer pour la première fois tes petits enfants à soixante dix ans !
Un rire gras qui puait l'arrogance et l'aisance financière m'était parvenu à mes pauvres oreilles.
- Comme si cet incapable pouvait prendre le moindre engagement. Le jour où il sera assez courageux pour montrer sa face au monde, nous en reparlerons.
- PAPA ! cria Felix. C'est justement pour éviter ce genre de commentaire horrible que je ne veux pas le montrer !
- Tu sais c'est normal d'avoir honte, c'est pas grave mon chéri.
Cette fois-ci, mon petit copain avait raccroché sans rien ajouter. Il avait jeté son téléphone au bout du lit puis s'était remis assis à côté de moi pour passer ses bras autour de mon cou. Un long silence s'en était suivi, honnêtement je ne savais pas trop quoi dire, j'hésitais entre une blague et un bonne nuit. Une blague, ça serait juste gênant, l'ambiance y est pas du tout et Felix penserait que je prends pas du tout ça au sérieux alors qu'au fond, bien sûr que si. Mais si je disais juste bonne nuit, Felix allait taper une énorme crise dans le bureau de son père demain parce qu'il saura que ça m'a touché. Puis avec les deux options, il faudra en parler. Et ça c'était le pire du pire, je ne voulais surtout pas en parler. J'avais assez honte comme ça. J'étais donc dans une impasse.
- Je t'aime mon amour, avait doucement dit Felix, la tête posée sur mon épaule.
Un petit sourire avait traversé mes lèvres, Felix s'était penché pour embrasser mon cou avant de nous faire tomber sur le lit pour continuer à se câliner jusqu'à que mon réveil ne sonne.
J'avoue que je n'avais pas pu fermer l'œil de la nuit. Est-ce que mon beau père était le seul à penser comme ça ? Est-ce que c'était tout le monde ? Felix aussi ?! Ma vie était pathétique, j'avais besoin de parler avec Chan.
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