Chapitre 44

J'ajuste ma robe pour la troisième fois dans un des mes nombreux gestes nerveux. J'écoute vaguement Camille qui essaie de m'expliquer le déroulement de la cérémonie et j'essaie, j'essaie vraiment de me forcer à écouter. Son regard est inquiet, et elle prend toutes les peines du monde à me parler, comme si j'étais une poupée en porcelaine qui pouvait se briser à tout moment.

Je n'ai rien demandé. Je veux juste qu'on me laisse tranquille, mais apparemment c'est trop demander. Je finis par faire taire mes pensées et m'observe à travers le miroir où je me suis assise pour que ma mère puisse me coiffer tranquillement. Je regarde mes grands yeux bleus rougis par les larmes et mon visage cerné par la fatigue. Je porte mes mains à mes joues en expirant l'air que je contenais apparemment depuis longtemps dans mes poumons. Je ferme les yeux en les sentant devenir humides et j'attends, j'espère que la douleur s'en ira un jour.

Ma mère essaie de me ramener sur terre en effleurant doucement mon bras et en m'annonçant qu'il est l'heure d'y aller. Je m'installe à l'arrière de la voiture, en posant ma tête contre la vitre. J'observe le ciel gris en me demandant si c'est parce que c'est aujourd'hui que tout à l'air d'être triste. J'agrippe mes mains dans un geste angoissé et retiens un cri de panique.

On finit par arriver devant une belle église, devant laquelle plein de personnes sont en train de patienter. Parker est là. Il a l'air de m'attendre, l'air grave dans son impeccable costume noir, assorti à ma nouvelle robe. Il m'offre sa main d'un sourire tendre et c'est trop pour que je puisse le lui refuser alors j'enroule mes doigts autour des siens en espérant juste que mon mal-être s'atténue. Mais non, non ; c'est encore plus douloureux.

Il paraît attendre que je crie, que je m'énerve, mais je ne le ferai pas. Je le ferai si j'avais envie de m'en sortir, après toutes les épreuves que j'ai pu traverser, j'aurai pensé que la vie m'importerait. Mais pas après ça. Je n'ai même plus la force de parler, bon dieu. J'ai essayé, vraiment, j'ai essayé mais je sentais que ma voix allait me lâcher et que j'allais fondre en larmes, alors je préfère me taire et attendre que ça se passe.

La cérémonie est longue, m'ennuie et je sais qu'il n'aurait jamais voulu ça. Sa mère pleure bruyamment au premier rang et il faut, il faut que je sorte d'ici parce que je commence vraiment à paniquer. Ils ne comprennent pas, je suis certaine qu'ils ne cherchent même pas à comprendre quel genre de personne il était vraiment au fond de lui. Je suis sûre que sa mère regrette de l'avoir laissé partir, regrette qu'il ait été comme ça, alors qu'il était une personne géniale.

On finit tous par quitter l'église pour aller dans le cimetière où il a déjà été enterré. Sa famille n'a pas voulu le faire aux yeux de tout le monde, et je leur en veux, je ne les ai jamais particulièrement appréciés mais à cause de ça, je n'ai pas pu lui dire vraiment au revoir.

Tout le monde finit par s'en aller, ses parents dans les derniers. Parker aussi, pour me laisser tranquille, s'en va, me laissant seule face à cette maudite pierre tombale. Le vent balaie mes cheveux devant mes yeux mais ça ne m'empêche pas de continuer à fixer l'inscription gravée, comme si je la voyais encore.

« Aaron NERSON, 1998-2015 »

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