Chapitre 43
Ma mère se lève et vient lui serrer la main qu'il tient devant lui depuis une bonne minute.
-Bonjour, jeune homme. Parker, c'est ça ?
Il hoche doucement la tête, en souriant adorablement. Vraiment, si je ne l'aimais pas autant, je suis sûre que j'en tomberais amoureuse à l'instant. Mon père le jauge de son regard implacable et finit pas lui tendre sa main aussi, en hochant la tête. J'entoure mon bras autour de celui de Parker et ne peut m'empêcher de me sentir soulagée.
-C'est mon copain, en fait.
Parker me regarde l'air de dire « tu veux ma mort, ou quoi ? » et je souris, en me pinçant les lèvres pour ne pas éclater de rire.
-Quel âge as-tu?
La question de mon père le fait sursauter. Je le regarde, le laissant se débrouiller un peu. Vengeance personnelle.
-Dix-sept ans.
L'information a l'air de passer et après quelques questions rituelles, mon père sort de la pièce pour aller dans son bureau pour travailler. Ma mère est vraiment contente pour moi, et a l'air de le trouver charmant, puisqu'elle l'invite à rester manger avec nous. Mais Parker refuse poliment, se sentant sûrement de trop et annonce son départ. Elle lui fait la bise et je le raccompagne dehors.
-Tu vois que je gère, quand même ? Que de perfection en moi.
J'ouvre grand les yeux face à son air hautain, m'avance un peu pour me mettre sur la pointe des pieds et lui tapoter la joue plusieurs fois comme un gamin qu'on félicite. Il sourit, m'attrape la main et m'appuie sur les épaules pour me faire redescendre.
-J'y vais, mon cœur. Pas de bêtise, d'accord ?
Son regard me percute un moment et je comprends tout de suite où il veut en venir. Je hoche négativement de la tête.
-Mais sinon, tu connais mon numéro ? Et je viendrais te sauver, comme toujours.
-Oui, j'ai bien compris que je ne pourrais pas me débarrasser de toi, Parker.
Il grimace, avant de m'embrasser puis enjambe son scooter et après un petit signe de la main, démarre en trombe pour regagner son chez lui. J'allais rentrer mais ma mère me demande d'aller regarder le courrier, moi qui n'y vais presque jamais, c'est un comble. Je prends le tout en main, faisant défiler les enveloppes les une après les autres, pour vérifier que rien n'est pour moi. Et ma main se fige, en voyant une enveloppe blanche à mon nom. Je dépose le reste sur la table de la salle à manger et monte en vitesse pour voir ce que c'est.
J'ai toujours adoré recevoir du courrier. C'est tellement rare aujourd'hui. On préfère s'envoyer des messages, des mails, s'appeler ou encore se voir grâce à Skype. Mais ça ne remplacera jamais le parfum du papier ou l'écriture de chaque personne. Une lettre est une lettre. Et ça reste ce qu'il y a de plus sincère comme moyen de communication.
J'entends ma mère m'appeler pour je ne sais quelle activité, mais l'écriture m'appelle et me rappelle quelque chose. Je me dépêche d'ouvrir l'enveloppe, ayant hâte de la lire. Je me sens me décomposer au fur et à mesure de la lecture de celle ci et c'est les larmes aux yeux que je me terre dans un silence terrifiant.
Ma princesse,
Oui, c'est Aaron, ton Aaron. Celui dont tu ne veux plus entendre parler depuis un moment, j'en suis absolument certain. Après tout, je suis celui qui a fait la pire connerie de sa vie en te laissant. Je suis un abruti fini, c'est exactement ce que je suis et ce que j'ai toujours été.
Je ne sais absolument pas à quel moment tu vas recevoir cette lettre et je me demande bien si tu vas la recevoir. Mais il fallait que je t'écrive tout ça, il fallait une preuve à tout ce que je ressens pour toi. Et puis, ça tombe, dès que tu l'auras entre les mains, tu te dépêcheras de la jeter à la poubelle ou peut être que quelqu'un s'empressera de le faire à ta place, peut-être pour t'empêcher de te détruire un peu plus.
Je me suis fourré dans de grosses emmerdes et je ne voulais pas te mêler à tout ça en restant en contact avec toi. J'ai donc coupé les ponts, c'était mieux, et de toute façon j'étais en train de devenir fou. Oui, c'est lâche. Mais c'est un autre trait de caractère qui me correspond bien.
Mais je t'assure que ce que je voulais par-dessus tout, c'est te protéger Beers. Tu sais à quel point cela compte pour moi.
Je t'imagine me détester, me pleurer et ça me rend fou, Juliette. Je t'avais pourtant dit de ne pas t'attacher à moi, de ne pas t'accrocher parce que tout ce que je sais faire, c'est détruire les gens. Je suis doué, vraiment doué pour ça parce que si la seule personne qui comptait vraiment pour moi ne veut plus de moi, ça, c'est comme si j'étais mort.
Tu m'avais pourtant sauvé et il a fallu que je replonge dans mes conneries et dans mon putain de mal-être. Tu es la meilleure chose qui me soit arrivée dans cette foutue vie, je ne pensais pas avoir droit à une seconde chance mais j'avais tort, tu étais là, tu as toujours été là.
Je suis tellement désolé.
Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé. Désolé.
Désolé d'être moi, désolé de t'enfoncer avec moi sans le vouloir, parce que oui, je n'ai jamais voulu te faire de mal.
Je t'assure que je fais tout mon possible pour me battre, pour m'en sortir, pour revenir. Parce que je reviendrai. Je reviendrai même si ta meilleure amie voudra sans doute me tuer.
Depuis le premier jour où j'ai cessé de t'envoyer des nouvelles, j'ai eu envie de prendre un avion, de revenir pour te serrer dans mes bras, en te promettant que je serai toujours là pour toi. Mais je mens comme je respire, alors peut être dois-je juste te laisser tranquille ?
Je reviendrai, je te le promets. Mais en attendant, c'est à toi de me faire une promesse. Relève-toi, sans moi, mais relève-toi. Tu es une battante, alors relève la tête et montre à tout ceux qui en doutent que tu es une battante. Tous ceux qui n'arriveront pas à y croire sont des abrutis finis.
Tu as été ma lueur d'espoir dans ce monde terrible. Tu es une étoile, mon étoile et celle qui est venue à moi et que je n'attendais pas. Celle pour qui j'aurais tout fait.
Vie pour moi, vie pour nous deux. Je reviendrai.
Et je t'aime,
Aaron.
Les pleurs m'étranglent, je suffoque, la poitrine oppressée par le poids trop lourd de la journée et de ces mots.. J'étouffe un deuxième sanglot et ma tête me brûle, mon cœur aussi.
Les larmes ruissellent sur mes joues et sur la lettre. Il n'en faut pas moins pour que je l'éloigne. Comment veut-il que je vive ma vie si lui ne quitte pas ma tête ?
Oh, Aaron.
Et dire que c'était lui au téléphone, que je l'ai engueulé alors qu'il a apparemment l'air d'être bien embêté. Je voudrais juste revenir en arrière.
Je me prends la tête entre les mains et me retient de hurler. Bon sang, il faut pourtant que j'évacue ma tristesse parce que je ne vais pas tenir sinon. J'ouvre mon velux et me dépêche de sortir. L'air glacial tarit mes larmes et je me sens défaillir. Je m'assois en tailleur, lève un peu la tête en me repassant les mots d'Aaron en boucle.
Comment veut-il que je relève la tête sans lui, comment veut-il que j'abandonne tous nos souvenirs passés ensembles ?
Les minutes passent et je me rends compte que ce n'est pas du tout ce qu'il veut. Il veut que j'avance, que j'aime la vie, avec lui, sans lui, peu importe. Que je dois me relever pour pouvoir m'en sortir. Il me parle comme s'il savait à quel point c'est difficile sans lui, comme s'il savait tout. Et c'est comme une source d'apaisement.
Ce n'est pas moi. Je ne l'ai pas fait fuir. Ça a beau être complètement égoïste de penser ça pendant qu'il est avec les mecs à qui j'ai parlé par téléphone mais ça fait me tellement de bien.
J'ai l'impression de pouvoir respirer à nouveau. Sûrement sans le savoir, il vient de me donner exactement ce que j'avais besoin.
Je finis par avoir froid et me décide à rentrer à la maison.
Demain, je raconterai tout à Parker. Demain, j'arrêterai d'être celle que je ne suis pas. Je ferai en sorte de rendre Aaron fier. Parce que c'est ce qu'il veut, plus que tout, je le sais bien. Et il me reviendra parce que quoi qu'il arrive je le retrouverai. Je ne peux pas le laisser partir, je ne le pourrai jamais. Et je m'en sortirai, il faut que je m'en sorte.
Je t'aime aussi, Aaron.
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