Chapitre 18

Parker s'assoit à côté de moi, l'air grave, voyant que je ne réagis toujours pas. J'ai le cœur lourd et je regrette toujours qu'il soit arrivé au mauvais moment. Le feu me réchauffe doucement et Parker m'enfile son pull sans protestations de ma part. C'est le même qu'il m'avait prêté.

C'est celui que je lui ai tendu en lui disant de foutre le camp. Et ça aussi, je le regrette terriblement. Peut être que les choses se seraient déroulées autrement.

Il m'entoure de ses bras et me cale contre lui. Je sais qu'il veut que je me sente rassurée et c'est le cas mais je me sens encore incapable de dire quoi que ce soit. Il m'a vu alors que j'étais en pleine crise de panique et je sais qu'il ne pourra jamais l'oublier.

- Explique-moi, mon cœur... Il faut absolument que tu me donnes une raison à cet acte. Tu te rends compte que j'ai essayé d'ignorer ton appel ? Si je l'avais fait, j'aurais appris ta mort. Je n'aurais jamais pu m'en remettre, tu le comprends ça, pas vrai ? Dis-moi quelque chose, quoi que ce soit, j'essaierai de comprendre. Mais s'il te plaît, parle-moi.

Il passe tendrement sa main dans mes cheveux et ça me donne encore plus envie de pleurer.

-Aaron, c'est Aaron.

Ma voix est terriblement enrouée, je ne la reconnais même pas. On dirait que c'est une autre personne qui parle. Et dans un sens, c'est le cas, après ce que je viens de faire, je sens que ce ne sera plus jamais comme avant. Il fronce les sourcils, ce qui est normal étant donné qu'il ne le connaît pas.

-C'est qui celui-là ?

Je ris ironiquement en pensant à ce qu'il représente pour moi.

-Sûrement celui qui me connaît le mieux sur cette terre. Ne t'énerve pas, Parker. C'est mon meilleur ami. Enfin, c'était. C'est dingue mais il représentait tout pour moi. C'était même plus que mon ami, je ne sais pas moi, ce n'est pas possible d'aimer quelqu'un autant que ça. Il était comme un frère pour moi. Je n'arrivais pas à imaginer ma vie sans lui. Et pourtant, j'ai dû réviser mes principes, je n'avais pas le choix.

Je respire profondément, me donnant du courage pour lui raconter la suite. Du courage, comment est-ce que je peux parler de courage après ce que j'ai fait.

-Il est parti, il m'a brisé le cœur. Sa famille est partie loin d'ici et je n'ai plus de nouvelles depuis quelques mois. Il a sûrement compris que je n'étais pas assez bien pour lui. C'est pour ça que je te repoussais autant, tu sais. Je sais que tu es un mec bien, je ne voulais pas te détruire avec mes conneries. Comme aujourd'hui.

Je vois qu'il a les larmes aux yeux en m'entendant raconter tout ça mais il ne m'interrompt pas, et je le remercie vraiment pour ça.

-Le reste de mon cœur est parti aux oubliettes quand j'ai dû faire face à cette rentrée, sans mes anciennes amies, sans toutes mes habitudes. Je suis beaucoup trop attachée au passé, c'est sûrement mon principal défaut. Je me suis laissée aller, en pensant que ça irait mieux avec le temps mais tout n'a fait qu'empirer. Je faisais des cauchemars atroces qui m'empêchaient de dormir. Je restais des heures assises dans le noir à ressasser encore et encore mes souvenirs jusqu'à devenir folle. Et ça m'a achevé, j'ai fini par couler, jusqu'à ne plus savoir passer une minute sans un pincement douloureux dans la poitrine. J'essayais de me débattre au début, je te le jure Parker, mais c'était beaucoup trop puissant pour moi.

-Attend, quoi ?

-Je suis en dépression, Parker. J'ai essayé de me battre pour remonter à la surface et me sauver pendant les premières semaines mais après j'en ai eu marre, et je me suis laissée aller. Je suis devenue une petite boule d'émotion, de colère et de tristesse. C'est pour ça qu'il faut que j'éloigne le plus de personnes possible. Un jour, je vais craquer, j'en aurai ras le bol, comme aujourd'hui. Je voulais seulement partir Parker. Tu aurais dû me laisser faire.

Son regard est blessé. Il me serre un peu plus fort contre lui, et finit par m'empêcher de respirer. Je le pousse un peu, pour reprendre mon souffle. Je fixe le feu mais Parker me fait tourner la tête pour m'obliger à le regarder.

- Écoute-moi bien, Juliette. Tu vas devoir me faire une promesse, là, maintenant, que tu t'engageras à tenir. Je suis sûre que ça a de l'importance pour toi, les promesses n'est-ce pas ?

Je hoche simplement la tête, me perdant dans ses beaux yeux marron devenus si sérieux.

-Tu ne fais plus jamais ça. Et si tu me dis que tu ne te crois pas capable de te retenir, je te jure que je vais devenir insupportable. Tu m'auras tous les jours sur le dos, j'avoue que ça sera quand même le cas mais bon peu importe, et je camperai dans ta chambre. Je t'assure que tu ne recommenceras plus jamais ça. Tu mérites tellement mieux. Mais tu ne te débarrasseras plus de moi, plus jamais je ne te laisserai. Plus jamais, je ne fais cette connerie. Et même si tu dois me frapper, me hurler dessus, je résisterai jusqu'au jour où tu te décideras à me tuer.

Un rire s'échappe de sa bouche, il arrive à me faire sourire à travers mes larmes, il est merveilleux.

-Tu iras mieux, mon cœur. Le temps guérit tout. Et moi, je te guérirai, je te le promets. Tu me le promets aussi ?

-Oui, d'accord. Promis. Je ne le ferai plus.

-Et à propos d'Aaron... Je suis désolée pour toi, mon cœur. C'est un salaud de t'avoir fait ce coup là, parce que vu ce que tu racontes de lui, il n'a pas l'air indifférent à toi. Je ne sais pas, peut être qu'il n'a pas eu le choix ? En tout cas, ne te monte plus la tête avec ça, et dès que tu n'arrives pas à dormir, je suis là d'accord ?

Mon envie de pleurer revient au grand galop et ma gorge se serre à nouveau.

-Les cauchemars s'étaient arrêtés, mais ils ont recommencés. Et ils sont pires qu'avant. Je pense que c'est depuis que je t'ai envoyé balader, encore désolée d'ailleurs.

-C'est oublié, je te dis. Oublie aussi, je ne t'en veux pas. Et c'est à moi de m'excuser pour mon comportement à la soirée de Louis. J'ai tendance à m'énerver facilement et vous voir tous les deux n'a pas aidé. J'étais jaloux. Excuse-moi.

Je secoue la tête pour qu'il évite d'apporter de l'importance à ses actes compréhensibles. Ce sont seulement ses mots qui m'ont blessée. Et il ne s'en souvient sûrement pas. Parker constate que je suis retournée dans ma petite carapace et il soupire en se passant la main sur sa nuque.

-Je ne te hais pas. Je ne le pensais absolument pas. Je reconnais seulement avoir voulu te faire mal, juste pour que tu te sentes comme je me sentais. Et je n'aurai pas dû, vu ce qu'il s'est passé.

Je sens encore mes plaintes désespérées me déchirer la gorge et les bras de Parker déterminés à me ramener sur la terre ferme. Je revois son air désespéré, impuissant face à moi. Il s'attendait sûrement à tout sauf à faire face à une furie, se débattant pour mourir.

-Et je ne veux pas que tu changes, pour rien au monde. Je sais que tu te crées une fausse image pour amadouer les gens, pour les laisser croire que tout va bien. Je sais que tu ne te crois pas assez bien pour être aimée de qui que ce soit. Mais regarde-moi, Juliette, je suis là, devant toi et je ne voudrai être nulle part ailleurs. Je sais qui tu es, tu es attachante et adorable. Alors, ne change pas s'il te plaît, je ne le veux absolument pas.

Mes larmes s'apaisent peu à peu quand Parker me berce dans ses bras et je me laisse un instant convaincre par ses douces paroles. Heureusement qu'il était là après tout. Il m'a sauvé.


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