Chapitre 3 : Rencontre à Beausoleil (2/2)

Cependant, Ethan avait plus que tout hâte de retrouver Violette, et le lendemain, il se pointa au rendez-vous avec près d'une demi-heure d'avance. A sa grande surprise, la jeune fille l'y attendait déjà, nonchalamment appuyée contre un muret bordant une maison.

- Ponctuel ! siffla-t-elle, étonnée.

- Pas autant que toi, fit-il remarquer, amusé.

- Prêt pour la suite de la visite ?

Ethan haussa les sourcils. Certes, leur balade de la veille avait été fort intéressante, mais il doutait que Beausoleil regorge d'autres trésors cachés qu'ils n'aient déjà décelés.

- Hier, c'était le village ; aujourd'hui, mon cher Ethan, nous partons au-delà.

- Ah oui ? répondit-il, sa curiosité piquée au vif. Et où allons-nous ?

Elle sourit d'un air mystérieux.

- Tu connais le manoir du Marquis ?

- Non, je te rappelle que je ne suis pas de la région, marmonna-t-il dans sa barbe.

- Ah oui, c'est vrai. Assieds-toi, il faut que je te mette au parfum.

Violette inspira par le nez et utilisa son ton de guide touristique, voilé et envoutant.

- Il y a de ça quelques années, à la sortie du village, vivait dans un immense manoir un Marquis.

-Ça commence bien.

- Et tu n'as encore rien vu. On raconte que par un odieux procédé, il assassina sa femme et la jeta dans le puits, caché au fond de son immense jardin.

Le jeune garçon leva un sourcil, peu convaincu.

- Des années passèrent. Le Marquis vivait reclus dans son domaine, craignant la vengeance de sa défunte femme.

- Si c'est de sa femme dont il avait peur, pourquoi s'enfermer avec elle au lieu de s'enfuir ?

- Oh, Ethan, fit-elle en retrouvant sa voix ordinaire. Tu n'y mets pas beaucoup du tien.

- Je suis sûr que ce serait beaucoup plus effrayant si tu le faisais avec des gestes.

Violette fit mine de lui donner un coup sur l'épaule avant de retrouver son sérieux et son air de conteuse d'histoires. Elle fit toutefois l'effort d'ajouter quelques gestes des mains pour illustrer son récit.

- Après des décennies, alors que son effroi s'était dissipé et qu'il se croyait hors de danger, il subit finalement le courroux de sa femme. Sa vengeance fut impitoyable et le précipita à son tour au fond du puits. Désormais, si on s'approche assez du manoir on peut entendre les nuits d'orage les cris de haine et de douleur des deux amants maudits.

- Des décennies ? Il avait quel âge, quand il est mort, ton Marquis ? Quatre-vingt piges ?

- Euh, ouais, environ.

- Tu ne crois pas qu'il est plutôt mort de vieillesse ?

A ces mots, la jeune fille poussa un cri de frustration.

- Tu es vraiment le pire des publics qu'il m'ait été donné d'avoir.

- Désolé. Je peux avoir la version officielle maintenant ?

- Il n'y en a pas. Tu rigoles, mais il y a vraiment plein de rumeurs qui circulent sur le Marquis. Mais bon, ce qui est sûr, c'est qu'il est mort sans descendance, et que personne n'a repris le manoir. Depuis, il tombe en ruines, et on n'a pas trop le droit de s'approcher, parce que c'est dangereux et tout, d'après mon père. Mais la semaine dernière, j'ai découvert un passage...

- C'est bien mieux quand tu ne prends pas ta voix de vieille diseuse de bonne aventure, l'interrompit Ethan. Tu as les yeux qui brillent et tu bouges les mains. Beaucoup plus captivant.

Les joues de la jeune fille rosirent et elle continua :

- ... J'ai découvert un passage dans la muraille qui entoure le domaine. Ça ne va pas être simple de le dégager, il y a plein de ronces qui courent sur les murs. Mais si on arrive à s'en débarrasser, je pense qu'on pourrait passer...

- On ?

- Oui, on, comme toi et moi. C'est la visite du jour : le manoir du Marquis. Ça te tente ?

- Le manoir abandonné d'un meurtrier tué par un fantôme. Toi, on peut dire que tu sais vendre la marchandise.

L'ironie dans sa voix était palpable.

- Oh, allez, rétorqua la jeune fille en se levant d'un bond, de quoi t'as peur ?

- J'ai peur de rien ! s'écria Ethan en se renfrognant. Mais bon, c'est quand même une propriété privée, et si ton père ne veut pas que tu y ailles...

La légèreté de son argument ne lui échappa pas.

- C'est pour ça que c'est aussi amusant ! Et puis, le manoir est abandonné depuis au moins cinq ans, opposa Violette. Il n'y a plus personne qui passe par-là, on sera tranquilles.

- Cinq ans ? La vache, il doit y en avoir des souris et des araignées...

- Tu as peur des bêbêtes ?

- Arrête ! Je n'ai pas peur.

« Un manoir hanté. Comme si il y avait des raisons d'avoir peur... »

En réalité, même en pleine journée, l'idée n'était pas pour rassurer le jeune garçon. Et même si en théorie il ne croyait pas aux fantômes, il avait lu suffisamment de livres d'épouvante pour être un peu inquiet. Mais il ne voulait pas perdre la face devant Violette. Elle était plus grande que lui, mais c'était avant tout une fille, et il était hors de question qu'il passe pour un froussard.

- C'est d'accord, dit-il en tentant du mieux qu'il pouvait de se donner contenance. Mais je te préviens : on fait un tour vite fait et on s'arrache.

- Ça me va. De toute façon, je n'y suis jamais allée auparavant, je vais découvrir en même temps que toi. Alors pour le guide, il faudra faire sans.

- Tant mieux. Cette voix chevrotante commence à me taper sur les nerfs.

Les deux enfants se levèrent et commencèrent à marcher, Violette en tête, Ethan sur ses talons. Il ne leur fallut que quelques minutes pour arriver en-dehors de Beausoleil et poursuivre leur chemin sur une petite route en terre bordée d'aulnes morts qui avaient vu passer des heures tragiques. Ce n'était peut-être qu'un effet de son imagination, mais le jeune garçon avait la nette impression que l'air s'était soudainement refroidi et il serra instinctivement ses bras autour de son torse. Violette, quant à elle, avançait d'un pas décidé et ne semblait pas avoir remarqué l'atmosphère pesante qui régnait dans l'allée.

« Je me demande si je ne vais pas faire demi-tour et m'enfuir à toutes jambes, tout compte fait... »

Avec l'air de quelqu'un qui sait ce qu'il fait, Violette sortit du sentier, talonnée par Ethan qui était bien décidé à dissimuler au fond de lui sa peur ; il n'était plus un gamin, et les fantômes, bon sang, une bonne fois pour toutes, ça n'existe pas.

- Alors, elle est où ton entrée secrète ? demanda-t-il d'un air qui se voulait courageux, et un peu frimeur, aussi.

Violette le regarda, un sourcil arqué, incrédule.

- On a plus peur des insectes ?

- Je n'ai pas peur des insectes. C'est juste dégueu.

La jeune fille secoua la tête en grommelant quelque chose qui ressemblait vaguement à « les garçons, tous les mêmes » et s'approcha d'un amas de ronces et de buis séchés qu'elle repoussa de son mieux, ajoutant de nouvelles marques sanglantes aux estafilades témoignant d'un passage antérieur.

- Ouah ! fit Ethan, impressionné. Tu as trouvé ça toute seule ?

- A force de rôder dans le coin en cherchant un moyen d'entrer, oui, j'ai fini par trouver ça. Je ne suis pas certaine qu'un adulte pourrait passer, mais nous, on aura aucun mal.

- Je croyais que tu n'avais pas le droit de venir dans le coin.

- Tu es du genre à écouter les ordres, toi ? Arrête de bavarder et aide-moi plutôt à tenir ce fichu buisson en place. La dernière fois, j'ai été obligée d'abandonner parce qu'il se remettait en place avant que je puisse passer. Mais maintenant que tu es là, on va le tirer à deux, comme ça il ne devrait plus pouvoir nous embêter.

Ethan obtempéra et sous le poids de leurs forces combinées, le buisson plia pour leur dégager une entrée confortable.

- Il faudra le retordre dans l'autre sens au cas où quelqu'un d'autre ait l'idée de venir fourrer son nez dans le coin, dit la jeune fille. Je tiens à ce qu'on soit les seuls au courant de ce passage secret.

- J'y penserai.

- Je passe devant, tu me rejoins ?

La jeune fille s'engouffra dans la brèche et disparut presque aussitôt. Quand après plusieurs secondes de silence, il ne se passa rien, Ethan sentit une boule nerveuse lui nouer l'estomac.

- Tout va bien ?

Il y eut un bruit de bruissements d'herbe, suivi d'un cri d'effroi.

- AAAAAAH !!!

Le cri de Violette fut rejoint par celui d'Ethan, dont les dents claquaient. Il continua de hurler longtemps après que les cris de la jeune fille se soient mués en un incontrôlable fou rire.

- Non mais écoute-toi ! parvint-elle à articuler, hilare.

Elle imita les hurlements du jeune garçon pendant que celui-ci, un peu vexé, se glissait à son tour dans la brèche.

- Ce n'est pas drôle du tout, rétorqua-t-il d'un ton boudeur, j'ai vraiment cru qu'il t'était arrivé un truc...

- Comme quoi ? Je me serais faite attraper par le fantôme vengeur de la Marquise ?

- Oh, la ferme.

Ethan se renferma comme une huître en grognant.

- Ça commence toujours comme ça, les films d'horreur, tu sais. Et puis, après, il se passe vraiment un truc...

- Oh, ça va, je suis désolée. Toujours partant ?

- Maintenant qu'on est entrés, ce serait dommage de repartir sans avoir au moins fait le tour du propriétaire.

Le jeune garçon leva les yeux vers l'immense bâtisse qui se dressait devant eux. Un jour lointain, sans doute, en ses années de faste et de grandeur, elle avait dû être imposante. Pas belle, car bâtie tout de bloc, mais qui forçait le respect. Mais les années passées sans entretien l'avait faite tomber en ruines, et elle n'avait plus rien de son caractère majestueux qui était désormais relégué au rang de souvenir. L'herbe était particulièrement haute (certains brins arrivaient au coude d'Ethan), et le jardin ressemblait à une forêt vierge. Le temps qu'il fasse une rapide inspection des lieux, Violette avait déjà progressé de plusieurs dizaines de mètres.

- Hey, attends-moi !

Ethan se lança à sa poursuite, les chevilles lacérées par les herbes folles qui se dressaient entre lui et sa destination. Enfin, il rejoignit Violette, qui examinait avec intérêt la porte d'entrée. Le fait qu'elle tienne encore debout relevait du miracle, tant les planches de bois semblaient pourries.

- Euh, Violette ? Tu fais quoi là ?

La jeune fille lui jeta un rapide coup d'œil avant de retourner à son observation de la porte.

- Tu ne veux pas entrer, quand même ?

- Oh, allez, juste un tour et après, promis, on s'en va.

Ethan leva les yeux au ciel. Cet endroit lui filait la chair de poule (quoiqu'il en dise), mais de toute façon, il était déjà certain que peu importe ce qu'il dirait, Violette aurait gain de cause. Elle n'était peut-être pas très douée pour raconter les histoires, mais elle savait s'y prendre pour qu'on se range contre son gré à son avis.

- Je suis sûr qu'on ne peut pas entrer, insista tout de même Ethan, juste pour la forme. Tu vois bien, les fenêtres sont condamnées, et en plus, la porte...

Un bruit tonitruant acheva la phrase du jeune garçon. La porte ne tenait quasiment plus sur ses gonds et la jeune fille n'avait eu qu'à pousser pour que celle-ci s'écroule sur le sol, soulevant un nuage de poussière phénoménal. Ethan se mit à tousser.

- C'est malin, ça... Tu es en train de détruire une propriété qui ne t'appartient pas, et en plus je suis allergique à la poussière.

- Pour la dernière fois, personne ne nous trouvera ici, et personne ne se soucie de l'état de cette porte. Alors respire.

- J'aimerais bien, mais tu viens de saturer l'air avec ta poussière...

Violette secoua la tête, un sourire narquois aux lèvres, et pénétra à l'intérieur de l'inquiétante bâtisse.

- Bon, cinq minutes, et on s'en va, hein ! lui chuchota Ethan en la suivant de près, même si jusqu'à présent aucune de ses recommandations n'avait eu d'effet sur la jeune fille.

Celle-ci se baladait allègrement à droite et à gauche, soulevant d'antiques objets en bronze posés sur un buffet, tentant d'apercevoir son reflet dans un miroir couvert de crasse en sifflotant un air à la mode.

Il faisait très sombre à l'intérieur, mais aucun d'eux ne s'aventura à tester le réseau électrique. Battu par les intempéries, le manoir devait être régulièrement noyé et ils n'avaient pas très envie de finir électrocuter. Ils devaient donc plisser les yeux pour apercevoir les recoins du vestibule ; Ethan repéra un parapluie au tissu rongé (« Pas de souris, s'il vous plait pas de souris »), mais en dehors de quelques bibelots sans importance, la pièce était vide. A sa mort, le Marquis n'ayant pas d'héritier, c'était la commune qui avait récupéré les richesses et vidé la maison.

- Il n'y a rien, fit Ethan d'un ton pressant un jetant un rapide coup d'œil aux autres pièces. C'est bon, tu as vu ce que tu voulais voir ? On peut y aller, maintenant ?

- Deux minutes ! souffla la jeune fille. On n'a pas encore visité l'étage.

« Hors de question que je monte »,

- Qui sera sans aucun doute constitué de pièces aussi vides que celles-ci. Aller viens, on a assez perdu de temps ici. Il fait beau aujourd'hui, on sera mieux dehors...

- Juste deux minutes ! insista-t-elle.

Ethan capitula en baissant la tête.

- D'accord. Mais je t'attends en bas.

- Froussard.

- Non, je n'ai juste pas envie de me fatiguer à monter les escaliers pour rien.

- Froussard.

Ethan aurait pu continuer, mais la jeune fille s'était déjà engouffrée à l'étage et avait disparu. Il pouvait entendre ses pieds taper contre le plancher ; heureusement que le Marquis n'avait pas eu de voisins au-dessus, car le plafond semblait plus fin que du papier à cigarette et laissait passer tous les bruits.

Les tap-tap réguliers des baskets de Violette finirent par s'estomper, plongeant Ethan dans une solitude silencieuse et oppressante, uniquement rompu par la plainte lugubre du vent qui s'engouffrait par la porte cassée.

« Respire, Ethan, ce n'est que le vent. Violette va revenir vite, c'est le vent... Je veux partir ! »

Seul dans l'obscurité, le jeune garçon remarqua une odeur âcre à laquelle il n'avait pas prêté attention jusque-là. La puanteur le saisit à la gorge, mélangeant les senteurs de renfermé, d'humidité et d'excréments de petits rongeurs.

- Violette, viens, on s'en va ! tenta-t-il d'hurler mais seul un gémissement plaintif s'échappa de sa gorge.

Au même moment, un cri accompagné d'un vacarme assourdissant provint de l'étage supérieur.

- VIOLETTE !

Dans les films d'horreur, le deuxième cri du protagoniste n'est jamais feint. Trouvant au fond de lui une once de courage inespérée, le jeune garçon gravit quatre à quatre les escaliers, se retrouvant dans un couloir sombre au parquet moisi. Il continua de courir, ouvrant les portes au hasard pour retrouver son amie redevenue silencieuse. Il s'engouffra dans une des pièces et un courant d'air referma la porte derrière lui avec un claquement inquiétant.

Ses yeux mirent un instant à s'habituer à l'obscurité ambiante, car la pièce ne possédait pas de fenêtre. Lorsqu'il parvint enfin à distinguer des formes, aucune trace de Violette. Il était dans une sorte de cabinet de travail, un peu plus fournie que les pièces désertées du rez-de-chaussée. Dans un angle se trouvait un secrétaire sur lequel étaient posés un encrier dont l'encre avait depuis longtemps coagulé, une plume et du papier à lettres. Une façon plutôt archaïque de communiquer, à l'ère des téléphones portables et des mails.

Ethan continua de regarder autour de lui, et ses yeux furent attirés par une petite étagère en hauteur. Il ne put retenir un cri d'effroi.

Une dizaine de poupées de porcelaine, le regard vide, étaient sagement assises, immobiles. Leurs vêtements, tout de dentelles et de tissus légers, étaient à moitiés mangés par les mites (et les souris, le doute n'était plus permis quand le jeune garçon en vit une courir le long de l'étagère). Certaines avaient la peau et les lèvres décolorées, et d'autres la tête à moitié détachée de leur corps fragile. Mais au-delà de tout, c'est ce regard morne qui glaça les sangs d'Ethan. Dans la pénombre, ces apparitions avaient quelque chose de monstrueux, quasi-démoniaque.

Deuxième cri d'effroi.

Ethan trébucha, se prit les pieds dans le tapis qu'il n'avait pas remarqué à l'entrée et tomba sur les fesses. Paniqué, il se redressa avec peine, s'appuyant sur le mur, et ouvrit à la volée la porte avant de s'enfuir à toutes jambes. Il faillit de se rompre le cou en manquant les cinq dernières marches et s'arrêta soudain.

- Mince, Violette !

Dans sa terreur, il avait complètement oublié de s'inquiéter du sort de la jeune fille. Il était monté dans l'optique de lui porter secours, mais il se sentait incapable de remonter. Il tremblait de tous ses membres, et il se demandait comment ses jambes flageolantes arrivaient encore à le supporter. Elles auraient pu être faites de coton qu'il n'y aurait pas eu de grande différence.

- ETHAN !

Il fit volte-face, et trouva son amie qui descendait les escaliers à pas pressés. Elle avait perdu son air assuré et était tremblante et livide. Quand elle arriva au bas de l'escalier, elle se jeta dans les bras de son ami, qui rougit jusqu'aux oreilles.

- Te voilà ! dit-il, un peu soulagé.

- Qu'est-ce qui t'es arrivé ? demanda-t-elle précipitamment. Je t'ai entendu crier, tu avais l'air d'être mort de trouille...

Toute ironie avait déserté les traits de la jeune fille et il n'hésita pas longtemps avant de se confier.

- Il y a un bureau là-haut, avec... plein de poupées flippantes. Je te cherchais, et je me suis laissé surprendre.

- L'angoisse. Le Marquis devait être complètement taré pour garder ça chez lui.

- Sauf si ça avait appartenu à sa femme. Auquel cas, c'est elle qui était maboule, parce qu'il faut avoir un sérieux problème pour collectionner des monstres pareils.

- Au moins, conclut la jeune fille, soulagée, elles ne se sont pas mises à bouger. , ça aurait vraiment fait film d'horreur.

- Ne m'en parle pas. Et toi, pourquoi tu as crié ? Je te jure que si c'était encore une blague...

- Non, non, plus de blague, promis. Je suis entrée dans une pièce, et une armoire a failli me tomber dessus.

La jeune fille leva son poignet, qui arborait une impressionnante balafre sanguinolente.

- En plus, quand elle est tombée, il y avait plein d'insectes en dessous. Ça grouillait de partout, c'était ignoble... Il y avait même une araignée... grosse comme ça, ajouta Violette en mimant avec ses doigts une bestiole de la taille d'une assiette.

Ethan douta qu'elle lui dise la vérité, mais le visage apeuré de la jeune fille le retint de démentir ses dires.

- Tu vois que c'est flippant, les insectes.

- Allons-nous-en.

A sa grande surprise, ce n'était pas Ethan qui avait prononcé ses mots, mais Violette.

- Bonne idée. Je vote même pour qu'on ne remette plus jamais les pieds ici.

- Vote à l'unanimité, alors... ça me fait mal de l'admettre, mais mon père avait raison. Mais puisqu'on ne reviendra pas, ajouta-t-elle avec un air mutin, je suggère qu'on fasse d'abord un tour par le jardin.

- Tu es vraiment incorrigible...

Mais quitter l'atmosphère sombre et humide du manoir désaffecté et retrouver l'air frais du dehors lui permit de recouvrer ses esprits et quand il descendit les marches du perron, sa peur s'était déjà quasi volatilisée. Comme le soleil brillait au-dessus d'eux, il se sentait même d'attaque pour explorer le jardin en friches de feu Monsieur le Marquis. Ils n'étaient pas à l'abri des serpents et autres bestioles de la campagne, mais à l'air libre, ils se sentaient moins vulnérables et errèrent dans le sous-bois derrière le manoir.

En tête de l'expédition, Violette furetait à droite à gauche, battant les hautes herbes de ses mains. Elle avait déjà pris un peu d'avance quand, caché par une haie d'arbres touffus, Ethan remarqua un vieux puits sur lequel le lierre avait élu domicile. Intrigué, il s'approcha. Une petite toiture aux tuiles verdies par les années protégeait un large orifice condamné par des planches en bois. Malgré tout, il pouvait distinguer par les interstices du bois une forme sombre flotter à la surface de l'eau croupie. Elle était bien trop petite pour être un cadavre – de toute façon, il avait eu sa dose de sensations fortes pour la semaine – mais cette étrange ombre l'attirait. Il se pencha dangereusement en avant. Les planches n'auraient pas supporté son poids.

- Hey !

Violette était revenue sur ses pas, l'avait fermement saisi par le col et tiré en arrière. Le jeune garçon, toujours sous l'emprise du puits, tenta de résister pour faire bonne mesure mais son amie avait de la poigne et ils se retrouvèrent bientôt tous les deux les fesses dans l'herbe.

- Tu as perdu la tête ?

- Je... Je ne sais pas ce qui m'a pris. Tu as vu, il y a un truc dans l'eau ?

Violette le regarda d'un air goguenard.

- Bien sûr, dit-elle d'un ton trainant. La Marquise ?

- Non, un vrai truc !

- Bon, allez, Ethan, ça suffit.

Une sorte de malaise flou envahit le jeune garçon. Il avait envie de vomir, et cette fois-ci, il était persuadé que ses jambes seraient incapables de le ramener chez lui.

- Et si on y allait, cette fois ?

Il ne broncha pas lorsque la jeune fille le traina par le poignet.

Ethan passa la soirée dans un était semi-comateux. A son retour, pris d'une soudaine crise de morosité, il erra dans la maison comme une âme en peine et toucha à peine à son assiette, inquiétant les adultes de la maisonnée. Lorsqu'ils essayèrent de l'interroger, celui-ci ne répondait que vaguement, au pire par un signe de main leur indiquant de laisser tomber, au mieux par un « mais si, ça va. »

Il ne donna rendez-vous à Violette ni le lendemain ni le surlendemain. La jeune fille, pas encore tout à fait remise de son escapade chez le Marquis, ne tenta pas non plus de le joindre, et le jeune garçon resta la plupart du temps cloîtré dans son réduit à ruminer des pensées noires.

Une pensée en particulier le taraudait. Il y avait quelque chose au fond du puits, une chose qu'il n'avait fait qu'entrapercevoir mais qu'il voulait absolument tenir entre ses mains.

La troisième nuit après l'incident, sa décision fut prise.

Il devait y retourner.

Salut la team! (Mes introductions sont de pire en pire, je prends mes aises) 

Quels sont vos retours sur ce nouveau chapitre? Une idée de ce qui va se passer ensuite? Faites-moi part de vos hypothèses les plus folles! 

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