Chapitre 17

— Papa... Papa, tu es là ?

Allongée sur un lit d'hôpital, à l'écart dans un coin isolé de l'infirmerie de l'Arcadia, Tianna chercha une position plus confortable sur ses oreillers, sans grand succès. La fillette se tortilla dans l'espoir de calmer les démangeaisons qui irritaient ses avant-bras, mais ses mouvements n'eurent pour seul résultat de tirer sur les aiguilles des perfusions plantées sous sa peau, ce qui lui arracha un « aïe » étouffé.
Elle souffla de dépit.

— Papa ? répéta-t-elle.

Harlock avait dû s'absenter pendant qu'elle se reposait. Elle savait que ce devait être normal, qu'il avait un travail très important à bord de l'Arcadia parce qu'il était capitaine, et qu'il était sûrement parti vérifier que son équipage lui obéissait bien, mais elle s'était habituée à ce qu'il soit présent à ses côtés depuis qu'il était venu la chercher, jour et nuit, pour la consoler et atténuer ses cauchemars.
En plus, il était blessé à sa jambe, donc il aurait dû rester à l'infirmerie avec elle, non ?

— Papa !

Elle avait crié. Ça la fit tousser, lui rappelant que, en plus des deux perfusions dans chacun de ses bras, un long tuyau rejoignait la base de son cou et s'enfonçait dans son œsophage jusqu'à son estomac. De longs spasmes douloureux soulevèrent sa poitrine et lui arrachèrent des larmes de souffrance et de colère mêlées. Pourquoi n'était-elle pas comme les autres petites filles ? se demanda-t-elle, une fois de plus. Pourquoi avait-elle besoin de l'aide d'un médecin pour se nourrir ?

— Là... Là... Du calme. Ne t'inquiète pas, ton père ne doit pas être loin, va...
— Je veux... mon papa... maintenant ! hoqueta-t-elle.

Elle savait qu'elle allait bientôt retourner sur Ethaniel parce qu'Harlock le lui avait dit. Elle en était triste, bien sûr, mais elle comprenait que c'était mieux pour elle : la Mère Supérieure, sous ses dehors sévères, était très douce pour calmer ses peurs psychiques, et le matériel médical du temple était plus adapté à ses besoins que celui de l'Arcadia. Mais avant qu'elle ne parte, elle tenait à profiter de chaque instant qui lui restait avec son papa.
Et tant pis s'il ne pouvait pas bien faire son travail de capitaine pendant ce temps !

                                                  —————

— Je pense qu'on aurait quand même pu rester en limite de l'orbite d'Aqualis, histoire d'appuyer le bon déroulé des négociations. Tu ne crois pas, Kei ?
— Oh, je ne suis pas sûre que l'amiral Zero aurait apprécié.

Yulian secoua la tête. L'amiral Zero et le commandant Oki étaient repartis avec Sérhà vers Aqualis il y avait déjà de cela quatre jours, juste avant que l'Arcadia ne quitte le système planétaire. Les deux officiers des Forces Solaires paraissaient bien décidés à servir d'intermédiaire pour négocier un cessez-le feu entre loyalistes et progressistes sylvidres (et de toute évidence très confiants sur le poids de la Terre pour aboutir à une solution acceptable). Sérhà leur avait assuré de les mettre en relation avec les dignitaires de son peuple.
La suite était désormais entre les mains des diplomates.

— Non, probablement pas, convint-il.

La proximité d'un vaisseau pirate tel que l'Arcadia avait tendance à crisper les gens, en effet. À moins qu'il ne s'agisse de la proximité d'Harlock...
Yulian eut un sourire entendu. Harlock était indissociable de l'Arcadia. Où l'un se trouvait, l'autre n'était jamais loin. Il avait pu le constater de ses yeux, lorsque le vaisseau vert avait violemment abordé la nef sylvidre, renversant la situation au moment même où elle semblait perdue. Un chronométrage parfait. Presque... surnaturel.
Il fixa sa console d'un regard absent. Il avait l'impression qu'il s'était écoulé des siècles depuis qu'il avait été réquisitionné pour participer à cette « opération de sauvetage », fermement convaincu qu'il ne serait d'aucune utilité. En réalité, tout s'était conclu en quelques jours. Et il y avait pris une part active.

— C'est curieux... murmura-t-il pour lui-même... de s'apercevoir que des actions si éphémères puissent se révéler si importantes sur le cours de notre vie.

Il se retourna vers Kei. L'Arcadia croisait à l'écart des routes commerciales, sous bouclier de camouflage et à vitesse discrète. L'équipage en profitait pour prendre du repos, et les postes de quart avaient été allégés au maximum. La jeune femme blonde passait cependant plus de temps en passerelle qu'il n'en fallait, en témoignaient ses traits tirés par la fatigue.
Yulian se mordit la lèvre inférieure, pensif. Harlock provisoirement indisponible (même si son ingérence se faisait de plus en plus sentir au fur et à mesure qu'il récupérait sa mobilité), Kei assumait seule la totalité de la charge de travail habituellement partagée entre le commandant et son second. Elle avait besoin d'un adjoint pour la suppléer et ainsi pouvoir tenir dans la durée – leur petite excursion sur Aqualis avait mis en évidence le fait qu'Harlock pouvait être absent pendant un laps de temps assez long, et ce serait pêcher par optimisme de croire qu'une telle situation ne se reproduirait jamais.
Et aucun membre d'équipage n'avait les épaules assez solides pour appréhender la complexité des systèmes de l'Arcadia dans leur ensemble, songea Yulian. Aucun... à part lui.

Il inspira profondément.

— Je me sens capable de prendre à ma charge la maintenance du système informatique du bord, annonça-t-il sans transition. J'ai détecté de nombreuses failles de sécurité que je peux corriger sans problème, et je pense qu'on peut également remplacer certains composants obsolètes pour booster encore les performances de l'ordinateur principal.

Certes, ce n'était pas encore à proprement parler une place qui le propulserait au même niveau que Kei. Mais l'ordinateur principal était la clé, il en était persuadé. L'ordinateur contrôlait l'Arcadia. L'Arcadia était lié au capitaine. S'il contrôlait l'ordinateur... C'était plus que ce que Kei n'était capable de faire, en tout cas. De son propre aveu, elle avait été impuissante à empêcher l'Arcadia de rejoindre Harlock.
Kei le fixa avec intérêt, une lueur amusée au fond des yeux.

— J'en parlerai au capitaine, mais pour ma part je n'y vois pas d'objection.

Yulian approuva d'un geste, même s'il n'était pas tout à fait satisfait de la réponse. L'ordinateur était la clé. Il avait besoin de précisions. Et ce qu'il venait de vivre lui avait donné davantage de confiance en lui qu'il n'en avait jamais eu.

— Il y a quelque chose à savoir à propos de l'ordinateur principal ? insista-t-il.

Kei fronça les sourcils, hésita, comme si elle cherchait à rassembler des idées éparses.

— Le cœur de l'Arcadia est l'héritage de Tochiro, dit-elle enfin. Il a mis... toute son âme dans cet ordinateur.

Et Tochiro avait été un génie, se souvint Yulian. Il avait conçu un vaisseau inégalé, non pas pour ses systèmes d'armes ou son endurance au combat, mais surtout pour les exceptionnelles performances de son IA. Une IA qui, les événements venaient de le démontrer, était capable de prendre des décisions fondées sur l'émotionnel et non sur la logique.
Une IA... ou autre chose.

— Toute son âme, répéta Kei, le regard dans le vague. Et tu y trouveras ce que tu acceptes d'y voir.

                                                  —————

— Je suis revenue.

Stellie ne savait pas trop pourquoi elle avait à nouveau bravé le labyrinthe du cœur, mais cela lui avait semblé important.

— Je ne reste pas, ajouta-t-elle en levant les yeux vers les ramifications de câbles qui coiffaient la colonne immense de l'ordinateur principal.

Illusion ou réalité, le chemin qui menait jusqu'à la salle de l'ordinateur avait été plus court que lorsqu'elle l'avait parcouru avec Yulian, les coursives moins étroites, l'atmosphère moins sombre. C'était comme si les lieux étaient soudain devenus... accommodants.

— Le temps n'est pas encore venu.

L'adolescente sursauta. Aucun bruit, aucun frémissement n'avait troublé l'air, et pourtant Mimee était maintenant à ses côtés, éthérée et fantomatique.
Apprivoise tes sentiments. Trouve ta place.
C'était ce que l'extra-humaine lui avait dit la première fois qu'elle l'avait rencontrée. Stellie sourit amèrement. Sa place ? Elle n'avait pas trouvé sa place ici. Elle avait rêvé longtemps à l'Arcadia, convaincue que la réalité du vaisseau pirate fusionnerait avec le monde utopique qu'elle s'était construit durant son enfance.
Mais ce rêve n'était pas le sien.

— Ce rêve est celui d'Harlock, déclara-t-elle sans vraiment s'adresser à Mimee.

Elle laissa les mots s'envoler vers les hauteurs de la pièce en forme de dôme, rebondir, revenir en milliers de petits échos ténus. L'Arcadia était un rêve qui ne lui appartenait pas.
La liberté d'Harlock était un vaisseau de quatre cents mètres de long. Elle ignorait encore sous quelle forme se matérialiserait sa liberté à elle, mais elle savait maintenant qu'il lui fallait trouver la réponse seule. Harlock avait été un modèle pour elle. Il lui avait montré la voie à suivre. Elle pouvait à présent se détacher de lui. Choisir sa propre voie.
Être libre.

— Je voulais être lui. Mais je ne peux pas.
— Personne ne le peut.

La présence de Mimee emplissait la salle d'une lueur verdâtre. Des ombres prenaient tout à coup vie, fuyaient lorsque le regard de Stellie tentaient de s'accrocher à elles, tournaient, revenaient. L'ordinateur était soudain animé du clignotement de centaines de diodes.
Et il y avait des bruits. Comme des chuchotements.
Lorsque ce sera fait... Reviens nous voir.
Les mots s'inscrivaient dans sa mémoire avec une netteté presque surnaturelle. C'était ce que Mimee avait dit.

Stellie hésita. Elle n'avait pas fait attention à ce détail, la première fois... « Nous » ?

Les chuchotements montèrent en intensité, devinrent des notes. L'adolescente leva un sourcil. Elle connaissait cette musique ! Son père était mort alors qu'elle était trop jeune pour se souvenir de lui autrement que par une image floue, mais elle n'avait jamais oublié cette berceuse qu'il lui chantait toujours.
Elle sourit.

— Je reviendrai et tu seras fière de moi.

                                                  —————

Le barman vérifia une dernière fois son paquetage avant de le tasser dans le compartiment à bagages exigu d'un spacewolf. Le plan de vol de l'Arcadia n'approcherait pas Rhô-Andeggar à courte échéance, et l'Octodian était résolu de quitter le vaisseau pirate avant qu'il ne reprenne trop le goût du sang. Un autre combat comme celui qu'il avait mené sur le croiseur sylvidre, deux peut-être, et il basculerait à nouveau dans l'ivresse de la violence qui avait caractérisé ses jeunes années.
Et il se refusait à ce que le gamin découvre cette facette sombre de sa personnalité.

— Vous partez avec un spacewolf ?

Un mécanicien en manches de chemise et couvert de cambouis le fixait avec curiosité.

— J'ai besoin d'un appareil équipé warp longue portée, expliqua le barman. Harlock m'a donné son accord.
— Pour un spacewolf ? insista le mécano.

Les spacewolfs étaient des biréacteurs légers d'attaque. Un seul pilote, et les meilleures performances que l'on puisse trouver sur ce type d'appareil que ce soit en termes d'attaque, de résistance ou de maniabilité. Le barman pouvait comprendre que ce mécanicien rechigne à laisser s'échapper un tel petit bijou alors qu'une navette aurait parfaitement fait l'affaire... à condition que la seule navette de l'Arcadia qui disposait de l'endurance suffisante pour rejoindre Rhô-Andeggar ne se soit pas crashée à la surface d'Aqualis, évidemment.
Le barman haussa les épaules. Il restait assez de spacewolfs sur l'Arcadia pour ne pas pénaliser ses capacités de projection offensive. Et puis il n'avait pas menti : Harlock lui avait donné son accord (même s'il était vrai qu'il avait un peu dû insister).

— Je le rangerai dans mon garage. Vous pourrez le récupérer la prochaine fois que votre capitaine passera me voir.
— Bien sûr. Sauf si vous le revendez en pièces détachées, grommela l'homme.

Le barman ne protesta pas (en partie parce qu'il y avait effectivement pensé). Après tout, il ignorait dans quel état il allait retrouver le Metal Bloody Saloon à son retour (ou plutôt et vu l'endroit où il était installé, il supposait qu'il avait été pillé moins de cinq minutes après son départ). Il n'aurait donc aucun scrupule à négocier des morceaux de spacewolf pour se réapprovisionner en alcool.

Le mécanicien finit par s'éloigner, tout en continuant à le surveiller à la dérobée d'un air suspicieux. Bob n'en tint pas compte. Qu'est-ce qu'il croyait, ce type ? Qu'il allait se servir dans les stocks de pièces détachées du bord pour monter un commerce parallèle sur Rhô-Andeggar ? (de toute façon, il n'y avait rien d'intéressant dans les caisses alentours : il avait regardé).
Le barman grommela deux trois jurons entre ses dents et se reconcentra sur ses bagages. Harlock lui avait proposé de rester une bonne dizaine de fois ces derniers jours avant de se résigner à lui prêter un de ses appareils. L'Octodian avait été près de céder. Trop près.
Il secoua la tête, comme si par ce geste il avait pu chasser les images de massacres qui le hantait. Le temps des pirates était révolu pour lui. Il était trop vieux pour ces conneries, avait-il répété à Harlock jusqu'à ce qu'il l'ait convaincu et qu'il se soit convaincu lui-même. Son bar l'attendait.
Il partirait avant ce soir. Avant qu'il ne change d'avis.
Et il emmènerait Stellie.

                                                  —————

— Toi ! J'attends des explications !

Harlock s'efforça d'adopter la pose la plus autoritaire qu'il puisse prendre, ce qui n'était pas une tâche aisée alors qu'il traînait péniblement sa jambe cassée dans les coursives. Le doc avait certes fini par céder à ses récriminations incessantes et lui ôter le caisson de régén' (au final, Harlock avait calculé avoir gagné vingt-quatre heures sur la durée optimale de maintien en place de ce truc. Une maigre victoire, mais une victoire quand même), mais le capitaine n'en avait pas été libre de ses mouvements pour autant. Les os de sa jambe (et de son genou en particulier) étaient en effet encore trop fragiles pour que Zero l'autorise à gambader sans protection. Le médecin-chef l'avait donc équipé d'une autre attelle, plus légère et ergonomique que la régén', mais toujours aussi peu pratique pour se déplacer.
Le capitaine de l'Arcadia avait dû se résigner à utiliser des béquilles, et c'était très mauvais pour son aura de commandant pirate incontestable et incontesté.

— Meaw.

Sans compter qu'il parlait à un chat.
Chat qui ne montrait d'ailleurs aucun signe de culpabilité, voire même se fichait totalement des griefs qu'Harlock pouvait bien formuler. Au fond du local technique dans lequel il avait établi ses quartiers, le félin, confortablement installé sur le capot d'une unité de diagnostic, le fixait de cet air à la fois hautain et blasé que seuls les chats sont capables de prendre.

— Ne crois pas que je n'aie pas remarqué ton petit manège !

Bon, en fait, le seul petit manège qu'Harlock avait remarqué, c'était que la bestiole semblait se trouver toujours au bon endroit au bon moment. Alors certes, cela faisait beaucoup de foutues coïncidences, mais l'on pouvait toujours imputer ça à l'infaillible instinct animal... à condition d'exclure cette histoire de projection astrale.
Les chats étaient-ils doués de pouvoirs psychiques ? s'était demandé Harlock sans parvenir à trouver de réponse satisfaisante. À défaut, les chats étaient-ils sensibles aux pouvoirs psychiques de leur entourage ? Pourquoi pas, et cela expliquerait le fait que cet animal les ait retrouvés, Tianna et lui, à l'intérieur du monde psychique de la fillette, mais c'était quand même bizarre.

Harlock en avait touché un mot au docteur Zero, mais celui-ci était davantage préoccupé par l'état de sa jambe que par ses questionnements métaphysiques sur les chats. Tochiro était resté muet. Mimee n'avait pas paru comprendre.

— Si l'ordinateur ne réagit pas au danger, lui avait-elle répondu, alors le danger n'a pas d'existence dans la réalité. Tu n'as pas à t'inquiéter.

Le danger n'existait peut-être pas, mais le chat était là, lui. Harlock n'avait cependant pas réussi à intéresser Mimee à l'animal. Comme si le chat n'existait pas pour elle.

Harlock soupira. Mimee ne s'était pas plus intéressée au chat qu'à Tianna. C'était sa fille et elle l'ignorait. Sa petite fée de cristal. Le capitaine avait espéré que ce maudit problème de compatibilité psychique se serait résolu de lui-même. Il semblait qu'il allait devoir attendre encore. Peut-être plus tard, tenta-t-il de se persuader. Encore quelques mois. La prochaine fois.
Cela durait depuis quatre ans.

— Meaw.
— Oh, laisse-moi. J'ai des soucis plus importants à gérer.

Sa petite fée s'envolerait bientôt, se rappela-t-il. Il se devait de passer le maximum de temps avec elle. Pour elle. Pour Mimee.
Pour lui.

Le capitaine se massa machinalement la joue droite. Deux fines cicatrices parallèles, vestiges presque estompés d'un coup de griffes dans un marécage, couraient de sa tempe à la base de son menton. Le doc lui avait affirmé qu'elles n'étaient pas assez profondes pour laisser une marque permanente et ne leur avait pas accordé plus d'attention qu'à une simple égratignure. Pourtant, la blessure le démangeait toujours. Des fourmillements. De fugaces sensations de brûlure. « Délires psychosomatiques », lui avait rétorqué Zero lorsqu'il s'était plaint. « Commencez par cesser de courir partout si vous ne voulez pas boiter pour le restant de vos jours. » Il n'avait pas insisté.
Il aurait bien le temps de s'en occuper plus tard.

                                                  —————

Le chat resta immobile jusqu'à ce qu'Harlock ait quitté le local pour rejoindre la coursive principale. Le capitaine hors de vue, le félin bâilla, s'étira paresseusement, puis bondit avec souplesse sur un terminal informatique, dont les quatre écrans affichaient des diagrammes dynamiques de contrôle des moteurs.

Une mince traînée de parasites persista sur les images tandis que l'animal se faufilait avec agilité entre les écrans et le clavier de commandes, s'arrêtait un instant face à un panneau de diodes, s'allongeait enfin avec volupté sur le coffrage de l'unité centrale chauffé par l'activité continue des composants électroniques.

L'ordinateur s'éteignit.


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