Chapitre 5

Ce matin était le premier que je passais loin de ma famille, c'était mon premier jour de cours et c'était la première fois que j'étais terrifiée à l'idée de me retrouver nez à nez avec Decklan.

Bref, c'était le matin de l'innovation.

Autant vous dire que quand mon réveil sonna à six heures trente, je n'en menais pas large, je n'avais pas dormir et j'avais l'horrible impression qu'un camion déménageur m'était passé sur le crâne à force de trop pleurer.

Connaissant Deck, il ne se lèverait pas avant une demie-heure et j'avais donc le temps d'aller me doucher sans avoir à le croiser.

Mais c'était bien sûr sans compter sur ma malchance légendaire.

Dès que j'ouvris la porte de ma chambre, un bruit de machine à café résonna depuis la cuisine, il était donc réveillé.
J'aurais sans doute du l'ignorer...mais c'est ce que j'avais fait cette nuit et ça n'avait aidé personne.
Je pris donc mon courage à deux mains et rejoignis mon meilleur ami.

Il était comme à son habitude en train de boire son lait en fumant sa cigarette du matin, immonde mélange qui me fit une fois de plus grimacer.

- Ouvre la fenêtre quand tu fumes Deck, lui rappelais-je en allant moi-même le faire.

Je retournai ensuite m'asseoir en face de lui et vis avec surprise qu'il m'avait déjà préparé mon café.

- Merci, chuchotais-je.

Mais ce qui me surpris encore plus c'est qu'il ne me répondit rien, il fixait son verre de lait d'un air complètement perdu.

- Deck ?

-...

-hey ? Dis-je en posant doucement ma main sur son bras.

Dès que nos peaux se touchèrent il eu comme un déclic et ramena brusquement sa main vers lui.
Ce geste me fis horriblement mal et j'eus tellement de peine à retenir mes larmes que je me levai pour m'accouder au plan de travail, juste histoire qu'il ne me voit pas pleurer comme une madeleine.

- Pourquoi ? Chuchota-t-il si doucement que je me demandais si je n'avais pas rêvé.

-...

- Pourquoi ? Répéta-t-il cette fois plus fort.

- Je...j'étais fatiguée et tu étais...introuvable...

- Putain Maggie ! Tu te rends compte de la peur que j'ai eu ?! T'en as rien à foutre !

- Je

- Non, il y a autre chose, trente fois je t'ai appelé et t'as jamais décroché, il s'est passé quoi ?

- Je t'ai dit, j'étais fatiguée et mon téléphone était plat, quand j'ai vu tes messages j'étais déjà partie et

-Me prend pas pour un con ! Cria-t-il en frappant brutalement du poing sur la table.

Je sursautai et poussai un petit cri qui le fit se retourner vers moi.

J'avais des remords, contrairement à ce qu'il prétendait, je n'en avais pas rien à faire.
Mais quand je vis les grosses poches mauves sous ses yeux et son air complètement vidé, j'eus tout de même certains doutes.

Lui aussi parut étonné de me voir pleurer mais pour une fois je ne fis rien, je continuai.

- Pourquoi t'as fait ça Maggie ? Répond moi, supplia-t-il d'un ton si désespéré que mes pleures redoublèrent.

- J'étais en colère, triste...je ne pouvais juste pas...je ne voulais pas...

Cette phrase n'était pas très claire, je l'avoue. Mais je n'allais pas lui sortir que je l'avais vu se faire tailler une pipe et que ça m'avait mise en rage, moi qui était folle amoureuse de lui.

Non, la phrase pas claire était beaucoup plus sûre.

- Je n'ai pas dormit de la nuit...je suis pitoyable, dit-il, pris d'un rire nerveux. Je sais même pas dormir sans toi.

Je pense que c'est à cet instant que je pris pleinement confiance de ce que j'avais fait, je n'avais finalement pensé qu'à moi, et pas une seule fois à lui.
Decklan ne donnait pas son cœur, je ne savais même pas si il en avait un où s'il était juste incapable d'aimer qui que ce soit et je le savais ça, j'aurais dû arrêter d'espérer... mais comme une idiote je m'accrochais à lui comme un boulet, ce devrait être lui qui me fuyait, pas l'inverse.
J'avais bel et bien été égoïste, lui n'y était pour rien puisqu'il n'était au courant de rien.
Et moi comme une conne je ne pouvais pas m'empêcher d'avoir mal.

La seule chose que Decklan était près à m'offrir était son amitié et sa confiance.

Et j'avais sans doute perdu ces deux choses en agissant comme une femme trompée.
Mon dieu, et s'il décidait qu'il en avait marre, s'il se rendait compte que je ne lui apportais que des ennuis, qu'il était mieux sans moi ? Sans était-il déjà rendu compte ?

Prise de panique je m'approchai de lui par derrière, passai mes bras autour de sa taille et posai mon visage contre son dos en reniflant.
Je le sentis immédiatement ce raidir sous moi mais il ne fit rien pour me repousser, au contraire, il se détendit peu à peu et soupira.

- Je suis désolée...

- Je sais.

- Tu es en colère ?

- J'ai eu peur Mag...tu t'imagines pas la peur que j'ai eu quand après un quart d'heure à te chercher partout et à t'appeler toutes les minutes t'étais toujours introuvable.

- Tu as eu peur de la réaction de mon père ? Rigolais-je à travers mes larmes.

- J'ai eu peur de pleins de chose Mag, mais la réaction de ton père ne m'a même pas traversé l'esprit.

- Oh, fut tout ce que je réussis à dire.

- Quand t'as pas voulu m'ouvrir, c'est la que j'ai senti que je...je sais pas en fait, j'ai eu cette putain d'impression de déjà vu, j'ai cru que tout recommençais encore. Que encore, j'arrivais trop tard.

Un lourd silence s'installe alors, ma crise de larmes cesse peu à peu mais je ne bouge pas pour autant.
Alors lui aussi avait eu cette impression...

- Mags, tu devrais pas aller te préparer ? Manquerait plus que t'arrive en retard à ton premier cours de l'année.

- Je te signale qu'on a cours à la même heure, tu seras tout aussi en retard que moi, dis-je en me forçant à sourire tout en reniflant.

- Mais moi je m'en fous, toi tu vas encore stresser.

- C'est pas vrai ! M'écriais-je en lui donnant une tape sur l'épaule.

Il se retourne vers moi l'air de dire "t'essaies de convaincre qui la ?"

- Je vais prendre une douche, soufflais-je en feignant d'être mécontente alors qu'au fond, je me sentais bien mieux qu'il y a quelques instants.

- Dépêche toi, je suis prêt et je vais pas t'attendre toute la journée.

- Non mais c'est l'hôpital qui se fout de la charité là ! C'est qui qui met toujours des heures à ce préparer ? Et c'est qui qui est obligé de l'attendre parce que monsieur ne veut pas y aller tout seul ?!

- Moi ? Fait-il incertain.

- Ouais toi ! Non mais je rêve ! T'as du bol que j'ai pas mon permis parce que je te jure que la t'irais tout seul !

Il me regarde encore un moment impassible et finit à mon plus grand étonnement par éclater de rire.

- Je me tire, tu me gonfles ! Ralais-je en sortant de la cuisine où ce débile ce tordait toujours de rire.

On devait être à la limite de la bipolarité tous les deux.
Je me lave en quatrième vitesse, m'enroule dans une longue serviette et me brosse les dents, j'en profite pour m'examiner un peu. Je n'ai pas bonne mine mais c'est tout de même moins pire que ce à quoi je m'attendais.

Je démêle mes longs cheveux bruns que je relève au dessus de ma tête en chignon, pour ma première journée de cours et parce que j'ai le temps, je décide de me maquiller légèrement.

Le résultat est plutôt pas mal, c'est pas extraordinaire mais ça cache un peu ma mine fatiguée.
Je pioche au hasard un jeans trop grand avec lequel je suis obligée de faire des bords et un t-shirt blanc tout simple que je ramène à l'intérieur du pantalon.

J'enfile vite mes converses et je suis prête, je cours ensuite jusqu'au salon récupérer mon sac et vérifier que Deck ne se soit pas déjà cassé mais non, il est toujours là et envoie des messages à je ne sais qui appuyé contre le mur de l'entrée.

- Je suis prête !

- Alleluia ! S'exclame-t-il en levant les mains au ciel.

Je souris heureuse de voir que l'épisode de cette nuit est déjà à peu près oublié, Decklan n'est pas rancunier et j'en suis soulagée.

Nous arrivons bientôt à l'université et je dois bien avouer qu'à cet instant, je n'en mène pas large. Dans mon ancien lycée je pense qu'on état à tout casser 200, on pouvait passer dans un couloir sans croiser personne et moi ça m'allait très bien.
Mais ici j'ai bien peur de ne pas pouvoir traverser un couloir sans bousculer quelqu'un...

- Je veux rentrer, viens Deck on s'en va !

Mon ami se retourne vers moi surprit par ma soudaine crise de panique.

- Tu as peur mon ange ?

- Non...enfin oui ! Il y a beaucoup trop de monde !

- Tu vas te faire plein d'amis.

- Deck arrête de me parler comme a une gamine ! Et je ne veux pas de nouveaux amis !

- Aller mon ange, tu ne peux pas passer ta vie à te cacher, j'ai de la chance de t'avoir mais d'autres personnes ont le droit et auront la chance de te connaître.

- Deck, suppliais-je au bord des larmes.

Il me regarde et ris doucement en passant ses pouces sur mes joues.

- Tu as vu dans quel état tu te mets ? Tu es vraiment la fille la plus bizarre que je connaisse.

- C'est parce que tu ne prends pas la peine de connaître les autres, chuchotais-je mes yeux plongés dans les siens.

Aussitôt son sourire disparaît et son regard se fait triste.
J'ai touché quelque chose.

- Ce n'est pas très gentil ça.

Et c'est vrai, qu'est-ce qui me prend tout à coup ? Ne devrais-je pas être heureuse que justement il ne connaisse pas d'autre filles mieux que moi ?

- Oublie, je dis ça parce que je suis stressée.

Il hoche vite la tête, m'embrasse le front et sort de la voiture pour allumer sa deuxième cigarette du matin.
Cinq secondes après je fais pareil le cœur au bord des lèvres en plus et la cigarette en moins.

- Tu es toute pâle.

- Je vais vomir.

- Mais non, dit-il en me rejoignant, tu vas assurer et je parie que ce soir tu seras la fille la plus populaire de ce campus et... AÏE !

- Arrête de te moquer !

- Mais je ne me moque pas ! S'exclame-t-il en levant les mains en l'air, signe de sa bonne foi.

- Maggie !

Nous nous retournons de concert vers Rebecca qui accourt un sourire immense collée sur ses lèvres et arborant, malgré la soirée d'hier, une mine radieuse. Cette fille est vraiment canon.

- Alors, pas trop stressée ? Me demande-t-elle tout en me faisant la bise mais en prenant bien soin d'ignorer Decklan.

Ça c'est nouveau. Normalement, les rares filles qui me parlent le font toujours de façon intéressée. C'est triste à dire mais je n'ai jamais eu d'amies, bien qu'à part Deck et le vieux facteur de notre ville, je n'ai jamais eu d'amis tout court.
Mais que Reb prenne mon parti plutôt que celui de Decklan et qu'en plus, elle ne tente pas par tous les moyens de le draguer est vraiment ahurissant.

- Un peu, est la seule chose que je parviens à sortir.

- Tu vas voir, au début on a qu'une envie c'est de retourner se terrer chez papa et maman mais ça finit par passer.

- Si le but était de me rassurer c'est raté Reb, lui fais-je remarquer en grimaçant.

- Aller mon ange, quand tu rentreras ce soir je suis sûr que tu me raconteras pendant trois heures ta super journée, me confie Decklan en prenant mon visage entre ses grandes mains.

- Toi on t'a pas sonné trouffion, lance Rebecca en le fusillant du regard.

- Reb ! M'écriais-je.

- Quoi ?! C'est pas un trouffion peut-être ?! À ta place moi je lui aurais foutu une putain de raclée !

- Et on peut savoir ce que j'ai fait pour mériter le "trouffion" et la raclée ? Demande Deck en souriant pas le moins du mon fâché mais plutôt amusé.

Oh non...

- Monsieur connard se casse sans prévenir en se fichant bien de se qui pourrait arriver et après il a le culot de me demander pourquoi je lui hurle dessus !!

- Reb...

Je n'ose plus lever la tête, le connard dont elle parle c'est moi, pas Decklan, lui ne ferait jamais ça...ou en tout cas pas à moi.

- Tu l'as laissé toute seule alors que tu sais très bien qu'elle n'est pas habituée à avoir autant de monde autour d'elle ! T'es vraiment un beau trou du c

- Rebecca !

Mon amie se tait instantanément et se retourne vers moi l'air de me demander pourquoi je m'acharne à prendre sa défense.

- Tu as raison, j'ai mal agi mais je suis heureux que Maggie ai trouvé une amie aussi féroce que toi. Je sais qu'elle est entre de bonnes mains.

Je me tourne vers Deck la bouche grande ouverte de surprise, il est en train de mentir...pour moi ?

- Non ne l'écoute pas c'est moi qui ai mentis et je

- C'est gentil de vouloir endosser le mauvais rôle mon ange mais je sais me défendre.

- Deck...

- J'ai été complètement stupide, je m'en rends bien compte à présent, pas une seconde je n'ai imaginer qu'elle serait complètement terrifiée de ne pas me trouver.

Moi je le savais, je ne voulais juste pas y penser.

- Et tu prétends être son ami ?! Tu ne la connais pas imbécile ! Si il lui était arrivé quelque chose qu'aurais-tu fait ?!

-...je ne me le serais jamais pardonné.

Un long blanc passe alors, je suis assez choquée et apparemment Reb aussi.

- Vraiment ? Demande-t-elle complètement déroutée par la réponse de mon ami.

Vraiment.

- Oui.

- Deck...tu n'es pas obligé de

- Mags, tu vas être en retard.

- Oui mais

- On se retrouve à midi.

-Deck...

- Aller vas-y je te dis ! Réplique-t-il un peu trop agressif.

Finalement je me trompais, il n'a rien oublié du tout.

J'hoche vite la tête, décidant pour une fois qu'il ne vaut mieux pas tenter l'habituel bisous sur la joue.
C'est un peu comme une tradition le bisous d'au revoir, si je l'oublie, il me le rappelle.

Mais cette fois-ci, il ne dit rien.

Ouais, il a vraiment pas oublié.

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