Chapitre 25

PDV Jérémy

Je dois être idiot. C'est la seule explication que je peux trouver. Il n'y en a aucune autre de valable. Pourquoi ai-je laissé Josh prendre toute cette place dans ma tête ? Au final, comme pour Aaron, ça ne rime à rien. L'un me promet monts et merveilles pour mieux m'en foutre un devant ses potes, l'autre m'embrasse pour ensuite se taper une fille dans les toilettes.

Je n'aurai jamais dû commencer à penser à lui. Mais bon, après tout, ce n'est pas comme si je l'avais décidé. Il s'est insinué dans mon esprit sans que je ne puisse rien y faire, et me voilà maintenant comme un con.

Je ne comprends pas son attitude. Rien ne me paraît logique, dans sa façon de se comporter. Il m'embrasse, trois fois, il détruit les personnes qui me font du mal, se met dans une colère folle quand quelqu'un me touche. Et derrière, il baise une fille dans les WC. Et surtout, il l'embrasse en me fixant, comme pour s'assurer que je l'ai bien remarqué. Que j'ai bien compris tout ce qu'il allait lui faire. Il n'avait qu'à la prendre dans ce couloir, tant qu'à faire !

Mon cœur a eu un loupé, quand il a fait ça. Et encore aujourd'hui, après plus d'une semaine, je n'arrive pas à arrêter d'y penser. Je n'arrive pas à arrêter d'être blessé chaque fois que la scène se rejoue dans ma mémoire. Pourtant, il ne me doit rien. Nous ne sommes pas un couple, ni des amants, il n'y a pas de sentiments, pas de relation particulière entre nous. Il n'y a rien, c'est le mot. Mais je suis tout de même touché, et je ne comprends pas pourquoi. Je comprends seulement qu'il a pris bien plus de place dans mon esprit que ce que je pensais.

Je me sens con, stupide, et tous les adjectifs que l'on peut utiliser. Parce qu'encore une fois, je me suis fait avoir. A la différence que cette fois-ci, je me suis monté la tête tout seul, parce qu'il ne m'a rien promis. Au contraire, il a bien dit ne pas comprendre lui-même.

Josh est un grand séducteur. Josh aime les femmes. Je ne devrais pas être surpris de l'avoir vu dans une telle situation. Je l'ai déjà vu, et je n'en ai jamais rien eu à faire. Mais cette fois c'est différent. Et puis pourquoi a-t-il agit de cette façon avec moi, alors qu'il n'est ni gay, ni intéressé par moi ?

Ma vie ne ressemble à rien, en ce moment, et j'ai l'impression que c'est de pire en pire. Entre Aaron, Andrews, et maintenant ce bad boy, rien ne va plus. Je ne sais pas comment gérer tout ça. Je suppose qu'il n'y a aucune bonne façon de le faire.

J'ai bien vu que Lucy et Zoé s'interrogent sur ma façon d'être. Il faut dire que j'évite un maximum de me retrouver avec le gang ces derniers jours. Ce qui n'est pas chose aisée quand il s'agit de mes seuls amis. Mais je n'ai pas envie de le voir. Je ne veux pas croiser son regard, car cela me ramènera à cette scène. Je l'imagine déjà suffisamment souvent de moi-même pour n'avoir besoin qu'il me la rappelle d'avantage.

Je n'ai pas envie de leur expliquer pourquoi j'agis ainsi. Tout simplement parce que je ne comprends pas bien moi-même ce qui m'arrive, en ce moment. Tout est bien trop flou pour que je n'arrive à y mettre des mots. Comment pourrais-je simplement leur dire que Josh m'a embrassé plusieurs fois, et que j'en reste tout chamboulé ? Et que malgré le mal que le voir dans les bras d'une fille m'a fait, j'ai envie de recommencer ?

Parce que je ne peux pas le nier. Mon cœur qui s'affole chaque fois que j'y pense en est la preuve. J'ai envie de sentir à nouveau ses lèvres sur les miennes, de ressentir toutes les folles sensations qui m'envahissent lorsque cela arrive. Mais j'ai bien trop peur de ne voir ses lèvres toucher celle d'une autre personne sitôt qu'elles auront quittées les miennes.

Je souffle un bon coup, secouant la tête. Il faut que j'arrête d'y penser, et que je me concentre sur ma journée. J'ai déjà passé bien trop de temps ce week-end à ressasser tout ça, et d'ailleurs, l'expression jour et nuit prend tout son sens. Peu importe l'heure, j'ai passé mon temps à revoir la scène, et à en imaginer la suite. Rien de bien agréable.

Je rentre dans l'établissement, décidé à ne pas ressasser tout ça. Il est temps de repartir sur de bonnes bases. J'avance vers mon casier et je suis vite rejoins par Jack, qui m'affiche un grand sourire. Ce type a toujours l'air heureux. Je me demande si ça lui arrive de ne pas l'être. Sûrement, et je me doute qu'il doit paraître bien impressionnant, lors de ses missions. J'en ai déjà eu un aperçu.


- Tu as passé un bon week-end Jérem' ?


Non, absolument pas, j'ai pensé à ton pote qui baise une fille à la place de ma propre personne. Ce n'est évidemment pas ce que je vais lui répondre. Mais rien que de le penser me fait rougir. Je viens vraiment de sous-entendre que Josh devrait me... ? Mon dieu. Je délire.

Je me contente d'acquiescer et de lui retourner la question.


- Oh tu sais, quelques bagarres, un peu d'échange pas trop légal, un week-end classique.


Oui, tout ce qu'il y a de plus classique, évidemment. Je laisse glisser un sourire sur mon visage avant de lui dire que je le rejoins en classe, ayant besoin de m'arrêter aux toilettes. Il lève un pouce et part tranquillement vers la salle de classe, tandis que j'avance vers le fameux lieu.

En en ressortant –je vous passe les détails de ce moment– je sursaute en sentant une main sur mon épaule. Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir à qui elle appartient. C'est comme si je sentais son horrible aura s'entourer autour de moi avant même qu'il n'ait besoin d'ouvrir la bouche. Je sens son corps se pencher en avant et il vient placer sa bouche près de mon oreille.


- Et si on allait discuter tous ensemble ?


Son ton n'a rien d'amical. Il me fait frissonner, alors qu'il me pousse vers la sortie intérieure du bâtiment. Je voudrais interpeller quelqu'un, mais comme toujours, dans ce genre de moment, je ne croise personne. Je ne vois pas combien ils sont. Mais en entendant les pas et les rires, et je sais que je n'ai pas moyen d'essayer de courir pour m'échapper. Et puis ce sont des sportifs. Ils auraient vite fait de m'attraper.

Mon cœur bat vite. Je sens l'angoisse monter en moi, surtout quand ils m'entraînent dans des vestiaires, et que j'entends le verrou se bloquer.

Andrews me retourne et je constate qu'ils sont 5, mais qu'Aaron n'est pas présent.


- Ça fait longtemps qu'on ne s'est pas vu !


Pas assez, j'ai envie de dire. Mais cette fois-ci, je n'ose pas répondre. Parce que je sens que cela va aller plus loin que les dernières fois. Je sais qu'une nouvelle limite va être franchie, aujourd'hui. Et j'ai peur de ce que cela va être. Malgré ce qui a pu se passer ces derniers temps, je ne pense qu'à une chose : Josh. Je voudrais qu'il débarque ici. Je voudrais qu'il les arrête avant qu'ils n'aient pu commencer. Mais il n'est pas là.


- Je t'ai manqué ?


Il ne pose pas vraiment la question. Il n'y aurai pas de bonne réponse de toutes façons.


- Moi, tu vois, tu m'as manqué. Alors j'ai imaginé une bonne façon de nous retrouver !


Il y a une excitation dans sa voix que je ne comprends pas. Comment peut-on être impatient de faire du mal à une autre personne ? Ça me dépasse. Il faut dire que je ne pense pas comme un psychopathe contrairement à lui.

Je me tords de douleur quand son poing vient s'abattre sans plus de paroles dans mon abdomen. Mes bras viennent entourer la zone touchée, mais j'ai à peine le temps de m'en remettre que son genou vient taper dans mon nez. Une vive douleur naît, et si je me doute qu'il n'est pas cassé –pas encore– je sens le sang s'en échapper. Une main sur chacune de mes blessures, je recule d'un pas, m'appuyant contre l'arche ouverte sur les zones de douches.


- J'ai essayé de me dire qu'on pourrait peut-être te laisser tranquille.


Il marque un temps d'arrêt, comme si il voulait mettre du suspens. C'est bien inutile. Je sais ce qu'il s'apprête à dire, et je sais que c'est le coup d'envoi de tout ce qui va suivre.


- Mais au final, je me suis rappelé que tu étais une pédale. Et je n'aime pas les pédales.


Je voudrais être capable de lui répondre. Mais outre le fait que je ne suis ni en état ni en position, je sais à quel point ce serait inutile. Il ne changera jamais d'avis. Son esprit est bien trop étriqué pour accepter un autre modèle que le sien. Et la violence est sa seule forme de communication.

Sa main s'avance vers moi et il agrippe mon t-shirt pour me tirer vers lui. Il m'envoie au sol, tandis qu'une douleur naît dans mon coude dû au choc contre le carrelage. A partir de là, je ne sais plus d'où viennent les coups, mais ils sont bien trop nombreux pour que je ne les compte. De pied, de poing, sur l'ensemble de mon corps. J'essaye de protéger mon visage tant que je peux, et je sens la douleur percer de partout. Je ne peux me retenir de crier. J'ai trop mal. Jamais je n'ai ressenti une telle douleur.

Mais ce n'est rien comparé à la peur qui s'empare de moi quand ils s'arrêtent et qu'Andrews se saisit de mon t-shirt, tirant dessus.


- Déshabillez-moi cette tarlouze.


La phrase me glace le sang. Et pour la première fois depuis que je suis ici, j'essaye de me débattre. Cela ne fait qu'augmenter leurs rires, et leur hargne. Je retiens les mains de celui qui me retire mon haut avant d'essayer de repousser avec mes pieds celui qui tente de me retirer mon pantalon. Je gesticule, dans tous les sens, quand un pied rentre violemment avec ma joue. La douleur me fait arrêter quelques instants de bouger, et ils en profitent pour me retirer ce que je porte. Ils me laissent en caleçon, et je prie pour qu'ils n'aillent pas plus loin que cela.

Les coups, l'humiliation, si ils veulent. Mais pitié, pas plus.

Je suis presque soulagé quand ils sortent des stylos de leurs poches et qu'ils se penchent sur moi. Je ne sais pas bien ce qu'ils écrivent sur l'ensemble de mon corps, mais je sais que ce ne doit pas être très glorieux. Je n'arrive pas à bouger. Je voudrais me débattre, mais je n'en ai plus la force. Même quand ils viennent me prendre les quatre membres et me soulever de cette façon, pour me traîner jusque dans les douches.

De là, les coups pleuvent encore. Les insultes et les menaces aussi.


- Qui sait, si on frappe assez fort, peut-être que tu redeviendras normal.


Je voudrais lui dire que la seule erreur de la nature ici, c'est lui. Mais je suis bien incapable de lâcher le moindre mot. Mon corps n'est que souffrance. Je gémis, n'ayant même plus la force de crier. Depuis combien de temps suis-je dans ce vestiaire ? Depuis combien de temps me passent-ils à tabac ?

Personne n'est venu. Me cherchent-ils ? Je suppose que oui. J'espère qu'ils vont me trouver.

Un coup de pied dans la poitrine me renvoie en arrière. Mon crâne frappe contre le carrelage de la douche et je me sens sonné pendant un instant, si bien que je ne sens plus les nouveaux coup.

Et puis de l'eau fraîche qui se verse sur moi me fait reprendre mes esprits. Elle est si froide.

J'entends leurs rires, et je ferme les yeux. Leurs pas semblent s'éloigner de moi, le verrou se déclencher, et la porte se refermer. Je gèle. Mais je n'ai pas la force de bouger pour arrêter l'eau. Ni pour sortir de cet endroit. Je garde juste les yeux fermés.

Et je me demande si je vais m'en sortir.  

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