Chapitre 2
PDV Jérémy
2 mois plus tôt.
Je souffle alors que la voiture s'engage à vitesse réduite dans l'allée ombragée. Si j'ai pu échapper à cette tradition familiale l'an passé, ma mère n'a pas lâché le morceau cette année. Me voilà donc dans un camping à plus deux heures de chez moi, avec ma génitrice, ma tante, ma cousine et ma grand-mère. Et quand on a mon âge, la perspective d'être loin de ses amis, entouré de membres de la famille exclusivement féminin pendant toutes ses vacances d'été, ce n'est pas le programme idéal. Bien que je les aime sans limite, j'aurai préféré rester à la villa et profiter des jours heureux que nous pouvons enfin nous octroyer après une nouvelle année mouvementée.
J'espère d'ailleurs que la suite ne sera pas aussi pleine de mauvaises surprises que les deux précédentes. Si tout le monde pouvait éviter de se faire kidnapper...
Ma tante se gare devant l'emplacement qui nous est réservé, et alors que tout le monde descend, excité, je reste là à regarder l'écran de mon téléphone. Pas de réseau, évidemment.
- Lâche un peu ton téléphone tu veux ! Aides-nous à décharger le coffre.
Je souffle et range l'appareil dans ma poche avant d'attraper une valise.
- Et souris, ça va pas te tuer.
Non, mais peut-être me donner des crampes aux joues, qui sait. Autant ne pas prendre de risque.
En avançant vers le mobilhome que nous allons partager à 5, mes yeux dérivent vers la terrasse voisine. Un homme si tient, plutôt jeune vue son style, mais il est de dos. Je ne vois que ses cheveux bruns bouclés. Je détourne le regard et rentre à l'intérieur, ayant autre chose à faire que de m'attarder sur le dos d'un inconnu. J'ai à peine poser les valises que je tiens que ma mère m'appelle encore.
- Quoi ?
- J'avais oublié de te prévenir, mais nous avons du prendre un trois chambre. Tu partageras avec ta cousine.
- Hein ? Mais pourquoi ?
- Parce que tu vas être gentil et laisser une chambre à ta grand-mère.
C'est vrai que c'est tout à fait logique que je partage ma chambre avec une fillette de 12 ans plutôt que ma grand-mère soit avec elle ou avec une de ses filles. Mais bon, c'est toujours comme ça, j'ai l'habitude. Je profite qu'elle me laisse un peu tranquille pour me poser sur le petit lit qui va m'accueillir.
Laura, ma cousine, arrive et se jette sur le lit d'à côté, commençant à parler sans s'arrêter. Adieu intimité, on se revoit dans 2 mois.
Je finis par la laisser, quand elle fait une brève pause dans son récit passionnant de pré-adolescente. Je n'ai pas le temps de m'installer sur la terrasse que j'entends ma mère hurler depuis sa propre chambre.
- Jérémy ! J'ai oublié la sauce pour ce soir ! Va à l'épicerie tu veux ?!
Je souffle, tournant la tête, et me stoppe. Je vois alors le jeune homme de tout à l'heure, debout, en train de me regarder, intrigué. Il faut dire que ma mère n'a pas dû passer inaperçue, et son cri a dû le surprendre. Je m'attarde un peu sur lui. Il doit avoir mon âge, et ses cheveux bouclés sont accompagnés de yeux si verts que je distingue leur teinte d'ici. Il est incroyablement beau. Je sens mes joues rougir alors qu'il me regarde encore, et lui offre un petit regard gêné et baissant la tête, m'excusant silencieusement du comportement de ma mère.
Je me dirige ensuite rapidement vers l'épicerie du camping, ne voulant pas rester là à le fixer comme une bête de foire. Ce n'est pas le premier mec beau que je croise, les gars du gang en sont un parfait exemple, seulement là, je ne m'attendais pas à ce genre de rencontre dans de telles circonstances. Si on peut appeler ça une rencontre.
Je secoue la tête, me traitant mentalement d'imbécile. Pourquoi penses-je autant à ce type dont je n'ai croisé le regard que quelques instants ? C'est embarrassant.
Malgré moi, quand je reviens à mon lieu de résidence, je ne peux empêcher mon regard de dévier, mais la terrasse voisine est à présent vide. Idiot que je suis, il n'allait pas m'attendre, on ne se connaît pas.
Je m'enferme ensuite dans ma petite chambre et profite que les femmes soient parties faire un tour pour me relaxer. Ces vacances avec elles ne seront clairement pas de tout repos, et j'espère que ma mère va me lâcher un peu, pour que je puisse en profiter un minimum.
J'ai l'impression de n'être seul que quelques minutes alors que cela fait plusieurs heures que j'écoute tranquillement de la musique quand ma mère m'appelle pour le dîner.
Je vais les rejoindre, et me sens rougir en constatant que pile en face de moi, le jeune homme de tout à l'heure mange avec sa propre famille. Il relève les yeux vers moi, alors je descends rapidement le regard vers mon assiette. Je ne voudrais pas qu'il pense que je l'épie.
Mais la situation se reproduit, le matin, le midi, le soir. Je suis déjà assez honteux qu'il ai pu me voir en sortant du lit, la marque de l'oreiller sur la joue, mais le fait que nos regards se soutiennent de plus en plus me met mal à l'aise. Pourtant, je n'ai pas envie de regarder ailleurs.
Et je me mets à croiser ses yeux de plus en plus souvent.
Ce jour là, par exemple, en allant à l'épicerie, alors que je lisais les étiquettes des bocaux en face de moi, et qu'il se trouvait de l'autre côté de l'étagère. Ou cet autre jour, où nous avons tous les deux fait la queue pour les douches, et que j'ai du me retenir de ne pas le fixer pendant les longues minutes qui se sont écoulées. Je m'en suis même voulu de l'imaginer, dans la cabine à côté de la mienne, complètement nu.
En une semaine, je ne saurai dire combien de fois exactement nos regards se sont croisés, mais je sais qu'à chaque fois, le contact était un peu plus long. Comme si ni l'un ni l'autre, nous n'avions envie de détourner le regard. Et je ne comprends pas trop pourquoi.
Alors que je couche mes pensées dans mon petit carnet, pendant que les femmes s'amusent aux cartes à l'extérieur, ma mère rentre sans frapper dans la petite pièce que je dois partager. J'ai réussi à me faire un peu d'espace au milieu des milliers de robes et de maillots de Laura, mais j'ai encore l'impression de vivre dans un placard.
Je referme précipitamment mon journal et râle.
- M'man ! Tu pourrais frapper !
- Pourquoi, tu es habillé. Et puis ce n'aurait rien été que je n'ai jamais vu.
- M'man !
Je crois que parfois, ma mère a du mal à me voir grandir. C'est une mère géniale, mais il lui arrive d'être un peu trop comme si j'avais 10 ans. Et d'autres fois au contraire elle me traite comme un adulte. On ne sait jamais comment elle va agir.
- Bref, prépare toi, nous allons à la soirée du camping ce soir.
Voyant que je m'apprête à protester, elle m'arrête.
- Et tu n'as pas le choix !
Je souffle tandis qu'elle referme la porte. Que veut-elle que j'aille faire à un karaoké géant ? Je ne connais personne ici, et je n'ai pas envie de passer tout mon temps avec elles, quand bien même je les adore.
C'est donc en traînant des pieds que je les suis, pour ensuite les perdre dans la foule. Cela valait bien le coup de me traîner jusqu'ici si c'était pour disparaître et me laisser seul.
Je regarde partout autour de moi pour voir un petit chemin qui mène plus loin. La musique me faisant mal à la tête, sans parler des cris des spectateurs, je décide de m'y engager pour m'éloigner un peu du bruit. J'arrive dans un lieu assez peu éclairé, où le bruit de la fête n'est qu'un vague bourdonnement. Mais la faible lumière me permet tout de même de distinguer un dos, que je reconnais rapidement. Je l'ai trop observé sans le vouloir ces derniers temps pour ne pas savoir de qui il le s'agit.
Le concerné finit par se tourner vers moi, comme si il m'avait senti le regarder. Je sens mes joues rougir une nouvelle fois, et je remercie le ciel d'être aussi sombre pour qu'il ne le voit pas. Son regard se plante dans le mien et nous restons comme ça quelques minutes, à nous fixer sans rien dire.
Il se décale un peu sur le tronc sur lequel il est assis. Comme si il me demandait silencieusement de le rejoindre. J'hésite. Pourquoi le ferais-je ? Je ne le connais pas. Mais en même temps, je ne connais personne ici, peut-être que cela pourrait être l'occasion de me faire un ami, pour passer l'été. Dans l'optique où il serait ici aussi longtemps que moi.
Mon corps finit par avancer et je m'assois à ses côtés, regardant le vide devant nous.
L'un de nous va peut-être devoir briser le silence, et vu qu'il ne semble pas décidé à la faire, je décide de me lancer.
- Hum... je suis Jérémy.
Du coin de l'œil, je vois un petit rictus craquant sur son visage.
- Je sais. Ta mère a dû le crier cent fois cette semaine.
- Ah oui... désolé, elle est un peu bruyante.
Et c'est peu de le dire. Ma mère se tait rarement. Je me demande si on ne va pas se faire virer du camping à cause de ses cris incessants. Elle ne sait pas parler normalement, c'est affolant. C'est par contre la première à se plaindre quand les autres font du bruit. Elle est fatigante mais bon, je l'aime quand même.
Il secoue la tête.
- C'est pas grave. Moi c'est Aaron.
Le silence nous entoure une nouvelle fois et j'attends qu'il décide de le briser. Chacun son tour. Mes prières sont vite exaucées.
- Tu as quel âge ?
- 17 ans. J'entre en terminale. Et toi ?
- Pareil.
En continuant à se poser timidement des questions, nous remarquons rapidement que nous venons du même endroit. Enfin presque, puisqu'il vit dans la ville attenante à la mienne. Une sacrée coïncidence. J'apprends aussi qu'il part une semaine avant moi d'ici, et qu'il fait du baseball dans son école. Je n'ai pas grand-chose à lui raconter. Je ne vais pas lui dire que je suis ami avec un groupe de gangsters, je ne suis pas sûr qu'il est encore envie de me connaître après ça. Du coup, vu que mes deux dernières années ont été surtout rythmées par les différents kidnappings et autres épreuves de mes deux meilleures amies, je n'ai pas grand-chose à raconter si j'exclue cela.
Le silence retombe et je le trouve gênant. Je préférais quand nous parlions, au moins cela ne me laissait pas le temps de penser au fait qu'il est très mignon. Et que je suis gay, donc que trouver un garçon mignon peut avoir des conséquences... voyantes. Je viens à peine de le rencontrer, et il sera peut-être la seule personne masculine avec laquelle je parlerais durant ces vacances, alors si je pouvais éviter de lui faire croire que je ne lui parle que pour du sexe. Parce que c'est loin d'être mon intention. Je ne suis même pas intéressé par lui, je veux dire, il est juste beau, mais je ne le connais pas. Et je n'ai pas envie d'étaler mon orientation sexuelle à un inconnu, en plus de cela. Il y a des idiots qui ne comprennent pas l'amour entre deux hommes partout, je ne voudrais découvrir qu'il en fait parti.
Je veux juste discuter, et pourquoi pas me faire un ami, ou du moins un allié pour passer des vacances moins pourries. Alors je reprends la discussion.
- Tu n'aime pas la fête ?
Il me sourit.
- Les karaokés des années 80 ne me passionnent pas. Je préfère m'isoler. Et toi, pourquoi n'y es-tu pas ?
- Je n'avais même pas envie d'y aller. Ma mère m'y a traîné. Elle m'a aussi traîné dans ce camping.
- Crois-moi, je ne suis pas là non plus par choix, alors que tous mes amis sont ensemble en Italie.
- Aïe.
- Hum, comme tu dis.
Je me laisse aller à rire et il me regarde en souriant. Je me plonge dans ses yeux et m'attarde sur son sourire qui le rend plus que charmant.
Peut-être qu'au final, ces vacances ne seront pas aussi nulles que je l'imaginais.
------------------------------------------------------------------
Un petit retour en arrière du côté de Jérémy... pourquoi donc ? Je vous laisse vous faire votre idée.
Merci pour votre super accueil sur cette nouvelle histoire ! J'espère qu'elle vous plaira autant si ce n'est plus que les deux premiers tomes !
Sur ce,
A dimanche,
Kiss :*
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top