Chapitre 15-2 : Promesse.

J'étais encore sous la douche, avec l'eau froide qui roulait le long de mon corps, comme pour tenter de me réveiller ou de laver les quelconques souvenirs qui voulaient revenir à la surface.

Peine perdue.

J'ai fini par sortir de la cabine, la serviette enroulée autour de moi, et j'ai mis une autre serviette autour de mes cheveux, alors que je prenais mes vêtements. Des vêtements de civils, pas d'uniforme. Car après tout, je ne m'étais pas engagée dans l'armée, je voulais même la fuir...

J'ai pris mes plaques dans mes mains pour les regarder un instant. Ce n'étaient pas ceux que l'on m'avait données au départ... ceux d'avant, je les avais perdues... quelque part dans la maison de Nathaniel...

Et je me vois mal y retourner pour les chercher.

Une fois bien habillée, mon manteau autour de moi, malgré mes cheveux encore trempés, je suis sortie pour aller au self. J'ai pris un plateau, et je me suis servie avant de rejoindre Anthony qui était avec ses amis. J'ai aussi été surprise de voir que Nath était encore là et qu'il discutait avec le colonel. Ils ont levé la tête en me voyant, et j'ai senti la douleur dans ma jambe revenir. J'ai serré mes mains sur mon plateau pour ne rien laisser transparaître, et j'ai avancé vers eux. Je me suis assise face à Nath, entre le colonel, et Anthony.

- Tu nous expliques ce qu'il s'est passé ? m'interrogea immédiatement mon frère.

J'ai soupiré tout en évitant leur regard.

Nous y voilà. Je savais que je ne pourrais pas y réchapper.

- Une petite querelle de rien du tout.

- Au point où vous en êtes venue au couteau ?

J'ai senti mes poings trembler, et je les ai cachés sous la table pour qu'ils ne puissent pas s'en apercevoir, mais Anthony me prit la main, tout en me regardant d'un air sérieux.

- Tu n'as pas à tout porter sur tes épaules, Angely.

J'ai ouvert la bouche pour la refermer, quand j'ai senti son regard pointer sur mon dos. Je me suis retournée d'un coup tout en la cherchant du regard, mais je ne voyais que des soldats en train de manger tout en discutant.

- Lili ?

Elle est là, à m'observer. A regarder qui elle pourrait toucher... Et elle continuera.

J'ai voulu me lever, mais en appuyant simplement sur mon pied droit, j'ai grimacé de douleur, et je me suis rassise.

- Tu n'aurais pas un peu trop forcé ? me demanda le colonel avec une pointe de reproche.

- Tu viens juste de sortir en plus, non ? ajouta Nath.

J'ai un instant croisé son regard, et je me suis rappellée du sien, d'elle... Lorsqu'elle m'avait demandé de la...

Non, je dois oublier !

J'ai détourné les yeux, presque en panique. Comment pouvais-je me retrouver dans cet état seulement parce que je l'avais croisé ?!

Parce qu'elle était la principale auteure de tous mes mots.

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PDV ANTHONY

Elle tremblait, et j'avais l'impression que je ne pouvais pas l'aider. J'avais peur pour elle, et j'en voulais à cette fille, celle qui s'était enfuie sans rien dire. J'ai tourné la tête pour voir Seth et les jumeaux arriver, et je les ai vus se figer en apercevant le dos d'Angely. Ils m'ont ensuite fait signe et je leur ai confirmé par un hochement de tête, mais ils parurent comprendre que quelque chose n'allait pas. Ils se sont approchés, et les trois ont tourné la tête d'un coup en regardant partout, comme si quelque chose les avait alerté...

- Qu'est-ce qu'il y a ?

Seth sembla sentir quelque chose, et se posta derrière ma soeur pour la prendre dans ses bras. La main d'Angely serra la mienne, puis peu à peu elle se détendit avant de lever la tête pour le voir. Elle ne tremblait plus, elle paraissait apaisée, et un petit sourire vint s'afficher sur son visage.

- Bon retour, Angely.

Il déposa un baiser sur son front, et j'ai remarqué l'expression de Nath. Hum... Ce n'était surement pas le bon moment pour faire une crise de jalousie. Surtout qu'on ne savait pas ce qu'elle avait... Elle qui paraissait si détendue un peu plus tôt...

Les jumeaux vinrent la prendre dans leur bras un à un et ils s'installèrent à la table, alors que mes amis suivaient la conversation avec curiosité.

- Y'a un truc qui clochait avant qu'on n'arrive, non ? fit Seth en croisant les bras.

- Comme quelqu'un qui nous observait, intervint Armin, pensif.

Angely hocha la tête doucement, et porta la fourchette à ses lèvres.

- Lili s'est fait attaquer par une folle un peu plus tôt.

- Une folle ?!

- Je ne sais pas qui c'est, mais cette tarée avait un couteau en main...

- Angely ?

Elle déglutit difficilement.

- Je ne peux pas en parler.

Sa voix avait perdu son assurance habituelle et tout le monde l'avait remarqué.

- Tu ne peux pas ou tu ne veux pas ?

- ...Les deux.

- Pourquoi tu veux toujours tout porter toute seule sur tes épaules ?!

- Peut-être parce que ça ne concerne que moi ?

- Mais on veut juste t'aider !

- C'est gentil, mais sur ce coup-ci, il n'y a rien à faire.

- Alors tu comptes te prendre encore des raclées ?!

Je lui ai désigné sa gorge et elle devint sérieuse comme...

- Elle est..., s'énerva-t-elle.

Elle grinça des dents, et prit une inspiration pour se calmer, incapable de finir la phrase qu'elle avait commencé.

- Sale garce, l'entendis-je souffler.

- Mais elle fait partie de la caserne, non ? On pourrait la retrouver ?

- Non, je ne pense pas, dit-elle calmement. Elle m'observe, et si Seth, Alexy et Armin ne l'ont pas repéré, c'est qu'elle s'est bien dissumulée dans ce tas de soldats.

- On pourrait la faire rechercher.

- Non. Il vaut mieux attendre jusqu'à ce qu'elle réapparaisse de nouveau.

- Mais il faut que quelqu'un reste avec toi !

- Je resterai avec elle ! lançais-je.

- Toi, tu restes à l 'armée.

- Non. Je te suivrai où que tu ailles, pour te soutenir.

Un pauvre sourire se dessina sur son visage, et elle soupira avant de manger une nouvelle bouchée.

- Je retourne chez Dan demain... Ce serait trop rapide pour que tu partes de la caserne.

J'ai jeté un coup d'oeil au colonel, et celui-ci comprit.

- Ce n'est pas un problème. Ça fait longtemps qu'il n'est pas sorti d'ici.

- ...Merci.

- En attendant, on ne sait toujours pas qui te veut du mal, réfléchit Seth. Quelqu'un qui en veut à cause de ton surnom ?

- ...Non.

- A cause de quoi alors ? Parce que tu l'as attaqué ?

Je l'ai aperçu trembler à nouveau, et j'ai passé mes bras autour d'elle.

- Non plus, souffla-t-elle avec une expression que je venais de voir que récemment.

Elle avait ce visage qui montrait toute sa peur, ce visage qui me faisait peur à moi aussi, car d'habitude, rien ne lui faisait cet effet, elle n'avait jamais cette expression. Et ça inquiétait tout le monde.

- Tout va bien, Lili, on est là, d'accord ?

- ...Oui.

Elle tourna la tête d'un coup, et j'ai vu les gars avoir le même réflexe.

- Elle est sortie, dit-t-elle comme soulagée.

- J'ai pas eu le temps de la voir, grogna Alexy.

A ma grande surprise, Nath parla enfin, mais pas pour parler de ça, au contraire, il fit comme si de rien n'était, et lui posa des questions sur tous ces mois où on ne l'avait pas vu.

Elle se détendit peu à peu, et elle semblait contente de pouvoir parler d'autre chose. Pourtant, elle faisait toujours en sorte de ne pas croiser le regard de mon professeur...

Etrange.

Y'avait-il un rapport avec lui ?

- Anthony, tu lui as montré tes progrès ?

- Pas encore.

- Pas la peine. Ça se voit sur lui, dit-elle.

- Mais il n'a pas subi ce que tu nous as fais subir ! Donc il n'est pas vraiment dans la phase finale.

- De quoi vous parlez ?! J'ai morflé pendant tout ce temps.

Angely fit un sourire sadique qui me fit froid dans le dos.

- Tu ferais mieux de demander aux jumeaux ce qu'est un entrainement à la Blacks, petit frère. Je t'assure que ça n'a rien à voir.

J'ai vu les deux concernés hocher de la tête d'un air apeuré.

- Tu comptes m'entrainer alors ?

- Non... J'ai peut-être... un peu trop forcé tout à l'heure...

- Angely, commença le colonel.

- Je sais, soupira-t-elle. Mais je voulais voir jusqu'où je pouvais aller...

- Arrête d'être aussi pressée ! T'as tout ton temps pour ça !

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PDV ANGELY

Le colonel était parti, alors que mes trois anciens compagnons entouraient Anthony pour lui expliquer certaines choses. J'allais les rejoindre, mais on me prit par le bras en me plaquant contre le mur, et un visage se plaça à ma hauteur.

- Pourquoi est-ce que tu évites mon regard ?!

Ses yeux bruns étaient plongés dans les miens, et je voulais regarder ailleurs, mais il m'en empêchait.

Nathaniel semblait mécontent et sa proximité me faisait vraiment perdre mes moyens. Pourtant, je luttais aussi contre les souvenirs qui voulaient revenir.

- Angely !

- ...Désolée... J'peux pas...

- Pourquoi ?!

J'ai senti ses mains me prendre le visage, alors que je commençais à trembler. Il me faisait beaucoup trop penser à elle... à sa mère... celle qui était au centre de l'histoire...

Je ne pourrais jamais oublier ce qu'il s'était passé ce jour là si je continue à être aussi proche de son fils... Si lui-même apprenait ce qu'il s'était passé... il ne me le pardonnerait jamais... et pourtant, je lui devais la vérité...

- Angely... Tu me fais confiance non ?

C'était ça le problème... J'avais peut-être confiance en lui, mais je ne savais pas comment il pourrait réagir si jamais il apprenait ce qui était arrivé à sa mère, et qu'il comprenait que c'était de ma faute.

J'ai posé mes mains sur son torse en tentant de l'éloigner, mais il restait de marbre face à moi. J'ai alors osé croiser son regard, et j'ai senti un liquide chaud sortir de mon oeil intact. Je l'ai vu écarquiller des yeux surpris.

- Je suis désolée...

Il ne dit rien, mais me prit dans ses bras pour me serrer fort contre lui, alors que je sentais le sanglot se coincer dans ma gorge.

- Je déteste te voir dans cet état, entendis-je.

Il releva mon visage et sécha mes larmes avant d'embrasser ma joue doucement. Mon coeur a pris de la vitesse, et il sourit en voyant que j'avais cessé de pleurer. Il posa doucement ses lèvres sur les miennes et m'embrassa tendrement. Je lui ai rendu son baiser, alors que ses mains m'attiraient un peu plus vers lui.

- Hum !

Nous avons sursauté, et Nath se détacha doucement de moi, en lançant un regard meurtrier à Seth qui avait croisé les bras comme un professeur qui serait tombé sur des élèves qu'il devait punir.

Dire que ça devenait intéressant...

Je me suis sentie rougir bêtement, et Nath passa ses bras autour de moi, comme si je lui appartenais et qu'il comptait l'exhiber à Seth.

Comme un trophée, Angely. Sauf que tu seras pas astiquer pour briller. Quoi que...

- T'es vraiment inconscient le blondinet. Angely vient de se faire attaquer, et tout ce que tu trouves à faire, c'est l'isoler pour l'embrasser. Et sa protection, tu y penses peut-être ?!

- Je suis là pour la protéger. Ce n'est pas comme si je ne savais pas me défendre. Tu ne te rappelles pas de la raclée que je t'ai mise ?

J'ai vu Seth commencer à s'énerver, et j'ai passé ma main sur celle de Nath.

- Arrête de le chercher, Nath.

- C'est de sa faute. Il vient toujours me déranger au meilleur moment.

Le rouge m'est monté aux joues, et je me suis raclée la gorge pour reprendre contenance.

- On ferait mieux...

J'ai regardé autour de moi, pour voir de petits flocons blancs tomber du ciel assombri par la nuit. Ils tombèrent peu à peu, et je me suis rendue compte qu'il neigeait. Je me suis détachée de la prise de Nath tout en tendant la main.

Combien de temps... Combien de temps est-ce que ça faisait depuis la dernière fois que j'avais vu ça ?!

Je devais ressembler à une idiote qui fixait le ciel, alors que la neige me tombait en pleine face, mais je savourais ce moment. C'était la première fois depuis tant d'années que je n'avais pas vu ça !

- ...mignonne..., entendis-je.

J'ai baissé l'oeil pour voir que les deux me regardaient avec un sourire, et je me suis sentie rougir. J'ai fourré mes mains dans les poches de mon manteau et j'ai regardé ailleurs.

- Hum, je disais qu'on ferait mieux d'y aller.

Seth pouffa de rire, et Nath s'approcha de moi, pour ébouriffer mes cheveux d'une main.

- Dommage que tu te sois arrêtée. T'étais vraiment mignonne.

Il déposa ses lèvres rapidement sur ma tempe et passa un bras autour de moi.

- Tu n'as pas vu la neige depuis combien de temps déjà ? me demanda Seth sans se départir de son sourire.

- Ça doit faire... plus de dix ans...

Je regardais les flocons tomber sur le sol, sans disparaitre.

- Et pour Anthony, ça doit faire cinq ans.

Nous avons marché jusqu'aux dortoirs où Anthony attendait avec les jumeaux, et mon petit frère courut jusqu'à moi pour me soulever, tout en faisant en sorte que Nath ne me lâche, et il me fit tourner.

- Il neiiiiiiiiiiige !!

Finalement, Anthony n'avait pas si grandi que ça. Il était toujours adorable, et les petites choses comme ça lui faisait plaisir... J'ai souri alors que des gros flocons tombaient à présent, en nous recouvrant comme si nous étions des bonhommes de neige.

- Dites les enfants ! cria Alexy. C'est l'heure de rentrer vous mettre à l'abri !

Les autres attendaient dans le coin sec que leur offrait le toit du dortoir. J'ai ri en voyant la moue boudeuse de mon petit frère et j'ai passé ma main rapidement dans ses cheveux.

- Ça ne va pas fondre comme ça ! Je suis sure qu'il y en aura encore demain !

- Oui...

Il me mit sur son dos, et je l'ai regardé d'un air surpris.

- Tu as trop forcé. Au loin, je te voyais clopiner. Je me demande pourquoi Seth ou Nath ne t'ont pas porté...

- Parce que je suis trop lourde.

Il s'esclaffa et marcha jusqu'aux autres. Nath passa une main dans mes cheveux pour retirer la neige qui s'y était accrochée, et je l'ai remercié. Je vis des soldats entrer rapidement dans le dortoir.

- On ferait mieux d'y aller aussi, fit Anthony. Le colonel va faire son inspection avant le couvre feu.

- A plus tard, les gars, lançais-je alors que mon petit frère nous éloignait d'eux.

Ils m'ont fait signe, et je suis restée accrochée à lui. Les hommes me regardaient avec curiosité, mais je n'y faisais pas attention, et puis Anthony leur avait jeté un regard noir pour qu'ils cessent. Et ensuite à l'arrivée du colonel, ils ont cessé tout mouvement.

J'étais assise sur le lit d'Anthony qui était assez étroit, mais une fois l'inspection passé, je me suis blottie contre mon petit frère qui avait passé ses bras autour de moi, avec la couverture.

- Bonne nuit, Angely.

- Merci, bonne nuit à toi aussi.

Il déposa un baiser sur mon front en souriant, puis prit un air sérieux.

- Je serai toujours là pour te protéger, rien que toi, Lili. Je te le promets.

J'ai passé mes doigts sur son visage. Finalement, il avait vraiment mûri... ce n'était pas que son corps, mais aussi son esprit. J'ai posé mon front contre le sien, en souriant.

- Merci, petit frère.

Il ferma les yeux, le sourire aux lèvres, et je l'ai imité.

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