Chapitre 6 - part 2
La douche m'a brûlée, laissant ma peau à vif. Habillée à nouveau en tenue de sport, je repense aux médicaments que le médecin m'a prescrit, une tonne. Maman est partie les chercher, tandis que mon frère est absorbé par ses jeux vidéo, ignorant tout ce qui se passe autour de lui. J'enfile ma veste, claque la porte derrière moi sans un mot. J'ai besoin de prendre l'air, d'échapper à tout ça, juste un instant.
Mes pas me mènent, presque automatiquement, vers cet endroit que je connais par cœur. Un petit parc isolé, perché au-dessus de la ville, loin de tout. Ici, c'est calme. Pas de maisons, pas de bruit. Juste le vent et moi.
Je m'assois sur la balançoire, le métal froid sous mes doigts. Le vent caresse mon visage, presque comme pour apaiser la douleur qui brûle à l'intérieur. Et enfin, les larmes retenues toute la journée coulent. Elles glissent le long de mes joues, mouillant la gaze qui couvre mes plaies.
Cette journée a été un enfer. Tout se mélange dans ma tête, et là, dans ce parc silencieux, je laisse tout sortir.
— Tu ne veux plus de moi, Rosie ?
Je secoue la tête, incapable de répondre. Il recule, s'asseyant à côté de moi sur la balançoire.
— Carla n'aurait pas dû te faire ça, finit-il par murmurer.
Ma gorge se serre, et ma voix sort plus dure que je ne l'aurais voulu.
— Pourquoi tu n'as rien fait, Arthur ?
Il grogne, irrité, peut être agacé par ma question.
— Tu ne peux pas attendre ça de moi.
Sa main effleure la mienne, mais cette proximité ne m'apporte aucune chaleur. J'aimerais prendre sa main, de m'accrocher à quelque chose, mais je n'ose pas. Au lieu de cela, je murmure, ma voix brisée :
— Je te fais honte.
Les mots sortent avant que je ne puisse les retenir. Je repense à Jules, à la façon dont il a pris ma défense, et à Arthur... qui n'a rien fait. Juste observé, comme toujours.
— Ce n'est pas ça...
Mais ses mots sonnent creux. Les larmes recommencent à couler, brûlant ma peau encore sensible sous la gaze
— Rosie... arrête de pleurer, murmure-t-il, presque suppliant. Je n'aime vraiment pas ça.
Quelque chose en moi se brise à ces mots. Mon regard croise le sien si lointain, si inaccessible. Un gouffre s'est ouvert entre nous, et je réalise que je me tiens seule au bord.
— Je ne peux rien faire pour toi, souffle-t-il.
Je me lève lentement, mes jambes tremblant sous le poids de mes émotions. Arthur m'imite, s'approche, son corps tout près du mien. Je fixe la ville en contrebas, ma vision brouillée par les larmes.
— De quoi tu parles ? dis-je, la gorge serrée.
Je ferme les yeux, sentant son torse frôler mon dos, sa chaleur m'envelopper et ce contact, pourtant si familier, ne fait qu'attiser la souffrance qui bouillonne en moi.
— Viens dans la voiture, murmure-t-il à mon oreille. Comme d'habitude, ça ira mieux.
Sa main se pose doucement sur mon épaule, mais cette fois, la colère prend le dessus. Mon cœur explose, et je ne peux plus tout retenir. Je m'écarte brusquement, le cœur dans la bouche.
— Je t'aime, Arthur.
Ces mots déchirent ma poitrine, plus douloureux que tout ce que j'ai vécu jusqu'ici. Il se fige, ses yeux s'écarquillent.
— Je t'aime, Arthur, tu le comprends, ça ? Un an que tu me baises, un an que tu te sers de moi comme d'un vulgaire chiffon !
Il avance d'un pas, ses mains tremblent. Le vent nous entoure, siffle dans les branches, mais il ne parle pas.
— Tu ne m'as jamais embrassée. Tu laisses les autres me marcher dessus, me faire du mal, et tu ne dis rien. Suis-je si insignifiante pour toi ?
Arthur ne bouge pas, incapable de répondre, ses yeux perdus quelque part, loin de moi. Mon corps cède sous les sanglots, et je m'effondre au sol, recroquevillée, le visage enfoui dans mes mains.
— Rosie, je... je n'ai jamais prétendu t'aimer... tu sais que c'est compliqué.
Sa voix est faible, presque désolée, mais elle ne fait qu'alimenter ma colère. « Compliqué. » Il ose encore dire que c'est compliqué, comme si ça justifiait tout.
— Que quoi ? Que je ne vaux rien ? Que je suis juste un passe-temps ?
Je relève la tête brusquement, les yeux brûlants de rage. Et dans cet instant, je le déteste vraiment. Tout ce qu'il représente, ce qu'il m'a fait subir, cette indifférence constante. Les larmes continuent de couler, mais je ne les sens même plus.
— C'est pas ce que tu crois, Rosie... C'est bien plus compliqué que ça... il chuchote en essayant de faire un pas vers moi.
Je me redresse d'un bond, la colère bouillonnant en moi comme jamais auparavant.
— Compliqué ? Tu crois que c'est compliqué ? Je hurle, les poings serrés.
Je n'attends même pas sa réponse. Mon poing se lève, guidé par cette rage qui me consume. Je tente de le frapper, mais Arthur attrape mon poignet à la dernière seconde. Sa poigne est ferme, mais je me débats, refusant de céder.
— Rosie ! Calme-toi !
Il tente de se justifier, de m'expliquer, mais je n'entends que des excuses. Des justifications pour masquer ses actes, son égoïsme.
— Mara est morte ! je hurle, la voix brisée. Elle est partie, tu comprends ? Elle est partie ! Tu peux arrêter de te cacher derrière elle maintenant. Je peux enfin exister, moi.
Son visage se décompose, son si beau visage.
Mon ange tombé des cieux.
Ses yeux s'agrandissent, mais je ne flanche pas. Je ne peux plus continuer ainsi.
— Je ne suis pas l'égoïste que tu penses. Je ne voulais pas te faire souffrir, mais c'est si compliqué...
Je me défais violement de sa poigne.
— Arrête avec tes « c'est compliqué » ! Je n'ai plus à te partager avec elle. Je suis là, moi. Et tu ne fais que me détruire, encore et encore, sans rien dire.
Je me recule, m'éloigne de lui. Il tend la main, mais je secoue la tête violemment.
— Tu n'es pas une moins que rien pour moi, Rosie... dit-il, sa voix vacillante. Mais ce n'est pas ainsi... Ce n'est pas aussi facile.
Je t'aime ! Pourquoi tu penses que je me laisse entrainer dans ta chute.
— Tu n'as jamais essayé de me connaître. Tu m'as gardée dans l'ombre. Pourquoi ? Parce que j'étais plus facile à ignorer ? Parce que je te faisais moins peur que Mara ? je cris maintenant, les larmes brouillant ma vision.
Il s'avance à nouveau, mais cette fois je lève ma main, prête à frapper encore s'il ose dire un mot de plus.
— Dégage, Arthur !
Il reste immobile un moment, son visage défait, les lèvres entre ouvertes. Puis il recule, lentement, comme s'il n'y avait plus rien à dire. Il se détourne, disparaissant enfin dans la nuit, me laissant seule dans ce parc, avec le bruit du vent et le vide qu'il a laissé derrière lui.
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